Ma vie est rythmée par le coma de Nathaniel depuis six mois. C'est chaque jour la même chose, les mêmes habitudes. Je fais tout par rapport à lui bien qu'il soit toujours à l'hôpital en train de dormir mais tout ce que je prends comme décision ou tout ce que je fais, je le fais en me demandant ce que dirait mon petit-ami. Je crois que cet accident m'a rendu un peu folle. J'essaie de me rendre à l'hôpital deux fois par jour, avant d'aller bosser et avant de rentrer à la maison le soir. Ma plus grande hantise? Que Nathaniel se réveille et que je ne sois pas là. Les médecins et infirmières ont mon numéro au cas où mais je veux être présente le jour où mon prince charmant rouvrira ses beaux yeux verts. Seulement... Pour l'instant, le jeune homme continue de dormir paisiblement. Il se repose, il se remet. Je l'envie dans le fond car même si j'ai été bien moins amochée que lui durant l'accident, je n'ai pas pu prendre mon temps pour me remettre de mes blessures.

Aujourd'hui ne déroge pas à la règle... A peine réveillée, je m'habille en vitesse d'un simple slim avec un chemisier bleu et file pour attraper mon bus pour aller voir Nate à l'hôpital. Tous les jours, les mêmes habitudes, les mêmes gestes... Dès que j'arrive, je lui éponge un peu le visage et remet correctement les draps de son lit. J'ouvre un peu la fenêtre pour qu'il profite de l'air et je lui parle un peu. Je vous assure, je suis sûrement en train de devenir folle. Jour après jour, son physique change. Il s'amaigri, son teint devient de plus en plus blafard étant donné qu'il ne voit pas le soleil ni ne mange normalement. Il est toujours séduisant, il le sera toujours à mes yeux mais le Nathaniel plein de vie et musclé me manque. J'ai beau le supplier d'ouvrir ses yeux, rien ne change. Je quitte donc l'hôpital, toujours aussi triste et frustrée et me rends au café pour travailler toute la journée.

Quand il est l'heure de quitter mon lieu de travail, je fais le chemin en marche arrière, traverse à nouveau ces longs couleurs blancs et sentant le désinfectant pour aller m'assoir sur le lit de mon petit ami. Je ne sais même pas s'il est mon petit ami ou mon fiancé? Il faut dire que j'ai trouvé une bague dans ses affaires mais j'ai peur de me faire des idées alors j'évite de trop y penser. Je l'observe de longues minutes et soupire. Il ne bouge pas. La seule chose qui se mouvoi chez lui est son torse qui se lève au rythme de sa respiration. Je n'ai pas envie de rentrer à la maison et de dormir seule... Pas cette nuit alors je tire la chaise qu'il y a dans le coin de la chambre de Nate et m'installe en boule dessus, bien face à lui. Je pose mon bras sur le lit et attrape ses doigts, m'y accrochant comme si j'avais peur qu'il s'envole. Doucement, je m'endors dans cette position plus qu'inconfortable.

En six mois, il m'est davantage arrivé de dormir sur cette chaise plutôt que dans notre lit confortable à la maison. D'ailleurs, je ne suis que très rarement à la maison. J'ai l'impression d'étouffer à l'intérieur et que les murs se resserrent sur moi tant le silence est pesant. Je pars tôt le matin et rentre le plus tard possible le soir afin de ne pas trop me retrouver seule là-bas. En plus, avec les frais d'hôpitaux de Nathaniel, j'ai pas trop le choix de faire un maximum d'heures au café. Je sais que ses parents sont riches, je vois de temps en temps sa maman ici mais je ne lui ai jamais parlé de ça, préférant qu'on se débrouille seuls. Mais il faudrait gentiment que mon amoureux se réveille car ça commence à coûter cher mais surtout parce qu'il me manque et que j'ai envie de vivre ma vie avec lui et non pas sans lui.

Je sais très bien que je n'ai pas trop le droit de dormir ici mais ça m'est souvent arrivé et je pense que les infirmières ont arrêté de contredire mon caractère de cochon. Je ne compte même plus le nombre de fois où je me suis prise la tête avec elles parce qu'elles me disaient de partir ou simplement parce que d'après moi, elles ne s'occupaient pas assez de Nathaniel. Enfin bref, quoi qu'il en soit, je ne compte pas dormir ailleurs qu'ici cette nuit. Je n'ai pas envie de parler d'instinct féminin mais j'ai l'impression que si je rentre il va se passer quelque chose et pas forcément positif. N'oublions pas que quand quelqu'un est dans le coma y a plus de chance pour qu'il s'endorme définitivement plutôt qu'il ne se réveille... Les médecins n'ont pas cessé de me le rappeler ces six derniers moi. C'est donc très inconfortablement installée que je m'endors un peu. Juste histoire de fermer les yeux quelques heures. Il m'arrive encore de faire des mauvais rêves à cause de l'accident mais cette nuit, je n'ai pas le temps de m'endormir assez profondément pour que mon subconscient réalise ses fantasmes que je sens quelque chose bouger dans ma main. Ca m'est souvent arrivé d'halluciner. De croire que Nate avait les yeux ouverts ou qu'il avait bougé alors que non. C'était mon esprit qui se faisait des films. Mais cette fois ça m'a paru tellement vrai. A moitié endormie, je décide d'attendre de voir si ça va se reproduire avant de me faire des films... Je suis aux aguets, n'osant pas bouger et tout d'un coup, ça remue à nouveau dans ma main. Je me redresse immédiatement, les yeux écarquillés et observe Nate. Ses paupière papillonnent. Elles ne s'ouvrent pas mais elles papillonnent. Je jette un oeil aux machines qui semblent prendre un rythme plus soutenu tout d'un coup. « Oh mon Dieu... » Je me lève presque d'un bond, ne lâchant pas la main de Nate et me contorsionnant pour appuyer sur le bouton des infirmières. Je me penche vers le visage de mon petit ami et scrute chaque parcelle de son visage pour être sûre de ne pas louper le moment où il ouvrira les yeux. S'il se daigne de le faire. « Nate? S'il-te-plaît... Ouvre tes beaux yeux... » J'ai l'impression de parler à un enfant mais très rapidement, une infirmière et un médecin entre dans la chambre de mon homme. Je ne veux pas lui lâcher la main pendant qu'ils regardent ses signes vitaux. Tout d'un coup, je vois que les yeux de Nathaniel s'ouvrent péniblement. J'étouffe un petit cri, ma main de libre se portant à ma bouche. Presque immédiatement, des larmes de joie et de soulagement montent aux coins de mes yeux. Je serre sa main et le meilleur dans tout ça c'est que je sens qu'il l'a tient aussi. Ce n'est plus un morceau de chaire et de muscles dans ma main, il la tient vraiment. Le médecin s'écarte un peu à côté de moi et observe Nate tout comme moi. « Nate? Tu m'entends? » On ne sait malheureusement pas quelles conséquences du coma il va avoir mais pour l'instant je veux juste qu'il me regarde.

Une vague de soulagement m'envahit en entendant sa voix. Voix endormie et un peu tremblante, mais c'était sa voix quand même. Je me mordis la lèvre avant de poser mon front contre le sien, profitant de ce retour parmi nous. Le médecin ainsi que l'infirmière derrière moi disparurent quelques instants. Surement pour nous laisser que les deux. J'avais les yeux inondés de larmes mais c'étaient des larmes de joie de le revoir avec les yeux ouverts. Je voyais bien que la lumière le gênait alors je m'écartais de lui quelques secondes histoire de baisser la luminosité de la pièce. Nathaniel reprend la parole pour me demander ce qu'il fait ici. Une légère nausée s'empara de moi. Je savais qu'il pouvait y avoir des séquelles mais comment expliquer à son petit ami qu'on a eu un accident de voiture et qu'il a dormi durant six mois suite à ça? Je fis durer le silence en l'aidant à boire un peu d'eau pour sa gorge puis je m'asseya au bord de son lit et prit sa main dans les miennes en faisant attention à ne pas toucher sa perfusion. Je n'ai jamais été douée pour trouver les bons mots. En général, je suis d'une nature assez franche mais là je ne peux pas me le permettre. Nate est déjà suffisamment choqué comme ça. « Eh bien... » Je prends une profonde inspiration. « On a eu un accident de voiture Nate... » J'ai tellement peur qu'il s'en veuille, qu'il pense que c'est de sa faute alors que ce n'est pas le cas. Il a voulu éviter une biche - que je n'avais pas vue - et avec la route mouillée, on s'est retrouvés dans le décor. « C'était y a six mois. » soufflais-je, la mâchoire crispée. Quand je repense à ces six mois que j'ai passé à galérer, à être triste et à souffrir... Maintenant il était enfin de retour et plus ou moins en bonne santé. « Tu as pu te reposer et te remettre de tes blessures et maintenant t'es de retour parmi moi. C'est l'important. » Je lui offre un demi sourire, toujours très émue de le voir avec les yeux ouverts. « Tu ne te rappelles vraiment de rien? » Je penche un peu ma tête sur le côté, curieuse. Après l'accident, j'ai retrouvé un boitier dans la veste qu'il portait ce soir là. Un boitier qui contenait une bague et s'il a oublié l'accident, peut-être qu'il a aussi oublié la soirée et ce qu'il comptait faire. A moins que je ne me fasse des idées. Oui ça doit être ça. Je secoue la tête et déplace ma main sur la joue de mon homme. « Ne réponds pas, il faut que tu te reposes... »