Si t'as pas d'Curly, mange un ami... Nicholas Palmer & Felix Moorgate
Tout le monde adore les virées entre amis n'est-ce pas ? Filles comme garçons. D'autant plus que, pour ma part, j'habitais loin de mon meilleur ami et il était possible de nous voir uniquement en voyageant un peu de New-York à Arrowsic et d'Arrowsic à New-York. Tandis que tous les autres adolescents que je voyais dans ma petite ville se baladait avec leur meilleur ami chaque jour. Enfin cette situation a changé depuis que Nicholas est venu vivre à Arrowsic : nous nous voyions donc beaucoup plus souvent qu'avant. Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'étais actuellement sur la route, en direction du seul bar de la ville. On ne peut pas dire que j'appréciais vraiment de prendre le volant... C'est pourquoi j'avais en ce moment même diverses pensées, notamment les paroles de la chanson qui résonnait dans l'habitacle, et toute l'histoire avec ma fille, dont je venais à peine de découvrir l'existence, fait que j'ai encore un peu de mal à réaliser... Mais je revins rapidement à la réalité, conscient que j'allais sûrement devenir un vrai danger public si je continuais à me laisser distraire. J'arrivais très rapidement au bar qui allait nous accueillir pendant une heure ou plus, sortis de ma voiture et allait me poser contre le mur du bâtiment en attendant Nicholas. Quelques personnes défilaient devant moi, voire entraient dans le bar, et Nicholas finit par arriver à son tour tandis que je lui serrais la main en souriant, avant de rentrer dans le bar et de m'installer sur un tabouret face au comptoir, attendant qu'un serveur vienne vers nous.
« Alors, quoi de neuf ? »
Le serveur finit par arriver et je commandais ma boisson, laissant Nicholas faire de même.
Sujet: Re: Si t'as pas d'Curly, mange un ami (a) [PV Nicholas] Mar 18 Jan - 12:37
Depuis mon arrivée à Arrowsic, j'avais trouvé un semblant d'équilibre dans ma vie. L'enseignement n'était pas encore devenu mon fort, mais il me semblait tout de même que je m'améliorais. Je n'avais jamais été formé pour être professeur. Oh, bien sûr, j'avais donné des cours en tant qu'assitant à l'université pendant mon PhD, mais donner cours à des étudiants à la fac était complètement différent de mon métier actuel. Les lycéens se montraient souvent irrespectueux, désordonnés et je m'en foutistes. C'était un défaut que je ne cautionnais pas. La plupart de mes élèves n'avait que faire d'ouvrir un livre et de l'étudier. Je me demandais parfois même s'ils étaient tous capables de lire. Au début, j'en avais bavé. Et je m'étais maudit d'avoir pris ce job. Mais j'avais finalement pris mes marques et je commençais à aimer ce que je faisais. D'abord et surtout parce que certains élèves valaient la peine de se lever le matin pour aller donner cours. Je ne me faisais pas d'illusions: je n'avais pas de petits génies dans mes classes et je ne leur donnerais probablement jamais le goût de lire. Mais je me battais pour qu'ils aient au moins un bagage pour entamer des études à l'université, ou pour trouver un job autre qu'éboueur, garagiste ou serveur dans le seul et unique bar de la ville. Malheureusement, c'était le sort réservé à nombre d'entre eux. Soit parce qu'ils ne daignaient pas lever le petit doigt pour étudier, soit parce qu'ils n'avaient pas les moyens de partir étudier. J'encourageais tout de même les plus prometteurs à travailler pour que leur moyenne leur donne droit à une bourse d'études. Et c'était une petite récompense lorsque je voyais leurs notes augmenter, dans mes cours ou dans les autres.
Bref, ce soir, j'avais rendez-vous avec mon meilleur ami, Felix Moorgate. Lui et moi, c'était une longue histoire. On s'était connus à New York lorsque j'y étudiais encore et qu'il était déjà journaliste artistique. C'était peut-être grâce à lui que j'avais accepté d'écrire quelques articles pour le NY Times. Quoi qu'il en soit, on était devenus amis et, le temps faisant bien les choses, il était rapidement devenu mon meilleur ami. On se voyait souvent à NY. Et quand il était retourné à Arrowsic, ça avait été une autre histoire. On n'avait pas perdu contact, mais se voir était devenu plus compliqué. Et puis je lui avais dit vouloir sortir des grandes villes et de leur agitation après avoir obtenu mon PhD de littérature. Il avait eu la gentillesse de se renseigner et avait découvert qu'une place de professeur d'anglais était libre au lycée McDonnell. J'avais postulé et été pris. J'ignore si c'était grâce à lui ou grâce à mon diplôme, mais j'étais là, à Arrowsic, et c'était le principal. Felix m'attendait déjà, appuyé contre la façade du bar. Nous entrâmes et passèrent notre commande au bar. Il n'avait pas l'air en grande forme.
" Je commence à me dire que certains de mes élèves sont des illettrés profonds. Rappelle-moi de te remercier pour m'avoir trouvé ce job. " Je lui souris et nos bières arrivèrent avant qu'il n'ait pu répondre. Je réglai la première tournée. " Et toi, ça va? T'as une petite mine. Tu as trop fait la fête? "
Sujet: Re: Si t'as pas d'Curly, mange un ami (a) [PV Nicholas] Mar 18 Jan - 14:03
De mon côté, je pensais bien avoir trouvé ma voie depuis le début. Je voulais faire ce métier depuis mon adolescence, et y être arrivé était une vraie victoire ! J'avais bien galéré au début dans le métier, juste après ma sortie d'études, et j'avais du batailler un peu et montrer que j'étais le meilleur de tous les candidats pour trouver un job, ce qui n'avait pas toujours bien fonctionné... Mais finalement, je suis là, alors je me dis que j'ai plutôt bien réussi et que d'autres n'ont pas ma chance. Quand j'étais devenu plutôt stable niveau travail, Nicholas en cherchait justement un qu'il pourrait exercer à Arrowsic. Jouant un peu de mes contacts, j'avais réussi à lui trouver une place de professeur dans le lycée de la ville. Alors le voilà à Arrowsic depuis juin, et nous voilà maintenant dans le seul et unique bar de cette petite ville qui m'abrite depuis ma naissance. Je m'installais devant le comptoir et commandait une bière, tandis qu'il fit de même. J'affichais ensuite un petit sourire lorsqu'il m'annonça son impression sur ces lèvres.
« C'est toujours mieux que physicien, avec des études de littérature. »
Il me retourna la question que je venais de lui poser. Une petite mine ? Possible... Des dizaines de pensées n'arrêtaient pas de remuer dans ma tête depuis quelques jours... Depuis que je sais que j'ai une fille en fait. Bon d'accord, je l'aime, même si la connaît à peine, mais avouez qu'apprendre du jour au lendemain que vous avez un enfant alors que celui-ci a déjà dix ans, qu'il grandissait pendant que vous faisiez la fête à droite et à gauche... Il faut le temps de s'en remettre disons.
« J'ai encore un peu de mal à réaliser ce que Charlie m'a avouer, mais à part ça, ça va. »
Je lui adressais un nouveau sourire et but une gorgée de ma bière.
Sujet: Re: Si t'as pas d'Curly, mange un ami (a) [PV Nicholas] Mar 18 Jan - 15:46
Si je n’étais pas encore tout à fait adapté à la vie dans ma nouvelle ville, j’étais optimiste. J’avais déménagé de nombreuses fois auparavant. De Brunswick à Boston, puis Washington et enfin New York. Mes parents m’avaient beaucoup trimballé sans forcément se soucier de mon accord. Certes, je n’avais pas mon mot à dire dans ces décisions, mais j’aurais aimé qu’ils comprennent que déménager n’était pas forcément bénéfique pour moi. J’avais plus ou moins détesté Boston et moyennement apprécié Washington. New York, c’était mon choix. C’était pour l’université. Et si je ne m’y étais jamais senti totalement à l’aise, j’avais réussi à m’y intégrer et à faire avec. Je détestais les grandes villes et j’étais bien heureux de m’en être enfui. Arrowsic était minuscule et chaleureuse, et c’était cela que j’appréciais tout particulièrement ici. J’étais le prof d’anglais du lycée Mc Donnell. Tout le monde, ou presque, me connaissait. Pour mon job de prof, évidemment, car ici, personne ne lisait le NY Times et mes quelques critiques littéraires encore moins. Les gens d’ici n’étaient pas réellement portés sur la littérature. Ni même sur la lecture tout court. A mon grand dam, car la lecture était pour moi le seul passe temps valable, mais j’étais un rat de bibliothèque et je ne pouvais pas exiger à toute la population d’être comme moi. Ceci dit, le sport était tout aussi acceptable à mes yeux, bien que je n’avais jamais été un grand fan de football américain ou de baseball. J’étais plutôt tennis ou course.
Je souris à la remarque de Felix.
" C’est vrai. Mais je n’aurais pas accepté. "
Je n’étais pas stupide. Si j’avais débarqué à Arrowsic, c’était parce que ce poste m’intéressait. Je n’avais aucune idée de la population d’élèves que j’aurais à gérer, par contre. Je m’imaginais qu’un minimum d’entre eux seraient intéressés par ce que je racontais et feraient quelques bons devoirs. Seulement j’avais dû me résoudre à arrêter de décompter les fautes d’orthographes dans certains textes qu’ils me rendaient. A croire qu’ils n’avaient jamais eu cours avant. Mais je ne baisserais pas les bras, j’avais envie que ces gosses aient un avenir autre que pêcheur comme papa, alcoolique comme maman ou dealer comme le grand frère parti à la ville. Ici, c’était une ironie, les gosses rêvaient des grandes villes pratiquement autant que je rêvais d’une petite ville tranquille et sans agitation. Mais je pouvais les comprendre. Arrowsic n’offrait pas beaucoup d’opportunités et on en avait vite fait le tour.
Felix avait récemment appris qu’il avait une fille de dix ans. Il avait du mal à accepter la nouvelle, et je le comprenais tout à fait. J’aurais eu beaucoup de mal à l’avaler aussi si j’étais dans sa situation. Je lui donnai une petite tape sur l’épaule.
" Ouais, je te comprends. Mais vois le bon côté des choses : tu n’auras pas à changer ses couches. "
Je lui souris, sachant pertinemment que ma touche d’humour ne lui plairait guère.
" Je plaisante. Est-ce que tu vas aller la voir ? J’veux dire, Charlie veut bien ? Ca t’aiderait peut-être de la rencontrer, cette môme. "
Je n’étais pas trop bien placé pour parler de ça avec Felix. Je n’avais pas eu de fille dont on m’avait caché l’existence pendant une décennie. C’était énorme pour une petite fille de cet âge. Je me demandais ce que Charlie avait bien pu lui raconter au sujet de son père. Felix était un mec bien et il n’aurait jamais laissé tomber sa copine enceinte. Il aurait pris ses responsabilités. J’en étais sûr. Et maintenant qu’il était au courant, j’étais pratiquement certain qu’il ferait tout pour rattraper ces dix années perdues.
Sujet: Re: Si t'as pas d'Curly, mange un ami (a) [PV Nicholas] Mar 18 Jan - 19:51
Pour ma part, je n'avais jamais déménagé. Mes seuls changements de ville voire d'habitations étaient des vacances ou des week-ends improvisés ou non. À New-York notamment, pour voir Nicholas et d'autres amis que j'avais là-bas. Certains d'entre eux étaient d'ailleurs également venus habiter à Arrowsic. À croire qu'on va finir par se retrouver avec une population supérieure à celle de Los Angeles ici ! Enfin, j'imaginais la galère qu'il pouvait parfois avoir avec les fautes d'orthographes. Je n'avais jamais eu ce problème, puisque j'avais toujours été attiré par tout ce qui touchait à l'art, et la littérature en faisait partie, mais en ce qui concernait les autres matières, mes efforts fournis étaient relativement faibles. On ne peut pas vraiment dire que j'adorais l'école... Il me donna une petite tape amicale sur l'épaule et sa remarque me fit grimacer.
« Ah ah. Très drôle. »
Je réfléchis un instant, dans le silence, mais cet instant fut tellement court que je ne suis pas certain que Nicholas l'ait remarqué.
« Quoi que t'as pas tort ! »
Il me demanda ensuite si j'allais la voir. De toutes manières, même si Charlie n'aurait pas voulu que je la vois, j'aurais insister. Question de logique : si je ne peux pas la voir, pourquoi elle me le dit alors ? Et effectivement, si je l'avais su au tout début, je ne l'aurais certainement pas laissé tomber. Je n'étais pas de ce genre de mec qui rejettent tout de suite la faute sur leur copine lorsqu'elle est enceinte. Au passage, elles ne se fécondent pas toutes seules... C'est n'importe quoi... Enfin bref, buvant une nouvelle gorgée de bière, je lui répondis :
« Normalement oui. Elle était déjà venue avec elle quand elle me la dit. D'ailleurs, je ne sais pas si elle le savait avant de me voir ou si elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait, parce qu'elle m'a regardé avec un grand sourire... Et moi à côté je devais avoir l'air d'un abruti avec la bouche ouverte. »
J'émis un petit rire en imaginant la tête que j'avais du faire ce jour-là, jour qui n'était pas si éloigné pour le moment.
Sujet: Re: Si t'as pas d'Curly, mange un ami (a) [PV Nicholas] Dim 23 Jan - 15:45
J'étais heureux d'avoir retrouvé mon ami. Felix avait souvent été là pour moi à New York et j'avais assez mal vécu le fait qu'il s'en aille. Je ne pouvais pas lui en vouloir, de toute façon. Finalement, je m'en étais remis assez rapidement. Plus que je ne me l'étais imaginé. J'avais eu beaucoup de boulot pour ma thèse et les cours que je donnais en tant qu'assistant. Mon directeur de thèse m'exploitait. Et le mot était faible. Entre les corrections de dissertations, les sujets à imaginer, les bouquins à lire et à comparer, j'avais eu très peu de temps pour penser à autre chose que le travail. En fait, ces dernières années à New York avaient été éreintantes et j'étais heureux d'en avoir fini. Cependant, mes amis new yorkais me manquaient, je ne pouvais le nier. La ville en soi pouvait bien rester où elle était. Le calme d'Arrowsic était bien plus agréable à mes yeux que tous les bars branchés de la Grosse Pomme. Et puis je l'avais voulu, ce déménagement. Je l'avais attendu. Retrouver Felix ici était la cerise sur le gâteau.
Par contre, cette fois ce n'était pas lui qui était là pour moi, mais bien l'inverse. Mis à part qu'il m'ait trouvé mon job actuel. Charlie, son ex, avait débarqué sans prévenir dans sa vie. Et avec elle, une petite fille, Carlie, dix ans. La fille de Felix. Quel choc ça avait été pour moi d'apprendre que mon meilleur ami était papa ! Mais je n'osais même pas imaginer une seule seconde être à la place de Felix. Lui devait en baver, et pas qu'un peu. De mon côté, je ne pouvais que le soutenir, que pouvais-je faire d'autre? Il avait envie de faire confiance à Charlie, je le voyais bien. Mais moi, je ne voyais pas les choses du même oeil, mais je gardais cela pour moi, pour l'instant. Charlie n'était revenue dans sa vie que depuis 24h et, à part cette nouvelle grosse comme un éléphant, elle n'avait pas encore provoqué de dégâts. Pas encore. Je n'étais pas très optimiste.
Felix avait eu l'occasion de rencontrer Carlie. Je brûlais d'envie de savoir à quoi elle ressemblait. Charlie était une très belle femme, nul doute que sa fille et celle de Felix serait un ange. A en voir la réaction de mon ami, il était sous le charme. Il n'en n'était probablement pas conscient. Il n'avait pas l'air de réaliser non plus, ce qui était totalement compréhensible. Je ne sais pas comment j'aurais réagi, si j'avais été à sa place.
" Je pense qu'elle a dû comprendre. Les enfants en savent toujours bien plus qu'on ne le pense. Ils sentent ces choses-là. "
Je pensais sincèrement ce que je disais. Même si Charlie n'avait pas avoué à sa fille qui était Felix, la gamine avait dû comprendre. Et puis elle avait dû entendre la conversation, même si elle avait fait semblant de jouer ou de faire autre chose.
" Pourquoi elle a attendu si longtemps avant de te dire que vous aviez eu une fille ensemble? "
Je ne pouvais pas cacher à mon ami l'inquiétude que j'avais pour lui, ni l'incompréhension que je ressentais. Pour moi, Charlie n'était pas nette sur ce coup.
Sujet: Re: Si t'as pas d'Curly, mange un ami (a) [PV Nicholas] Dim 23 Jan - 21:08
Lorsque j'étais rentré du bar où j'avais revu Charlie et rencontré Carlie, j'étais tout de suite rentré chez moi, à la limite d'être un zombie, et m'était précipité sur le téléphone pour appeler Nicholas. J'avais appelé une fois, et en entendant son "allo", je n'avais rien dit. Bizarrement, le premier prénom qui lui était venu à l'esprit pour deviner qui était son interlocuteur était le mien, alors je me suis bien senti obligé de lui répondre. J'avais nié avoir un problème au début, mais finalement, il me connaissait trop bien et je n'arrivais jamais à lui cacher quelque chose. Et quand je lui avais annoncé la nouvelle, c'était lui qui n'avait plus rien dit, laissant un silence pesant dans mon téléphone.
Et aujourd'hui, nous étions dans ce bar, à reparler de cette histoire. Et Nicholas avait encore une fois raison. Carlie avait sûrement du comprendre que j'étais son père avant même que Charlie ne me le dise. Peut-être par rapport à notre conversation, ou bien à autre chose... Peut-être parce que j'ai regardé Charlie puis Carlie, avec une pointe de jalousie, pensant tout d'abord qu'elle avait refait sa vie. Oui bon, il faut avouer que Charlie est, et était aussi à l'époque, une très belle femme. Alors non, je ne regrette absolument pas d'avoir couché avec elle. Enfin bref, le ton que pris ensuite Nicholas pour me poser sa question me paru étrange. Comme inquiet même.
« Je n'en ai aucune idée justement... Parce que si encore elle me l'avait dit au bout d'un an, d'accord. Mais dix... »
Je pense que si elle m'avait mis au courant avant, j'aurais eu plus de facilité à l'accepter. Et puis j'avais tout de même loupé les dix premières années de ma fille, ses premiers mots, ses premiers pas et tout le reste.
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