nom : Cortés Bernal, comme le veut une tradition espagnole qui fait que les enfants portent souvent le nom des deux parents. A leur arrivée aux Etats-Unis cependant, il a été convenu que Gabriela ne porterait que le premier de ces deux noms, soit celui de son padre. Ҩ prénom : Gabriela, et avec un seul L. Toute personne qui en ajouterait un second partirait d'un bien mauvais pied avec elle. Ҩ âge : 25 ans. Ҩ origines Gabriela est née en Espagne (Grenade) mais a vécu une bonne partie de sa vie à New York. Ҩ statut civil : Célibataire. Ҩ occupation : Danseuse de flamenco quand elle en a envie, sinon pas grand chose. Ҩ avatar : Shannyn Sossamon Ҩ crédits : heartons @ tumblr.

Mes pieds se déplacent et enchaînent les figures, mais je suis comme en transe. Je n'ai plus conscience de mes gestes tandis que je danse au son de la guitare. Ma robe virevolte au rythme des notes jouées par le musicien. Le tempo accélère et mes mouvements font de même. Mon corps et mon esprit sont emportés dans cette frénésie. Je ne réfléchis plus. Le temps d'une danse, je m'oublie.
La musique s'arrête et m'interrompt dans mes gestes. J'adresse un regard au guitariste. Il connaît cet air et ne me laisse pas dire un mot. Il m'indique l'entrée de la pièce d'un signe de la tête.
C'est là que je le vois, mon padre, adossé négligemment dans l'encadrement de la porte. Mes pas se font plus lents alors que je traverse la pièce en sa direction. Mes talons claquent sur le parquet, marquant un rythme régulier sur lequel tout mon organisme vient se calquer. Ma respiration est saccadée alors que je reprends mon souffle. Je lui lance ce regard noir qu'il connaît bien maintenant. « Que fais-tu là ? » Je le questionne sans même un sourire et n'obtiens pour toute réponse qu'un rire et quelques mots en espagnol. « Je vais quitter Nueva York bientôt, tu sais. » Je lui dis avec sérieux. Il ne m'en croit pas capable. C'est vrai, il me connaît depuis vingt ans et je n'ai jamais réussi quoique ce soit. Ces mots peuvent sembler un peu fatalistes, mais c'est la vérité. Je prétendais devenir danseuse de flamenco, et j'en étais encore à travailler dans son stupide magasin, tout en répétant occasionnellement dans cette petite salle du Spanish Harlem, à Manhattan. C'est là que j'ai grandi. Je suis née à Grenade mais je n'y ai vécu que les premières années de ma vie. D'un jour au lendemain, mes parents ont décidé de quitter leur Espagne natale pour tenter leur chance aux Estados Unidos, où nous vivons depuis quinze ans maintenant, mes deux frères aînés, mes parents et moi. Depuis des années, je prétendais que j'allais quitter New-York pour voyager à travers le pays. C'était devenue une plaisanterie entre nous, personne ne pensait qu'un jour enfin, je le ferais.

J'ai pourtant fini par partir, lassée de la vie que je me dessinais en restant ici. J'ai abandonné les rues noires de monde, les lumières aveuglantes de la ville, j'ai laissé derrière moi ma famille. Je pensais qu'ils me manqueraient, mais non. C'est triste à dire mais il faut bien l'admettre, toutes ces personnes que j'ai laissées derrière moi, je ne les regrette pas. Bien sûr je pense à eux, mais je préfère la vie que je mène maintenant. Parfois je leur donne de mes nouvelles depuis la cabine téléphonique la plus proche. Depuis deux années maintenant, je sillonne les routes, je m'arrête dans une petite ville pour quelques temps. Ca peut être une semaine comme ça peut être un an. Une fois sur place, je me débrouille. Je danse quand je le peux, j'essaye comme je peux de me procurer un travail, quel qu'il soit. C'est peut-être cliché ou simplement idiot, mais j'aime cette vie d'errance et de constant dépaysement.

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Ca fait maintenant quelques temps que je voyage avec los artistos del circo. Ne me demandez pas comment s'appelle leur joyeuse troupe, je n'en ai aucune idée. Je les ai rencontrés dans une petite ville dont j'ai oublié jusqu'au nom, j'ai passé la soirée avec eux, on a dansé, et j'ai commencé à suivre le chemin de leur tournée.
« C'est quoi le nom ? Arrowsic ? » répète un trapéziste à l'attention de celui qui a proposé d'y aller faire un tour. Moi, je fume ma cigarette et je les écoute débattre, indifférente. D'habitude je m'exprime, je m'agace d'un rien, je m'énerve, et puis je me tais. Mais Arrowsic ou autre chose, pour moi, c'est du pareil au même. Et de toute façon, je ne sais pas où aller, alors je vais les suivre. L'autre acquiesce, et si j'en vois certains froncer les sourcils, je sens déjà que le jeune hombre aux yeux fiers a obtenu gain de cause et que leur prochaine destination - et la mienne - est toute vue : ce sera Arrowsic, dans le Maine. Alors que je pense à tout cela, une certaine excitation s'empare de moi, et comme toutes les veilles de grands départs, je m'amuse comme une enfant à imaginer cette ville et la vie que j'y mènerai.