« Arrête. Tu me fais mal. Arrête. Lâche-moi. Arrête. Au secours. Arrête. »
Des cris. Des pleurs. Des chuchotements. Plus rien. L’habitude. Pour moi, tout ceci était devenu une malheureuse routine. Cela faisait presque trois ans que je souffrais à ce point, sans pouvoir échapper à tout ça. Comment faire lorsque la personne que l’on aime le plus au monde jusqu’à l’univers est aussi celle que nous fais le plus souffrir ? Comment faire lorsque tous les soirs après les cours, on craint de rentrer chez soit, de peur de se retrouver avec cette même personne ? Mais qu’en même temps, on n’arrive pas à imaginer sa vie sans elle ? Comment faire lorsqu’on sait que tout ça ne se termina jamais, sauf si on en a la motivation ? Comment faire pour avoir cette motivation ? Comment faire lorsque son fiancé à qui on aurait tout donné nous bats ? Je n’ai jamais réellement trouver de réponse à ces questions.

« Zara, je… je crois que… Tu sais, on se connaît depuis un bout de temps maintenant et… Tu me plaîs vraiment... » C’était le jour de l’anniversaire de mes dix-huit ans, et franchement, je n’aurais pas pû avoir un plus beau cadeau. Ce garçon, Joshua, est dans ma classe depuis la seconde, on est d’ailleurs devenus de bons amis, mais depuis quelques temps, je me suis rendu compte que je désirais être plus qu’une sauf. Sauf qu’à cause de ma stupide timidité, je n’ai jamais osé le lui dire. C’est le moment, ma grande, ne rate pas ta chance ! « C’est vrai ? Je veux dire… Tu ne me fais pas l’une de tes blagues ? » Ou comment tout foirer en une phrase et demi. « Je n’aurais jamais dû dire ça. Tu ne ressens apparemment pas la même chose pour moi. Oublie » Et merde. « Attend ! Joshua, attend. Je… C’est juste que… Tu me plaîs aussi et… Je ne pensais pas que c’était réciproque… » Sans plus attendre, il m’embrasse. Vous savez ? Comme dans les films pour ados.

« Jonatan ? Qui est Jonatan ? Tu me trompe, traînée. » Autant le dire tout de suite, je ne m’attendais pas à ça. Nous étions tous chez Suzanna, une amie, afin de passer une après-midi entre amis. Sauf que Joshua venait de tout gâcher en me criant dessus et en m’insultant. Sérieusement, j’ai beau être amoureuse de lui, je ne vois ce qui lui donne le droit de me parler de la sorte. Ce fut la première fois. « C’est mon cousin. Celui qui doit arriver la semaine prochaine, tu sais ? Et ne m’insulte pas. » Je me souviens de ce moment comme si c’était hier. Je lui avais répondu le plus calmement possible, même si à l’intérieur, j’avais envie de pleurer. Etant très sensible, les larmes se mettaient souvent à couler seules lorsqu’on me disait un mot plus haut que l’autre. « C’est ça, ouais. Ton cousin ? Tu me prends pour un abruti ou quoi ?! » Mais qu’est-ce qui lui prends ? Je sais qu’il est jaloux, mais je pense qu’il y a des limites. Il n’a pas besoin de s’énerver autant, en sachant très bien qu’il a tord. Je l’ai prévenu de la venue de mon cousin qui allait d’ailleurs loger dans notre appartement. « N’importe quoi. Arrête tes conneries. » Il se rapproche de moi, l’air énervé et me chuchote à l’oreille : « Ne me parle plus jamais comme ça. On y va. » Quoi ? Qu’est-ce qu’il me raconte là ? On va où ? Je le regarde, assez perplexe. « J’ai dis : On y va. Bouge-toi. Je te laisse deux minutes pour dire au revoir à tout le monde. Je t’attends dans la voiture. » OMFG. J’ai honte, tellement honte. Il ne m’a jamais fais une crise aussi ridicule. Les autres me regardent, choqués. Ils ne connaissaient pas Joshua avant aujourd’hui, et voila l’impression qu’il leur a faîte. Honte. « Zara, qu’est-ce que tu fais avec ce mec ? Il est asociable, et t’as vu la crise qu’il vient de faire ? Et comment il te parles ? » Les remarques de mon amie de ne me plaisaient pas du tout. Certes, il vient de faire une crise ridicule et il m’a parlé comme à un chien, mais d’habitude, il n’est pas comme ça. Elle n’a pas le droit de le juger, elle ne le connait pas comme moi je le connais. Je leur fais un rapide au revoir quand j’entend le klaxon de la voiture de mon copain. Le début de la fin.

« Zara ! Ouvre-moi, s’il te plaît… Je suis désolé. » Je m’interdis mentalement d’ouvrir cette porte. Je n’ai jamais autant mal physiquement et moralement. J’ai mal à la tête, j’ai bleus un peu partout sur les bras et du sang coule de ma lèvre inférieure. « Tu dis ça à chaque fois. » Plus les secondes passent et plus les larmes coulent sur mes joues. Je tremble, j’ai froid. J’ai peur. [color=#00984b]« Je te promet, Zara, je te promet que ça ne se reproduira plus. » Foutaises ! « Ca aussi, je l’ai souvent entendu. » Et ce n’était pas faux. A chaque fois. A chaque fois qu’il lève la main sur main, il s’excuse en promettant qu’il ne recommencera plus. Et à chaque fois je lui donne une « seconde chance ». « Zara… Ouvre la porte s’il te plaît. J’aimerais te parler en face. » Franchement, j’hésite à ouvrir la porte. Que pouvait-il me faire encore, après tout ? J’étais déjà défigurée, non ? Et puis, il a l’air de s’être calmé. Peut-être qu’il est sincère après tout. Je m’avance vers la porte et m’apprête à l’ouvrir lorsqu’il éclate : « Ouvre cette fucking porte, merde ! Tu crois que je vais attendre longtemps ici ? J’ai été bien gentil jusque là, mais je vais pas passer ma journée à te supplier, alors ouvre cette fucking porte ! C’est un ordre. » Je me ravise. Il ne changera jamais. Je me recule jusqu’au lit et je me vois la porte littéralement éclater en morceaux. J’y crois pas ! Il a défoncé la porte. Il est fou. J’ai peur. Il aggripe mon bras tellement fort que j’en pleure encore plus. « LACHE MOI ! TU ME FAIS MAL ! » Je me débat pour qu’il me lâche, mais je n’arrive à rien : il ne bouge pas d’un millimètre. « Ta gueule ! Tu fais ton intéressante, quelqu’un doit te faire comprendre que tu dois te calmer. » Aïe ! « Moi ?! C’est moi qui dois me calmer ?! Espèce de taré ! LACHE MOI ! » Il me tiens encore plus, comme si c’était possible, et cette fois si, il attrape aussi mon autre bras. « J’ai dis : Ta gueule ! » J’ai l’impression qu’il va me les arracher. « LACHE MOI ! » Il me secoue comme un prunier et je lui crache au visage. « FUCKING BITCH ! » Il lâche mes bras et je m’attend à ce qu’il me gifle, comme d’habitude. Mais non, il met ses deux mains autour de mon cou. Il sert de plus en plus en continuant à me secouer. L’air va commencer à manquer. J’essaye de le griffer au visage et du peu que je vois derrière mes larmes, j’y arrive. Il me secoue encore plus et me pousse. « Conasse. » Je tombe et j’ai l’impression que c’est la fin. Il me crache dessus, et s’en va, sans demander son reste. Qu’est-ce que j’ai fais pour mériter ça ? Il faut que je méchappe, j’ai assez souffert, ça suffit. Au bout de quelques longues minutes, je reprends quelque peu mes esprits et je m’assois contre le lit. Je repense à tout ce que j’ai perdu à cause de lui. Mes amis. Il ne les aimait pas, et m’a demandé de choisir. Par amour, je l’ai suivi à l’autre bout de la ville d’Atlanta. Ma famille. Eux, avaient conscience de ma souffrance, mais je m’étais voilée la face. Mon amour pour Joshua était trop fort pour que je choissise de rester près de ma famille. Plus conne que moi, ça n’existe pas.

« Bonjour, je m’appelle Zara Keenan et j’ai vu votre annonce sur internet. Est-ce que votre appartement dans le centre ville d’Arrowsic est encore libre ? » Je croise les doigts, même si elle ne peut pas me voir. Ma situation est urgente. En effet, je vis dans un hôtel miteux dans les environs de Philadelphie. J’ai réussi à m’enfuir d’Atlanta mais je vis dans la crainte d’être retrouvée par Joshua. Je sais que dans une petite ville comme Arrowsic, il n’aura pas l’idée de venir. « Bien sur et aucune offre n’a été faîte. Si vous pouvez payer le loyer et qu’il n’y a aucun problème avec la banque et dans votre dossier, vous pourriez emménager dans environ deux mois. » Deux mois ? C’est trop long. Je n’ai pas assez d’argent pour tenir deux mois dans cet hôtel, certes miteux, mais horriblement cher. « Oh. Deux mois ? Je… C’est trop long. Je… Je suis désolée de vous avoir dérangée… » Comment je vais faire ? Où je vais pouvoir aller ? Je ne roule pas sur l’or et je sens que je ne vais pas tenir longtemps dans cette situation. Je termine poliment cette conversation avec cette bonne femme, et à partir du cyber-café d’où je suis, je cherche une autre solution sur internet. Et si je cherchais de la collocation ? « Bonjour, je m’appelle Zara Keenan et j’ai vu votre annonce sur internet. Je me demandais si votre offre de collocation est toujours d’actualité et à combien s’élèverai le loyer ? » Encore une fois, je croise les doigts. Si seulement je pouvais être acceptée comme colocataire, ma chance commencerait enfin à tourner. Peut-être pourrais-je enfin changer de vie ? « A vrai dire, il n’y a pas de loyer à payer. J’ai seulement besoin de compagnie. Par contre, il faudrait que l’on prenne rendez-vous afin de voir si on s’entend. » OMFG. J’y crois pas, c’est une super bonne nouvelle ! « Je… Wouaw ? C’est vrai, pas de loyer ? Je… Wouaw. » J’entend la jeune femme rire doucement à l’autre bout du fil, mais je continue, sans me démonter : « Pour le rendez-vous… Dans deux jours, c’est possible ? Disons que je ne suis pas en ville actuellement. » Je recroise mes doigts, tellement fort qu’ils pourraient devenir bleus. « Pas de problème. A dans deux jours Zara. »

« PHOENIX ! T’es où ? » Ma colocataire, qui était maintenant ma meilleure amie m’interpellait dans tout l’appartement (elle est la seule à m’appeler Phoenix). Je suis certaine qu’elle va me dire qu’elle sort et qu’elle va voir son copain, on parie ? « Dans la cuisine. Tu vas où ? » Elle arrive rapidement et à son sourire, je sais que j’ai raison. « Je vais au cinéma avec Kévin*, tu veux venir ? » Un peu plus et je me serais mise à faire la danse de la joie, juste parce que j’ai raison. « Non. Je ne veux pas tenir la chandelle. Mais merci d’avoir proposé, c’est gentil. » Elle roule des yeux et s’appuie sur le table face à moi. Je sais déjà ce qu’elle va me dire, je la connais comme si je l’avais faîte. « Mais Phoenix ! Tu ne sors presque jamais. Juste pour chercher du travail, et encore ! La plupart du temps, tu le fais sur internet. Fais-toi des amis, je sais pas moi. Rencontre des gens ! Un garçon dans ta vie, par exemple, ça ne te ferais pas de mal. » Kahina a beau être ma meilleure amie depuis bien longtemps, elle n’est pas au courant de beaucoup de choses dans ma vie. Elle doit bien se douter qu’il s’est passé quelque chose d’assez grave, mais je ne lui ai jamais rien dis. Je n’y arrive pas. J’ai honte. « Va retrouver Kévin. Il va t’attendre. » Dis-je en baissant les yeux. Ce qu’elle ne sait pas, c’est que j’ai rencontré un garçon. Il me plaît énormément. Autant que Joshua me plaisait. Mais je n’ai pas assez confiance pour le revoir et ne serait-ce que penser avoir une histoire avec lui.

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