Sujet: llewyn ✧ drink good coffee, read good books Dim 15 Nov - 12:52
“drink good coffee, read good books”
Cela fait quelques jours que je suis revenu à Arrowsic. Beaucoup de choses ont changé. La ville semble morte, déserte. Les habitants reviennent peu à peu, mais beaucoup de choses sont à reconstruire. J’ai l’impression que cette ville me représente un peu. C’est un chantier qui ne demande qu’à être transformé. Je ne sais pas ce que j’attends. Je n’attends pas grand chose en fait. Alors du coup, j’essaie de m’occuper du mieux que je peux. J’ai acheté la maison près du lac, celle dont je rêvais d’avoir avec Lauren quand j’étais adolescent. C’était un rêve fou. Aujourd’hui, cette maison ne ressemble plus à la maison de mes rêves. Il y a beaucoup de choses à faire, beaucoup de problèmes à régler. Mais je vais tout faire pour que cette maison ressemble à celle que j’avais dans mes souvenirs. C’est mon objectif, pour le moment. Et quand j’aurais fini, il faudra que je trouve un autre objectif. Voilà à quoi ressemble ma vie aujourd’hui. Je jette un coup d’œil à ma montre. Il est déjà 16h04. Je n’ai pas vu le temps filer. Je pose la planche en bois que j’étais en train de découper, et je me dirige vers la douche pour me laver. Je n’ai pas encore d’eau chaude, et je dois avouer que prendre une douche est particulièrement difficile. Mais bon, je ne vais pas me plaindre. Au moins j’ai un toit, un foyer. C’est déjà beaucoup. Je vais ensuite dans ma chambre pour chercher une chemise, un pantalon et des baskets. Je prends ensuite les clés de la maison et ferme la porte avant de me diriger vers le centre-ville d’Arrowsic. Je n’ai pas suffisamment d’argent pour m’acheter une voiture décente pour le moment, alors je fais tout à pied, ou je prends le bus quand il y en a. Je fais aussi de l’auto-stop quand il le faut. Je me débrouille quoi. De toute façon, Arrowsic, ça n’est pas Chicago. Je peux me déplacer à pied, même si ça me prend un peu de temps. Et puis, c’est agréable de repasser aux endroits où je garde de très bons souvenirs. Bientôt, je sais que cette ville ne ressemblera plus du tout à l’image que j’ai. Il n’y a qu’à écouter le discours du nouveau maire. Il veut tout reconstruire, rendre la ville meilleure. Il veut construire des centres commerciaux, ce genre de choses futiles. Je ne supporte pas sa politique et sa vision de voir les choses, mais qui suis-je pour juger de tout cela ? Alors je me contente de ruminer dans mon coin, rester dans mon petit coin de paradis, bien ancré dans la nature. Je ne veux plus connaître le tumulte des grandes villes. J’ai déjà assez donné. Au bout d’une bonne trentaine de minutes, j’arrive finalement dans le centre-ville d’Arrowsic. Je croise quelques personnes sur mon chemin, mais aucun ne m’est familier. J’aperçois la librairie au loin et je me dirige vers elle. C’est l’un des seuls endroits d’Arrowsic qui n’est pas en train de changer complètement. La librairie est calme, et puis elle fait office de café également. Que demander de plus ? Comme d’habitude, le silence règne dans la pièce. Ça aussi, c’est agréable. Je parcours les rayons pendant quelques minutes, je lis quelques résumés, avant de m’attarder sur un livre en particulier. Je me décide finalement à le prendre. Il s’agit de Jane Eyre de Charlotte Bronte. Je me dirige vers la caisse pour payer le livre. C’est toujours le même libraire qui m’accueille. Il ne parle pas beaucoup. Il a l’air d’être discret. Une fois que j’ai payé, je lui demande : « Je peux avoir un café ? » Cet endroit est agréable et calme. C’est tout ce dont j’ai besoin en ce moment. Et puis je dois avouer que je n’ai pas très envie de me remettre à marcher dans les rues d’Arrowsic tout de suite.
DOUBLE-COMPTE : La schizophrénie ne nécessite pas plusieurs corps, mais une seule tête. MESSAGES : 424 ARRIVÉE : 10/11/2013 LOCALISATION : Au sommet du Squirrel Point Light, affrontant l'horizon.
Sujet: Re: llewyn ✧ drink good coffee, read good books Dim 15 Nov - 21:06
drink good coffee, read good books
aaron lawford — llewyn h. fitzgeral
Les plus belles choses se trouvent dans le détail. Dans ces toutes petites failles de nos journées, où l'instant devient tout. Je me souviens avoir compris ça très jeune, quand j'aidais ma mère dans le jardin. Qu'il fallait planter le citronnier de mon grand-père en son honneur et qu'un an plus tard, les fruits étaient au rendez-vous. Il faut du temps, de la patiente et de l'observation. Depuis ce qui est arrivé à Arrowsic, je m'amuse à « arranger » certaines choses. Bien avant que les habitants commencent enfin à revenir, je réparais et nettoyer quelques petits endroits dans l'espoir qu'un jour, la ville serait de nouveau ce qu'elle était. Je sais maintenant que c'est trop tard, qu'Arrowsic ne pourra plus jamais être comme avant. Je pouvais compter sur mes souvenirs pour m'accrocher au passé, mais il était évident que l'avenir ne ressemblait en rien à ce que j'avais connu. Qu'Arrowsic allait fleurir d'une façon plus belle encore et que la ville finirait par être aussi vivante que jamais. J'étais du coup aller nettoyer les bancs publics près des quais. Très tôt le matin, avec un saut et une éponge. J'imagine qu'il n'y avait que moi pour faire ce genre de choses, mais je n'étais pas du genre à me tourner les pouces à attendre que d'autres fassent quelque chose que je pouvais faire moi-même. De toute façon je doute que la ville dispose de tous les moyens nécessaires pour nettoyer la ville comme il le faut. Il y a encore tellement de choses à faire, tellement de choses à mettre en place. Cela me fait mal au cœur, ce silence, mais dès que je vois quelqu'un ou qu'il y a un peu de monde, je sais que tout ira bien.
La librairie est toujours ouverte. Quoi que je fasse. Comme je vis à l'étage du dessus, je dois forcément passer par l'intérieur avant d'atteindre ma douche – dont j'ai bien besoin. L'odeur des livres m'a toujours accueilli de manière grandiose, comme si l'air pouvait me parler et me dire que j'étais à ma place. Que j'étais chez moi. Je monte rapidement dans mon appartement pour poser mes affaires. Surtout pour enlever l'odeur pas très subtile qui doit me coller à la peau. Sans prendre le temps de m'habiller complètement, je profite qu'il soit 13h pour me faire rapidement un sandwich avant d'enfiler un tee-shirt et de descendre. Je gère la librairie seule cet après-midi. Je n'étais pas du genre à faire autre chose de toute façon, mon monde se trouvait ici. Alors que je mets la machine à café en marche, j'ouvre l'un de mes livres pour un dossier que je dois rendre à la fac. Je profitais souvent du calme pour avancer dans mes études. Je n'avais pas à assister au cours, mais j'avais beaucoup de choses à rendre. Crayon derrière l'oreille, surligneur entre les doigts, j'étais pleinement concentré sur l'une des parties les plus brutales des guerres de gangs new-yorkais. J'aperçois alors une ombre entrée, mais je continue de lire de toute façon. Je n'étais pas du genre à sauter sur tous ceux qui décidaient de venir voir mes livres – j'avais arrêté ça après avoir compris que c'était un peu effrayant pour certains.
Finalement, c'est Aaron qui se présente devant moi, un livre prêt à être payé et emballé. Je pose mon surligneur pour encaisser la vente avant de ranger le livre dans un petit sac en carton avec le nom de la boutique dessus. « - Bien sûr. » Je lui offre un sourire amical avant de me tourner vers la machine et de déverser le liquide dans une tasse bleue avec le logo de Superman dessus. Toutes mes tasses avaient des références de superhéros. Heureusement que je n'avais pas mon tee-shirt Capitaine America. Je sors d'un des tiroirs un petit spéculos emballé d'une marque dont j'ignore le nom et je tends le tout à Aaron. « - Tu as déjà lu Jane Eyre ? Où tu es curieux ? » Charlotte Brontë avait connu un succès incroyable avec ce premier roman. Je l'avais découvert avec Jane Eyre comme beaucoup d'autres. Je m'étais, pas la suite, renseigné sur elle et avais cherché à lire ce qu'elle avait écrit autre. J'avais été touché par certains de ces poèmes dont je comprenais tellement le sens et la profondeur.