And then I go and spoil it on by sayin something stupid like I love you. À l'aide de mon casque adapté à ma surdité, je me laisse porter par l'un de mes morceaux préférés. Je me roule dans mon lit et je chantonne sans me soucier d'être entendue. Je suis bien. Je me sens libre, enfin presque. Je fixe l'anneau posé sur ma commode. L'anneau qui représente ma petite entrave à la liberté. J'aurais pu être honnête, j'aurais pu dire non, j'aurais pu faire face à la réalité et lui dire que je n'étais pas prête, que j'étais trop jeune pour me marier. Mais fuir est bien plus facile. Fuir est la solution que j'ai toujours choisi. Mon téléphone vibre. C'est lui, encore. J'ignore les coups de fil. Ma boîte vocale est saturée. J'espère qu'il ne me retrouvera pas, même si en réalité je suis sûre qu'il n'en aura aucun mal. Il sait que ma mère est Arrowsic, que c'est là-bas que je vivais avant. Mon retour ici était logique. J'espère juste laisser passer le plus de temps possible avant qu'il ne revienne. Que dire ? Que faire ? Je n'en sais rien.

J'arrête la musique et je range mon mp3 dans un tiroire. J'ai envie de voir ce que fait mon frère. Oui, mon frère. Désormais je peux réellement l'appeler comme ça. Enfin des frères, j'en ai deux. Les jumeaux, mes adorables jumeaux. Mais là, j'ai envie d'aller voir Naomhàn parce que c'est avec lui que j'ai la plus grande complicité, c'est avec lui que j'ai partagé le plus de choses. Je me lève de mon lit et je fais quelques mètres pour atteindre la chambre d'à côté. La porte est fermée. J'hésite à toquer. Je ne veux pas le déranger. Je ne veux pas faire irruption alors qu'il serait occupé. Mais bon, tant pis, il me connait après tout. Je suis du genre à faire ce que je veux, quand je veux. Petite starlette gâtée, des fois c'est de ça qu'il me traite. J'ouvre la porte si brusquement que je le vois sursauter dans son lit. Il est allongé, en caleçon, en train de faire je ne sais quoi sur son téléphone. J'affiche un énorme sourire et je saute sur son lit, comme une gamine. «Naooooooo !» Il semble légèrement surpris de me voir, mais je sais qu'au fond ça lui fait plaisir. «J'm'ennuyais et j'me suis dit que j'allais enfin t'avouer ce qui m'a fait rentrer à Arrowsic...» dis-je d'un ton légèrement plus sérieux.

Oui, parce qu'il me l'avait demandé. Et plusieurs fois. J'avais décidé de rester plutôt secrète parce qu'au fond j'avais un peu honte. Naomhàn connait ce fameux médecin qui fut mon amant. Et j'avais trop peur qu'il en parle à Patrick. Du coup, je m'étais tus. Mais je ne peux plus cacher tout celà à mon frère. Il fait partie de moi, depuis toujours. Et puis, ce secret est trop lourd, trop lourd pour que je ne m'en libère pas.

Spoiler:

Étendu sur le dos, je ne pouvais m’empêcher de penser à tout et à rien, c’était comme si notre vie ici c’était transformée. Maman, ce que maman me manque parfois, et même si la mère de Jona semble plutôt bien nous accueillir avec mon frère, elle ne sera jamais celle qui nous a mis au monde, pourtant, on lui doit quand même beaucoup. Elle nous accueillait chez elle, malgré sa maladie, elle nous nourrissait nous achetaient des vêtements pour nous faire plaisir, et notre père était là pour nous aussi, mais ma mère me manquait, elle qui nous avait appris à parler bulgare qui nous rendait fier de nos origines. Je regardais mon téléphone, admirant les photos que j’y avais importé, mon frère, ma sœur, mes amis, Silhas et pour ne pas m’évader trop longtemps sur mon magnifique voisin je décidais de jouer à un jeu stupide, toujours étendu sur mon lit.

Mais c’était sans compter ma demi-sœur, mais ma sœur avant tout, pour moi demi n’était qu’une mesure et pour moi Jona était ma sœur quoi qu’il advienne, peu importe qu’elle soit née d’une mère différente. Bref, c’était sans compter ma sœur, Jona, qui vint perturber cet parfait petit moment de solitude, en entrant dans ma chambre, sautant sur mon lit, tout en ne manquant pas de me faire lâcher mon téléphone par terre, et venir, comme une gamine, pour venir me parler. Mais le sujet avait l’air sérieux: son retour à Arrowsic. Je fronçais les sourcils avant de m’installer correctement afin que nous puissions discuter. « Je t’écoute Jo’, tu sais que je t’écouterais toujours » Nous étions frère et sœur et même s’il y avait eu des moments où je n’avais pas été très poli et correct avec elle, notamment lorsqu’elle avait découvert mon homosexualité –même si ça c’était arrangé depuis –, je ne lui ferais jamais faux bon. Ma presque nudité ne me dérangeait absolument pas et pour détendre l’atmosphère afin qu’elle puisse mieux se confier je décidais même d’en rire. « Et au cas où tu aurais les idées mal placées, je n’allais rien faire de "cochon" lorsque tu as débarqué… Il fait juste putain de chaud dans cette baraque. » Je riais de bon cœur avant de hausser un sourcil. « Alors Jo’, dis-moi, pourquoi t’es revenue ici. Même si t’étais vachement capricieuse, on était bien avec toi.. » C'était vrai qu'elle avait été plutôt difficile à vivre, surtout pendant un moment, mais c'était ma soeur et je devais avouer qu'elle m'avait énormément manquer

Spoiler:

Je m'apprête à faire une révélation importante à mon frère. J'en ai un peu la boule au ventre. Je n'ai aucune idée de comment il va réagir. Et j'ai peur qu'il me juge. J'ai peur qu'il prenne mal les choses et que notre relation en prenne un coup. Mais je préfère ça plutôt que de mentir, plutôt que de cacher des choses. J'ai déjà trop vécu avec des secrets et ça m'a rongé. « Je t’écoute Jo’, tu sais que je t’écouterais toujours » Ça, déjà, ça me met en confiance et il le sait. Naomhàn me connait, après toutes ces années. Il sait comment je fonctionne, il sait comment m'apaiser. Je lui souris et il ajoute sur le ton de la rigolade : « Et au cas où tu aurais les idées mal placées, je n’allais rien faire de "cochon" lorsque tu as débarqué… Il fait juste putain de chaud dans cette baraque. » Je ris. Ce n'est pas ce que j'ai pensé, même si c'est amusant qu'il le fasse remarquer. C'est vrai, il fait chaud. Le printemps est déjà bien amorcé et l'été nous guette. Je suis moi même en débardeur et en short étant donné que la villa capte particulièrement bien la chaleur. « T'inquiètes fréro ! » dis-je tendrement.

« Alors Jo’, dis-moi, pourquoi t’es revenue ici. Même si t’étais vachement capricieuse, on était bien avec toi.. » Je sais qu'ils aimaient tous beaucoup le Texas et d'ailleurs je ne sais pas comment leur dire à quel point je suis reconnaissante qu'ils m'aient suivi ici. Ça me touche beaucoup. Nous formons vraiment une famille maintenant. Nous sommes tous ensemble. « Tu te souviens du Docteur Boerjborg ? » Je commence par demander. Commme je ne sais pas comment aborder les choses, je préfère aller plutôt droit au but. Il fait oui de la tête. « Et bien, il y a eu des rumeurs comme quoi il avait quitté sa femme pour une petite jeunette, je sais pas si tu en as entendu parlé. » Je sens qu'il voit où je veux en venir puisque je peux voir son sourire s'effacer lentement et l'expression du choc naître sur son visage. « Et bien... C'était moi. » À nouveau, je repense au mal que j'avais du faire, à la famille que j'ai brisé. Ça me fait mal, tellement mal. C'est une torture d'y penser. Je ne peux m'empêcher de repenser à chaque fois à ma propre histoire. Je ne peux m'empêcher de revoir défiler dans ma tête les images de Patrick dans le lit de ma mère avec une autre femme quand j'étais petite. Ça m'avait brisé le coeur. J'imagine bien à quel point j'ai du brisé le coeur de sa petite fille. Et de sa femme. Je m'en veux, tellement.

L'émotion me gagne et des larmes se ruent au bord de mes yeux. « Je voulais pas briser une famille, tu sais. Je savais pas au début... Je.. » J'ai honte et j'en perds mes mots. J'ai également peur, très peur de la réaction de mon frère. Là, tout de suite, j'ai juste besoin de lui. Juste besoin qu'il me prenne dans ses bras et me dise que c'est pas grave, que je n'ai rien fait de mal, même si c'est faux. Et puis, je sais que je dois continuer, même si c'est dur, mon récit n'est pas terminé... Le pire est à dire.