nom : jones Ҩ prénom : remy sally Ҩ âge : vingt-trois ans Ҩ origines britanniques Ҩ statut civil : célibataire Ҩ occupation : étudiante en droits Ҩ avatar : kristen stewart. Ҩ crédits : mariebd | tumblr.

Cher journal,

C’est ce temps de l’année que j’aime tant. Celui où le cirque revient en ville, celui où je vais de nouveau avoir la chance de voir Owen. Ce serait mentir que de dire que je ne suis pas excitée ou nerveuse de le revoir, puisque c’est le cas. Tout est plus simple avec Owen. Il est cette connaissance, cet ami qui me suit avec les années, sans que notre relation ne se complique par l’adolescence qui nous fait dire et faire n’importe quoi à longueur de journée. Owen, c’est mon ami le temps d’une semaine, quand le cirque passe en ville et que les heures se perdent entre les animaux dont je prends un plaisir fou à m’occuper en sa compagnie et les fous rires qui ne quittent jamais les conversations toutes aussi loufoques que plaisantes que l’on échange sans fin. J’aime ses moments particuliers et précieux depuis la première année que j’ai rencontré Owen. Je n’avais que huit ans à l’époque et tout le monde autour de moi savait pertinemment que le social n’avait jamais été mon point fort. Timide comme pas deux, silencieuse et discrète, il est assez troublant de s’imaginer que je puisse m’être fait un ami en ce jour ensoleillé au milieu du cirque, juste devant la cage aux lions, fascinée par le fait que de si gros animaux puisse être capturé, enfermé dans cette géante cage sans devenir complètement fous. Et pourtant. J’avais senti sa présence derrière moi, ses yeux me regarder alors que je n’arrivais pas à décrocher mon regard des lions. Je n’osais pas tourné la tête, pas plus que je n’osais ouvrir la bouche. Et comme s’il sentait mon malaise, il a fait les premiers pas. Je ne pourrais pas dire exactement ce qu’il a dit pour briser la glace, mais je me souviens de m’être retournée et d’avoir lu un sourire tellement sincère sur ses lèvres que je n’ai pas pu m’empêcher de me sentir automatiquement à l’aise avec lui, d’une manière qui m’était complètement non-familière. Avec les années, les choses sont restés les mêmes. Certes, chaque année, nos traits vieillissent, mais je sais qu’avec Owen, je peux rester cette gamine de huit ans sans aucun soucis et qu’à ses yeux, je ne suis pas Remy la fille timide qui passe tout son temps avec ses bouquins. Avec Owen, je suis plus vivante que jamais, presque drôle, énergique. Les affiches annonçant l’arrivée du cirque demain me font sourire chaque fois que je les croise et j’ai hâte de le revoir, hâte de savoir quelles genres d’aventures trépidantes lui sont arrivés cette année avec cette vie de fous qu’il mène au cirque. Pour quelques jours, j’ai l’intention de vivre à nouveau, pour seulement mieux pouvoir replonger dans les livres ensuite, je le sais d’avance. Mais je ne sais pas agir autrement, et c’est plus simple ainsi. Entre mon père qui n’a dieu que pour son entreprise et une mère inexistante, disparue depuis ma naissance, je trouve mon réconfort dans mes livres, ma meilleure amie qui attend apparemment toujours que la chenille que je suis se transforme en magnifique papillon sortant de son cocon - chose qui n’arrivera probablement jamais si vous voulez mon avis - et chez cet ami de quelques jours par année. Ouais, j’ai hâte. Vraiment hâte.

La route est longue et remplie de voitures, tellement pleine que ça m’en donne le tournis. Les mêmes affiches qui provoquent en moi une excitation normalement laisse seulement place à un vide cette fois-ci, comme si je n’étais pas en mesure de me retrouver face à face à Owen, face à cette simplicité et cette amitié qui avait un jour pris tant de place dans mon esprit et mon coeur, malgré les longs mois qui me séparaient toujours du jeune garçon. Cette année, tout est différent et j’arrive pas à jouer la fille drôle et énergique comme j’ai pu le faire autrefois, c’est comme si elle ne faisait plus partie de moi. Et pourtant, alors que la route s’allonge devant le cirque qui prend place exactement à la même place que les années précédentes, mon coeur se serre. Je sais qu’il est là, je peux même l’imaginer m’attendre à notre point de rencontre, devant la cage des lions, aussi impatient que je l’ai un jour été face à ces rencontres. Mais j’ai changé, trop pour pouvoir le retrouver. À côté de moi, je peux sentir le regard de ma meilleure amie de toujours sur moi alors que mes yeux à moi ne quitte pas les immenses chapiteaux qui me rappellent tant de souvenirs. « Tu devrais peut-être aller faire un tour Remy. » Elle sait que je ne peux pas et pourtant, elle semble entêtée à ne pas vouloir me comprendre. « J’ai rien à lui dire. » Même moi je n’y crois pas, mais je peux pas faire ça, pas cette année. Je repense à tout ce qui s’est passé depuis les derniers mois et je peux juste pas m’imaginer être la fille sans soucis, incapable de pouvoir prétendre l’être ne serait ce que l’instant de quelques heures en la compagnie d’Owen. Je revois encore cette lettre sortie de nulle part, m’annonçant la mort de cette mère que je n’ai pourtant jamais connu. L’image de mon père et moi aux funérailles d’une femme dont j’ai hérité le nom et la beauté, sans jamais connaître le moindre détail sur sa personnalité, sur ses manies, sur ce qui faisait d’elle la femme qu’elle avait un jour été, aimé de beaucoup si je me fie à la quantité de gens présents. J’étais sa fille, et pourtant, j’étais probablement celle qui l’a connaissait le moins, ne la connaissant pas du tout pour des raisons que personne n’a jamais osé me donner et que désormais, je ne connaîtrais jamais puisque la seule personne les sachant véritablement n’habite plus cette terre pour me les dire. Dans les derniers mois, je suis devenue encore plus solitaire que je ne l’avais jamais été, brisant ainsi tous les records de solitude existant, j’en suis persuadée. Seule ma meilleure amie me reste fidèle, pour des raisons que j’ignore d’ailleurs vu l’attitude que je lui offre depuis trop longtemps. Je sais qu’elle essaye fort de retrouver la douce Remy que je fus un jour avant tout ça, celle qui vivait bien avec l’absence de sa mère et le travail trop imposant de son père, mais on dirait que tout a changé et que dans le tourbillon, j’ai pas pu être une exception à la règle. Sauf qu’on dirait que mon changement est incomplet, en attente et qu’en attendant, les seuls trucs que je puisse faire, c’est travailler fort dans mes livres pour me changer les idées et maudire la vie avec ma meilleure amie qui me supporte plus qu’elle ne le devrait. « Tu pourrais au moins lui donner ton numéro ou j’sais pas. » Non, je pouvais pas. C’était une règle que l’on s’était donné, de ne jamais garder contact hors du cirque, pour ne pas gâcher tout ce qui s’y passait. C’était tellement plus simple ainsi et dans ma vie actuelle, je n’avais pas de place pour la simplicité. Elle était de trop, comme un concept que je ne comprenais plus, qui ne faisait aucun sens à mes yeux de jeune femme perdue dans ce monde et bien trop compliquée. Je me contente d’hocher la tête. C’est une conversation qu’elle et moi avons eu bien trop souvent dans les derniers jours et je n’ai plus envie d’y penser. Alors j’appuie sur l’accélérateur et oublie les moments et les souvenirs que contient ce cirque et j’avance vers le vide de cette longue route. Car désormais, c’est tout ce qu’il me reste véritablement..

« Arrowsic, vraiment? » Entre deux bouchées de ses céréales préférés, je peux lire la surprise sur le visage de mon père alors que je lui montre cette offre de stage qui m’a été offerte dans cette ville qui semble si loin de mon quotidien routinier. Une expérience que je ne croyais jamais vivre, une aventure à laquelle je ne m’étais jamais véritablement permise de rêver vu les moyens financiers toujours restreints de mon père. Je savais que l’université était une option pour moi seulement parce que j’avais droit à une tonne de prêts et bourses grâce à mes notes et tout l’effort que j’y avais mis au cours du lycée. Cette opportunité toutefois, je ne l’avais pas vu venir, je ne l’avais jamais imaginé comme quelque chose faisant partie de cette magique bourse qui me permettrait un jour d’exercer pleinement mon travail d’avocate, suite à ces études en droits pour lesquelles je travaillais depuis déjà quatre longues années. Mon coeur bat à la chamade à l’idée de sortir de mon Angleterre chérie, mais une Angleterre que j’endure plus que je ne profite depuis quelques années déjà. J’ai peur, je suis terrorisée même, mais une partie de moi sait parfaitement que cette chance est exactement ce dont j’ai besoin en ce moment dans ma vie. « Ouais, il m’offre ce stage tout inclus, la chance d’une vie quoi. Tu crois que tu pourrais t’en sortir sans moi? » Je n’avais jamais véritablement été proche de mon père, notre relation se basant majoritairement sur les quelques repas ici et là partagés ensemble. Jamais de véritable discussion sur les décisions de vie, jamais de leçons sur quoique ce soit puisque d’une manière ou d’une autre, j’étais une fille bien trop sage pour qu’il puisse me reprocher quoique ce soit. Aucune confiance, aucune confidence, que les banalités de la vie. La seule chose qui nous unis lui et moi est le fait que je suis sa fille et qu’il est mon père et que véritablement, nous n’avons personne d’autre dans ce monde. Certes il a son commerce et j’ai mes études, mais nous sommes la seule famille que l’autre possède et malgré le fait que l’on ne se soit jamais senti près l’un de l’autre, je sais que partir loin de lui va créer un trou dans mon coeur, un trou dans ma vie déjà presque entièrement vide. Sauf que je sais que Arrowic, c’est ma chance de repartir à nouveau, de la remplir de quelque chose que je n’ai jamais connu auparavant. « Tu promets de m’appeler une fois de temps en temps? » Sa question me surprend et sur le coup, je ne sais pas quoi répondre. J’échappe un rire nerveux alors qu’une tentative de sourire se forme sur les lèvres de mon paternel. Qui aurait cru que mon départ créerait cette espèce de lien entre lui et moi? Ou peut-être avait-il toujours été là et que j’étais tout simplement trop aveugle pour m’en rendre compte? Peu importe, je me lève de ma chaise et m’approche de lui, passant mes bras autour de son cou d’une manière qui ne me ressemblait pas et pourtant à l’instant, ça semblait être exactement la chose parfaite à faire. Je sens ses bras me rapprocher contre lui et je pose ma tête au creux de son épaule avant de murmurer à son oreille « Aussi souvent que possible, je te le promets papa. » Le silence reprend place entre nous deux, de manière confortable, nous laissant profiter de ce moment inégalé entre un père et une fille qui n’ont jamais pris la peine de se connaître. Mais peut-être que les kilomètres qui nous sépareront bientôt seront l’obstacle qui nous forcera à le faire finalement, une bonne fois pour toute..