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 If ever there was someone to keep me at home

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MessageSujet: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptySam 11 Juin - 15:31


Louanne s’appuya sur le chambranle de la porte du cellier et, les bras croisés sur sa poitrine, regardait Ray examiner avec attention son disjoncteur électrique, lampe de poche à la main. « Désolée de t’avoir encore dérangé… » souffla-t-elle après qu’un silence frémissant s’était installé entre eux, « mais quand j’ai vu que les lumières de l’étage ne s’allumaient plus je me suis dit que quelqu’un était peut-être venu couper le courant et je suis pas très douée avec les fusibles et tout ça. » Elle se mordit l’intérieur de la lèvre pour dévorer sa gène. Elle lui avait déjà expliqué la situation trois fois, une sur le pas de sa porte quand elle était venue sonner chez lui, l’autre sur le chemin, et maintenant ici. Mais elle ne savait pas que dire d’autre.

Quand il était entré dans la maison – chez elle, mais cela ne lui ressemblait tellement plus, elle n’était même pas sûre que cela lui ai jamais ressemblé – l’autre jour, portant ses valises à bout de bras, elle avait été tellement minable, n’ayant rien à lui offrir à boire, aucun endroit où lui proposer de s’asseoir, pas de conversation à lui faire. Ils étaient restés là, debout dans le vestibule, à se toiser du regard dans cette maison morte, comme deux fantômes incapables d’agir sur le monde qui les entoure. Elle ne savait pas quoi lui dire. Il était toujours là. Il n’avait pas bougé. Elle ne s’était pas attendu à le revoir, debout au milieu de sa pelouse, derrière un massif de fleurs un peu délaissé. Mais peut-être qu’elle avait espéré le revoir. En tout cas sa présence la rassurait, elle remettait un peu de normalité dans son petit monde, délesté de ses parents. Louanne était maintenant bel et bien seule. Elle l’avait tellement souhaité, de rompre ce lien avec son père, elle s’était comporté si longtemps comme la fille de personne et maintenant elle était orpheline et cette solitude se transformait en malédiction. Elle n’était plus rien, elle n’avait même plus d’attache à cette terre, à cette ville. Son nom de famille, écaillé sur la boîte aux lettres, ne rappelait que le souvenir de ses parents aux passants. Mais Ray… Son regard, il se souvenait d’elle. C’était comme s’il l’attendait. C’est dingue, non ? Oui c’est dingue. Complètement dingue.

« Je peux t’offrir une bière quand tu auras fini ? » Rattraper cette misérable première impression, le garder un peu plus dans cette maison, cet endroit qu’il connaissait autant qu’elle pour y avoir passé de longs dimanche après-midi, allongé par terre dans la chambre de Louanne, à fixer le plafond et les moucherons qui voletaient dans la chaleur de l’été, elle, allongée sur son lit, n’ayant rien à se dire, rien à partager, parce qu’elle était têtue, parce qu’elle croyait qu’elle pouvait être quelqu’un d’autre. Se souvenir de ces moments avec lui, cela l’empêchait de se souvenir directement de ses parents. Elle avait jeté le lait qui avait tourné, elle avait mit ses affaires dans la commode de la chambre d’amis, elle avait ouvert grandes les fenêtres pour faire entrer l’air, la vie, le vent, pour agiter la poussière, chasser la paralysie de la mort. Elle faisait de son mieux. C’était long.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptySam 11 Juin - 23:54

Plongé dans un noir total qui me donnerait presque froid dans le dos s'il n'y avait pas eu Louanne à côté, j'allumai la petite lampe de poche que cette dernière m'avait prêté en rentrant dans sa demeure. J'ouvrai la petite porte de métal qui protégeait le disjoncteur électrique, et j'entrepris de repérer quel était le problème, quels fusibles étaient impliqués dans la panne et éventuellement réparer ce qui clochait. Pendant que j'éteignais certains fusibles et que je regardais la source du problème, Louanne se confondit en excuses, pour la troisième fois en dix minutes. « Désolée de t’avoir encore dérangé… mais quand j’ai vu que les lumières de l’étage ne s’allumaient plus je me suis dit que quelqu’un était peut-être venu couper le courant et je suis pas très douée avec les fusibles et tout ça. » Était-ce pour combler le silence ou était-elle réellement désolée au point d'en oublier tout le reste ? « C'est rien, Louanne, je te le dis ! » J'eus un petit sourire en coin. « C'est pas comme si j'avais mieux à faire de mon samedi soir ... » Je la regardai moqueusement. Je ne voulais pas la faire sentir coupable, c'était juste une petite farce pour détendre l'atmosphère. De toute façon, il me faisait tellement plaisir de revoir ce petit bout de femme qu'était Louanne que je ne pouvais refuser une occasion de la visiter. Les temps étaient difficiles pour elle, et comme six années s'étaient écoulées entre nous, je ne me sentais pas à l'aise de m'immiscer dans sa vie à tout moment. J'attendais donc plutôt que ce soit elle qui vienne à moi, puisque dorénavant elle savait que moi, je serais toujours là. Comme si je l'avais attendue tout ce temps, eh bien j'attendrais encore et toujours qu'elle vienne frapper à ma porte avec sa petite bouille timide.

« Je peux t’offrir une bière quand tu auras fini ? » Justement, j'avais terminé. Je rallumai le courant principal et tout d'un coup, l'étage s'illumina de nouveau. Je souris fièrement tout en me relevant, essuyant mes mains poussiéreuses sur mes jeans. « Attention je ne bois pas n'importe quoi moi ! Alors tant que ce n'est pas de la bière de fillette, oui ! » Je pointai le disjoncteur électrique de mon index. « Pour éviter que ça se reproduise, essaie de ne pas faire fonctionner le fer plat, le fer à repasser et le four en même temps, hein ? Ça surchauffe là-dedans. » Je lui fis un clin d'oeil encore une fois moqueur. Je n'avais pas perdu mes bonnes vieilles habitudes de gamin.

Je lui fis un petit coup de tête vers les escaliers, attendant son approbation pour que nous passions à la cuisine afin d'entamer cette bière qu'elle venait de me proposer. Louanne m'emboita le pas et je la suivis jusqu'à cette cuisine qui n'avait pas tellement changée depuis le temps. Je pris place sur l'un des fauteuils dans le salon qui était juste à côté, à mur ouvert. « Tu sais, prochaine fois, pas la peine de chercher des excuses pour qu'on passe du temps ensemble. Viens cogner ou téléphone, c'est toujours un plaisir de te revoir, Louanne. » Bien sûr, je disais à la rigolade qu'elle s'inventait des raisons de me faire venir chez elle, mais le fond de la pensée était la même : j'étais là pour elle, n'importe quand.
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 12 Juin - 11:30

Comme toute demoiselle en détresse, Louanne avait fait appel au premier chevalier servant à l’horizon et c’était Garrett. Pourtant elle ne l’avait jamais réellement considéré ainsi jusqu’à ce qu’il se propose de prendre ses valises le jour où elle était arrivée. Ray devait être juste le type qui habite à côté, celui qui ne l’intéressait pas, le garçon un peu lunaire et marrant qu’elle avait forcé à manger tout type d’insectes rampants juste pour rigoler quand elle avait onze ans. Et maintenant il apparaissait comme la seule personne qu’elle pouvait appeler dans cette ville. « C'est rien, Louanne, je te le dis ! C'est pas comme si j'avais mieux à faire de mon samedi soir ... » Elle eut un petit rire nerveux, se doutant qu’il ne lui en voulait pas – à Arrowsic, le samedi soir ne détonnait pas vraiment des autres soirs, et si elle se souvenait bien, les jeunes prenaient n’importe quel soir de la semaine pour sortir et oublier leur malheur dans l’alcool. D’ailleurs, elle lui proposa une bière, pour essayer de se racheter, comme si elle voulait aussi changer le souvenir qu’elle lui avait laissé en partant. Il avait l’air si bien, si droit, si honnête comparé à elle, c’était comme si l’équation s’était soudain renversée et qu’il sortait grand gagnant du concours de celui qui a le mieux réussi. Elle était celle qui avait fait les mauvais choix.

« Attention je ne bois pas n'importe quoi moi ! Alors tant que ce n'est pas de la bière de fillette, oui ! » « Ha, non, je crois que je l’ai bien choisie. » Elle avait juste acheté la bière locale du Maine, une bière qui a le même goût que toutes les bières vendues en pack de six aux Etats-Unis, juste de la bière. « Pour éviter que ça se reproduise, essaie de ne pas faire fonctionner le fer plat, le fer à repasser et le four en même temps, hein ? Ça surchauffe là-dedans. » Elle hocha la tête puis sourit, surprise par cet accès de sympathie qu’il avait à son encontre. « Je ferai attention. » Comment pouvait-il être aussi gentil avec elle ? Après tout, ce n’était pas comme s’ils s’étaient quittés amis, non ? Ils descendirent les escaliers, le long de toute une ribambelle de photos encadrées qui montraient les parents de Louanne et leurs plus beaux souvenirs. Il ne restait plus qu’une seule photo de Louanne, les autres ayant été retirées, probablement parce qu’elles faisaient trop de mal à regarder. Il n’y avait d’ailleurs aucune photo prise après son départ, comme si elle les avait empêchés de vivre. Son cœur se serra dans sa poitrine et elle se racla la gorge pour essayer de dissiper ce sentiment désagréable de culpabilité et de remords. Elle sortit deux bières du frigo, les décapsula et en tendit une à Ray qui se rendit au salon comme si cette maison était toujours habitée. Elle l’était, par elle, mais elle se sentait comme une visiteuse non-légitime de la demeure. Il détonnait beaucoup moins dans le décor qu’elle.

Il la frôla en se rendant dans la pièce à vivre. Il sentait le linge propre et l’herbe fraîchement tondue. Il sentait bon. Il sentait comme tout le monde dans le quartier. C’était familier, rassurant. En allant dans le salon elle passa devant la fenêtre ouverte d’où volaient des bouffées d’été venant du jardin à l’extérieur. Même s’il n’avait pas été entretenu depuis des semaines les fleurs s’étaient quand même ouvertes et exhalaient le même parfum qu’elle n’avait jamais pris le temps de remarquer plus jeune, et qui imprégnait le linge qu’ils faisaient sécher dehors. Les été du Maine étaient les plus beaux des Etats-Unis, ils étaient doux, jamais étouffants, comme un long printemps. « Tu sais, prochaine fois, pas la peine de chercher des excuses pour qu'on passe du temps ensemble. Viens cogner ou téléphone, c'est toujours un plaisir de te revoir, Louanne. » Elle rit doucement. Il avait raison, elle avait envie de passer du temps avec lui, de se souvenir avec lui. Il sentait vraiment bon. Au lieu de s’asseoir sur le fauteuil face à lui elle vint se poser sur l’accoudoir de celui qu’il occupait. Quand ils étaient jeunes une telle proximité de les gênait pas, maintenant… « Ca fait plaisir de te revoir aussi. » Elle plongea son regard dans le sien et ses lèvres sourirent très légèrement, comme si elles avaient un secret à garder. Était-elle en train de flirter avec lui ? « Dis-moi, alors, » commença-t-elle après avoir détaché son regard du sien et bu dans sa bouteille, « qu’est-ce que tu deviens ? Tes parents vont bien ? »


HJ - Une page Word... Ca me ressemble pas, je suis A FOND Laughing
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 12 Juin - 15:56

Non, nous n'avions jamais ressenti quoi que ce soit l'un pour l'autre. Non, nous ne nous étions jamais proclamés les meilleurs amis du monde en gravant nos initiales sur un arbre qui vieillirait en même temps que nous. Oui, nous n'étions que des voisins. De simples voisins qui se côtoient parce qu'il le faut bien, parce que les parents sont polis et s'invitent à boire un café le soir avant l'heure du coucher. Seulement voilà, le temps avait passé, nous étions maintenant tous les deux des adultes et vu le contexte dans lequel nous nous retrouvions, je me devais d'être là pour elle. Si les parents de Louanne avait toujours été vivant et qu'elle ne faisait que leur rendre visite pour l'été, probablement l'aurais-je simplement accueillie d'un bonjour et d'un sourire, demandant brièvement de ses nouvelles et retourner à mon monde dès qu'elle me tournerait le dos. Mais Louanne était seule, je le sentais, je le voyais. En partant d'ici, ses racines étaient sorties de la terre pour lui permettre d'aller encore plus loin. Plus rien ne la rattachait donc à Arrowsic. Je voulais lui donner cette attache. Je voulais qu'elle comprenne qu'elle avait encore sa place ici, qu'elle n'était pas aussi seule qu'elle le pensait. De la charité ? De la pitié peut-être ? Je n'aurais pu le dire pour le moment. À la base, peut-être était-ce ces sentiments qui m'avaient poussé à l'aider en premier lieu. Aujourd'hui par contre, je me sentais tout simplement bien avec elle. Je me rendais compte que nous ne nous connaissions pas du tout en fait, mais je ne sais pourquoi, j'avais envie que ça change. « Ha, non, je crois que je l’ai bien choisie. » Me répondit-elle quant à ma remarque sur les marques de bière que je buvais. Je souris en hochant brièvement la tête. « C'est ce qu'on va voir. »

Une fois tout le problème du disjoncteur électrique terminé, et après lui avoir conseillé de ne pas le faire surchauffer afin d'éviter que cela se reproduise, nous passâmes à cette fameuse bière au salon. N'étant pas le plus grand observateur, je ne portai aucune attention aux photographies accrochées au mur. Pour moi, cette maison était encore la même que dans mon enfance, et le fait que ses propriétaires soient décédés n'y changeaient pas grand chose. Je n'avais pas ce genre de relation avec la mort. Je ne sentais pas leur présence ici, je ne me sentais pas mal à l'aise non plus de me trouver dans leur demeure. Celle-ci faisait partie de mon enfance, elle était pratiquement la même que la dernière fois où j'étais venu porter du sucre à la mère de Louanne. Effectivement, au départ de la jeune fille, la vie à Arrowsic n'avait pas cessée. Mes parents continuaient à prendre le thé ou le café avec les Ginsberg, je continuais à les y accompagner. Seul. Sans Louanne. En partant de ma vie, elle avait changé quelque chose à ma routine, mais sans doute ne s'en était-elle même pas aperçu. Bref, je pris place dans le petit fauteuil et je regardai Louanne se rendre jusqu'à la fenêtre. Elle avait changé, et malgré cette tristesse qui habitait chacun de ses gestes et de ses regards, elle était belle. Une beauté indescriptible, presque irréelle. Petite, je m'étais toujours amusé à la traiter d'ignoble sorcière laide, mais il me semblait qu'aujourd'hui il me serait impossible de jeter ces mots à sa figure.

Je me décidai finalement à lui passer un petit message subtil comme quoi elle pouvait toujours venir cogner à ma porte pour que nous passions du temps ensemble ; cela me ferait très plaisir. Elle rit. Puis, contre toute attente, elle vint s'asseoir sur l'accoudoir du fauteuil que j'occupais. Cette nouvelle proximité, qui pourtant avait comblée toute notre enfance, me sembla désormais ambigüe. « Ca fait plaisir de te revoir aussi. » Je souris légèrement en la regardant dans les yeux. « Dis-moi, alors, » commença-t-elle. Elle bu un gorgée de sa bière - et je fis la même chose - avant de continuer.« qu’est-ce que tu deviens ? Tes parents vont bien ? » Une autre gorgée de bière, tiens. Je ne me sentais pas à l'aise de parler de mes parents alors que les siens n 'étaient plus de ce monde. Mais elle avait demandé, après tout, non ? « Très bien. Ils ont emménagé dans la résidence pour retraités près de la rivière, ils se disent plus heureux que jamais. Je pense que c'est un bon endroit pour eux. La maison commençait à être difficile à entretenir par eux-mêmes. Puis moi bah ... tu connais la vie à Arrowsic, c'est comme sa rivière, ça coule très lentement ... En gros j'ai pas trouvé le remède contre le cancer ! » Je souris en la regardant. « Mais parle-moi de Boston. Il paraît que c'est magnifique et plein d'histoire. »

HJ - J'aime t'inspirer, et j'aime quand tu m'inspires Laughing
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 12 Juin - 17:38

Les parents de Ray, elle les avait tellement méprisés, autant qu’elle l’avait méprisé lui, avec ses chemises à carreaux bidon et ses jeans bien repassés. Les tupperwares étiquetés qu’ils venaient leur apporter quand ils en avaient fait trop. Leur voiture toujours propre, leurs massifs toujours bien taillés. Maintenant ses jeans étaient un peu froissés, ses chemises restaient les mêmes, mais ses parents étaient toujours en vie, ils étaient heureux, ils songeaient à leur fils avec sérénité et la satisfaction du devoir rempli. Il avait l’air content lui aussi, même si comme il le disait sa vie n’était pas pleine d’aventures. En tout cas il lui souriait en retour. Il était mal rasé, un peu bronzé, il n’était plus un adolescent. Elle non plus. Sa cuisse, sous sa jupe, effleurait à peine son bras mais elle n’avait pas envie de bouger, alors elle maintint consciemment ce quasi-contact qui tendait tout son corps alors qu’elle restait naturelle en apparence, faisant comme si elle ne sentait rien ou comme si elle ne le remarquait pas, les yeux rivés dans les siens, son demi-sourire toujours sur les lèvres. « Mais parle-moi de Boston. Il paraît que c'est magnifique et plein d'histoire. » Elle glissa ses cheveux derrière son épaule et détourna les yeux pour les poser sur la cheminée poussiéreuse, couverte elle aussi de photo et de babioles que ses parents avaient amassées parce qu’elles signifiaient quelque chose pour eux. De Boston elle n’avait rien amené, à part ses vêtements, juste parce qu’elle n’avait rien qui valait la peine qu’elle s’en souvienne. « Oui, c’est sympa, » répondit-elle un peu plus sombre, « au début j’adorais, je me sentais libre, j’allais dans les bars, je rencontrais des gens… » Elle se tourna vers lui, sa jambe touchant vraiment son bras cette fois, « et puis un jour j’ai réalisé qu’au fond je n’avais rencontré personne qui comptait et que mon rockeur de fiancé n’était qu’un alcoolique doublé d’un fumeur d’herbe et qu’il n’accomplirait probablement rien de sa vie. » Elle regarda l’étiquette sur sa bouteille qui se décollait à cause de la condensation, but un peu, puis regarda Ray, encore. « Alors j’ai ravalé ma dignité et j’ai pris des cours pour devenir infirmière. Et j’ai déménagé dans un une-pièce pas loin de l’hôpital et j’ai bossé soixante-dix heures par semaine jusqu’à ce que je demande un congé sans solde pour venir ici. C’est pas brillant non plus. »

Elle laissa ses mots occuper tout l’espace autour d’eux, le silence s’installer pour bien souligner le pathétisme de son histoire, elle laissa de la place pour qu’ils sentent leur deux peau qui se frôlaient au travers d’un tissu léger et se contenta de garder son regard posé dans ses yeux clairs. « J’aime bien te savoir ici, » souffla-t-elle finalement après de longues secondes passées à le dévisager, à compter les années écoulées, comme dans le vestibule l’autre jour. Ses parents adoraient Ray ; elle comprenait enfin pourquoi.

HJ - grosse chute dans la quantité, mais j'aimais bien ma dernière phrase, je pouvais pas rajouter quelque chose après Laughing If ever there was someone to keep me at home 372147
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyLun 13 Juin - 6:17

C’est fou, comme le temps jouait avec nous comme si nous étions des marionnettes. La roue tournait, encore et encore. Quand Louanne avait quitté Arrowsic à ses seize ans, elle était l’adolescente rebelle qui lève son doigt d’honneur à quiconque se trouvait sur son chemin. Au même moment, j’étais un jeune homme qui n’avait même plus le temps d’essayer d’entrer dans les bars malgré sa minorité parce que j’étais trop débordé par mes trois boulots et la responsabilité de ma famille. Aujourd’hui, il me semblait que les rôles étaient inversés. À première vue, Louanne me paraissait comme une jeune femme mature, calme et posée, très douce et sensible. De mon côté, j’étais l’homme insouciant, qui prend la vie trop à la légère, qui est incapable de se fixer, de s’engager, de se stabiliser, préférant de loin tenter de briser sa routine dans les bars de la ville à chaque soir. Toutefois, à ses côtés, on aurait dit que la balance s’équilibrait. Peut-être était-ce le fait qu’elle faisait à la fois parti de mon ancien petit monde, mais aussi de mon nouveau désormais, sans qu’il y ait eu d’attache entre les deux.

Je baissai mes yeux sur sa cuisse qui effleurait mon bras, sagement posé sur le coin de l’accoudoir où elle était assise. J’essayais de cacher la tension dans mon corps et ma respiration nerveuse et agitée. Il fallait que je lui parle de Boston, ou plutôt qu’elle m’en parle, pour détourner mon attention de la ravissante femme qu’elle était devenue. [color=slateblue] « Oui, c’est sympa, » Sa voix s’était assombrie. Moi qui croyais avoir choisi un sujet de discussion plutôt léger et sympa. « Au début j’adorais, je me sentais libre, j’allais dans les bars, je rencontrais des gens… » Louanne se tourna complètement vers moi afin de continuer à me parler, et sa cuisse se colla totalement sur mon bras, ce qui me fit légèrement frissonner, un sentiment plutôt agréable bien que gênant montant en moi. « Et puis un jour j’ai réalisé qu’au fond je n’avais rencontré personne qui comptait et que mon rockeur de fiancé n’était qu’un alcoolique doublé d’un fumeur d’herbe et qu’il n’accomplirait probablement rien de sa vie. » Alors elle ne s’était jamais mariée. Inconsciemment, un petit sourire se dessina sur mes lèvres, et lorsque je m’en rendis compte, je priai pour qu’elle ne l’ait pas remarqué. J’hochai la tête, tout simplement. « Alors j’ai ravalé ma dignité et j’ai pris des cours pour devenir infirmière. Et j’ai déménagé dans un une-pièce pas loin de l’hôpital et j’ai bossé soixante-dix heures par semaine jusqu’à ce que je demande un congé sans solde pour venir ici. C’est pas brillant non plus. » Je ne savais pas quoi dire. Qu’y avait-il à dire ? Moi qui croyais qu’elle avait été heureuse, là-bas. « Pourquoi tu ne reviens pas ici ? C’est plus calme que Boston, mais tu sais la tranquillité a du bon. Et puis avec le vieillissement de la population d’Arrowsic, tu n’as pas à craindre de manquer de boulot à l’hôpital … » Je lui souris. C’était tout ce que j’avais trouvé à dire, après qu’elle se soit entièrement ouverte à moi. Je n’étais pas très bon pour le côté triste de la vie. Il me mettait mal à l’aise.

Un silence planait dans le salon. Ni agréable ni désagréable, juste là. Je bus ma bière qui était maintenant à moitié vide, ou à moitié pleine, c’est à vous de voir. Ma main libre, dont le côté effleurait la cuisse de Louanne, se laissa aller à lever ses doigts afin de légèrement caresser sa peau. Une courte seconde. Cela aurait même pu paraître accidentel. « J’aime bien te savoir ici, » Je faillis sursauter alors qu’elle me tira de mes pensées probablement trop osées. Je lui souris, retirant complètement mon bras de l’accoudoir. « C’est étrange pourtant, tu ne trouves pas ? Je veux dire … t’as de bien meilleurs amis qui vivent encore ici et qui n’attendent probablement que de te revoir … » C’était bien vrai. Je n’étais pas le seul à ne pas avoir bougé, alors pourquoi étais-je le seul qui semblait encore exister pour elle ?


HJ - m'en fiche de la quantité, la qualité est toujours bonne avec toi alors I love you
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyLun 13 Juin - 17:15

Elle se doutait bien que son récit de Boston devait être beaucoup moins exotique que ce à quoi Ray s’attendait. Il devait probablement l’avoir imaginée en train de mener la vie de palace, mariée à une star du rock, avec son nom tatoué sur la hanche, en train de boire du Moët et Chandon au goulot. Oui, c’était ce qu’elle croyait aller trouver à Boston lorsqu’elle quitta Arrowsic. Boston, New York, pourquoi pas Los Angeles et San Francisco. Mais non, rien de tout ça. Elle s’était juste pris une gigantesque baffe au visage et maintenant elle n’avait même plus ses parents pour lui pardonner et l’aimer malgré tout. « Pourquoi tu ne reviens pas ici ? C’est plus calme que Boston, mais tu sais la tranquillité a du bon. Et puis avec le vieillissement de la population d’Arrowsic, tu n’as pas à craindre de manquer de boulot à l’hôpital … » Louanne sourit et baissa les yeux. « Pourquoi pas… » dit-elle simplement, pour ne pas avouer qu’elle considérait sérieusement l’idée depuis plusieurs heures. Ici elle avait une maison, une boîte aux lettres, un disjoncteur électrique qu’on pouvait réparer. Elle avait un voisin avec qui parler. Et puis surtout elle n’avait plus envie de retourner à Boston. Elle n’y appartenait plus, comme elle avait le sentiment de n’appartenir plus nulle part. Puis le frôlement des doigts de Ray sur sa cuisse lui donna de l’espoir. Alors elle lui dit qu’elle appréciait sa présence. Il s’éloigna d’elle ; cause à effet ? « C’est étrange pourtant, tu ne trouves pas ? Je veux dire … t’as de bien meilleurs amis qui vivent encore ici et qui n’attendent probablement que de te revoir … »

Louanne haussa les épaules et se désaltéra une fois de plus avant de se lever et de faire le tour de la table basse. « Je n’ai pas vraiment veillé à conserver mes amitiés ici… Je pensais que je ne reviendrai jamais alors je suis partie sans dire au revoir. Ni à toi, ni à Pride, ou Nate… » Louanne se massa légèrement la nuque de sa main libre et préféra continuer à éviter le regard de Ray, encore quelques petites minutes. Elle craignait que si leurs regards se croisaient elle n’arriverait pas à dire ce qu’elle se sentait suffisamment en confiance pour avouer. « J’ai peur… de leur avoir laissé un trop mauvais souvenir pour qu’ils aient pris la peine de se souvenir de moi. J’ai peur d’être une étrangère ici… Et je sais que c’est de ma faute. » Elle se tourna pour lui faire face, de l’autre côté de la pièce, mais elle préféra garder les yeux rivés sur sa bouteille. « D’ailleurs… pourquoi es-tu si gentil avec moi alors que je me suis comportée comme la pire des pestes avec toi ? » Louanne voulait savoir ; s’il allait la laisser tomber après quelques jours de politesse eut égard à son deuil – autant qu’il le fasse tout de suite ; s’il avait autre chose à faire de sa vie que de s’embarrasser d’une ratée comme elle. Elle lui faisait confiance, elle avait envie de lui faire confiance, de se reposer sur lui, mais elle n’avait rien fait pour mériter ça de sa part. Elle était partie, il était resté, c’était aussi simple que cela.


HJ - Oualala je les kiffouille à mort If ever there was someone to keep me at home 161626
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyMer 15 Juin - 5:56

Après tout, dans une petite ville comme Arrowsic, toutes ces autres grandes villes de l'Amérique dont on entend parler font rêver. Chicago, Los Angeles, New York, Boston, Washington, San Francisco, Hollywood, tant à nommer. Là-bas, tous les rêves semblaient être possibles. Là-bas, espérer une vie meilleure n'était pas interdit. Alors de penser qu'après six ans, Louanne n'avait rien accompli de particulier et même qu'elle s'était lassée de la grande ville de Boston, me semblait tout à fait inconcevable. À sa place, j'aurais profité de chaque moment, j'aurais saisi chaque opportunité. Mais qui étais-je pour juger ? Je n'étais pas dans ses souliers. Je ne savais pas ce qui s'était passé. Toutefois je demeurais surpris par ses aveux. Moi qui l'avais toujours imaginée heureuse plus que jamais, épanouie, la jalousant même parfois puisque moi j'étais coincé ici. Par choix, certes, mais coincé quand même. La revoilà, cette Louanne, complètement changée et désirant retrouver son petit Arrowsic d'antan. C'était incroyable. Incroyable je vous dis.

« Pourquoi pas… » Répondit-elle quand je lui demandai pourquoi elle ne resterait pas ici quelques temps. Après tout, c'était chez elle. Elle serait toujours la bienvenue, et comme on dit, on ne se sent jamais aussi bien que chez soi. « En tout cas ça me ferait très plaisir de retrouver ma voisine … » Finalement, lorsque la conversation changea sur le fait qu'elle était heureuse de m'avoir ici, je mis enfin cartes sur table en posant la question qui me trottait dans la tête depuis son retour. Pourquoi moi ? Pourquoi pas tous ses anciens meilleurs amis avec qui elle traînait toujours comme une adolescente rebelle en furie pendant que moi je travaillais comme un fou ? Ils étaient encore là, eux aussi. Je les côtoyais à chaque jour. Avant de me répondre, Louanne se leva, ce qui enleva toute tension entre nous deux. Étrangement, je ressentais un vide. Je manquais tout d'un coup de chaleur, de contact humain. « Je n’ai pas vraiment veillé à conserver mes amitiés ici… Je pensais que je ne reviendrai jamais alors je suis partie sans dire au revoir. Ni à toi, ni à Pride, ou Nate… » J'eus un petit rire à la fois sarcastique et moqueur. « Oui, j'ai cru remarquer. » Elle ne m'avait pas dit au revoir à moi non plus. J'avais appris son départ par ses parents. Cependant, avec les années, j'avais su oublier ce détail qui m'avait certes blessé à l'époque, et j'avais compris qu'elle avait probablement eu ses raisons, quelles qu'elles soient. « J’ai peur… de leur avoir laissé un trop mauvais souvenir pour qu’ils aient pris la peine de se souvenir de moi. J’ai peur d’être une étrangère ici… Et je sais que c’est de ma faute. » Louanne se tourna enfin de face à moi, mais elle ne me regarda toujours pas.

« D’ailleurs… pourquoi es-tu si gentil avec moi alors que je me suis comportée comme la pire des pestes avec toi ? » Je fronçai les sourcils. « Je n'ai pas le souvenir de t'avoir vue te comporter comme une peste avec moi. On était gosses, on s'amusait. Et si tu parles du fait que t'es partie comme une voleuse eh bien ... on fait tous des erreurs. J'vais pas te cacher que ça m'a un peu énervé, mais ça fait six ans hein, et t'es là maintenant, c'est ce qui compte. » Je souris légèrement. « Et puis, faut bien que quelqu'un s'occupe de toi. Tu t'en sortirais jamais toute seule, avoue-le. » Je me moquais d'elle, encore une fois. J'espérais juste qu'elle ne prendrait pas mal mon humour.

HJ - Mais graaaaave Laughing
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyMer 15 Juin - 17:07


« En tout cas ça me ferait très plaisir de retrouver ma voisine … » Elle avait souri, un peu, c’était comme revenir d’un coup six ans en arrière, comme lorsque l’on repeint son salon et que finalement, la couleur précédente était mieux. Normalement, on finit par s’habituer à la nouvelle couleur et avec le temps on finit par oublier ce qu’il y avait avant. Mais Louanne n’avait jamais pu oublier, malgré tout l’effort qu’elle y avait mis et surtout, tout était resté intact, presque inchangé, comme pour lui signaler que cette maison, que ses parents, avaient attendu son retour jour après jour. L’amertume qui avait suivi dans la remarque suivante de Ray n’avait fait qu’accentuer sa culpabilité, même s’il ne l’avait probablement pas fait pour la vexer.

« Je n'ai pas le souvenir de t'avoir vue te comporter comme une peste avec moi. » Louanne leva son regard inquiet vers lui, surprise. Pourtant, elle l’avait bel et bien traité comme un moins que rien à cesser de lui adresser la parole dès qu’elle eut quatorze ans, « On était gosses, on s'amusait. Et si tu parles du fait que t'es partie comme une voleuse eh bien ... on fait tous des erreurs. J'vais pas te cacher que ça m'a un peu énervé, mais ça fait six ans hein, et t'es là maintenant, c'est ce qui compte. » Elle lui sourit en retour, plus qu’émue par la façon dont lui la traitait, avec bienveillance et tolérance, ce sourire sincère aux lèvres, se comportant comme s’ils ne s’étaient jamais quittés, comme s’il ne lui en avait jamais voulu. « Et puis, faut bien que quelqu'un s'occupe de toi. Tu t'en sortirais jamais toute seule, avoue-le. » Elle répondit par un petit éclat de rire et essaya de dissimuler son trouble en buvant une longue lampée de bière avant de poser la bouteille dans un claquement sec sur la table basse et de taper dans ses mains. « Bon, quand même, c’est samedi soir, si tu veux bien rester encore un peu, je vais essayer d’être moins ennuyeuse ! » Elle se retourna dans un geste vivace, repéra la chaîne HiFi et s’approcha de la tour de CD ; mais quand elle alluma l’appareil, un disque se trouvait déjà dans le lecteur et se lança automatique. Un disque de jazz, de Chet Baker. « C’est pas très brillant, » lança-t-elle à Garrett, mais finalement, elle ne le changea pas. Elle l’avait entendu toute son enfance, hiver au coin du feu comme les longues soirées d’été où le soleil ne se couche pas avant minuit.

Elle était sûre que Ray s’en souviendrait aussi. « Allez viens, » elle lui tendit la main, et lorsque finalement il la rejoignit dans ce petit espace derrière le canapé elle passa ses mains autour de son cou et commença à danser avec lui, lentement, un sourire presque invisible sur le visage. « T’as vu, on dirait nos parents… » murmura-t-elle après que plusieurs mesures se furent écoulée, « ou quand on était petits et qu’on jouait à la maison. »

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyVen 17 Juin - 21:32


J'avais toujours aimé ma tendre enfance. J'étais tellement nostalgique de cette époque où rien n'importait. L'argent, l'amour, la responsabilité, le stress. Tout ça, ça n'existait pas. Depuis mon adolescence malheureusement, ces mots étaient une partie omniprésente de ma vie. Puis pour essayer de rattraper ma jeunesse perdue à travailler comme un malade, je jonglais ces temps-ci entre boulot, filles et alcool. Comme un vieux fou. Le fait de revoir Louanne m'apaisait, comme si je retournais des années en arrière, quand tout allait bien. Quand je n'avais pas besoin de trouver un équilibre dans ma vie. Quand j'affirmai ne jamais l'avoir perçue comme une peste avec moi, la jeune femme leva un regard surpris vers moi. Je fronçai les sourcils et me replongeai dans ma mémoire. Oh. Comme j'avais été idiot. Lorsque la Louanne de quatorze ans me disait qu'elle ne pouvait pas venir au cinéma avec moi, ce n'était pas parce qu'elle avait un dîner avec ses parents comme elle le prétendait. Je me disais bien aussi qu'elle passait beaucoup trop de temps avec ses parents. C'est à ce moment que je sortis une blague sur le fait qu'elle ne pouvait se débrouiller seule. Je ne voulais pas perdre la face après avoir réalisé qu'elle avait coupé les ponts avec moi par honte, peut-être, d'avoir un jour été mon amie. Disons qu'à cet âge-là, je n'étais pas le garçon le plus populaire en ville. Pas autant qu'aujourd'hui en tout cas.

Louanne éclata de rire et déposa - si on peut dire déposer - sa bière sur la table basse tout en tapant dans ses mains. Je souris, toujours assis confortablement. « Bon, quand même, c’est samedi soir, si tu veux bien rester encore un peu, je vais essayer d’être moins ennuyeuse ! » J'hochai la tête et je finis cul-sec le fond de bière qu'il me restait. Je la déposai à mon tour à côté de celle de Louanne, d'un geste aussi sec que le sien. Je me levai de mon fauteuil et je la rejoignis près de la tour à CD. Chet Baker commença alors que j'étais juste derrière elle. Je souris. « C’est pas très brillant, » dit-elle. « Chet Baker. Tu sais il est demeuré le meilleur artiste de jazz que j'ai entendu. Peut-être parce qu'il me rappelle tant de souvenirs mais en tout cas ... je n'ai jamais cessé de l'écouter. » « Allez viens, » Louanne tendit sa main dans ce mince espace qui nous séparait. Je m'avançai légèrement, enlaçant mes doigts dans les siens, le coeur battant un petit peu plus vite déjà, et mes jambes tremblotant au rythme du piano.

Les mains de la jeune femme s'enroulèrent au tour de mon cou, et je descendis mes mains jusqu'à ses hanches. Nous dansèrent doucement, sur cette romantique musique qui tendait mon corps en entier. Ou peut-être était-ce Louanne qui me faisait cet effet. Oui. Probablement. « T’as vu, on dirait nos parents… » avoua mon amie d'enfance tout en tournant en un petit cercle avec moi. « ou quand on était petits et qu’on jouait à la maison. » Je souris à cette remarque. Je me souvenais, oui. Je plongeai mon regard dans le sien. « Ce qui est bien avec le fait qu'on est grands maintenant, c'est qu'on a plus besoin de faire semblant ... » Et là, alors que Chet Baker commençait à chanter, almost blue, almost doing things we used to do, je penchai mon visage vers le sien, et malgré les papillons qui hurlaient dans ma poitrine et mon ventre, je savourai le goût de ses lèvres, de leur contact tiède sur les miennes.
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptySam 18 Juin - 16:15

Elle avait l’impression d’être hors du temps ; elle était consciente qu’ils étaient un samedi, que ses parents étaient morts depuis deux semaines, déjà, que leurs corps avaient été mis sous terre dans le cimetière de la ville lors d’une cérémonie à laquelle elle n’avait même pas pu assister. Tout la ville avait dû remarquer son absence mais elle n’aurait pas pu, elle n’aurait pas su endurer tous les regards réprobateurs de ceux qui étaient restés, elle avait préféré laisser son ombre planer ce jour-là sur leurs tombes par le biais de son absence. Elle savait tout cela, elle savait qu’elle n’avait pas vu Garrett depuis six ans et pourtant c’était comme si ça ne comptait plus. Et elle savait aussi que demain, probablement, il faudrait tout recommencer, retrouver une place dans la vie de Garrett, chaque jour lutter contre ses six années d’absence et prouver qu’elle était là, en cet instant en essayant de faire oublier le reste.

Il s’était rapproché d’elle alors qu’elle lançait la musique et elle avait senti son sourire lorsque les premières notes de trompette avaient démarré. On jouait souvent Chet Baker chez les Ginsberg après dîner, dans ce moment délicieux où chacun se laisse aller à une relative torpeur, en discutant de choses insignifiantes en buvant un café. Quand elle était vraiment petite, Louanne s’endormait dans sa chambre en entendant cette musique, plus tard, lorsqu’elle avait le droit de rester, elle se contentait d’être assise en silence sur un côté du canapé à fixer le mur, en feignant l’indifférence face à cette musique qui lui rappelait toujours sa solitude. En six ans elle n’avait pas entendu sa voix. Garrett venait de prouver une fois de plus qu’il était mieux qu’elle, il avait perpétré cette habitude, il n’avait pas abandonné ses souvenirs. Louanne, elle, se sentait toujours aussi seule qu’à l’époque, peut-être plus, même. Mais elle n’avait plus envie de l’être, plus maintenant, plus dans cette maison, plus dans cette ville, plus dans cette vie. Alors elle s’était tournée vers Garrett et ils avaient commencé à danser, et elle s’était laissée envelopper par ses bras, par son odeur qui l’avait tant fait vaciller plus tôt, ses yeux s’étaient perdus dans les siens et elle avait évoqué un énième souvenir commun. « Ce qui est bien avec le fait qu'on est grands maintenant, c'est qu'on a plus besoin de faire semblant ... » Puis il s’était penché vers elle au moment exact où Chet Baker commençait enfin à chanter après une longue introduction, après six ans, et il l’avait embrassée.

Louanne accueillit ce baiser avec calme et pourtant s’y abandonna complètement ; elle l’avait attendu sans le savoir toute la soirée. Non elle n’avait plus envie d’être seule. Et pour une fois cela n’avait pas l’air d’une erreur, peut-être parce qu’elle le connaissait si bien, en fait, même si elle ne savait rien de ce qu’il faisait à présent, elle l’avait connu toute son enfance, elle savait d’où il venait. Lui aussi. Elle prolongea leur baiser, almost blue, flirting with this disaster became me, il y avait un peu de l’amertume de la bière entre eux, les battements interrogateurs de son cœur, puis la chanson prit fin et dans l’intervalle qui les séparaient du morceau suivant elle murmura « Garrett… » dans un souffle chaud avant de rattraper son regard et de sentir ses joues rosir soudainement à cause du désir, de l’amour des adultes, parce qu’il était le seul à être là avec elle et à la regarder ainsi. « Je suis pas une fille pour toi, tu mérites mieux… »

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 26 Juin - 7:48

Ce que nous faisions là, c'était irresponsable, con, naïf. Oublier, voilà ce que nous faisions. Comme si le fait de nous retrouver enfin effaçait tout le reste. Pourtant non. Je savais, au plus profond de moi-même, que j'étais tout simplement sous le choc de ce grand retour. J'étais enthousiaste, chamboulé, surpris, je flottais sur mon petit nuage de bonheur nostalgique. Je redevenais un gosse quand j'étais aux côtés de Louanne. Avec toute l'innocence qui vient avec. Mais je me réveillerais demain matin, je me rendrais compte que je suis pas un gosse, je ne suis plus un gosse. Je suis un adulte, et bien que Arrowsic soit Arrowsic, ma vie avait tout de même changée depuis le départ de Louanne. Je n'étais plus le même qu'avant. Nous n'avions plus les mêmes possibilités devant nous. Nous ne pouvions pas continuer à faire les cons sans que ça veuille dire quoi que ce soit. Pas avec elle en tout cas. Mais pour ce soir, juste pour ce soir, j'avais envie de ne pas penser au fait que tout ça, ça aller merder. Juste ce soir. Être hors du temps.

La musique se glissait doucement dans mes oreilles, faisant naître sur mon visage un sourire béat. Des images défilaient dans ma tête, se superposant à celles qui se déroulaient droit devant mes yeux. Une Louanne grande et perdue. J'avais l'impression qu'il fallait que je la sauve. Mais comment. Et pourquoi. Et puis merde, trop de questions. Ça tuait le moment. Je l'ai embrassée, voilà, c'est fait. Et c'est bon. J'ai envie de recommencer. Parce que même si Louanne a fait en sorte que ce baiser s'est prolongé jusqu'à la toute fin de la chanson, il me semble encore trop court. On s'était abandonnés, je voulais qu'on s'enfonce encore plus dans cette forêt grande. Je ne voulais plus seulement m'abandonner, je voulais me perdre, tant que je me perdais avec elle. C'était insensé. C'était ce qui rendait le moment si beau.

« Garrett… » Vint-elle briser le silence. Ce délicieux silence lorsque nos lèvres se scellaient. Je reculai mon visage du sien, plongeant mon regard dans le sien. Elle me sortit la phrase la plus stupide du monde. « Je suis pas une fille pour toi, tu mérites mieux… » Le cliché le plus ridicule. J'eus un rire. Voyant qu'elle était sérieuse, je secouai légèrement la tête, sourcils froncés. « Tu rigoles là, c'est ça ? » Je me détachai de son corps, reculai de quelques pas. Je ne voulais pas entendre ça, pas ce soir. Demain pourquoi pas. Même là, l'envie n'y serait pas. « Pourquoi ne me laisses-tu pas en juger par moi-même ? » Nous étions séparés par trop de centimètres. Ça se comptait d'ailleurs en décimètres. « Je ne te connais plus. Tu ne me connais plus. Tu ne sais même pas qui je suis devenu, alors comment peux-tu dire que je mérite mieux ? » Parce qu'au final, je n'étais pas très convaincu de cette affirmation. J'aurais plutôt pensé le contraire, vu ce que les années avaient fait de moi.


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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 26 Juin - 18:41

Elle avait empoigné ses cheveux quand ses lèvres s’étaient posées sur les siennes pour l’approcher un peu plus d’elle et parce qu’il y avait un peu plus que de la tendresse entre eux. C’était agréable. Ca faisait du bien. C’était différent. Elle le connaissait, il était rassurant, et même si cette maison peinait à lui faire se sentir chez elle, du moins elle lui était familière. Mais elle devait le prévenir, elle devait lui dire que se risquer à embrasser Louanne Ginsberg n’était pas sans conséquences. Mais il ne voulait pas l’entendre. « Tu rigoles là, c'est ça ? » Elle le regarda, interdite. Elle ne s’était pas attendue à une telle réaction. Il s’éloigna d’elle et elle laissa ses bras retomber ballants le long de son corps, sans fonction, sans vis. « Pourquoi ne me laisses-tu pas en juger par moi-même ? » « Ecoute je… » « Je ne te connais plus. Tu ne me connais plus. Tu ne sais même pas qui je suis devenu, alors comment peux-tu dire que je mérite mieux ? » Elle resta la bouche entrouverte, une expression de complet étonnement sur le visage. Comment pouvait-il dire ça ? Elle essaya de déchiffrer ce qu’il y avait dans ses yeux bleus mais elle n’y arrivait pas, et puis il y avait ce vide entre eux, c’était comme si l’air était soudainement redevenu froid. « Mais moi je me connais, et je sais que je n’arrête pas de décevoir les gens qui m’entourent, je suis pas stable, je fais des erreurs et j’ai pas envie de… » Te perdre, pensa-t-elle. Mais on ne peut perdre ce qui n’avait jamais été à soi, n’est-ce pas ?

Et puis il avait raison. Des années avaient passées, elle était revenue de ses détours, elle était devenue quelqu’un que même ses parents n’auraient pu reconnaître. Portant des robes à fleurs et des tee-shirts de couleurs, buvant du lait écrémé et du décaféiné. Elle soupira et se tourna vers la radio. « Clairement c’était une mauvaise idée, » fit-elle en coupant la musique avant de se retourner vers lui et de contempler la distance qui les séparait. C’était plus simple ainsi, tout compte fait. « Tu devrais rentrer chez toi. » Mais elle n’arrivait pas à s’y résoudre et cela devait se lire dans ses grands yeux qu’elle avait posés sur lui. Le souvenir de son baiser continuait de faire battre son cœur et elle n’avait pas envie qu’il parte, mais c’était la meilleure des choses à faire. Arrowsic était une petite ville, elle ne pouvait pas embrasser n’importe qui, surtout pas son voisin. Elle ne pouvait pas prendre le risque de perdre son amitié, son affection, ou peu importe ce qu’il éprouvait à son égard. Même si ce souvenir lui semblait être la meilleure chose qu’elle ait faite jusqu’à présent.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyJeu 7 Juil - 21:50

Ma main se replia sur son vêtement, en froissant le tissu entre mes doigts. J'avais envie de sentir son corps sur le mien. Que son parfum s'étende sur mes blessures. Que ses baisers guérissent tous mes démons pour en faire des anges. Parce que c'était ce qu'elle était ; un ange. Revenue à Arrowsic pour me sauver de moi-même, peut-être. Ou des autres. Ou d'un mélange des deux, et du monde aussi. Sauf que Louanne ne semblait pas réaliser l'effet qu'elle me faisait, tout le bien qu'elle m'apportait. Que même si c'était con et innocent, je ne voulais pas que nous arrêtions. Pas tout de suite, en tout cas. De toute façon, nous nous étions déjà mis les deux pieds dans le plat, c'était difficile de revenir en arrière aussi facilement. Alors autant s'enfoncer jusqu'au bout de la tête, tant qu'à y être. « Mais moi je me connais, et je sais que je n’arrête pas de décevoir les gens qui m’entourent, je suis pas stable, je fais des erreurs et j’ai pas envie de… » Je secouai la tête. Je ne voulais plus en entendre. Elle cessa de parler devant mon air résolu à ne plus vouloir l'écouter de toute façon. « Et moi aussi je me connais, et je sais que je suis assez borné pour ne pas me fier à ce que tu me dis. Tu sais, je suis critique de film. J'ai appris à me faire mon propre opinion, et ne pas suivre le sens populaire. Alors essaie autant que tu veux de me convaincre que je mérite mieux que toi, que t'es pas une bonne personne, j'entends rien. » J'en avais marre qu'elle réfléchisse trop. J'avais passé mon adolescence à tout réfléchir, tout calculer. Maintenant je voulais laisser la vie suivre son cours. Laisser Dieu faire son boulot : me créer un destin. Et s'il avait remis Louanne sur ma route pour une seconde fois, j'osais croire que c'était pour une raison. « Clairement c’était une mauvaise idée, » Continua quand même Louanne, fermant la musique qui avait entamée un nouveau morceau entre temps. Je soupirai en la fixant intensément. Déçu. « Tu devrais rentrer chez toi. » Je capitulais. Je voyais dans ses yeux noisettes que ce n'était pas ce qu'elle désirait. Ce n'était pas ce que je désirais non plus. Mais je n'allais pas me battre contre sa bonne conscience. Peut-être le fait que je sois plus loin d'elle lui permettrait de se rendre compte qu'elle avait besoin de moi, du moins pour le moment. « Si c'est ce que tu veux ... Mais je t'avertis, je n'aime pas qu'on joue avec mes sentiments. Alors la prochaine fois, si tu viens cogner à ma porte pour que je répare ton réfrigérateur qui ne refroidit plus, alors sois bien certaine que tu veuilles vraiment que je vienne te le réparer. Ton coeur, je parle. » J'attrapai ma veste que j'avais laissée sur le fauteuil, et je repartis vers la porte d'entrée, en silence.
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyJeu 7 Juil - 23:04

C’est vrai qu’il était têtu et il continuait à refuser de l’entendre, il refusait de revoir en elle ce qu’elle avait montré avant de partir, une haine sans borne envers ses parents, de la rancœur contre cette petite ville qui ne lui avait rien fait mais qui ne lui avait certainement pas apporté l’aventure qu’elle cherchait à l’époque. Et voilà qu’aujourd’hui elle se retrouvait dans la maison de ses parents avec son cœur battant à cent à l’heure, se voyant démontrer par A plus B que l’aventure était au coin de la rue, juste devant ses yeux, que Garrett en était une et qu’elle était peureuse comme une fillette n’osant pas sauter dans un torrent. Mais les mots dépassaient sa pensée tandis qu’elle l’enjoignait de rentrer chez lui à contrecœur, le faisant simplement parce qu’il avait l’air soudainement si excédé, par elle, par son indécision, par son attitude étrangement précautionneuse, elle qui avait toujours pris ses décisions sur un coup de tête. « Si c'est ce que tu veux ... Mais je t'avertis, je n'aime pas qu'on joue avec mes sentiments. Alors la prochaine fois, si tu viens cogner à ma porte pour que je répare ton réfrigérateur qui ne refroidit plus, alors sois bien certaine que tu veuilles vraiment que je vienne te le réparer. Ton cœur, je parle. » Elle baissa les yeux, entendant ses derniers mots résonner dans sa tête maintenant qu’il n’y avait plus de musique pour qu’elle ignore ses mains moites et tremblantes. Elle avait peur de la tendresse, elle avait peur qu’il l’abandonne en représailles de ce qu’elle avait fait six années plus tôt, et puis elle avait peur tout court. Peur de cette attirance fortuite et peur de tomber amoureuse.

« Attend. » Elle soupira puis regarda machinalement autour d’elle avant de le rejoindre dans l’entrée et de poser sa main sur son bras. Elle voulait lui faire confiance. Elle leva les yeux vers lui si bien que son visage était de nouveau aussi proche du sien que lorsqu’ils dansaient. « On m’a toujours dit que je ne savais pas ce que je voulais… » La respiration de Louanne se fit entendre alors qu’elle le fixait sans bouger, le temps qu’un sourire se dessine sur son visage. C’était plus fort qu’elle, être près de lui, elle n’avait pas envie d’être seule et elle se sentait mieux avec lui dans la pièce. Elle se sentait bien avec lui tout près. « Je ne jouerai pas si tu ne joues pas. » Elle se rapprocha, jusqu’à ce qu’ils se frôlent. « Avec nos sentiments, je veux dire. » Sa main glissa le long du bras de Ray jusqu’à toucher sa paume et s’y glisser. « Alors peut-être que tu peux rester encore un peu, » murmura-t-elle juste avant que sa bouche ne rejoigne la sienne pour un deuxième baiser.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyJeu 7 Juil - 23:53



« Attend. » Je m'arrêtai sec de marcher. Un léger sourire se dessina sur mon visage qui avait été crispé tout au long de ma descente vers le hall d'entrée. Je fermai les yeux en entendant ses pas s'approcher de moi. J'avais espéré qu'elle me retienne. J'avais espéré qu'elle se laisse aller, qu'elle s'abandonne à ce que nous pourrions être. Les coups de tête étaient toujours plus prometteurs que les décisions de grandes réflexions, parce qu'après tout, nous étions des animaux, et l'animal se fie toujours à son instinct. Pour sa survie. Et cela semblait plutôt bien fonctionner, alors pourquoi pas pour nous ? Mes yeux se rouvrirent automatiquement lorsque je sentis la chaude main de Louanne se refermer sur mon poignet. Je ne tournai que la tête vers elle, toujours de dos, donc. Nos visages étaient tout de même assez prêts pour avoir une odeur de déjà-vu qui me rappelait notre baiser d'un peu plus tôt. Je ne m'aventurai pas plus sur le terrain, j'attendais de voir pourquoi elle me retenait réellement. « On m’a toujours dit que je ne savais pas ce que je voulais… » J'eus un petit rire. « Et moi on m'a toujours dit que je voulais l'impossible. » L'impossible, c'était elle. Car à chaque fois que je ferais un pas vers elle, elle en ferait un de reculons. Je le sentais. Toutefois, j'osais croire que ça en vaudrait la peine. « Je ne jouerai pas si tu ne joues pas. » J'hochai la tête. Cette phrase me fit beaucoup plus peur que prévu. Je jouais. C'était ce que je faisais, tout le temps. Je jouais avec le coeur des femmes, et pas qu'une seule à la fois. Était-ce seulement l'effet de nouveauté que je trouvais en Louanne qui me donnait l'impression de ne vouloir qu'elle pour le moment ? Moi qui n'était jamais satisfait des femmes ? Il était trop tôt pour faire une croix sur qui j'étais à présent. J'avais toujours su qu'un jour ou l'autre, une demoiselle me ferait changer. Je n'aurais jamais cru que ce serait aussi tôt. Comment le savoir, de toute façon, à part en expérimentant ? « Avec nos sentiments, je veux dire. » J'hochai donc la tête d'une façon plus convaincante. La main de Louanne glissa le long de mon bras et vint se loger dans ma paume. Je resserrai mes doigts autour d'elle. « Alors peut-être que tu peux rester encore un peu, » Nos lèvres se scellèrent de nouveau et une vague intense de chaleur s'empara de tout mon corps, en particulier mon bas-ventre. Ma respiration changea rapidement, devint entrecoupée, et voyant que l'effet était le même chez Louanne, je me permis d'enfreindre les limites. Je m'emparai de ses hanches et je la relevai de force dans les airs pour qu'elle enroule ses jambes autour de mon corps. Sans perdre une seconde, je la plaquai contre le mur, où quelques cadres furent délogés de la position qu'ils tenaient depuis des années. Je l'embrassais fougueusement. J'avais envie d'elle. Je la voulais.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyVen 8 Juil - 0:23

Ce second baiser était nettement plus franc que le premier et il ne laissait plus aucun doute quant aux intentions des deux protagonistes. Pourtant il restait toujours ce petit quelque chose d’étrange qui faisait qu’elle n’avait pas simplement l’impression d’allumer son désir pour n’importe qui. Elle le désirait, lui, vraiment lui, et pas simplement qu’on assouvisse ses envies. Elle n’avait pas besoin de Garrett pour ça, elle aurait pu prendre n’importe quel type dans un bar. Ce soir elle savait qu’elle voulait être avec ce voisin qui avait traversé sa vie comme un fantôme avant de se révéler vraiment à elle. Sans crier garde il la souleva et elle l’aida en passant ses mains sur sa nuque, comme pour leur première danse mais c’était nettement différent. Son dos heurta le mur et un cadre se décrocha juste derrière elle. La maison n’avait probablement pas vibré autant depuis des années. C’était aussi comme si elle reprenait vie grâce à eux. Ils agitaient les grains de poussière dans l’air, ils secouaient des objets qui avaient eu l’air immuables, figés dans le temps.

Rapidement il escalada les escaliers, Louanne agrippée à sa chemise, jusqu’à ce qu’ils arrivent au palier de l’étage. Elle le dirigea vers la chambre d’amis en la pointant approximativement du doigt sans pour autant détacher ses lèvres des siennes et ils tombèrent sur le lit dans un son sourd de draps froissés. La pièce sentait un peu le renfermé et les volets étaient clos mais Louanne ne s’en préoccupait plus. Après leur chute elle s’était retrouvée sur Garrett et lui avait prestement enlevé sa chemise, de peur qu’il ne change d’avis. Elle ne pouvait empêcher son esprit d’être perturbé par les pistes brouillées en cet instant, elle était désorientée car il s’agissait de Ray, elle était dans la chambre d’amis de sa propre maison, ses parents étaient morts et elle était une adulte, tout cela ne cessait de la rendre encore plus malhabile alors qu’elle essayait de déboucler sa ceinture. Et elle n’arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui avait changé chez lui ; il était plus âgé, c’est vrai, il avait l’air plus mûr, mais il était plus sombre aussi, moins naïf. Elle ne le connaissait plus, il avait raison, mais elle s’accrochait au souvenir qu’elle avait de lui. Bientôt il se redressa et elle perdit sa blouse, et ce fut elle qui se retrouva allongée sous lui, la tête entourée de ces draps ringards couverts de fleurs aux couleurs usées, jusqu’à ce qu’il se penche vers elle de nouveau et lui ferme les yeux d’un baiser pour lui faire tout oublier.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyVen 8 Juil - 5:07

Je commençai tout de suite à monter les escaliers, trébuchant de temps à autre mais me retenant à la rampe de support. J'y allais rapidement mais sûrement ; c'aurait été bête qu'on déboule tous les deux les marches alors que le désir était si fort et le moment si propice. Je ne crois pas que nous aurions eu le courage de tout recommencer après. Après quelques efforts - même si ces efforts n'avaient rien à voir avec son poids, poids plume devrais-je dire -, j'arrivai enfin en haut de l'escalier. Je sentis la main de Louanne se détacher de mon cou et j'eus l'intelligence d'esprit d'ouvrir les yeux afin de regarder ce qu'elle faisait avec cette main. Me pointer un endroit où aller. J'hochai la tête tout en continuant à l'embrasser, comme si nous étions deux aimants incapables de nous détacher l'un de l'autre. Je déviai ma trajectoire jusqu'à cette chambre, la chambre d'invités, si mes souvenirs étaient toujours bons. Cela faisait des années que je n'y étais pas allé. Et pourtant, j'y avais déjà dormi. Quand mes parents partaient pour le week-end et que les parents de Louanne me gardait, par exemple. Je passai rapidement le cadre de la porte et en deux enjambées je fus tout près du lit, où je nous laissai chuter. Louanne se retrouva par-dessus moi, et pour tout vous dire la position était très agréable. J'en profitai un moment avant de la laisser retirer ma chemise. Je ne réalisais même pas que nous baignions dans un drap de poussières qui témoignaient des années passées sans visiteur dans cette maison. Les parents de Louanne avaient été si seuls après son départ, anéantis ... Qui l'aurait cru ? Que quelques années plus tard, elle reviendrait, et que ce serait avec le petit - devenu grand - Ray qu'elle déciderait d'être ? Que ce serait auprès de lui qu'elle irait se réfugier ? C'était incroyable. Inimaginable. On l'aurait dit au gosse que j'étais il y a dix ans, je ne l'aurais jamais cru, j'aurais dit que c'était inconcevable. Pourtant nous voilà, tous les deux adultes, prisonniers d'une passion sans limite. Je roulai sur le côté, prenant le contrôle de la situation, et me retrouvai ainsi allongé sur ce fantôme de mon passé. Je lui enlevai son haut, rapidement, et m'attarda un moment sur sa poitrine remontée par son soutien-gorge. Elle était magnifique. Après l'avoir contemplée un moment, je me repenchai de nouveau sur elle afin de l'embrasser encore et encore. Je laissai ma main se faufiler sous le seul tissu qui me séparait de son sein gauche, et j'en caressai le bout doucement, tout en continuant à l'embrasser, laissant parfois mes lèvres glisser dans son cou et un peu plus bas. Je délaissai finalement sa poitrine et ses lèvres et je glissai tout mon corps vers le bas. Je détachai rapidement son pantalon et le lui retira complètement, les sous-vêtements avec. Je pris ses cuisses entre mes mains et les passai par-dessus mes épaules, pour laisser le champ libre à ma bouche qui s'aventura vers le sexe de Louanne.
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyVen 8 Juil - 21:52

C’était drôle comme cet autre baiser avait si soudainement enclenché son désir pour lui, si bien que maintenant chacun de ses effleurements déclenchait des décharges d’un doux plaisir dans tout son corps. Elle ne se souvenait pas d’avoir autant désiré un homme. Pas même son ex-fiancé, après tout, elle n’avait que seize ans à l’époque et dix-huit ans quand ils avaient rompu. Elle n’était qu’une gamine et elle avait vite compris les craintes de ses parents. Sa première fois, elle ne s’en souvenait pas tellement elle était bourrée, mais elle savait juste que ça avait été loin d’être bien. Puis il y avait eu d’autres hommes qui étaient passés dans son lit, des hommes dont elle n’aurait pu donner un seul de leurs noms et qui n’avaient certainement pas laissé de souvenirs inoubliables. Son voisin, ce misérable petit point dans son passé, elle le désirait autant que tous les autres réunis. Il la caressa sous son soutien-gorge et elle ne put retenir un soupir sonore contre ses lèvres car d’un seul contact il décuplait son désir. Elle accompagna sa descente vers son ventre en glissant ses mains dans les cheveux de Ray jusqu’à ce qu’il la dénude complètement. Verrait-il l’effet complètement dingue qu’il avait sur elle ?

Et si elle n’était pas partie, est-ce qu’un jour elle aurait ouvert les yeux sur le voisin qui tond sa pelouse tous les premiers dimanche du mois ? Si ses parents n’étaient pas morts, serait-elle jamais revenue à Arrowsic, l’aurait-elle revu ? Les passants qui marchaient le long de cette maison synonyme de deuil étaient certainement loin de s’imaginer ce qu’il se passait à l’intérieur de cette petite chambre du premier étage qui avait la plus belle vue. C’était d’ailleurs si improbable qu’elle n’arrivait que difficilement à y croire ; mais la bouche de Garrett entre ses jambes et leurs jeux d’enfants devenus grands l’empêchèrent de penser d’avantage et elle gémit une fois de plus, aux prises avec un plaisir qu’elle ne contrôlait plus et qui la contrôlait. Elle sentait l’escalade se constituer à l’intérieur d’elle avec chaque geste de Ray et chacune de ses expirations devenait de plus en plus appuyée jusqu’à ce que finalement, alors qu’elle était au bord de la chute, elle lui demande d’attendre. Elle le voulait lui, en elle, comme une métaphore pour qu’il vienne combler le vide qu’elle ressentait et qui n’était dû à rien d’autre qu’à son extrême solitude. Mais avec Garrett cela n’allait pas être que baiser, il ne la soulagerait pas que physiquement, elle le désirait tant car elle savait qu’avec lui elle ne se sentirait plus seule.

Elle l’incita à remonter vers elle en tenant son visage entre ses mains et elle le guida jusqu’à sa bouche pour qu’elle l’embrasse et une fois que leurs lèvres se verrouillèrent, elle laissa ses mains glisser vers son pantalon qu’elle déboutonna rapidement avant de le repousser en arrière. L’air commençait à embaumer de leurs parfums mêlés et chaque fois qu’elle inspirait c’était lui qui entrait dans ses poumons. Elle glissa une de ses mains dans le boxer de Garrett et le caressa doucement pour constater qu’il en avait autant envie qu’elle. Pourtant elle ne précipitait pas les choses ; pour une fois elle se surprenait à apprécier les préliminaires, à faire plaisir à l’autre et malgré le désir qui lui déchirait le ventre elle restait lascive et patiente.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 17 Juil - 6:06

Bien des entre-jambes et des poitrines étaient passées dans mon lit au cours des dernières années. Mais voilà ce qu’elles avaient été à mes yeux durant tout l’acte : des seins et des sexes féminins. Rien de plus. Avec Louanne, c’était si différent. J’avais lu tellement de merde à propos du fait que le désir sexuel était augmenté par le lien qui unissait les deux personnes impliquées. Ce n’était qu’aujourd’hui que je réalisais que c’était vrai. Louanne et moi fusionnions autant par nos corps que par nos esprits. C’était mille fois mieux que toutes les parties de jambes en l’air que j’avais eues depuis ma vie d’adulte. Le fait de pouvoir goûter entre mes lèvres que ce sentiment était réciproque me faisait encore plus plaisir – si c’était momentanément possible d’être plus heureux que je ne l’étais.

Louanne respirait énergiquement, gémissait, se mordait les lèvres d’extase. Puis elle me demanda d’arrêter, m’incitant à remonter vers elle. Elle avait raison ; il fallait faire durer le plaisir. L’attente, le suspens, ne pas aller droit au but. Je remontai donc tout son corps en la couvrant de baiser, de la même façon que je l’avais descendu. La tête entre les deux mains de mon amante, je me frayai un chemin jusqu’à sa bouche, guidée par ses mouvements. Je l’embrassai encore une fois, et le fait qu’elle accepte de le faire après que mes lèvres aient touché son intimité m’alluma. Je laissai un petit rire s’échapper d’entre mes lèvres lorsque Louanne me poussa vers l’arrière après avoir déboutonné mon jeans. Je ne me souvenais pas m’être déjà autant amusé au lit. Tous nos gestes étaient si naturels, coulant comme l’eau d’une rivière. Il n’y avait aucun malaise, aucune gêne.

Je fermai les yeux et laissai ma tête tomber légèrement vers l’arrière lorsque la main de la jeune femme vint me caresser dans mon boxer. C’était à mon tour de gémir entre mes lèvres et d’avoir la respiration saccadée. Ma main droite s’éleva jusqu’aux longs cheveux bruns de Louanne, et je passai mes doigts entre ceux-ci. Après un moment, j’enfouis ma tête dans le creux du cou de ma compagne et je commençai à l’embrasser doucement, puis je me fis plus pressant. Je n’en pouvais sincèrement plus d’attendre, malgré que les préliminaires aient été parmi les meilleurs de toute ma vie. Je la repoussai légèrement vers l’arrière, pris ses cuisses entre mes mains et les entourai par moi-même autour du bas de mon corps. Je croisai son regard et en voyant la lueur de désir dans ses yeux, je pénétrai son corps d’abord doucement, continuant à la couvrir de baiser pour le moment, puis je me fis de plus en plus insistant dans mes coups de reins, laissant de temps à autre sortir de ma bouche quelques gémissements animaux.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 17 Juil - 19:13

Elle l’avait connu toute sa vie, elle aurait dû être gênée d’être nue devant lui. Elle ne l’était pas, bien au contraire, il la faisait se sentir en sécurité. Cette longue absence, il ne lui faisait pas payer, mieux, il ne la jugeait pas ; mais à bien y réfléchir elle ne se souvenait pas qu’il l’ait jamais fait. Malgré tout ce qu’elle avait pu faire qui avait déçu ses parents, jamais Garrett n’avait porté un regard désapprobateur sur son comportement alors qu’il s’était comporté comme le meilleur fils dont ses parents n’auraient jamais pu rêver. Au bout de quelques autres secondes durant lesquelles ils enlevèrent le reste de leurs vêtements il passa entre les jambes de la jeune femme, juste au bon moment pour elle et elle releva son regard pour croiser le sien. Ses pupilles étaient dilatées par le désir qui s’était accumulé en elle jusqu’à ce qu’il le fasse exploser en s’invitant en elle. Louanne l’accueillit par un doux gémissement et un mouvement de hanche puis laissa courir une de ses mains sur les épaules de son compagnon tandis que son autre main alla chercher celle de Garrett et leurs doigts s’entrelacèrent soudainement. Elle vint soupirer dans son oreille et quand le plaisir devenait trop prenant elle susurrait son nom ou mordillait son épaule juste pour le plaisir de goûter sa peau. Elle trouvait que son prénom usuel roulait bien sur sa langue. Il était doux mais il restait pourtant masculin avec toutes ces consonnes frappées. Elle se plaisait à murmurer son nom ; elle ne comprenait pas pourquoi elle ne l’avait pas su plus tôt.

Ils basculèrent et elle se retrouva sur lui qui s’était assis sur le lit ; elle avait toujours ses jambes enroulées autour de sa taille et son regard plongé dans le sien. En quelques coups de hanches ils retrouvèrent un rythme, leurs respirations se mélangeant alors que leurs fronts étaient appuyés l’un contre l’autre et ce fut comme s’ils repoussaient les limites de leur plaisir à chaque fois. Louanne retomba de nouveau sur le lit et Garrett revint contre elle juste après avoir glissé une de ses jambes sur son épaule. Le changement de position la fit soupirer de nouveau et plusieurs gémissements plus tard elle fut secouée de tremblements désordonnés qui lui coupèrent le souffle. Son corps entier se détendit et elle déplaça sa jambe pour la remettre autour de la taille de Garrett. Elle se sentait bien. Il était partout, sur elle, contre elle, en elle, elle aurait voulu prolonger cette sensation pour toujours. Elle garda son visage blotti dans le creux de son cou, dispersant quelques baisers sur sa peau légèrement salée, repoussant le moment où la réalité les rattraperait. « Si j’avais su, je ne serai pas partie, » souffla-t-elle sur le ton de la plaisanterie et avec en sourire tout en reculant son visage sur l’oreiller pour plonger ses yeux dans ceux de son amant d’une nuit. De deux, peut-être, se surprit-elle déjà à espérer.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyLun 25 Juil - 6:00

J'avais été nu devant tant de femmes que bien que je n'aie pas le physique convoité par toutes ces demoiselles qui ne juraient que par les muscles, je ne m'en sentais pas gêné pour autant. De plus, Louanne et moi vivions en ce moment un moment si profond, si intense et inattendu que je ne m'attardais même pas à la gêne de la pudeur. Elle ne semblait pas non plus y réfléchir. Comme si toute cette soirée avait été naturelle. Normale. Et pourtant, c'était bien tout le contraire, justement. Aujourd'hui, ma vie avait été renversée. Même si peut-être que demain, cette nuit ne voudrait plus rien dire, je serais tout de même changé à tout jamais. Tout simplement parce que cette fille-là n'était pas une fille comme les autres. Elle avait fait parti intégrante de mon passé. Elle revenait maintenant hanter mon présent. Puis j'osais espérer qu'elle resterait pour habiter mon futur. Un petit peu, un petit bout de temps, au moins.

Pour le moment, c'est moi qui avais choisi d'habiter Louanne le temps de notre amour furtif. Elle posa ses mains sur mes hanches, aidant à mes mouvements en me tirant vers elle à chaque coup de rein. Je sentais son souffle chaud dans mon horaire. Un souffle de plaisir, qui s'harmonisait au mien. J'aimais entendre mon nom sortir de ses lèvres, et je fis la même chose pour elle, me disant qu'elle aimerait probablement tout autant. Autrefois, j'aurais crié son nom pour qu'elle vienne jouer avec moi, ou alors pour la gronder si elle avait brisé un de mes jouets. Maintenant, je le murmurais à son oreille parce qu'elle me comblait, elle me rendait heureux, elle me faisait du bien.

Louanne décida de changer les rôles et elle me fit basculer afin de se retrouver par-dessus moi. Dominante, la voisine. La jeune femme prit le contrôle et je la laissai se déhancher sur moi, posant mes mains sur ses courbes. Nous collâmes nos fronts l'un sur l'autre, et je posai un baiser sur le bout de son nez, puis sur ses lèvres, avant que nous reprenions un rythme qui fit en sorte que ma respiration saccadée m'empêchait de la couvrir de mes lèvres. Après un moment, j'eus l'envie de reprendre le contrôle, sentant que j'allais bientôt exploser de plaisir, et je me retrouvai donc de nouveau sur elle, contre elle. La cadence accéléra, mon coeur battait plus vite, j'avais chaud, je lâchais des gémissements incontrôlés, ma respiration fut coupée, et mes jambes se contractèrent comme le reste de mes muscles, causant un tremblement sur tout mon corps. Je restai un moment en Louanne, l'embrassant une dernière fois avant de retomber sur le côté, restant tout de même logé dans ses bras. « Si j’avais su, je ne serai pas partie, » Je souris en même temps qu'elle. « Peut-être que c'est mieux ainsi. L'attente était peut-être ce qu'il nous fallait ... Je ne pense pas que si tu étais restée, nous en serions au même point aujourd'hui ... » Je l'embrassai une autre fois. Pour le plaisir. Parce que son goût me manquait trop. « Mais ne parlons pas de ça, pas maintenant ni jamais d'ailleurs ... ça ne sert à rien. » Je replaçai ma tête sur l'oreiller. Je ne savais pas si elle voulait que je reste pour la nuit, que je parte. Habituellement, je serais parti dès qu'elle aurait fermé l'oeil. Maintenant, je ne savais pas trop ce que je voulais, en réalité.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyJeu 28 Juil - 22:01

Louanne se tourna vers Garrett, un sourire accroché aux lèvres. « Peut-être que c'est mieux ainsi. L'attente était peut-être ce qu'il nous fallait ... Je ne pense pas que si tu étais restée, nous en serions au même point aujourd'hui ... » Bien des choses se seraient passées différemment si elle avait décidé d’écouter les conseils de ses parents. Mais Garrett avait probablement raison ; elle avait tellement changé à Boston, peut-être même qu’elle avait eu besoin de partir, qui sait ? Au moins, aujourd’hui, son amertume était dirigée vers elle-même et plus ses parents, et même si c’était douloureux, de ne pas avoir pu leur dire qu’elle les aimait, qu’elle ne leur en voulait pas, qu’ils avaient raison… elle préférait cela à une vie de ressentiments à leur égard s’ils l’avaient forcée à rester. Elle caressait Garrett du regard. Lui n’avait pas perdu sa famille. Quand leurs lèvres se rejoignirent elle eut le sentiment qu’il était la seule famille qui lui restait. « Mais ne parlons pas de ça, pas maintenant ni jamais d'ailleurs ... ça ne sert à rien. » Le sourire de la jeune femme s’estompa et elle s’allongea sur le côté en posant sa tête juste à côté de lui. Ils restèrent un moment en silence, côte à côte, Louanne ne sachant pas si elle avait le droit de le toucher maintenant. Mais cette proximité entre eux… c’était comme si les minces espaces qui les séparaient par endroit devenaient denses, denses de son envie de rompre cette séparation, tout comme lorsqu’elle s’était assise juste à côté de lui et que sa main frôlait sa cuisse. Ils ne se touchaient pas, mais il y avait plus dans cette absence de contact que dans une main posée sur son épaule.

Sentant le nœud de la solitude se resserrer dans son estomac, Louanne expira doucement et vint murmurer dans l’oreille de Garrett. Elle avait besoin de lui. C’était ridicule de sa part de faire comme si ce n’était pas le cas. Elle était en train de se rendre compte qu’elle avait eu besoin de lui dès le début. « Je n’ai que toi ici. » Elle n’avait plus d’amis, plus de parents, plus d’ennemis. Elle avait disparu du tableau comme on quitte l’adolescence. « Si je te dis que je reste à Arrowsic… tu veux bien rester avec moi ? Ce soir ? » Elle se mordit l’intérieur de sa joue par crainte de sa réponse. Elle avait vraiment envie qu’il reste. Elle avait besoin d’une présence avec elle dans cette chambre d’amie grise et oubliée. Elle avait besoin de sa présence.

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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptyDim 31 Juil - 5:34



Un silence s’était installé entre nous. Je ne savais pas vraiment comment l’interpréter. Louanne avait perdu son sourire, elle demeurait tout simplement allongée à mes côtés, le regard perdu dans le vide. Je cessai de la regarder, me sentant de trop dans son intimité, dans ses réflexions. Je regardai par la fenêtre la noirceur de la ville qui dormait dans les ténèbres. Le vent soufflait fort sur Arrowsic, je n’avais pas de difficulté à croire qu’un orage se préparait pour plus tard dans la nuit. Quelle heure était-il, d’ailleurs ? Je jetai un regard à ma montre, ne pensant même pas que Louanne pourrait interpréter ce geste autrement. Il était passé minuit. Le temps avait filé, entre la réparation des fusibles, nos danses nostalgiques et ce revirement inattendu dans la chambre à coucher. Je reposai ma main sur mon ventre, soupirant légèrement. J’avais sommeil, mes yeux commençaient d’ailleurs à se fermer par eux-mêmes. « Je n’ai que toi ici. » Entendis-je murmurer la jeune femme après qu’elle se soit hissée jusqu’à mon oreille. Le sentiment que je ressentis à ce moment-là fut indescriptible. Un méli-mélo de tant d’émotions. La peur. Le devoir. L’angoisse. L’inquiétude. La pression. La joie. J’étais flatté et apeuré à la fois de désormais posséder un si grand rôle dans sa vie. Il me semblait que nous étions en train de courir bien trop vite vers la même lumière. Ce que nous avions devenait bien trop sérieux, et ce même si nous ne savions toujours pas ce que nous partagions. L’amour, l’amitié, le désir. Trois relations bien distinctes. L’une me faisait beaucoup plus peur que les deux autres ; je vous laisse deviner. Je ne répondis pas. « Si je te dis que je reste à Arrowsic… tu veux bien rester avec moi ? Ce soir ? » Je tournai la tête vers elle. Je ne savais pas quoi dire, je ne savais pas quoi penser. Je ne voulais pas la brusquer, je ne voulais pas la décevoir ni lui faire de peine. Mais je ne voulais pas lui faire de faux espoirs non plus. Je n’étais pas le grand romantique, malgré l’image que j’avais pu donner plus tôt. J’étais un lâche quand mon cœur s’en mêlait et s’emmêlait. L’amour m’effrayait, oui. Louanne m’effrayait. « Je … » Tout ce que j’allais dire aller lui faire du mal, alors aussi bien laisser les mots couler. « Louanne … j’adorerais rester avec toi … mais … je ne veux pas que tu te fasses d’idées … je veux dire … je … je n’en suis pas là dans ma vie … » Comprendrait-elle seulement de quoi je parlais ? Oui. Sûrement. Elle n’était pas stupide. Que disais-je.
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MessageSujet: Re: If ever there was someone to keep me at home   If ever there was someone to keep me at home EmptySam 27 Aoû - 0:51

Elle s’était exprimée sans y penser, spontanément, comme une enfant qui ne cache aucune pensée. Mais justement, peut-être aurait-elle mieux fait de réfléchir avant de parler plutôt que de se laisser submerger par ces émotions puériles que sont l’espoir et la confiance aveugle en la main qui la caresse. Portée par un élan de sincérité elle lui avoua sans autre cérémonie qu’il était la seule personne qui comptait pour elle ici. De ses amis d’enfance il était le seul survivant au jeu de la mémoire alors qu’elle l’en avait écarté dès qu’elle était partie. Comme les autres. Mais il venait de se réimposer à elle, lui et tout ce qu’il incarnait, tout ce qu’il incarnait en elle, tous les souvenirs qu’ils ramenaient à la lumière du jour. Dans l’obscurité de son passé il était une torche qui l’aiguillait vers ses moments de bonheur. Elle, qui en avait eu si peu depuis qu’elle était partie.

Louanne avait cru que les promesses qu’il lui avait faites auparavant, juste après avoir écouté Chet Baker, elle avait cru qu’il les pensait ; mais maintenant elle réalisait qu’il n’avait rien promis du tout. « Je … Louanne … j’adorerais rester avec toi … mais … je ne veux pas que tu te fasses d’idées … je veux dire … je … je n’en suis pas là dans ma vie … » Elle se mordit les lèvres pour empêcher une réaction sur son visage mais il aurait été impossible d’empêcher le voile de tristesse qui vint couvrir ses yeux. Elle n’était pas simplement déçue, elle était profondément triste. Pis encore, elle était coupable, une fois de plus, de son sens du jugement chaque fois plus inégal. Une erreur de plus à inscrire dans le bilan de ses décisions et maintenant, celle qu’elle avait fait de revenir à Arrowsic lui paraissait être bien mauvaise. Pourtant, elle n’avait pas d’autre choix. C’était rester à Boston et disparaître pour toujours, n’être plus rien d’autre que Louanne l’infirmière, sans racines, sans passé, ou tenter de se reconstruire et de se retrouver ici. Mais elle n’avait trouvé dans le Maine que des ruines (elle s’y était attendue). Pendant l’éclat d’une étreinte passionnée elle avait cru avoir trouvé autre chose ; ce n’était qu’un mirage, une projection de son esprit. Garrett n’avait probablement aucun intérêt à la revoir, elle. Sa vie allait bien.

L’infirmière prit une longue inspiration et se tourna pour être sur le dos. Elle tira le drap sur son corps nu, elle se sentait soudain pudique. « Oui. Bien sûr. Je comprends. » fit-elle avec autant de conviction qu’un automate. Elle garda son regard obstinément fixé au plafond. « C’était bien, merci. » Son ton seul le congédiait et il ne lui en fallut pas plus pour quitter la couche qu’ils venaient de partager. Malgré son odeur qui se dissipait, elle continua de fixer le plafonnier, jusqu’à ce que ses pas sonnent sourdement sur le tapis des escaliers, jusqu’à ce qu’elle entende la porte d’entrée s’ouvrir et se refermer. Là seulement elle s’autorisa à respirer, et alors que l’air froid s’engouffrait dans ses poumons oppressés, elle comprit qu’elle était seule, vraiment seule, et elle se mit à pleurer.
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