Ça s’est passé il y a un peu plus d’un mois dans les rues de Manhattan. J’allais entrer dans la voiture de mon père conduite par son chauffeur…. Je ne me rappelle plus vraiment les détails de l’action. Ce dont je me rappelais plus précisément était la sensation que j’avais eue, la pression sur mon bras, puis une main posée violemment sur ma bouche. Je ne compris pas de suite ce qu’il m’arrivait. C’est lorsque l’on me força à reculer en arrière que je compris ce qu’il se passait. On tentait de me kidnapper. Mon père possédait une riche fortune et depuis quelques temps déjà, des menaces planaient au dessus de lui. Warren, mon père fut déjà victime d’une agression d’hommes cagoulés juste devant la demeure de l’époque. Suite à cet accident où mon père s’en sortit presque indemne, il comprit que son succès faisait des envieux. Il s’entoura immédiatement d’un garde du corps qui l’accompagna à chacun de ses déplacements. Mais jamais encore cela n’avait atteint sa famille. Mais au fond, c’était sans doute la bonne suite des choses. Une rançon, voilà ce qu’espéraient les ravisseurs en m’attrapant. J’étais une proie facile. Seule, frêle, fragile, j’étais sans doute la victime idéale. Sauf, que j’eu un réflexe presque machinal, je pliai ma jambe en arrière histoire d’atteindre l’entre-jambe de l’homme qui me tenait contre lui. Mécanisme humain, il retira sa main de ma bouche. J’en profitai pour crier, ce qui surprit le ravisseur. J’y laissai la bretelle en soie de mon haut, mais, je réussis à m’échapper. Le chauffeur de mon père avait eu le temps de faire le tour de la voiture, pour arriver jusqu’à moi, et me fit rentrer dans la voiture brusquement. Lorsque mon père était venu me chercher à l’hôpital, j’avais ressentit un sentiment de haine, de remords et d’inquiétude mélangés. La haine, contre les personnes qui avaient manigancés ce kidnapping loupé. Des remords parce que mon père avait entièrement conscience que ce qui m’était arrivé était de sa faute – bien que je ne lui en tenais pas rigueur. Et de l’inquiétude, comme tout père aimant pourrait en avoir lorsque sa fille se retrouve à l’hôpital.

Deux coups de téléphone avaient suffit pour me dénicher un garde du corps. J’étais en convalescence dans l’appartement new-yorkais parental. Pour mon père, il était hors de question que je retourne dans mon appartement. Mon père était un homme d’affaire redoutable, mais lorsqu’il disait « non », la négation était autoritaire aussi bien au travail qu’en famille. Je savais depuis toute petite qu’un « non » de mon père le resterait. Je ne m’amusais plus à contester, j’avais passé l’âge. Et je savais bien qu’après cet incident, aucun argumentaire de ma part ne ferait le poids. Même ma mère était de son côté à lui. La lutte serait vaine. Je partais le lendemain pour le Maine, à Arrowsic. Et pour couronner le tout, j’aurais un garde du corps pour me protéger, là-bas… Cette pensée me laissa perplexe. Dans une ville qui n’avait rien à voir avec New-York, loin de l’effervescence de la grande pomme, selon moi, rien ne nécessitait une protection aussi rapprochée. J’avais conscience que mon père avait eu très peur pour moi et que par conséquence il mettait tout en sorte pour que cela ne se reproduise pas. Je devais faire avec.

Après plusieurs heures de vol et de nombreux bagages, j’atterrissais enfin près de la petite ville d’Arrowsic. Mon père m’avait donné les dernières recommandations avant que je quitte New-York, le nom de mon nouveau protecteur : Rafael ; ce dernier avait les clés de la maison que mon père avait louée, son numéro de téléphone. C’était lui qui était chargé de venir me chercher à l’aéroport à l’heure de mon arrivée. Mon père m’avait recommandé d’agir avec discrétion là-bas et de veiller à ne pas me faire trop remarquer. Mes bagages à bout de bras, je me dirigeai vers les portes de sortie où devrait – logiquement – se trouver le fameux Rafael. Je ne voyais aucune pancarte avec mon nom inscrit. Sûrement une consigne de mon père. Ralentissant le pas pour observer les personnes présentes, je repérai un jeune homme, habillé en costard, c’était le seul. Me dirigeant vers lui d’un pas peu sûr de moi, de peur de me tromper, même si le risque était mince.

« Vous êtes Rafael ? » demandai-je avec prudence.

Spoiler:

Les missions, les combats, le terrain, ses frères. Oui, aujourd’hui tout lui manquait. Comment l’armée avait-elle put lui faire subir un tel affront ? Lui qui avait donné sa vie pour ses congénères américains. Le patriotisme n’était visiblement plus ce qu’il était par le passé et les citoyens semblaient prendre toutes bonnes mœurs à la légère. Rafael ne pouvait plus supporter de vivre dans une telle honte. Cet échec, il le vivait au quotidien, dès lors qu’il se levait, jusqu’à ce qu’il ferme les yeux. Soucieux de son image, il s’effaçait, pensant sûrement que sa trahison pouvait se lire sur son visage sombre. Mais après tout, qui pouvait parler de trahison ? Bancroft avait suivi ses missions à la lettre et jamais il n’aurait mis son esquade dans un tel merdier. Tout ceci n’était qu’un piège, cela n’en faisait aucun doute. Le général se devait d’effacer les preuves, supprimer les éléments gênants qui en savaient plus que n’importe qui …Car là-bas, tout est différent et tellement plus compliqué. Mais Rafael avait été sur le terrain, le processus d’une accusation est peut-être long à échafauder, mais sur le terrain, dans ses montagnes irakiennes, il avait tout vu, il avait survécu. L’armée américaine ne pouvait pas mettre fin à sa vie, une fois revenu sur un sol tant chéri. C’est pourquoi elle l’avait envoyé à New-York, reprendre le cours de son ancienne vie. Rafael avait promis de ne faire aucune esclandre, moyennant ainsi une importe somme d’argent et sachant qu’il faisait toujours l’objet de surveillance, il opta pour une reconversion professionnelle. Le métier de garde du corps n’était pas tellement contraignant, au contraire. Le jeune homme gagnait relativement bien sa vie mais le moteur, cette essence, qui lui faisait apprécier ses tâches quotidiennes était l’adrénaline. Le plaisir de cogner, de se battre pour une cause louable était bien présent et contre toute attente, Rafael y trouvait un réconfort certain. Bien loin de l’agitation de la grosse pomme, le garde du corps s’était retrouvé dans une petite ville du Maine, sous les requêtes d’un important commanditaire. L’homme au nom célèbre et à la fortune mirobolante avait fait appel à ses services pour qu’il puisse veiller pendant un temps sur sa fille. Victime d’une tentative d’enlèvement, sa princesse n’était plus en sécurité dans la métropole, si bien qu’il décida de l’envoyer à Arrowsic, une localité bien trop tranquille. Le séduisant brun n’avait pas été exigeant sur le salaire puisque son commanditaire, dans le plus grand secret, lui offrait le logis. Sa fille n’était visiblement pas au courant de ce petit détail, elle qui rechignait déjà à l’idée de le rencontrer. Croisant ses bras puissants sur son torse, Rafael poussa un long soupir. L’avion de sa protégée était arrivé sur le tarmac et les passagers commençaient à sortir de ses entrailles de fer. Attentif et à la fois suspicieux, Bancroft toisa la salle de ce petit aéroport. Une fois que la chose fût faite, il réalisa qu’aucun danger ne se présentaient à eux. Plusieurs touristes ou résidents quittèrent les postes douaniers et c’est la qu’il croisa son regard. Maladroite, les bras chargés de bagages, une sculpturale brune s’avança vers le garde du corps. Plus citadine que jamais, les effluves de son parfum sucré vinrent caresser sa peau masculine, alors qu’elle lui faisait face. Cette superbe créature le questionna mais Rafael reprit bien vite ses esprits. Il lui lança un léger sourire avant de s’emparer de ses valises. « C’est exact Mademoiselle Fawkes, avez-vous fait bon voyage ? »

J’étais tout de même surprise face à l’homme qui se tenait en face de moi. Je remarquai qu’il était beau garçon, je m’étais attendue plutôt à un homme plus âgé, peut-être même avec le crâne rasé. Je fus donc surprise, mais agréablement. Ce fut le premier point positif du calvaire qui m’attendait : une ville ennuyeuse à mourir, loin de ma famille, loin de mes amis et avec monsieur le garde du corps observant mes moindre faits et gestes. Lorsque je me postai devant lui un peu par déduction, il n’hésita pas une seconde à me débarrasser de deux de mes bagages. Nous commencions à marcher instinctivement vers la sortie. Je m’empressai de jeter un coup d’œil à l’extérieur de l’aéroport en regardant à travers les baies vitrée. Lorsque Rafael me demandai si j’avais fait bon voyage j’eus un sourire en coin tout en continuant de marcher à ses côtés.

« Tout s’est bien passé… J’avais hâte de me retrouver coincée ici… » répondis-je sarcastiquement tout en regardant droit devant moi. Je tirais énergiquement ma valise restante de ma main gauche tandis que je gardais contre moi mon sac à main. Je m’attendais évidemment à ce qu’il ne relève pas ma remarque cinglante. J’avais depuis longtemps l’habitude du garde du corps de mon père qui était bien plus âgé que Rafael et qui n’était pas des plus bavards - bien que professionnellement parlant, il n’y ait rien à lui reprocher. Après avoir franchir les portes automatiques de l’aéroport, mon regard balaya l’extérieur. Ne sachant où me diriger, je jetais un regard furtif à mon accompagnateur qui se dirigea sur la gauche. Je remarquai immédiatement une voiture noire, classieuse, tout à fait le style de réservation de mon père. Un sourire en coin se logea à nouveau sur mes lèvres, mais disparut rapidement lorsque je me rappelais que je n’étais pas seule. Raphael n’avait pas l’air désagréable, mais sa présence m’inconfortait fortement… Et puis, lui où quelqu’un d’autre, je n’avais aucunement envie d’être suivie n’importe où.

« Sachez une chose monsieur Bancroft… je n’estime pas votre présence à mes côtés nécessaire. Disons que le choix ne m’a pas vraiment été demandé… » le ton n’était pas forcément désagréable, mais on ressentait dans ma voix une certaine amertume. Je m’étais d’ailleurs rendu compte de ma faille. Notre marche s’arrêta devant la berline noire. Je me décalai vers le coffre. J’étais peut-être légèrement effrontée mais pas impolie. Rafael ouvrit le coffre de la voiture et nous posions les bagages à l’intérieur de celui-ci. Il nous restait encore de la route pour atteindre Arsowic. Ma vie changeait du tout au tout et j’étais plutôt anxieuse. Bien que j’ai annonçais à Rafael que je n’avais pas besoin de son aide, je me demandais tout de même si je n’étais pas vraiment en danger…

La jolie jeune femme passa une main délicate dans sa chevelure de jais. Visiblement décontenancée par la tournure que prenait cette situation, elle le laissa s’emparer de ses nombreux bagages, sans piper mot. Contre toute attente, Rafael n’était pas mécontent de tout ce qu’il lui arrivait. Son commanditaire l’avait prévenu du caractère impétueux de sa fille, mais qu’importait, il prenait cette protection rapprochée très au sérieux. Un léger sourire posté sur le bout de ses lèvres masculines, Bancroft lui adressa un vif signe de tête et tout deux sortirent spontanément de l’aéroport. La délicieuse créature avait visiblement fait bon voyage et d’ailleurs, elle ponctua ses propos d’un soupçon de sarcasme. Contenant son amusement avec difficulté, le jeune homme fuyant son regard, s’approcha d’une berline lustrée. « Je reconnais que la demande de votre père n’est pas habituelle, mais souvenez-vous qu'il agit ainsi pour votre sécurité. » Oui, c’était tout ce qui importait. Rafael ne pouvait échouer dans une telle mission, il avait fait serment, signé un contrat. Ailina était à présent entre de bonnes mains. La séduisante jeune femme suivi son garde du corps et celle-ci ne put s’empêcher de prendre une nouvelle fois la parole. Amère, elle lui exposa franchement sa version de l’histoire et son ressenti ne lui était malheureusement pas favorable. Bancroft ne pouvait pas la blâmer pour de tels reproches. Ceux-ci étaient largement fondés. Qui donc accepterait de se faire épier nuits et jours pour rassurer un proche, maladivement craintif ? Poussant un léger soupir, Rafael lui fit face et plus bienveillant que jamais, il renchérit. « Je comprends votre position Mademoiselle Bancroft et je peux partager votre amertume. Toutefois, je peux vous promettre de veiller sur vous tout en étant très discret. Je ne pense pas être du genre envahissant et je suis persuadé que vous oublierez ma présence bien vite. Vous pouvez me faire confiance. » Un énième sourire s’afficha sur son visage rassurant et sans plus attendre, il chargea les bagages de sa protégée dans le coffre. La petite ville d’Arsowic était à plus d’une heure de voiture, il était temps de se mettre en chemin. Ouvrant la portière du côté passager à la belle, il l’invita d’un signe de tête à s’installer. « Veuillez m’excuser, mais je suis garde du corps et non taxi. A moins que vous ne préfèreriez monter à l’arrière ? » Confortablement assise sur le fauteuil de cuir, Ailina n’en démordit pas et sous le vrombissement sourd d’un puissant moteur, tout deux quittèrent le parking de l’aéroport. Rafael s’engagea sur une immense route et rapidement, un silence pesant s’installa. Son regard se détacha de son objectif pour discrètement glisser sur le corps frêle de sa passagère. Pensive, elle était pourtant si attirante dans ses vêtements griffés. Réalisant qu’elle le toisait à son tour, Bancroft redressa bien vite le regard tout en priant intérieurement qu’elle ne l’ait pas vu.

J’étais étonnée par la répartie qu’avait Rafael. Bien qu’il restait tout à fait professionnel, il avait les bonnes réponses à mes remarques. Cela me laissait perplexe. Il était diplomate en plus… Je le regardais sans de suite répondre, étonnée. Lorsqu’il avoua reconnaître que la demande de mon père lui avait parue spéciale, cela me confortait dans mon idée. Il avait au moins l’honnêteté de l’admettre. Ce n’était pas contre lui personnellement que j’étais en colère, mais contre mon père. La personne qui était à mes côtés ne faisait que ce qu’on lui avait demandé. Et que ce soit Rafael ou un autre, mon père aurait tout de même réussit à me coller quelqu’un aux fesses. Bien que j’admettais que Rafael n’y était pour rien, c’était la seule personne à qui je pouvais me plaindre… Rafael fit allusion à ma sécurité. « Je suis pourtant persuadée de ne pas être en danger… » répondis-je d’un air dédaigneux, comme si mon père était aliéné. J’avais conscience des évènements qui s’étaient déroulés, je les avais moi-même vécus. Mon père n’avait pas inventé ma tentative d’enlèvement. Je n’avais pas laissé la paranoïa m’envahir. Mon père n’en n’était plus à ce stade. De là à s’expatrier et se retrouver sous escorte, cela allait un peu trop loin pour moi. Particulièrement, le point sensible, je savais que la solitude allait m’envahir et j’en étais terrifiée. Lorsque Rafael m’expliqua qu’il se ferait très discret et que je ne remarquerais que très peu, je fus étrangement frustrée. C’est justement ce que je redoutais… La situation aurait été différente si nous nous étions trouvés à New-York, entourés de mes amis, mes connaissances et relations. Dans ce cas précis où j’aurais continué à mener ma vie habituelle de femme, j’aurais encore plus haï être suivie constamment par Rafael. Mais regardons la situation telle qu’elle était ici, à Arrowsic, la seule personne que je connaissais était justement Rafael. Alors si même lui se retirait en se faisant discret et me laissait encore plus seule que je ne l’étais, la vie ici serait encore plus complexe que prévu. « Rafael, je vous rappelle que je me rends dans une ville où je ne connais personne, croyez-moi, votre présence sera amplement appréciée » Non pas que je ne prédisais pas de me faire des amis, mais sans activité professionnelle, je ne voyais pas trop comment me former un cercle de connaissance. J’étais ici en convalescence, en quarantaine. Ici ou ailleurs serait revenu du pareil au même. Alors Rafael serait sûrement de bonne compagnie dans les grands moments de solitude qui arriveraient très prochainement.

Les bagages placés dans le coffre, il se dirigea du côté passager. Il me fit remarquer qu’il préférait que je me place à l’avant. Néanmoins, le jeune homme me laissa la possibilité de m’assoir à l’arrière. « Je préfère m’assoir à l’avant, j’aime voir la route… » L’art de toujours vouloir tout contrôler. A l’arrière, je n’arrivais jamais à voir la route sans avoir à me pencher sur le côté. J’aimais voir la route pour pouvoir en quelque sorte observer les évènements routiers, on ne sait jamais. Lorsque la voiture démarra, le moteur gronda, mes yeux se placèrent instinctivement sur le tableau de bord. Une pensée alla à mon père et sa légendaire passion pour les cylindrées. Un sourire se dessina sur mes lèvres. Je pensais à mon père, à Arrowsic, et puis à Rafael. J’avais remarqué que c’était un bel homme mais je le trouvais particulièrement séduisant. Lorsque je ressentis un regard posé sur moi cela me sortit de mes pensées. Je regardai Rafael qui s'empressa de détourner le regard furtivement. Lorsque nos regards se croisèrent, mon regard se plaça précipitamment sur la route, droit devant moi. Le silence s’installa et je me mordillai la lèvre inférieure. « Avez-vous déjà visité la maison où nous irons ? Comment est-elle ? »

Feignant de n’avoir été nullement touché par le regard qu’elle venait de lui lancer, l’ancien soldat se concentra sur la route. C’était préférable et beaucoup moins dangereux ainsi. Muet, le jeune homme repensa à ce qu’elle venait de lui avouer. Elle n’était peut-être pas en danger, mais la fortune de son père était si conséquente qu’un fou-furieux serait capable de lui vouloir du tord. Cette séduisante brune valait une belle somme d’argent. Une fois capturée, faire plier son père serait chose facile. Méfiant de nature, Bancroft redoublerait d’attention en sa présence. Ses doigts se resserrèrent sur le volant, alors qu’Ailina reprenait une nouvelle fois la parole. Celle-ci le rassura largement sur sa présence à Arrowsic. Et effectivement, le garde du corps n’avait pas vraiment réfléchi à la question. Il était parti bille en tête en pensant fermement que cette bourgade ne lui été pas inconnue. Visiblement, sa protégée ne connaissait personne là-bas et lui non plus d’ailleurs. Un bref sourire éclaira son visage, véritablement ravi de pouvoir faire plus amples connaissances avec cette adorable créature. Quelques mots s’échappèrent une nouvelle fois des lèvres brillantes de l’héritière. Le questionnant sur sa nouvelle demeure, Rafael déglutit avec difficulté. Le sujet devenait houleux et pour ne pas la brusquer, il choisi ses mots avec soin. « Et bien, c’est un très bel endroit. Vraiment … Avec tout le confort. J’espère que vous vous y sentirez bien. En revanche, votre père m’a donné une chambre à l’étage. Je comprends totalement que vous ne souhaitez pas m’avoir sur le dos, alors je vais voir si je peux pas me trouver un hôtel pas très loin de votre villa. » Le cas échéant, on parlait clairement de collocation. Bancroft ne connaissait absolument pas cette jeune femme et pour tout vous avouer, il redoutait quelque peu de devoir vivre avec elle. Non pas qu’elle soit dérangeante ou autre, mais mal à l’aise à l’idée de vivre avec un membre du sexe opposé. Depuis l’Irak, il n’avait plus l’habitude de tout cela et plus maladroit que jamais, il serait capable d’agir rudement. Toisant la route, à la recherche d’échappatoire, il remarqua qu’ils venaient de pénétrer dans une ville plutôt sympathique. Le moteur de son imposante voiture criait famine et sans plus attendre, il s’arrêta à la première station venue. Avant de couper le contact, il se retourna prestement vers sa passagère. « Vous souhaitez manger quelque chose ou nous pouvons repartir une fois le plein fait ? »

Je n’avais qu’une crainte, me retrouver seule dans cette ville que j’imaginais ennuyeuse à mourir. Finalement, la présence de Rafael ne serait pas de refus. Je pensais à mille et une choses pendant que nous roulions. La solitude, mon travail, mes amis, mon père… Nous nous étions échangés un regard furtif, faisant mine tous les deux de l’avoir ignoré. Je pensais à présent à la maison où nous allions et commandais-je à Rafael des détails sur celle-ci. C’était mon père qui avait prit soin de choisir la maison – ou bien Caroll, sa secrétaire… Il n’avait pas toujours le temps de gérer ce genre de chose, mais je supposais qu’il avait pris soin de choisir la maison de sa fille avec soin. Rafael me souligna que son père lui avait attribué une chambre dans cette même maison. « Etant responsable de ma sécurité, j’estime que vous devez veiller sur moi autant le jour que la nuit, n’est-ce pas ? Et puis, si vous savez cuisiner c’est un bon point pour vous…» Qui ne tente rien n’a rien, j’ignorais peut-être que Rafael avait un talent caché en cuisine… Je voyais mal mon père accepter que Rafael dorme à l’hôtel et que je reste seule dans la maison toute la nuit. J’appréciais tout de même sa proposition même s’il était plus sage qu’il reste à mes côtés. Du coup, après avoir officiellement accepté que Rafael vive avec elle, elle redoutait la colocation qui allait avoir lieu. La situation allait lui sembler irréelle, elle se retrouvait du jour au lendemain à vivre avec un inconnu. Certes, c’était un charmant inconnu. Et à sa place, une quantité notoire de fille serait ravie de se retrouver enfermée dans la même maison que Rafael…

Ce dernier s’arrêta dans une station service. Le jeune homme me demanda, une fois à l’arrêt, si je souhaitais quelque chose à boire ou à manger. « Je vais aller prendre un café… est-ce que vous voulez que je vous en prenne un pendant que vous mettez de l’essence ? » Après tout, je pouvais bien payer un café à la personne qui allait – peut-être - sauver ma vie à un moment ou à un autre. Je retirai ma ceinture de sécurité, ouvris la portière et descendis de la voiture mon sac sur l’épaule. Je m’arrêtai net lorsque je me retrouvai nez à nez face à Rafael qui était également descendu de la voiture et avait fait le tour du véhicule. « Enfin… à part si vous estimez que j’encours un risque…. » continuais-je, histoire de l’embêter un peu, un sourire au coin des lèvres. J’attendais sagement qu’il me donne son autorisation, ou non, de me rendre à l’intérieur de la station d’essence pour acheter deux cafés. Nos regards se croisèrent lorsque nous nous fîmes face.

Quittant son siège, le jeune homme descendit du véhicule avant de se rapprocher de la pompe. Dégrafant la ceinture de sécurité, sa jolie protégée en fit de même. Ses doigts glissèrent sur la portière qu’elle referma prestement. Ailina allait prendre un café. Quelle excellente idée ! Il n’avait pas beaucoup dormi cette nuit là et bien trop préoccupé par la mission qu’on venait de lui confier, il avait fait le tour de la maison, maintes et maintes fois, pour s’assurer qu’elle ne courrait aucun danger. Sa main glissa sur son visage et tout à coup, la fatigue se fit ressentir. Depuis son retrait de l’armée, ses nuits étaient criblées d’images atroces et d’autres cauchemars. Aujourd’hui, le sommeil lui manquait et il fallait impérativement remédier à tout cela, pour le bien-être de cette séduisante brune. Tentant, tant bien que mal de redevenir alerte, Rafael lui adressa un sourire poli, visiblement ravi de son offre. « Et bien avec plaisir, je n’ai pas pris le temps de déjeuner. Je vous remercie » Mutine, la jeune femme ponctua ses propos par une réplique plus que malicieuse. Amusé par sa répartie, qui ne se voulait nullement désobligeante, il haussa les épaules et toisa l’échoppe avec raideur. « Je peux toujours y faire un tour si vous le souhaitez … » Entrant pleinement dans son jeu, il ouvrit la trappe avant de reprendre avec un peu plus de sérieux. « Vous ne risquez rien, je ne crois pas que la caissière vous importunera, elle est bien trop plongée dans ses faits divers ... oh et à picorer des m&m's » Soulignant ces quelques mots par un sourire, il laissa la jolie brune faire ses achats. Une fois qu’elle eut pénétré dans la boutique, il toisa à nouveau les alentours. Depuis leur départ de l’aéroport, il avait analysé chaque mouvement, décomposé chaque phrase qu’il avait pu entendre. Tel un fauve, il protégeait son ange de douceur, de tout danger potentiel. Et visiblement, celle-ci ne s’en rendait pas compte. Ailina revint près de lui, les mains prises par deux gobelets fumants, Rafael la débarrassa bien vite et sans plus tarder, il apprécia la vigueur d’un bon café bien chaud. Prêts à repartir, il régla la note avant de s’enfermer à nouveau dans l’habitacle de la BMW. Bercé par les effluves d’un café délicieux, le garde du corps retrouva un peu de baume au cœur. Ensemble, ils poursuivirent leur route jusqu’à la villa. Durant les quelques kilomètres restants, ils échangèrent sur des sujets variés. Ailina s’avérait être une personne très intéressante malgré le milieu dont elle provenait. Il est vrai que les femmes, superficielles, de ce rang avaient pour habitude d’être gâtées, et il fût ravi de réaliser qu’il était inutile de généraliser. Le jeune homme poussa un léger soupir de soulagement lorsqu’au détour d’une rue, il vit leur future demeure. Souriant, il posa un regard sur la sensuelle jeune femme. « Alors, qu’en dites-vous ? »

Lorsque Rafael accepta le café qu’elle s’était proposé d’aller chercher, j’eust un sourire satisfait au bord des lèvres. Je me dirigeai vers la boutique de la station précédée par Rafael qui vérifia par pure défi l’intérieur du local. Je levai les yeux au ciel tout en le suivant. « N’exagérez pas Rafael… » lançais-je au garde du corps. Je n’arrivais toujours pas réaliser les dangers que je pouvais potentiellement encourir. Il était donc normal que je trouve la situation ridicule et j’avais conscience que c’était la première d’une longue série. Rafael me laissa et je réglais les deux cafés avant de retourner dans le siège de la voiture. Lorsqu’il s’assit derrière de volant je lui tendis le deuxième café que je tenais dans mes mains et qui lui était destiné. Après une petite heure de route, ils arrivèrent enfin à destination dans la petite ville Arrowsic. Arrivés devant une maison, Rafael arrêta le véhicule. Je me penchai pour observer la maison qui nous faisait face. Rafael se redressa sur le siège et me demanda ce que je pensais de la maison… Je bloquais quelques minutes sur les détails de la maison. Le portail, la pelouse, le perron, les fenêtres, la façade boisée blanche…

« Je reconnais bien là les choix de mon père… » Répondis-je un sourire sur mes lèvres. La maison était imposante de l’extérieur et je pensais qu’il serait de même à l’intérieur. Je la trouvais très à mon goût et remercia mon père intérieurement d’avoir les mêmes goûts en matière d’immobilier. Je sortis du véhicule avec la hâte de la découvrir. Rafael et moi nous dirigions vers l’entrée mes bagages à bout de bras. Il passa devant moi pour ouvrir la porte. Je me sentais comme une enfant allant recevoir un cadeau. Rafael poussa la porte et il me laissa découvrir l’intérieur. En faisant un pas dans l’entrée, je me tournai vers Rafael « Vous l’avez déjà vu n’est-ce pas… Vous me faites visiter ? » Demandais-je en posant les bagages que je tenais à terre. L’intérieur étai très confortable. De l’entrée, où je me trouvais, je voyais le salon et devant nous, se trouvait un grand escalier montant à l’étage supérieur. Je regardais à ma gauche à ma droite, observant les moindre détails de ce qui se trouait être ma nouvelle maison.