On s'est connus, on s'est reconnus... ♣ JEANNE MOREAU
ft. MARLA &&. SUTTON-ROONEY
2012, Jack's Lounge.

Et de un. De deux. Le troisième. Un quatrième. Le numéro cinq. Six. Le sept. Et de huit. Et le neuvième... qui avait l'air de très mal passer. C'était l'anniversaire de l'un de ses amis, et tous s'étaient retrouvés au Jack's Lounge pour fêter ça. Vingt-et-un ans pour son ami, et Sutton avait fait l'un des paris les plus stupides dans lequel elle ne s'était jamais entrainé. Ou presque. Quelques jours plus tôt, elle avait dit à son ami que si il arrivait à se libérer du travail le soir de son anniversaire -il bossait de nuit-, elle entamerait la soirée en buvant autant de teq' paf que de chiffres qu'il avait au compteur. Vingt-et-un shots, enchainés. Avant même de toucher au premier verre, elle regrettait déjà d'avoir prononcé ces mots. Mais un pari est un pari, elle les honore toujours. Elle commença donc à les boire les uns après les autres, avec juste le temps d'inspirer un coup entre chaque verre. Malheureusement, son foie n'était vraiment pas d'accord avec elle ce soir là. Il semblait vouloir rester tranquille, qu'on lui foute la paix. « Putain de bordel de cul. » lança une Sutton dépitée, main devant la bouche, avant de commencer à courir. Courir comme une dératée jusqu'aux toilettes. Toilettes hommes, toilettes femmes, peu importe. Elle voulait juste se retrouver la tête au dessus de la cuvette.
Dans sa course, elle percuta de plein fouet une jeune femme, qui attendait tranquillement son tour pour commander au comptoir. La fille en question se retourna, intriguée, Sutton crut la reconnaître, mais elle n'avait pas le temps pour ça. Son foie la quémandait. Elle continua donc sa course, en marmonnant un désolé à l'adresse de la rousse. Elle arriva enfin à bon port, et passons les détails gênants, elle en ressortie soulagée et fraîche comme un gardon. Elle chercha du regard la rousse qu'elle avait percuté peu de temps auparavant, elle la connaissait, elle en était sûre. Ces cheveux, ce regard et ce visage, d'une grande beauté, ne pouvaient la tromper. Sa beauté était originale, on la croisait une seule fois dans une vie. Sue était donc persuadée qu'elle n'avait pas divagué. Elle la chercha, en vain, et retourna donc s'asseoir avec ses amis.
Ils ne manquèrent point de se moquer d'elle sur les derniers évènements, lui lançant des piques et rigolant à foison. Ça ne la dérangeait pas, au contraire, ça l'amusait aussi « Punaise ouais. Ce pari était stupide. Et irréalisable après une toute première journée de boulot. Je m'incline Brent. J'te dois dix dollars, t'es le meilleur ! ». Ils rirent, burent, s'amusèrent, et Sue en oublia complètement la jeune femme qui l'intriguait tant.
Jusqu'à ce qu'un peu plus tard dans la soirée, une jeune femme se présenta à leur table en souriant. Elle souhaita un joyeux anniversaire à l'ami de Sutton, qu'elle devait apparemment connaître également. La jeune femme n'y fit pas vraiment attention, elle avait déjà bien picolé et ses yeux n'étaient plus vraiment en face des trous. Néanmoins, elle réagit lorsque l'invitée surprise prononça son prénom, apparemment surprise. Sue posa le regard sur elle, écarquilla les yeux et se leva en se jetant dans ses bras, la serrant de toutes ses forces. « Oh mon dieu ! Marla, quelle surprise !! Mais qu'est-ce que tu fous ici ? T'es perdue dans ce petit village ? Bordel, ce que ça fait plaisir de te voir là ma belle ! » lança-t-elle en se détachant de l'étreinte, sourire jusqu'aux oreilles et yeux pétillants.

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On s'est connus, on s'est reconnus... JEANNE MOREAU
ft. MARLA &&. SUTTON-ROONEY
2012, Jack's Lounge.

Croiser Marla à Arrowsic la ramenait loin dans ses souvenirs. Des années auparavant, lors de leur rencontre. New York City était en effervescence, le défilé printemps-été de cette année là allait être dévoilé aux yeux du monde. Sutton, elle, avait été trainée ici par son oncle. Prétextant qu'elle serait mieux là bas, à s'habituer aux soirées mondaines, plutôt qu'à fumer des joints seule dans sa chambre. Elle avait hurlé, ralé, et avait fini par céder. C'était son premier défilé de mode, et elle était bien plus intéressée par ce que le buffet proposait que par ces anorexiques se pavanant sur scène. La soirée était donc très mal partie, Sutton ne se sentant pas à sa place dans ce monde d'argent et de paillettes, c'est pourquoi elle passa une grande partie de celle-ci sur la terrasse, à enchainer les joints et ses écouteurs sur les oreilles. Malgré tout, lorsqu'elle rentra chez elle ce soir-là, elle était heureuse d'avoir suivi son tuteur. Une rencontre avait tout changé. Elle avait l'esprit ouvert, mais ne se voyait pas côtoyer un de ces mannequins sans cervelle avant de faire la rencontre de Marla. Elle était contente de penser autrement, d'avoir bien rigolé, discuté et bu, avec la jeune rousse. Elle avait fait le tour du monde, et étant un des grands rêves de Sue, elle avait pu lui poser tout un tas de questions.
Mais c'est une autre histoire. Détachée de l'étreinte, elle pu plonger son regard dans celui de son interlocutrice. Elle pétillait de joie de voir son amie si loin de New York, elle avait l'air de n'avoir pas changé. Souriant, elle répondit donc sur un ton amusé à sa question. « J'avais envie de voir du pays. On m'a toujours dit que les pubs du trouducul du monde étaient glauques... je voulais voir ça de mes propres yeux ! » lança-t-elle suivi d'un petit rire. Elle était bien trop éméchée pour parler des vraies raisons de sa venue à Arrowsic. Elle ne pourrait pas aligner ses pensées ; et puis, elle ne voulait pas y repenser. C'était du passé. Sentant la jeune fille un peu pressée, elle se rappela son ami, celui dont la rousse ne se séparait jamais. Il était dur de la voir sans lui, même le temps d'un café. Ce fut donc, encore une fois, avec un sourire jusqu'aux oreilles et en scrutant la salle qu'elle entama une question. Mais elle n'imaginait pas qu'en se lancant à prononcer ces quelques mots: « Han, et Andrew il est là ? Ça fait un bail que je l'ai pas vu ce zigoto ! », elle effacerait la bonne humeur du visage de son amie. Malgré l'alcool, elle se rendit compte de la bourde, et enchaina sans tarder. Elle était nulle pour réconforter les gens... surtout lorsqu'elle était complètement saoule. Et pourtant, en étant une experte de la bourde, elle aurait pu s'améliorer. Mais non, c'était pas pour elle, le réconfort. « T'as le temps de boire un verre ma belle ou tu es pressée ? » demanda-t-elle, en espérant que malgré son air pressé, Marla aurait un peu de temps à lui accorder. Pour discuter, rire et s'amuser, comme chaque fois.

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