Tonia Vladislava Hasbrough

« Fashion is a form of ugliness so intolerable that we have to alter it every six months. » Oscar Wilde

NOM(S): Hasbrough ❖ PRÉNOM(S): Tonia Vladislava ❖ AGE: 20 ans ❖ ORIGINE: américaine, lointaines racines de l’Europe de l’Est ❖ STATUT CIVIL: célibataire ❖ MÉTIER OU ÉTUDES: vogue de petit job en petit job ❖ GROUPE: filthy youth. ❖ AVATAR: Emily Didonato.

Donc moi c'est Laetitia, Vitamins/Vitsie sur les forums, 23 ans *bon dieu que je suis vieille*. Je suis belge, avouez que vous êtes jaloux. Je fais une fixation sur les vernis à ongles, dès que je passe dans un magasin où on en vend il m'en faut un. Je résiste depuis bien trop longtemps pour acheter le Rock coat de Dior. Je porte des RayBans "comme tout le monde a" et je m'en fous parce qu'avec ça, j'ai l'air d'être la frangine à Camelia Jordana. Je ne pensais pas parler autant de moi, et pourtant, me voilà à déballer ma vie. J'aime lire, je me damnerais pour un bon livre. Je déteste quand les groupes que j'aime bien deviennent connus et que quelqu'un d'autre les écoute. Non, je ne suis pas possessive du tout...
Oh et avant que j'oublie: vous voyez, je ne suis pas restée longtemps loin de vous, j'ai craqué beaucoup trop vite :) (J'étais Nicholas Palmer)

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Si je vous dis que ma vie n'est pas un conte de fées et ne le sera jamais, vous allez me rire au nez. Car à 20 ans, comment je pourrais savoir ça? Je ne suis qu'une gamine et je n'ai rien vécu, c'est ce que vous vous dites sûrement. Sauf qu'à 20 ans j'ai sans doute vu plus de choses que vous n'en verrez jamais, vous petit habitant insignifiant d'Arrowsic. Oui, parce que si je suis née ici, si je suis une enfant du pays, j'ai eu le malheur de rêver plus loin que le bout de mon nez. Et je me suis écrasée, applatie, humiliée. Je suis tombée du haut de mon trône de princesse. Car la vie, mes amis, c'est pas comme un Disney. Ici, pas de marraine dotée de pouvoirs magiques, pas de petites souris faiseuses de miracles, pas de prince charmant au bout des 90 minutes de pur rêve. Mais je n'ai encore que 20 ans et le prince arrivera peut-être sur son cheval blanc, l'épée au fourreau prêt à me défendre contre vents et marées. Malheureusement pour moi, j'ai arrêté de croire à ces bêtises.

Je suis née à Arrowsic. Mes parents sont de purs américains, fiers de leur nationalité et patriotes au possible. Ils aiment leur région, leur petite ville reculée de tout, leur maison et leur jardin. Ils aiment tout ici. Ils n'ont jamais rien vu d'autre. Et j'aurais pu finir comme eux si je n'avais pas eu un peu d'ambition, forcément un peu trop, quand on voit où tout ça m'a menée. J'ai un frère, Pritchard, 23 ans, fier comme un gardon d'être un habitant d'Arrowsic, fan de baseball et inconditionnel des sorties en mer. C'est un beau gosse comme toutes les filles d'Arrowsic en rêvent. Et j'ai une soeur, Morgana, comme la fée de Merlin. En moins féérique. 28 ans, mariée, une paire de jumelles sous le bras en continu. Je suis sûre qu'elle regrette la ligne de ses vingt ans et ses soirées entre copines. Parce que maintenant, elle est devenue une gratte-papier à mi-temps, une maman à temps plein et une épouse aimante et aussi désespérée que la première Desperate Housewife venue. Elle fait semblant d'aimer sa vie, et au fond je crois qu'elle parvient à se mentir à elle-même. Moi, je suis la cadette, celle qu'on a couvée le plus longtemps possible et qu'on a tellement étouffé qu'elle n'a rêvé que de s'échapper.

A dix ans, j'étais un parfait petit ange, j'allais à la messe tous les dimanches et disait mes prières avant de me coucher. Je faisais la fierté de mes parents et j'aimais voir leur sourire fier lorsque j'obtenais une médaille à un concours de gymnastique. A douze ans, je volais la vedette à toutes les petites filles de mon cours de danse en obtenant le rôle de Colombine dans le spectacle de fin d'année. Dans mon tutu rose, avec mon chignon bien serré sur le haut du crâne et mon brin de rouge à lèvres pour faire "comme les grandes", j'étais une véritable enfant modèle. Je ne sais pas au juste quand tout cela a commencé à tourner au cauchemar pour moi. Ce que je sais, c'est qu'au lycée, je feuilletais les magazines de mode et que je rêvais d'être une de ces mannequins qui voyagent autour du monde, portent des fringues hors de prix et sont enviée de la moitié des femmes de la planète. Je rêvais d'une silhouette longiligne, de hauts talons et de catwalks. J'étais grande, mince, jolie et j'avais tout pour moi. J'avais des notes géniales en cours sans faire le moindre effort, je jouais du violon et continuais mes leçons de danse avec une assiduité qui m'étonnait parfois. Mais derrière tout cela, je rêvais de partir tenter ma chance à New York.

Je n’ai jamais bien compris pourquoi j’ai continué à jouer les petites filles modèles jusqu’au bout. Sans doute parce que j’avais un peu peur de mes parents, et que je savais aussi qu’ils ne comprendraient pas. Après tout, comment auraient-ils pu comprendre que leur adorable petite fille talentueuse et intelligente ait envie de faire des défilés tout autour du globe au lieu de faire des études ? D’ailleurs, avec le recul, je me demande où j’ai bien pu aller chercher un tel rêve. J’ai réussi mes SATs et je me suis arrangée pour me faire accepter à la fac de New York. Disons plutôt que je n’ai postulé que là, alors que j’aurais pu rentrer à Brown ou à Yale sans la moindre difficulté. J’ai fait croire à mes parents que j’avais envoyé des lettres dans d’autres universités, pour qu’ils pensent que j’avais de l’ambition. Je n’avais reçu qu’une lettre en retour : mon admission à la fac de New York. Mes parents n’avaient pas caché leur déception, mais je les avais rassurés en leur disant que c’était la plus belle chose qui ait pu m’arriver. Je rêvais de New York depuis si longtemps ! Et je leur vantai les mérites de professeurs tout droit sortis de mon imagination. Et quand vint le moment tant attendu de partir pour la Grosse Pomme, j’étais aux anges, je flottais sur mon petit nuage.

J’étais inscrite en commerce international. Inscription de façade, car je n’avais aucune envie de m’enterrer dans les auditoires et encore moins pour entendre parler d’économie à longueur de journées. Je séchais les cours perpétuellement et arpentais les rues de New York en espérant me faire repérer par un chasseur de têtes. A force de provoquer le destin, il finit par me tomber dessus totalement par hasard. Je contemplais une boutique de fringues vintage avec une camarade de classe tout aussi passionnée que moi par le cours de droit économique. On riait et on se prenait en photo comme deux ados que nous étions. Un gars s’est approché, carte de visite en main. Il me proposait un entretien. 2 mois plus tard, j’avais un contrat chez IMG et un bel avenir devant moi. J’ai tout envoyé valser pour ce métier dont je ne savais rien et pour un avenir dont j’ignorais tout. Inutile de dire que ma famille l’a très mal pris. Et comme l’ado que j’étais à l’époque, j’ai préféré m’imaginer en photo 5 mètres sur 4 sur la Cinquième Avenue que d’écouter les conseils de mes parents. Au revoir l’université, au revoir tout ce que j’avais construit pendant ces 18 dernières années. J’allais être mannequin et porter du Prada devant la planète entière. Et mes parents ? Je leur ai dit que jamais je ne reviendrais à Arrowsic et que je ne voulais plus jamais les voir, s’ils n’étaient pas fichus d’être heureux pour moi.

J’ai regretté ces mots. Mais pas tout de suite.

Deux semaines après avoir été signée par IMG, on me proposait un shooting pour un magazine de mode qui se lançait. Je ne coutais pas cher, ils avaient besoin de ce genre de mannequins. Contrairement à toute attente, le magazine a fait un tabac, et moi dans tous leurs éditos avec. 35 pages de mode avec uniquement moi, moi et moi. Vogue Italie m’a repérée. Et ce fut le début d’une longue série. A la fashion week de Paris, je défilais au côté des plus grandes et je mourrais de trouille et de plaisir en même temps. Les trajets en avion m’épuisaient, les fashion weeks étaient éprouvantes, mais de me voir dans les magazines que j’avais lus pendant toute mon adolescence était un plaisir qui effaçait tous les petits soucis. J’étais invitée dans de super fêtes, je côtoyais des photographes de renom et des couturiers voulaient me créer des robes. C’était le paradis sur terre et je n’aurais pas pu être plus comblée. J’étais loin de tout ce que j’avais pu imaginer, bien loin devant. C’était mes rêves, mais en mieux. J’étais sur un petit nuage. Je louais un petit appart dans Soho et j’avais des amis artistes. Et ma chambre au dortoir universitaire ? Abandonnée, comme mon cursus scolaire en commerce international. J’étais vraiment heureuse et je passais de petit ami en petit ami sans regarder derrière moi. La petite fille modèle d’Arrowsic n’était plus qu’un vague souvenir.

Les photographes m’aimaient bien, parce qu’avec mon physique de danseuse étoile, je faisais ce que je voulais. Et eux, ils prenaient leur pied à me faire faire le grand écart en legging Vuitton avec des Manolo Blahnik de 15 centimètres de haut. Les maquilleurs adoraient mes grands yeux bleus et mes lèvres de poupée Barbie. Les stylistes adoraient voir leurs fringues glisser sur mon corps sans forme. Qui aurait cru que mes trop nombreuses années de danse classique à Arrowsic auraient pu me servir ! Je sautais d’un avion à l’autre pour aller prendre la pose à l’autre bout du monde, sur des îles paradisiaques ou au milieu du désert de Mojave. Je n’avais pas le temps de me retourner, et cette existence speed me convenait parfaitement.

Jusqu’au jour où un photographe a brisé mes illusions.

Jusque là, j’étais une étoile montante et je faisais mon petit bonhomme de chemin dans le monde impitoyable de la mode en me racontant que si jamais je n’avais pas ce que je voulais, ce n’était pas grave. Sauf que j’étais devenue accro aux flashes, aux beaux vêtements et à l’attention. Et la grande descente aux enfers n’en fut que plus dure encore. Shooting sur une plage déserte au large des côtes de la Floride. Le soleil se couchait et la lumière était géniale. A force de travailler avec des photographes, j’avais appris à reconnaître ces détails. On finissait le shooting et toute l’équipe était crevée. On avait commencé tôt le matin, au saut de l’avion. On devait passer la nuit là et on repartait sur NYC dans la matinée. Je ne rêvais que d’une chose, c’était de me baigner et d’aller m’effondrer dans mon lit. Et finalement, on a fait la fête. Comme souvent, mais l’ambiance était géniale et ma fatigue fut bien vite oubliée. J’ai fini la soirée en robe Matthew Williamson à faire des photos les pieds dans l’eau. L’effet était génial et la rédactrice serait sûrement contente du résultat, malgré que ce ne fût pas prévu au programme et qu’on avait probablement ruiné la robe. Et les choses ont commencé à dégénérer. On était plus que le photographe et moi et toute naïve que j’étais, je n’avais pas compris où il voulait en venir. J’étais à moitié saoule, mais pas assez que pour être inconsciente de la situation. Il a voulu en profiter. Et je n’ai rien pu faire. Que peut une gamine de 19 ans qui pèse 45 kilos toute mouillée contre un mec d’une quarantaine d’années déterminé à avoir ce qu’il veut ? Quand j’ai compris que me débattre ne ferait qu’empirer les choses, je l’ai laissé faire. J’ai fermé les yeux et attendu qu’il termine. Le lendemain, il se vantait devant toute l’équipe que lui et moi avions passé une nuit géniale. Personne ne s’en est retourné, apparemment c’était commun. Mais c’était loin de l’être pour moi.

Ce fut pire encore lorsque je fus amenée à retravailler avec lui. Parce qu’il n’en resta pas là. Désemparée, j’en parlai à mon agent. Il me dit que je n’avais qu’à prendre sur moi, que ses photos de moi étaient les plus belles et que c’était cela qui m’avait amenée où j’en étais. Et c’était vrai, ma carrière avait véritablement décollé grâce à cet édito de Floride pour Vogue US. Comme mon ascension était plus importante que le reste, je décidai de passer l’éponge. Je n’étais sûrement pas la première à qui cela arriverait. Et puis si je me mettais dans un bon état d’esprit, je pourrais sûrement prendre mon pied, moi aussi, la prochaine fois qu’il me toucherait ?

Un soir, mon agent m’attendait devant la porte de mon appart. Il voulait me parler. Le photographe avait continué à se vanter de ses exploits. Pas seulement avec moi, mais avec d’autres. Je l’ai fait entrer et il m’a expliqué la situation. Et lui, cet homme en qui j’avais toute confiance, il me fit tomber de très haut.

« Ecoute, c’est très mauvais pour ta carrière si des rédacteurs et des créateurs apprennent que tu couches avec lui.
- Mais Brad, je t’ai expliqué.
- Oui, je sais, t’étais pas consentante. N’empêche que t’as recommencé.
- Mais…
- Y a pas de mais, Tonia. Tu n’avais qu’à lui dire non.
- Je lui ai dis, Brad. Mais tu m’as dit toi-même que porter plainte ne servirait à rien, que…
- Ecoute, je vais régler ça, d’accord. Je vais m’arranger. Tout ça sera oublié.
- Comment tu vas faire ?
- Une rumeur par-ci, une rumeur par-là, tu connais la chanson. C’est facile de faire tomber quelqu’un dans ce milieu, tu le sais aussi bien que moi.
- Qu’est-ce que tu vas dire ?
- Je trouverai. Ce mec est une ordure. Un putain d’artiste que tous les magazines s’arrachent, mais c’est une ordure. Il traîne des casseroles derrière lui. Ca sera pas difficile d’en faire remonter une à la surface. »

C’était le genre de discours que je n’aimais pas entendre. Parce que cela démontrait l’horrible visage de la mode et que je faisais tout depuis le début pour essayer de ne voir que le bon côté des choses, quitte à me mentir à moi-même.

« En ce qui te concerne… je peux m’arranger pour faire oublier ces rumeurs.
- Sérieux, tu peux faire ça ?
- Evidemment, Tonia, qu’est-ce que tu crois ?
- Je ne pourrai jamais te remercier assez.
- C’est vrai. Mais je sais par où tu pourrais commencer. »

Il avait ce sourire magnétique qui charmait n’importe qui. Il me tendit une robe, une de celles dont on rêve quand on est gosse.

« Enfile-ça. On va à une soirée. Il y aura des photographes, des rédacteurs et le gratin de la mode. Tu n’auras qu’à sourire et faire ce que je te dis. Et tout se passera très bien. »

Le ton qu’il avait employé m’inquiéta. Il passa son doigt le long de mon bras et son sourire n’était plus aussi séduisant que tout à l’heure.

« Et, Tonia, ne pense même pas à me dire non. »

Il me traîna à la soirée, et je dus réellement me forcer à sourire et à garder contenance. Je me consolais en me disant que je portais une robe Prada et des Louboutin. Là, je rencontrai le directeur de IMG. Brad me poussa carrément dans ses bras, non sans me dire que moi seule avais le pouvoir de sauver ma carrière. « Ne t’avise pas de lui refuser quoi que ce soit, Tonia. Et encore moins d’aller le raconter après. Parce que cet homme a ton destin entre ses mains. Si tu le contraries, tu peux oublier ta carrière de mannequin. Donne tout ce que tu as, ma belle. C’est tout ce qui te reste. »

Je passai la plus horrible nuit de toute ma vie et j’aimerais que les détails se soient effacés de mon esprit. Mais ils sont encore aussi clairs aujourd’hui que ce jour-là et leur simple évocation me donne la nausée.
Après cette nuit, je fis mes valises et pris un aller simple pour Arrowsic. Le monde de la mode n’était plus qu’un vague souvenir. Et pourtant, j’avais fait tout ce qu’on m’avait dit…

Le pire, c’est d’avoir dû demander à mes parents de me reprendre après tout ce que je leur ai dit et de devoir chaque jour affronter leur regard déçu et en colère. Le pire, c’est de me dire que si je les avais écoutés, je n’en serais pas là et que tout ce qui m’est arrivé, je l’ai cherché. Mais le plus dur de tout, c’est encore de devoir porter ce fardeau toute seule, car il est hors de question que je raconte cela à qui que ce soit.