La voix de Neela se mit à retentir dans la maison et Astrée délaissa Carlie à contrecœur pour sortir de la chambre.  La jeune femme descendit donc les escaliers en annonçant sa présence pour rejoindre sa patronne –même si ça faisait toujours bizarre de voir Neela comme telle-. « Salut ! Comment vas-tu ? ». Les deux filles se firent la bise. Comment allait Astrée ? Bien en somme, mais elle ne pouvait s’empêcher d’être légèrement tendue. La jeune maman l’avait sans doute bien compris puisqu’elle fronçait les sourcils d’incompréhension –ou de suspicion-. « Ça s'est bien passé ? … Elle est dans sa chambre ? ». L’adolescente se mordit la lèvre inférieure ne sachant pas trop comment abordé le sujet. « Oui elle est dans sa chambre et en fait… ça c’est très bien passé jusqu’à ce que j’aborde la grossesse de la prof de danse… ». Quelle boulette n’avait-elle pas fait là, elle ignorait tout de la grossesse de Neela et surtout de l’impact que cela avait sur Carlie. La petite avait démarré au quart de tour. Elle avait hurlé contre de tous les bébés du monde et c’était réfugier dans sa chambre sans que sa nounou ne parvienne à la consoler.  « Carlie s’est énervée et elle m’a appris pour votre grossesse… ». Pas de la manière la plus délicate qui soit. Astrée avait bien compris que Carlie n’avait nullement envie d’un petit bébé pour lui faire de concurrence. « Je n’ai pas vraiment réussit à la calmer et j’avoue que je ne sais pas trop ce que je peux ou non lui dire… ». C’est vrai, elle avait sans doute déjà fait des crises à sa mère et Astrée ne voulait en rien dire quelque chose qui soit à l’inverse de ce que Neela pourrait bien lui dire.

Astrée afficha quand même un beau sourire, parce qu’au milieu de la colère de Carlie contre laquelle elle ne pouvait rien, il y avait quand même un heureux évènement. « Mais, Félicitation pour votre grossesse. ». C’était sincère et évidemment, la brunette ne lui en voulait pas de ne l’avoir informé, après tout, elle devait avoir d’autres chats à fouetter.

« Oui elle est dans sa chambre et en fait… ça c’est très bien passé jusqu’à ce que j’aborde la grossesse de la prof de danse… » J'interrogeai la jeune fille du regard. D'une part, je n'étais pas au courant que sa prof de danse était elle aussi enceinte, et d'autre part, le caractère de cochon de ma fille avait une fois de plus fait des siennes. Même avec une baby-sitter qu'elle adorait, Carlie ne pouvait pas s'empêcher de bouder, de se plaindre, ce qui m'inquiétait énormément, parce que cela signifiait que le problème était profond et qu'elle ne changerait pas de si tôt d'attitude. J'allais lui répondre, mais Astrée prit la parole bien avant moi. « Carlie s’est énervée et elle m’a appris pour votre grossesse… » Je m'apprêtais à lui répondre qu'elle ne faisait que ça, même avec nous ces derniers temps, mais je m'étais stoppée en écoutant la fin de sa phrase. « Oh ... » Je la regardais avec un petit sourire, hésitant à être agacée du comportement inacceptable de ma fille ou à être finalement très heureuse d'apprendre cela à Astrée. C'est vrai que je n'avais pas vraiment eu l'occasion de lui parler de ma grossesse, j'aurais dû, c'était même mon rôle, mais à vrai dire, depuis que je l'avais appris, tout s'était enchaîné très vite, si bien que je n'y avais pas pensé.  « Je n’ai pas vraiment réussit à la calmer et j’avoue que je ne sais pas trop ce que je peux ou non lui dire… » Je poussai un petit soupir d'exaspération tout en regardant en haut des escaliers en pensant à ma fille, qui devait être rouge de colère dans sa chambre. Ma fille m'avait très certainement entendu arriver avec le bruit de la porte, mais bien sûr, elle se retenait bien de venir me dire bonjour, la chipie ! Je hochai finalement la tête en posant mon regard sur Astrée. « Ne t'inquiète pas, c'est normal. Je vais m'en charger. » Je lui tendis un petit sourire qui se voulait rassurant. Ça pour la calmer, il fallait être courageuse et ne pas lâcher le morceau ! Non pas que je doutais du courage de la jeune fille, mais Carlie avait un caractère si fort que la calmer n'était pas la tâche la plus facile qui soit, et franchement, je pouvais déjà remercier Astrée de ne pas avoir perdu patience avec elle. Cela me montrait qu'elle était la baby-sitter parfaite, celle dont tous les parents rêvent d'avoir pour leurs enfants. En tout cas, je ne reprochais absolument rien à la jeune fille, elle avait été correcte, et au moins, avait fait preuve d'honnêteté avec moi. C'est vrai que je la comprenais, elle était jeune et qui plus est, ne pouvait pas vraiment savoir ce qu'il fallait lui dire ou non, la situation était tellement délicate et compliquée à la maison ces derniers temps … Malgré le fait que je ne lui avais pas annoncé ma grossesse en temps voulu, Astrée afficha quand même un ravissant sourire, comme pour me prouver qu'elle ne m'en voulait pas. « Mais, Félicitation pour votre grossesse. » Je lui offris à mon tour le plus joli de mes sourires, avant d'afficher une mine un peu gênée. Oui, je considérais qu'Astrée faisait presque partie de notre famille désormais, elle était là tous les jours à la maison, parfois il lui arrivait de rester en pleine nuit, alors forcément, je m'en voulais de ne pas lui avoir dit tout ça plus tôt. « Je suis désolée de ne pas t'en avoir informée plus tôt mais … tu sais, les choses se sont enchaînées si vite. Bref, j'ai totalement oublié. Mais merci Astrée, c'est très gentil à toi. » Avant que je n'oublie, j'attrapai mon sac à main et lui tendis quelques billets, plus que je ne lui devais, mais j'estimais qu'elle le méritait. Oui, pour réussir à supporter ma fille toute la journée, je lui aurais même volontiers donné une médaille d'or ! « Carlie ! Tu veux bien descendre s'il te plait ? » lui demandais-je du bas des escaliers, et d'une voix suffisamment forte pour qu'elle m'entende de sa chambre.

Spoiler:

Les bébés, les bébés. Les gens n’avaient que ça à la bouche. Ils n’avaient que ça dans la tête. En parler avec Astrée m’avait encore énervé. Je n’y pouvais rien parce que je n’en pouvais plus. Je ne voyais pas ce qu’il y avait de beau, magique ou merveilleux. Ce n’était là que pour nous pourrir la vie. Que ce soit à la danse ou à la maison, il y avait des histoires de bébés partout. Et bien sûr, ma maîtresse, cette vilaine, elle ne voulait pas tomber enceinte ! Moi,  j’en avais plus qu’assez. Plus qu’assez que tous mes actes, mes gestes et mes conversations me ramènent à cette réalité. J’avais beau en avoir parlé avec papa et maman rien n’avait changé. Je ne voulais pas de ce bébé. Je ne voulais pas partager ma famille. Je n’acceptais pas l’idée qu’un(e) pseudo frère ou sœur puisse me mettre sous le nez le fait qu’elle avait toujours eu papa à ses côtés. Et que de toute évidence, il l’aimerait bien plus que moi. J’en avais marre de ressasser constamment toutes ces idées. J’avais du mal à dormir la nuit. Et la journée tout me ramenait toujours à ça. Alors c’est vrai que j’étais monté en boudant dans ma chambre. Alors même que je n’en voulais pas du tout à Astrée. Elle était super Astrée. Mais voilà, j’en avais assez.

Maman était rentrée, j’avais entendu la porte claquée. Astrée avait été la voir mais pas moi. Je n’avais pas très envie de me faire rouspéter. Même si je n’allais pas avoir le choix. « Carlie ! Tu veux bien descendre s'il te plait ? ». Bon bah, je n’avais pas franchement le choix. Je descendais de mon lit et traînait les pieds jusqu’à l’escalier jusqu’en bas. « Bonjour maman. ». Non, je n’avais pas l’espoir que cela adoucisse son esprit. Nul doute qu’elle allait m’en vouloir par rapport à Astrée. Surtout qu’elle ne l’avait même pas prévenu de sa grossesse. Je regardais Astrée avec ses longs cheveux bruns et ses beaux yeux bleus. Elle n’avait pas l’air en colère. Elle avait toujours cet adorable sourire rassurant sur le visage. Et quelque part, je m’en voulais un peu d’avoir bouder.  Du coup, je baissais les yeux. Attendant que ma mère lève le ton. Même si dans le fond, ça ne changerait jamais rien au problème.  Mais qu’est-ce qui pouvait réellement changer le problème ? Pas grand-chose, j’avais perdu le combat face au bébé.

Les pas de ma fille descendirent très doucement dans l'escalier, jusqu'à ce que je l'aperçoive enfin des pieds à la tête. Felix étant encore au travail, j'allais devoir régler le problème toute seule pour une fois. « Bonjour maman. » dit-elle poliment. Quand même, j'avais réussi à décrocher un 'bonjour' de ma fille, qui finalement s'était décidée à sortir de sa cachette pour venir me saluer. Comme d'habitude avec ses parents, elle se contentait du strict minimum : bonjour, au revoir, merci. « Bonjour. » lui répondis-je un peu plus froidement que d'ordinaire. J'étais effectivement bien en colère contre ma petite fille. Son attitude m'agaçait, tout simplement, d'autant que maintenant, elle commençait à faire part de tous ses états d'âmes à notre entourage, ce qui était plutôt embêtant. Elle baissait les yeux, n'osait pas me regarder en face, ni moi ni Astrée, comme si elle savait déjà pertinemment qu'elle avait fait une bêtise et qu'elle allait se faire rouspéter. Effectivement, elle n'allait pas s'en sortir comme ça, après ce que je venais d'apprendre de la bouche d'Astrée. Carlie avait encore fait des siennes cet après-midi, profitant apparemment de mon absence pour exprimer son mécontentement envers sa baby-sitter. Je regardais quelques instants ma fille en fronçant les sourcils, les bras croisés. Astrée était notre toute nouvelle baby-sitter, et franchement, je ne tenais vraiment pas à ce qu'elle nous file entre les doigts aujourd'hui à cause du comportement intolérable de Carlie. Avec Felix, nous avions déjà eu beaucoup de difficultés à en trouver une nouvelle, alors maintenant que nous en avions une, ce n'était pas le moment de la faire fuir. Je me mis finalement à la hauteur de ma fille pour lui parler sérieusement de ce qui s'était passé entre elle et sa baby-sitter durant la journée. « Je peux savoir ce qui s'est passé exactement avec Astrée cet après-midi ? » Ma voix était soudainement devenue beaucoup plus douce, parce que je ne voulais pas me fâcher avec ma fille, loin de là. En plus, elle prenait encore cette mine attristée qui me fendait littéralement le cœur, et devant laquelle j'avais bien souvent du mal à résister. Ma fille était mon petit trésor, je ne souhaitais surtout pas la fâcher de trop, encore moins lui faire de la peine, d'autant que je savais pertinemment que si elle était dans cet état, c'était à cause de nous, ses parents, et de notre bêtise. « Elle m'a dit que tu t'étais énervée... Pourquoi ? » lui demandais-je calmement, ne souhaitant pas vraiment m'acharner sur elle. En réalité, je savais très bien pourquoi mademoiselle s'était énervée. Astrée venait tout juste de me l'expliquer, et pourtant je souhaitais l'entendre de la bouche de ma fille. C'était encore et toujours pour la même raison : ma grossesse la dérangeait, Carlie n'acceptait pas la venue de ce bébé, et il n'y avait rien à faire à cela. Bref, Felix et moi étions des parents complètement désemparés face à la situation.

Neela n’était pas des plus ravie par l’attitude de sa fille et Astrée pouvait le comprendre mais, elle ne pouvait pas blâmer Carlie. Elle comprenait que la petite puisse avoir peur, après tout en dix ans –presque onze- elle n’avait jamais eu à partager quoique ce soit. Et à l’école elle devait sans doute avoir des amis avec des frères et des sœurs pas toujours très sympathiques. Bref, ce n’était pas une nouveauté que l’arrivée d’un nouveau-né angoissait les premiers arrivés. « Je suis désolée de ne pas t'en avoir informée plus tôt mais … tu sais, les choses se sont enchaînées si vite. Bref, j'ai totalement oublié. Mais merci Astrée, c'est très gentil à toi. ». La jolie brune afficha un tendre sourire, elle ne lui en voulait pas le moins du monde.  « C’est rien, je ne vous en veux pas, les choses ont dû s’enchaîner très rapidement donc bon. ». Elle lui fit un de ses plus beaux sourires, après tout Neela avait dû le dire à Felix puis à Carlie qui avait donc de toute évidence mal réagi, et puis à sa famille proche, bref ! Autant dire qu’annoncer sa grossesse, Astrée voyait ça comme un énorme marathon.

Neela tendit alors des billets à la jeune femme qu’il les prit avant de constater qu’il y en avait bien trop. « Mais, Neela, il y en a bien plus que prévu là… ». Elle ne voulait pas s’enrichir sur le dos de Neela déjà qu’à la base elle faisait ça plus par plaisir que pour l’argent.

Enfin la jeune maman s’inquiétait plus pour sa fille que pour son argent, sa fille qui n’était pas encore descendue. « Carlie ! Tu veux bien descendre s'il te plait ? ». La petite fille ne les fit pas attendre mais son regard était rivé sur le sol et elle traînait les pieds. Elle n’avait sans doute pas envie de se faire disputer –ce qui était plutôt logique-. « Bonjour maman. ». C’est vrai que Carlie se contentait du minimum, elle n’avait pas l’air ravie. Elle disait bonjour par pur politesse. « Bonjour. ». Vu le ton froid de Neela, elle n’était pas non plus des plus ravies, Astrée commençait d’ailleurs à se sentir… mal à l’aise.

Neela se mit à hauteur de Carlie, pour la regarder dans les yeux. « Je peux savoir ce qui s'est passé exactement avec Astrée cet après-midi ? ». Pas sûre que la petite fille meurt d’envie de lui dire, elle savait très bien que ça n’allait pas être très bien vu. « Elle m'a dit que tu t'étais énervée... Pourquoi ? ». Neela voulait l’entendre de a bouche de Carlie mais la jolie petite fille restait muette et quelque part Astrée culpabilisait un peu mais surtout, elle était triste que les choses se passe comme ça pour eux. « Carlie tu peux le dire à ta maman, tu sais, il vaut mieux crever l’abcès maintenant et en parler calmement. ». L’adolescente lui fit un sourire encourageant même si elle n’était pas sûre que cela soit suffisant.

Maman n’était pas du tout contente. Son « Bonjour. » le montrait bien. Elle était plus froide qu’à son habitude.  Mais bon, je m’y attendais. Elle se mit à ma hauteur, me regardant droit dans les yeux. Elle avait pourtant l’air plus conciliante. Comme si… elle voulait avoir une information. Et c’était sans doute le cas, j’en étais même certaine en fait. Et elle me le confirma rapidement. « Je peux savoir ce qui s'est passé exactement avec Astrée cet après-midi ? ». Elle le savait déjà, je n’avais pas besoin de lui dire. Je préférais baissée les yeux que d’ajouter quoique ce soit. Après tout, sans cela elle allait quand même m’engueuler non ? Alors autant ne pas en rajouter. « Elle m'a dit que tu t'étais énervée... Pourquoi ? ». Pourquoi, pourquoi… elle savait très bien pourquoi et ça ne servait pas à grand-chose de ramener le sujet sur le tapis. Après tout, ça finissait toujours en dispute et j’en avais assez. J’allais encore entendre que j’étais une petite fille capricieuse alors bon… « Carlie tu peux le dire à ta maman, tu sais, il vaut mieux crever l’abcès maintenant et en parler calmement. ». Je levais les yeux vers Astrée. Elle avait cet adorable sourire rassurant qui lui allait si bien. Je m’en voulais de m’être mal comportée avec elle, elle était si gentille. Elle cherchait encore et toujours à arranger les choses. « Mais il y a rien à dire c’est toujours le même problème contre lequel on peut rien faire… ». Le bébé, on ne pouvait rien faire contre. Et pourtant je n’avais vraiment pas envie de ce bébé. Plus les jours passaient plus cette idée me gênait. Je n’étais pas une grande sœur. Je ne voulais pas ne être une. Ni maintenant, ni jamais.

Enfin je m’éloignais de maman pour me rapprocher d’Astrée. Je lui devais quand même des excuses. Parce qu’elle n’y était pour rien dans cette histoire. Et elle ne méritait pas que je m’énerve après elle. « Je suis désolée Astrée, j’aurais pas dû m’énerver… c’est juste que…enfin je suis désolée quoi. Tu reviendrais quand même hein ? ». C’est vrai que j’avais un peu peur qu’Astrée m’en veuille. Qu’elle ne désire plus revenir. Et Astrée elle était quand même super cool comme baby-sitter presque aussi cool Ella. Même aussi cool qu’Ella d’ailleurs. J’espérais sincèrement qu’elle ne tombe pas enceinte aussi… moi je vous dis les bébés c’est que des problèmes !

« Carlie tu peux le dire à ta maman, tu sais, il vaut mieux crever l’abcès maintenant et en parler calmement. » Je vis le sourire encourageant d'Astrée adressé à Carlie, signe qu'elle pouvait avoir confiance parce que j'étais sa mère. Cette adolescente était vraiment formidable, elle me faisait presque penser à Ella, toutes deux avaient un caractère similaire : très douces, brillantes et surtout adorables avec les enfants. Après avoir regardé Astrée avec un sourire, je hochais la tête en direction de Carlie, histoire de lui faire comprendre qu'il ne servait à rien de continuer à faire semblant que tout allait bien devant moi. Parce que ma fille avait beau afficher une mine impassible, j'étais sa maman, je la connaissais mieux que quiconque, et donc elle n'avait rien à me cacher, parce que de toute façon, tôt ou tard, je saurais ce qui la chagrine. Mais en l'occurrence, je le savais déjà, je voulais simplement l'entendre pour en être certaine et remettre les choses à plat, même devant Astrée, qui avait l'air de vouloir rester pour m'aider à régler le problème que j'avais depuis bien longtemps avec ma fille. « Mais il y a rien à dire c’est toujours le même problème contre lequel on peut rien faire… » Je soupirai longuement en la regardant un moment d'un air attristé. Toujours la même réponse venant de sa part. Toujours le même problème avec elle. J'avais l'impression que Felix et moi n'en finirions jamais avec ça. Elle affirmait, elle était même persuadée qu'il n'y avait rien à faire contre ce qu'elle appelait un 'problème', or elle avait l'air d'ignorer qu'elle était en partie responsable de la solution à tout cela. Felix et moi nous étions mal comportés, avions fait une petite erreur lourde de conséquences pour notre famille, mais voilà, nous l'assumions aujourd'hui et Carlie devait l'accepter avec le temps. Après avoir laissé un petit silence s'installer, je déclarais en la regardant dans les yeux, la tenant encore dans mes bras en caressant ses longs cheveux. Un geste tendre que je faisais toujours machinalement comme pour lui prouver qu'elle était, qu'elle resterait ma fille et que je l'aimais plus que tout. « Non on ne peut rien faire c'est sûr, mais toi tu peux faire quelque chose par contre. Tu peux déjà t'excuser auprès de Astrée, et ensuite tu peux accepter d'accueillir ce petit frère ou cette petite sœur, parce que tu sais très bien qu'on vous aimera tout autant tous les deux. Je t'assure que cela faciliterait les choses ma chérie, on se sentirait tous beaucoup mieux, et toi aussi. » Après cela, je déposai un baiser sur sa joue, et c'est sans grand étonnement que je la vis s'éloigner vers sa baby-sitter. Mine de rien, Carlie était très obéissante, et surtout, elle ne cherchait pas à se rebeller, parce qu'elle était aussi une petite fille intelligente, et savait pertinemment qu'elle avait tout intérêt à exprimer ses excuses auprès de la jeune fille si elle voulait qu'elle continue de la garder. « Je suis désolée Astrée, j’aurais pas dû m’énerver… c’est juste que…enfin je suis désolée quoi. Tu reviendrais quand même hein ? » Bien sûr qu'elle reviendrait, il suffisait d'observer l'expression de son visage adorable pour le deviner. Ma fille était quand même merveilleuse, je l'avais bien élevée, c'était dans ces moments là que je m'en rendais compte. Elle était polie, respectueuse et très sage, malgré les problèmes que nous étions en train de rencontrer. Je n'avais pas pu m'empêcher de sourire, attendrie, regardant tour à tour ma fille et Astrée, qui n'avait pas l'air d'en vouloir énormément à Carlie, et avait apparemment déjà accepté ses excuses.

La petite fille semblait bien triste, ce n’était plus tellement la colère qui donnait son visage mais une profonde tristesse. Ce bébé était censé être la vie et pourtant, il avait tout l’air d’en représenter la fin aux yeux de la petite Carlie. « Mais il y a rien à dire c’est toujours le même problème contre lequel on peut rien faire… ». Neela semblait attristée par cette situation, ce n’était sans doute pas la première fois qu’elle entendait cela. Toutefois, Astrée ne pouvait pas nier que Carlie avait raison, il n’y avait pas grand-chose de concret à faire contre une grossesse, il ne pouvait nullement s’agir de son choix à elle, tout ce qu’elle pouvait faire c’était l’accepter. De toute évidence, elle n’était absolument pas prête à ça.  Neela regarda sa fille droit dans les yeux sans jamais arrêter avec ses gestes tendres de maman, c’était beau à voir mais, étrangement Astrée avait comme un doute sur le fait que cela rassure Carlie. « Non on ne peut rien faire c'est sûr, mais toi tu peux faire quelque chose par contre. Tu peux déjà t'excuser auprès d’Astrée, et ensuite tu peux accepter d'accueillir ce petit frère ou cette petite sœur, parce que tu sais très bien qu'on vous aimera tout autant tous les deux. Je t'assure que cela faciliterait les choses ma chérie, on se sentirait tous beaucoup mieux, et toi aussi. ». Neela déposa un baiser sur la joue de Carlie avant de la laisser se retourner vers Astrée. « Je suis désolée Astrée, j’aurais pas dû m’énerver… c’est juste que…enfin je suis désolée quoi. Tu reviendrais quand même hein ? ». L’adolescente afficha un large sourire, elle n’en voulait pas le moins du monde à Carlie alors, elle était d’avance toute excusée.  « Bien sûr que je reviendrai, tu es toute pardonnée Carlie. ». Elle lui fit un petit clin d’œil alors que la petite puce semblait ravie de cette nouvelle.

Carlie était loin d’être un diable, elle était terriblement intelligente, calme, respectueuse, bref, le genre de petite fille qu’on gardait avec plaisir. C’était surprenant qu’elle ait piquée une colère comme elle l’avait juste avant. Bien sûr, parfois elle se vexait –notamment quand elle ratait ses démonstrations de danse- mais, ça ne durait pas bien longtemps. Astrée était donc on ne peut plus surprise de la voir si en colère…et cette colère ne datait pas d’aujourd’hui. Elle se mit alors à hauteur de la petite fille pour lui poser une question qui lui brûlait les lèvres. « Mais dis-moi, qu’est-ce qui t’énerves vraiment à propos de l’arrivée de ce bébé ? ». Elle voulait savoir parce que parfois, c’était important de montrer qu’il y a avait deux côtés des choses, que rien n’était tout blanc ou tout noir. Astrée était certaine que Neela avait déjà tenté de le faire mais, peut-être qu’avec un nouveau soutien, ça rentrerait dans la tête de Carlie. En tout cas, l’adolescente ne se voyait pas partir comme ça et laisser Neela seule face à sa fille de onze ans en pleine crise –bien qu’elle était calmée actuellement, le sujet pouvait vite repartir-.

Maman était triste que je vois ce bébé d’un mauvais œil. Je le savais bien mais pour moi ce n’était pas la meilleure des nouvelles, bien loin de là. Elle me prit dans ses bras, caressant mes cheveux. Je savais que c’était supposé être rassurant mais, c’était presque au pire final. C’était un peu comme si elle confirmait mes doutes, mes craintes, mes angoisses. Comme si elle le faisait maintenant parce qu’il n’y aurait plus d’après. J’avais beau savoir que ce n’était pas du tout l’idée, le principe, ça me trottait dans la tête. Pourquoi essayait-il à ce point de ma rassurer si réellement je n’avais pas à m’en faire ? « Non on ne peut rien faire c'est sûr, mais toi tu peux faire quelque chose par contre. Tu peux déjà t'excuser auprès d’Astrée, et ensuite tu peux accepter d'accueillir ce petit frère ou cette petite sœur, parce que tu sais très bien qu'on vous aimera tout autant tous les deux. Je t'assure que cela faciliterait les choses ma chérie, on se sentirait tous beaucoup mieux, et toi aussi. ». Elle déposa un baiser sur ma joue alors que je me tournais vers Astrée. J’allais m’excuser spontanément de toute façon. Je l’aurais fait qu’elle me le dise ou non. Mais, pour ce qui était d’accepter son bébé… j’avais juste envie d’hurler. Accepter, comme si c’était facile. Comme si ça se faisait d’un claquement de doigt –si tant est que je puisse le faire un jour-. Enfin bon, je présentais mes excuses à Astrée.  « Bien sûr que je reviendrai, tu es toute pardonnée Carlie. ». Elle me fit un clin d’œil et j’affichais un immense sourire. Ravie qu’elle me pardonne.

Enfin, Astrée se mit à ma hauteur. J’étais presque certaine qu’elle voulait arranger les choses. Parce que c’était du Astrée tout craché. . « Mais dis-moi, qu’est-ce qui t’énerves vraiment à propos de l’arrivée de ce bébé ? ». Oulah, il y avait énormément de choses. Beaucoup trop de choses. Je regardais rapidement ma mère. Je doutais qu’elle veuille entendre tout ça mais bon. « Ce qui m’énerves c’est de devoir faire des sacrifices pour quelque chose que je ne veux pas. J’ai pas eu de papa pendant dix ans… et ce bébé sera toujours plus petit que moi, il aura toujours besoin de plus d’attention que moi. Donc, j’aurais plus mon papa pour moi toute seule, ni même mes deux parents pour moi toute seule. ». Je regardais à nouveau ma mère, anxieuse à l’idée qu’elle s’énerver d’entendre ça. « Je veux pas être celle qui doit toujours se débrouiller seule parce qu’elle est plus grande, montrer l’exemple ou s’occuper du bébé. Je veux pouvoir dormir la nuit et continuer à danser. ». Ma mère allait sûrement dire que je ramenais tout à la danse. Mais oui, forcément. Je ne voulais pas me couper de ma passion à cause d’un bébé. Je voulais danser dans ma vie. Enfin bon, j’imagine que dans tous les cas, rien n’était suffisant comme argument.