« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

« Bougez-vous bande de chiche molle ! » Ashton hurlait encore une fois sur ses élèves, il n’en pouvait plus aujourd’hui, ils ne foutaient rien, ils avaient l’air de loque, à moins que ce ne soit lui qui soit un peu speed et un peu sur les nerfs ? Peut-être bien oui, toujours est-il qu’il les trouvait lent et qu’il avait envie d’une bonne bouteille de whisky –oui, ça ne se comptait plus en verre mais en bouteille- et les élèves avaient bien compris qu’aujourd’hui, il était préférable de fermer sa gueule, certains prétendaient que c’était à cause d’Ella, elle semblait particulièrement énervé en ce moment –parce qu’elle avait rompu avec Mattia, disaient les rumeurs sans savoir- d’autres prétendaient simplement qu’il était en manque de cul, mais, personne n’avait cerné qu’ils feraient mieux de tous fermer leur grande gueule et d’éviter d’écouter les rumeurs parce que le professeur finirait pas une claquer un contre un mur et lui foutre son point dans la gueule.

La journée passa sur le même ton, Ashton pestant contre ses élèves, excluant le premier capable de le faire chier, fuyant ses abrutis de collègues et rageant contre la machine à café –trop indigeste pour lui qui avait surtout envie d’alcool-. C’est donc naturellement qu’Ashton avait fini par s’acheter quelques trois bouteilles qu’il avait posé dans sa voiture, ouvrant la première et laissant glisser l’alcool dans sa gorge Il en but une, pratiquement d’une traite, se disant que bordel ça faisait du bien et qu’il se retrouvait enfin alors qu’il s’égarait. D’ailleurs, il ne savait même plus pourquoi il buvait, pourquoi il allait mal tout ce qu’il savait c’est que la grossesse de sa sœur et en avait rajouté une couche et qu’il n’en revenait toujours pas, du comportement de sa sœur, de son manque d’égoïsme. Voilà ça faisait une raison de plus pour entamer la deuxième bouteille et de se livrer à l’ivresse. C’était inutile de préciser qu’il l’avait terminé elle aussi, ce qu’il fallait préciser c’est qu’il avait laissé la dernière dans le coffre en cas de besoin, au cas où l’ivresse ne soit pas assez importante.

Bref, malgré tout ça, Ashton n’avait pas envie de rentrer chez lui et d’être seul avec lui-même, il aurait bien appelé Gracie mais, il ne voulait pas la déranger, elle devait profiter de sa soirée avec son fils, de plus, même si elle ne le jugerait en aucun cas, elle n’aimerait certainement pas savoir que son ami avait encore bu comme un trou. Conclusion ? Il était descendu de sa voiture pour arpenter les rues d’Arrowsic, à la recherche de quelque chose d’inconnu, il voulait simplement oublier sa colère et ses soucis, faire quelque chose de simple qui lui change les idées. Il marchait sans but – et sans tituber, monsieur tient l’alcool, attention -mais, finalement ça le détendait, surtout en fumant cette petite cigarette, il avait arrêté il y a longtemps et avait finalement reprit suite à la rupture avec sa femme.

Non, il n’avait pas l’intention de s’énerver ce soir, il l’avait fait toute la journée et les vapeurs de l’alcool commençait à l’apaiser mais, ceci fut de courte durée. Son regard se posa sur un jeune blondinet, qui était posé sur un banc, le sac de sport à côté de lui, même avec quinze verres de vodka, dix grammes de cocaïne et huit shooter de tequila, il l’aurait reconnu –non non, ce n’était pas une exagération du tout-. L’ex petit ami de sa sœur, celui qui l’avait mis enceinte, oui maintenant c’était les premières choses qui lui venait à l’esprit mais, il ne tombait pas si mal, il fallait qu’il lui parle qu’il sache et qu’il lui explique quelques trucs. Du coup, Ashton avait décidé que c’était maintenant tout de suite, il ne lui laisserait pas l’occasion de s’évader. « Mattia » Dit-il en se mettant face à lui ne sachant pas trop s’il était sympathique ou neutre, se foutant bien du ton qu’il utilisait et ce qu’on pensait de lui, ce qui comptait c’était les réponses du jeune homme. « Tu tombes bien, faut qu’on parle de la grossesse d’Ella. » Le tact et lui ? Une grande histoire d’amour !

Quand on a une journée de merde, il est rare que le soir, ça s'arrange. Comme une loi de maths, il n'y a que peu d'exception. Mattia allait vite le découvrir ce jour-là; et il ne ferait en aucun cas parti de ces exceptions justement.

Arpentant les rues d'Arrowsic, son sac de tennis sur son épaule, Mattia déambulait, quelque peu perdu. Il n'avait pas envie de rentrer chez lui, il était bien trop énervé pour ça. Il avait eu une journée de merde. Vraiment, une journée de merde! Il avait eu cours de philo pour commencer, et rien que ça, ça promettait une mauvaise journée. Puis, il avait eu maths. Le prof lui avait demandé de faire un exercice, qu'il n'avait pas fait, et parce qu'il devenait de plus en plus têtu et l'avait répondu, il avait finit par le coller pour insolence. De l'insolence, tu parles! Et comme ce n'était pas encore fini, il avait été à son entrainement de tennis. Là encore, ce fut une catastrophe.. Il aurait joué avec sa main gauche, ça aurait été pareil. Résultat, il s'en était pris violemment à sa raquette, et l'avait cassé à tel point que jouer avec, relèverait d'un défi. Et s'était donc fait engueuler pour avoir réagit aussi violemment.

Alors, plutôt que de rentrer chez lui, de croiser le regard dans le vide de sa mère, ou d'observer du coin de l'oeil le regard haineux de son beau-père, il avait préféré passer son temps dehors. Histoire de se calmer. Histoire de ne plus s'énerver. Histoire de s'apaiser. Et rien de tel pour ça que d'être loin de chez lui, loin de chez eux.
Il s'était alors assis sur le dos d'un banc, avait posé son sac à côté de lui, et avait fourré son casque sur sa tête pour écouter de la musique. Comme pour continuer sur son mauvais sort, son casque n'avait délivré aucune mélodie. Pestant, il avait alors changé, et avait mis d'autres écouteurs dans ses oreilles. Cette fois, son MP3 marcha, et rapidement, il entendit le son d'une chanson. Ne sachant pas vraiment pourquoi, il se mit aussitôt à penser à Ella.

Parce qu'elle attendait un bébé.
Parce qu'il lui en voulait.
Parce que cette situation était ridicule.
Parce qu'elle lui manquait.

La dernière note sonnait à sa fin lorsqu'il entendit un « Mattia ». Relevant la tête prestement, Mattia se retrouva nez-à-nez avec Ashton. Ashton, soit l'une des personnes qu'il désirait par-dessus tout éviter ces dernier temps. Et merde! La journée se finissait donc aussi nullement que ce qu'elle avait commencé !! Putain, ce fichu destin ne pouvait pas lui foutre la paix un moment? NON? C'était trop demandé? Ses yeux s'étaient agrandit, et il ressentit une petite douleur dans le ventre. Le stress. Il montait ce fichu stress! « Tu tombes bien, faut qu’on parle de la grossesse d’Ella. » Charmant.. Quel calme. Ainsi donc, c'était vrai. On disait ces derniers temps qu'Ashton Clarke était de très mauvais poil. Mattia ne l'avait pas encore vérifié vu qu'il n'avait pas été à son dernier cours -et cette fois, il avait une excuse valable-. Mais les bruits couraient comme quoi il était intenable..
Se retrouvant ainsi tout près d'Ashton, Mattia se sentit mal à l'aise. Parce qu'il savait qu'il avait fait une connerie avec Ella. Parce qu'il l'avait envoyé valser, et que s'il était au courant de ça, ça risquait de mal se passer entre eux. Et puis, surtout, il sentit quelque chose de bizarre. C'était quoi cette odeur? Il aurait dit de l'alcool.. Fronçant les sourcils, Mattia se releva de son banc, où il avait posé ses fesses sur le dossier quelques minutes plus tôt. De là, il était plus haut qu'Ashton. Ca ne dura pas longtemps. Il descendit les pieds du banc, et dût bousculer légèrement Ashton au passage. « T'as qu'à en parler avec elle, moi, j'ai strictement rien à te dire là-dessus!» Tout en disant ces mots, Mattia enleva ses écouteurs de ces oreilles, et attrapa son sac. Il n'avait qu'une idée; filer d'ici. Filer le plus loin possible. Filer et ne plus sentir cette odeur d'alcool. Filer et ne pas devoir supporter les foudres d'Ashton. Filer et surtout, filer le plus loin possible d'Arrowsic. Dans l'idéal, c'était ça son rêve. Se barrer de cette putain de vie. Se sauver de ce putain d'endroit, de ces satanés profs, de cette histoire invraisemblable. Qu'on le laisse tranquille pour une fois!

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Le jeune homme releva rapidement la tête, certainement –désagréablement- surpris d’entendre la voix du frère de son ex petit-ami et accessoirement prof de sport –accessoirement parce que Mattia n’avait pas assisté aux cours depuis un certain temps-. Il devait maudire la terre entière d’avoir croisé le brunet ce soir mais, lui, trouvait que ça tombait plutôt bien, il n’aurait pas à lui courir après dans tout le lycée pour lui expliquer qu’il avait plutôt intérêt à laisser Ella tranquille en autres petits sujets à aborder. Oh non ils n’allaient pas parler de sujets léger et peut-être même qu’à côté de leur conversation un cours de philosophie lui semblerait plus intéressant. Parler d’un bébé à dix-sept ans dont on était le père, non franchement, il y avait mieux comme sujet, tout comme parler de sa petite amie trop naïve pour prendre soin d’elle, non Mattia n’avait pas de chances, surtout que son professeurs avait bu ce qui signifiait qu’il allait avoir encore moins de tact qu’à son habitude. D’ailleurs, l’adolescent avait l’air d’avoir senti l’alcool mais, ça Ashton en avait rien à foutre, il n’avait pas l’intention de parler de ses problèmes et comme il était en dehors de l’établissement scolaire, il ne risquait rien.

Toutefois, Mattia n’avait pas l’air de tenir à cette conversation –comme si c’était une surprise, tiens-. Et se leva assez rapidement prenant grand soin de bousculer le professeur au passage en crachant quelques mots qu’il aurait peut-être dû retenir. « T'as qu'à en parler avec elle, moi, j'ai strictement rien à te dire là-dessus!» Rien ? Il ne voulait rien dire surtout mais il avait des tas de choses à lui dire, là était toute la nuance. Ashton voulait notamment savoir ce qu’il comptait faire lui et le mettre en garde sur certaine chose que la blondinet n’avait pas intérêt à transgresser. Il retira ses écouteurs et attrapa son sac, désireux de partir contre l’avis d’Ashton mais, l’adolescent n’avait pas encore compris qu’il avait affaire à un Ashton encore plus têtu que d’habitude et que quoiqu’il dise ou fasse, il n’échapperait pas à ce moment. Ella allait porter un bébé pendant son ventre pendant neuf mois ou se faire avorter, elle allait affronter ça sans lui alors étant donné que ça venait de ses couille il pouvait bien affronter le regard du grand frère de celle qu’il avait mis enceinte pour mieux l’abandonner.

Ashton attrapa le jeune tennisman par le premier bout de peau qui lui tomba sous la main, c’est-à-dire, son oreille. Oui, Ashton attrapa son élève par l’oreille pour le forcer à revenir tout à côté de lui à et s’asseoir sur ce banc où il allait rester un moment. Il était préférable pour la survie du jeune homme pour qu’il n’attaque pas trop Ella –surtout vu comme elle avait été adorable avec lui – et qu’il ne tente pas de s’évader –autrement il finirait par ne plus pouvoir mettre une seule fille enceinte-. « J’en ai déjà parlé avec Ella alors tu ferais mieux de te calmer et de me donner quelques explications. » Ce n’était pas une consigne mais un ordre, Mattia devait bien se rappeler de ce jour où Ashton les avait surpris avec sa sœur, il devait se souvenir de ses paroles. « Qu’est-ce que tu comptes faire concernant votre enfant ? Et Ella ? » il savait que le jeune homme n’en voulait pas –quand bien même il l’aurait déduit de sa réaction- mais , il voulait que le jeune homme lui dise les yeux dans les yeux, qu’il soit sûr de lui et surtout qu’il lui dise ce qui comptait faire avec Ella –hors mis la larguer-.

Prêt à s'en aller, Mattia sentit une vive douleur sur son oreille. Il fit un pas en avant, et comprit à ce moment-là ce qu'il se passait; son corps entier restait bloqué, pris entre deux feux -Ashton et la fuite-. Cet enfoiré le tenait par l'oreille! Sans avoir le temps de dire quoique ce soit, il se retrouva, de nouveau assis sur le banc. Là, il fit un geste sur le côté, balançant violemment son bras sur le bras d'Ashton pour libérer son oreille. Une fois qu'il fut enfin libre, il lança un regard noir à son assaillant.

Ce dernier ne se laissa pas démonter. « J’en ai déjà parlé avec Ella alors tu ferais mieux de te calmer et de me donner quelques explications. » Il ferait mieux de se calmer? Sérieux??! Mattia avait envie de lui hurler dessus, de lui demander lequel des deux semblait le plus énervé. Parce que la réponse était facile à trouver. Mais pour toute réponse, il se contenta de lui lancer, un énième regard noir. « Qu’est-ce que tu comptes faire concernant votre enfant ? Et Ella ? ». Là, ce fut trop. Trop pour un jeune de dix-sept ans. Trop pour Mattia. Il s'exclama alors, en regardant bien Ashton dans les yeux. « NOTRE enfant? » Un léger rire sortit de sa bouche. Comme si les paroles d'Ashton étaient drôles. Comme si c'était un grand clown qui se trouvait devant lui. Mais en réalité, ce rire, c'était un rire ironique. Un rire gêné.

Et cette fois, il ne se laissa pas démonter à son tour. Ses yeux levés, rivés sur Ashton, il ouvrit la bouche. « Qu'est-ce que j'en sais s'il est de moi, hein? » Après tout, c'était vrai. Une femme enceinte attendait un bébé. L'on dit que son compagnon n'est pas le père une fois sur trente. Dans leur classe, il y avait un gosse qui appelait « papa » un type qui n'était pas biologiquement le sien, et qui ne le savait pas. Pris dans sa lancée, ses yeux lançant des éclairs, et il continua, toujours aussi furieux; parce que cette histoire, ça le mettait en rogne. « Tu ne sais pas ce qu'Ella fait dans les soirées, et moi non plus! »

Oui, c'était con d'exploser de la sorte. De laisser sortir tout ça. D'insinuer de telles atrocités sur Ella. Sur la fille qu'il avait tant aimé. Parce que là, il sous-entendait quelque chose. Il sous-entendait qu'il avait un doute sur sa paternité. Comme si Ella était capable d'une telle chose; d'aller voir ailleurs, de laisser Mattia endosser ce rôle.. Mais lui, lui, il n'en pouvait plus. Toute cette histoire lui montait à la tête. Il se sentait paumé, perdu. Il avait suffit d'une phrase prononcée par sa petite amie pour que Mattia, tout comme elle, se retrouve propulsé, à seulement dix-sept ans, dans le monde des adultes. Un petit chez les grands. Et cette vie-là, ça l'étouffait. Il avait l'impression de se faire écraser sous le poids de son innocence.

Et puis, aussitôt après avoir lâché ces mots, il se releva. Debout, face à Ashton, il n'hésita pas. Il aurait mieux fait de se taire. Sans doute. Mais qu'importe. S'il l'énervait à son tour, ce n'était pas grave. De toute façon, cette conversation autour d'Ella, du bébé, ne pouvait pas rester calme. C'était bien trop fort pour lui. Sa langue était incapable de rester clouer dans sa bouche, ses lèvres incapables de rester immobiles. D'une voix, cette fois plus douce, plus calme, pour que ces mots imprègnent bien l'esprit d'Ashton, il lâcha un « Elle a très pu aller baiser avec un autre type! » étouffé dans sa respiration quelque peu haletante. Comme si c'était vrai, comme si il en souffrait lui-même. Et en réalité, il l'espérait. Il priait presque pour qu'Ella se souvienne, d'un coup, qu'un jour, elle avait été voir ailleurs. Il aurait aimé souffrir comme ça. Et franchement, s'il apprenait de sa bouche qu'elle l'avait fait cocue, il irait directement la vénérer. Elle aurait un temple à son nom, et Mattia deviendrait l'un de ses plus grands fidèles.

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Le gamin lançait des regards noirs à son bourreau comme si cela pouvait changer la situation, ça ne faisait même pas frissonner Ashton, il n’en avait rien à faire, que Mattia vienne à le haïr ne changerait rien parce qu’il était aveuglé par l’amour qu’il portait à sa sœur. Est-ce que lui, il détestait Mattia ? Non pas du tout mais, il ne supportait pas ce comportement puéril du gosse incapable d’avoir une conversation censée et réfléchie, il avait dix-sept ans merde ! Certes, à cet âge c’était le début de l’apogée de la jeunesse et des conneries en tout genre mais, c’était aussi le début de la raison, de la réflexion, l’âge où on mûri et on commence à prendre certaines décisions en ayant posé le pour et le contre. La tension était palpable entre eux, parce qu’Ashton avait bu et que même s’il n’était pas énervé –du moins pas plus que dans son état naturel ces derniers temps- il n’était pas sympathique pour autant et que Mattia n’aspirait qu’à se lever, hurler et partir mais, il n’était pas aussi simple de se débarrasser du grand frère, s’il voulait crier, Ashton pourrait crier plus fort que lui. Alors qu’Ella ? Elle n’osait même pas crier sur un chien alors forcément, la difficulté était moindre. Enfin, l’adolescent posa son regard sérieux sur celui d’Ashton qui ne l’était pas moins avant de s’exclamer. « NOTRE enfant? » Là il ne marquait pas des points avec son petit rire ironique qui ne plaisait nullement à Ashton, il n’aimait pas qu’on se paye sa tête ni celle de sa petite sœur alors les deux en même temps ? Il ne savait pas ce qui le retenait de lui casser les dents en les explosant contre le rebord du banc. Mattia pouvait remercier cet élan de conscience ou cette force supérieure, sans ça, il n’aurait plus de dents à l’heure actuelle, et là, même avec toutes ses capacités génitales, il ne mettrait plus personne en cloque. « Qu'est-ce que j'en sais s'il est de moi, hein? » Et il continuait ? Certes il ne démontait pas cette fois mais, il poussait le bouchon un peu loin, la question n’avait aucun sens parce qu’il s’agissait d’Ella Babe Clarke. Ashton restait littéralement impassible, attendant que l’adolescent termine de déverser son lot de connerie, parce qu’il sentait que ce n’était pas fini, son sang bouillonnant le faisait comprendre aisément. « Tu ne sais pas ce qu'Ella fait dans les soirées, et moi non plus! » Quel argument de choc ! Ella n’allait que très rarement en soirée et elle ne buvait que très peu –quand bien elle restait affreusement raisonnable- et Ashton était certain qu’elle ne fréquentait aucun autre garçon que Mattia en étant consentante – et il ne valait mieux pas qu’elle ait subi des rapports non consenti au risque d’une fusillade dans le lycée- parce que sa sœur était droite dans ses bottes et qu’elle avait toujours eu une sainte horreur de l’infidélité, ne comprenant pas comment on pouvait faire ça à quelqu’un qu’on aime et elle était folle amoureuse du blondinet –elle l’avait encore prouvé l’autre jour-.

Le jeune se leva, face à son professeur, qui le regardait avec colère et sérieux, sans pour autant bouger ou répondre à ses accusations mensongères – mais, cette situation n’était que provisoire, Mattia devait s’attendre à recevoir le boomerang en pleine gueule-. « Elle a très pu aller baiser avec un autre type! » Là, Ashton se leva pour empoigner l’adolescent par le col et le lever du sol, Ashton en avait rien à foutre des protestations du blondinet, il était exaspéré par ce comportement et avait bien l’intention de lui faire comprendre, puis, Mattia avait de la chance, c’était mieux que de se faire frapper, surtout qu’à l’heure actuelle, Ashton ne mesurait pas sa force. « Oui VOTRE enfant ! Je te rappelle qu’on parle d’une gamine qui n’a pas les pieds sur Terre qui a lu au moins cinq cent fois Roméo et Juliette, une gamine persuadée que l’amour éternel existe et qui rêverait de faire la fête avec la fée clochette. En ayant été son petit-ami tu ne sais toujours pas qu’elle fait passer la vie des autres avant la sienne ? Elle n’aurait jamais pris le risque de détruire ta vie si elle n’était pas certaine que tu es le père de son bébé. Alors tes conneries tu les gardes pour tes potes au lycée mais, tu ne me la feras pas à moi Mattia ! » Ça c’était dit, Mattia pouvait bien faire croire ce qu’il voulait à ses copains crédules mais, au frère de cette ex qu’il avait mis enceinte ? Non, ça ce n’était pas possible, il aurait mieux fait de le fermer plutôt que de nier. Ashton tenait toujours le morveux par le col et il n’était pas encore prêt à le lâcher, il n’avait pas fini. « Mais, l’idée d’être cocu à l’air de te plaire, c’est sûr passé du rôle de coupable à celui de victime, ça serait le pied. Mais vous êtes deux coupables dans l’affaire Ella et TOI ! Alors si tu as tant de doute sur ta paternité, je suis prêt à payer tous les tests que tu veux pour que la preuve qu’il s’agit bien de ton enfant soit sous tes yeux. » Oui, il était prêt à aller jusqu’à dans l’Ohio où il effectuait des tests de paternités avant même la naissance du bébé –et fiable à plus de 99%- il était prêt à payer des fortunes pour que le blondinet cesse enfant sa petite crise de pseudo petit copain cocu et qu’il casse de salir Ella de la sorte. Il reposa les pieds de Mattia sur le sol sans pour autant lâcher son col. « Si tu es capable de penser ça d’elle, ne t’en approches plus. Plus de messages, de regards, de gestes, ne lui adresse plus la parole, tu l’oublies et je ne veux pas t’entendre balancer quelconque rumeur pour la détruire un peu plus, sinon, je vais me charger de ton cas un peu plus sérieusement. Tu ne veux pas de ce bébé c’est une chose, c’est ton choix, nous sommes d’accord mais, par la même occasion tu sors ma sœur de ta vie et t’as pas intérêt à tenter d’influer dans son choix, compris ? » Non, il ne plaisantait pas, si Mattia était réellement capable de penser cela de la jeune Clarke, il était totalement hors de question qu’il reste dans sa vie, surtout qu’en ce moment elle n’avait pas besoin de ça, il y avait déjà foutu un sacré carnage, pas besoin d’un ouragan en plus. Cela ne voulait pas dire pour autant qu’il n’allait pas faire ce que sa sœur lui avait demandé mais, elle ne lui avait jamais interdit de parler à Mattia et de le sortir de sa vie –bon à la base ce n’était pas son intention mais, il ne pouvait pas décemment parler d’elle comme ça-, c’est fou comme les gens change de discours quand les choses tournent au vinaigre… Mattia en était la preuve vivante.

Enerver Ashton était de loin la plus mauvaise idée que Mattia avait eu ce jour-là. D'autant plus qu'il avait bu. Ca se sentait à plein nez. Debout, tout près, face à lui, Mattia en était presque écœuré. Cette odeur, il la détestait. Vraiment. Quand il était dans une soirée, et que lui-même, il buvait, ou qu'il sentait l'odeur dégueulasse de ces potes, ce n'était pas pareil. Là, il ne disait rien. Mais ici, en plein jour, quand son nez était sous celui d'Ashton, et que ses narines étaient emplis de cette odeur nauséabonde, il avait une seule envie ; gerber.

Le regard rivé sur Ashton, la respiration quelque peu haletante, Mattia cessa de vociférer. La réaction de son professeur ne tarda pas. L'alcool sans doute. Il se retrouva bientôt, presque pendu, tenu par ses vêtements, et par un Ashton qui lui serrait le col. Protestant alors, râlant, rien n'y fit. Et là, la grande tirade d'Ashton commença (Ashton était connu de tout le lycée comme étant le prof à éviter quand il vous engueulait; il était capable de parler en vous arrachant les oreilles, et ce, pendant de très très longs moments). « Oui VOTRE enfant ! Je te rappelle qu’on parle d’une gamine qui n’a pas les pieds sur Terre qui a lu au moins cinq cent fois Roméo et Juliette, une gamine persuadée que l’amour éternel existe et qui rêverait de faire la fête avec la fée clochette. En ayant été son petit-ami tu ne sais toujours pas qu’elle fait passer la vie des autres avant la sienne ? Elle n’aurait jamais pris le risque de détruire ta vie si elle n’était pas certaine que tu es le père de son bébé. Alors tes conneries tu les gardes pour tes potes au lycée mais, tu ne me la feras pas à moi Mattia ! » Il gueulait, gueulait, tandis que Mattia essayait de se sortir de ce mauvais pas, râlant toujours pour qu'il le lâche enfin. « Mais, l’idée d’être cocu à l’air de te plaire, c’est sûr passé du rôle de coupable à celui de victime, ça serait le pied. Mais vous êtes deux coupables dans l’affaire Ella et TOI ! Alors si tu as tant de doute sur ta paternité, je suis prêt à payer tous les tests que tu veux pour que la preuve qu’il s’agit bien de ton enfant soit sous tes yeux. » Allez, parle, parle, mais fiche lui la paix! Là, pendu, il commençait à se sentir super mal. Secoué, forcé de sentir cette odeur nauséabonde, il avait toujours cette envie de gerber. Mais qu'est-ce qu'il avait fait, bon sang pour mériter ça? Hein?

Cette fois, enfin, il retrouva la terre ferme sous ses pieds. Les mains d'Ashton toujours autour de son cou, pressées contre son col, il l'entendit terminer sa tirade. « Si tu es capable de penser ça d’elle, ne t’en approches plus. Plus de messages, de regards, de gestes, ne lui adresse plus la parole, tu l’oublies et je ne veux pas t’entendre balancer quelconque rumeur pour la détruire un peu plus, sinon, je vais me charger de ton cas un peu plus sérieusement. Tu ne veux pas de ce bébé c’est une chose, c’est ton choix, nous sommes d’accord mais, par la même occasion tu sors ma sœur de ta vie et t’as pas intérêt à tenter d’influer dans son choix, compris ? »

Sonné, le jeune homme n'avait pas vraiment tout écouté. Il avait retenu quelques vagues idées. D'un, qu'il était le père. De deux, qu'il n'allait pas devoir s'occuper d'Ella. Mais c'était si facile que ça franchement? Quand enfin, il réussit à reprendre totalement ces esprits, Mattia n'en avait pas fini. Il était toujours aussi en colère; c'était sa façon à lui de ne pas s'effondrer. Parce qu'il avait drôlement peur. Peur de son avenir. Peur d'Ashton aussi. Et surtout, peur que tout le monde sache qu'il allait être père; son beau-père y comprit. Cette peur, c'était la plus grande de toute, et il n'était pas capable de l'exprimer haut et fort. Les gens ne pouvaient pas comprendre; les gens ne comprendraient pas. Alors, secouant la tête, doucement de gauche à droite, il murmura à l'intention de son professeur. « Tu comprends pas. » Non, il ne comprenait pas. Personne ne pouvait comprendre de toute façon. Ils étaient là, à vivre leur petite vie, sans se rendre compte que ça, c'était un drame. Etre parent à 17 ans. « Tu le dis trop tard tout ça. Ta soeur est déjà sortie de ma vie, je n'en veux pas de ce gosse, ni maintenant, ni après. » Cruel. Ces mots n'étaient pas taillés dans la demi-mesure. C'était pourtant vrai, sa soeur ne faisait plus partie de sa vie. Il l'avait lâché. Proprement. Pour avoir eu un utérus si douillet. Mais la réalité était tout autre; il attendait un sms d'Ella chaque fois qu'il entendait la petite musique de son téléphone, il pensait à Ella chaque fois qu'il ouvrait son tiroir où restait caché des préservatifs, il la revoyait dans ces pulls quand il rangeait son armoire, il la voyait virevolter dans l'eau dès qu'il allumait la télé, et qu'une piscine pointait le bout de son nez sur l'écran. Elle l'obnubilait. Mais ça, par fierté, il n'osait pas lui dire. Il ne savait même pas si Ashton apprécierait ou pas qu'il balance ça. «  Et puis, tu sais, si Ella veut se débarrasser de ça, de ce truc dans son ventre, la solution est toute simple; elle n'a qu'à avorter. Après tout, pourquoi sa vie serait plus importante que la nôtre? » Pour lui, c'était la solution la plus sage, la plus simple. Pas un seul instant, il n'imaginait ce que ça pouvait faire, de se faire retirer un bébé de son ventre. Pour lui, c'était juste enlever un truc, comme aller chez le dentiste pour enlever une carie. Alors, haussant les épaules, il s'en alla lui dire « Qu'elle avorte! Elle pourra poursuivre sa carrière tranquillement comme ça! » C'était aussi simple que ça..

Une fois qu'il eut dit ça, il posa ses deux mains sur les bras d'Ashton. Il voulut se libérer, laisser son col enfin tranquille. Qu'il puisse respirer correctement. « Lâche-moi!! » lâcha-t-il, espérant que cette fois, il l'entendrait.

Spoiler:

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Mattia semblait toujours aussi en colère si ce n’était pas plus, en même temps, deux impulsifs face à face ça ne pouvait que faire des étincelles dans telles conditions. Le jeune homme secoua la tête de gauche à droite avant de s’adresser à son professeur en murmurant. « Tu comprends pas. » Comprendre quoi ? Qu’il ne voulait pas être père à dix-sept, oh ça, si, il le comprenait ! Mais ce qu’il ne comprenait pas en revanche c’est qu’il enfonce Ella comme ça et qu’au lieu d’assumer ses torts et d’affirmer sa position il agisse comme un véritable crétin. « Tu le dis trop tard tout ça. Ta soeur est déjà sortie de ma vie, je n'en veux pas de ce gosse, ni maintenant, ni après. » Ouais, le pire c’est que plus ce gosse parlait plus Ashton avait l’impression d’avoir laissé sa sœur entre les mains d’un parfait abruti, il avait réellement envie de lui foutre un poing dans la gueule et de la faire ravaler sa cruauté –totalement gratuite qui plus est- parce qu’Ashton avait très bien compris qu’il ne voulait pas du bébé. « Je tenais simplement à ce qu’on soit sur la même longueur d’onde concernant Ella parce que pour le bébé, j’ai bien compris. » Ashton crachait ses mots avec une haine qu’on ne pouvait pas ignorer, le blondinet ignorait ce que c’était d’avoir une sœur, d’être le grand frère mais, il pouvait voir les réactions que ça pouvait provoquer, pourtant, ça ne le dissuadait pas de continuer à chercher des noises au grand frère, à croire qu’il tendait le bâton pour se faire battre. « Et puis, tu sais, si Ella veut se débarrasser de ça, de ce truc dans son ventre, la solution est toute simple; elle n'a qu'à avorter. Après tout, pourquoi sa vie serait plus importante que la nôtre? » Ashton grinça des dents, autant il trouvait que sa sœur manquait d’égoïsme autant ce gosse en débordait, en entendant de telles paroles, Ashton en avait la gerbe, la colère montait. Il ne comprenait rien ce petit merdeux, il ne savait pas ce que c’était de perdre un enfant, il était trop con pour comprendre qu’Ella ne s’en remettrait pas ! Ashton était écœuré de voir qu’il la connaissait si mal, à croire que leur couple avec fonctionné parce que tous les deux un amour démesuré pour le blondinet, sinon Mattia aurait pesé ses mots, il n’aurait jamais sorti ça comme ça en sachant qu’Ella se sentirait coupable toute sa vie. Ashton serra un peu plus fort alors que l’adolescent s’enfonçait un peu plus et en toute beauté. « Qu'elle avorte! Elle pourra poursuivre sa carrière tranquillement comme ça! » Sa carrière, non mais, elle n’était pas comme lui ! Certes, Ella serait capable d’avorter dans l’espoir de reprendre la natation synchronisée mais, bouffée par les remords, elle serait incapable d’effectuer un programme à la perfection comme avant, elle finirait par abandonner. Non, sa carrière à elle était définitivement foutue, à moins d’une fausse couche –et encore- elle devait faire une croix là-dessus, Ashton le savait et Ella aussi sans aucun doute possible, il n’y avait que cet abruti de Mattia pour croire que tout était si facile, c’est sûr qu’en étant aussi lâche et égoïste, ça l’était. L’adolescent posa ses mains sur les bras d’Ashton dans le but de se libérer de son enfer –et c’était peine perdu- tout en lâchant. « Lâche-moi!! » Ashton l’examina deux secondes avant de le lâcher –un miracle ? Non, il fallait surtout s’attendre à pire- et dans la fraction de seconde il donna un coup dans le ventre de Mattia à l’endroit même où se formait les nœuds d’angoisse, celle-là même qui nous donnait envie de vomir, Ashton ne cracha pas sur la violence et la force, même sobre, il l’aurait fait, le blondinet avait voulu le pousser à bout ? Il avait réussi, il avait été trop long, bien trop loin. « Pourquoi sa vie serait plus importante que la nôtre ? Parce que depuis qu’on est dans sa vie, les notre compte plus que tout pour elle ! Et parce qu’elle ne représente pas qu’une seule vie mais, deux. » Ashton regardait Mattia avec mépris, posant une main menaçante sur la gorge du jeune homme, qui n’avait pas le droit de dénigrer ainsi la vie d’une gamine qui faisait tout pour qu’il aille bien. « Tu vois, quand elle m’a annoncé qu’elle était enceinte, elle a tout fait pour atténuer ta part de responsabilité, pour que j’oublie que t’étais le père et que surtout je ne t’en veuille pas. Alors que toi tu l’enfonces en sachant pertinemment qu’à cet instant elle rêve de se tirer une balle pour ne pas avoir à choisir ! » Les yeux d’Ashton étaient remplis de larmes de rage. Il venait clairement de sous-entendre que dans leur couple, elle l’aimait plus que sa propre, à l’inverse, il aurait pu la vendre au marché aux puces, il l’aurait fait. « Elle a un cœur. » Cracha-t-il pour essuyer toutes les horreurs prononcer par Mattia et qu’il comprenne que lui s’il en avait un, il le cachait bien actuellement, il lâcha le cou de Mattia avec un regard noir à vous geler sur place, qui vous donne envie de fuir mais qui vous fait comprendre que dans votre intérêt, vous n’avez pas intérêt à bouger.

« Je tenais simplement à ce qu’on soit sur la même longueur d’onde concernant Ella parce que pour le bébé, j’ai bien compris. » La haine. C'était clairement ce sentiment qui sonnait en harmonie dans ces mots. Et Mattia ne se calma pas pour autant, lui aussi, il vociféra, pestant, demandant à ce qu'Ella avorte. Tout aurait été tellement plus simple si ce gosse n'était pas là. Et puis, parce que son prof le tenait toujours par le col, il lui demanda de le lâcher. D'une voix ferme, comme s'il ne laissait aucune autre solution possible. De toute sa hauteur, son prof l'observa durant quelques secondes, et décida enfin à le lâcher. Soulagé, Mattia leva la main pour remettre en place son pull, lorsque coupé dans son élan, il ressentit une vive douleur dans son ventre. Le salaud! Il venait de le frapper, sans qu'il s'en rende compte.

Son ventre lui faisait terriblement mal. Sa boule d'angoisse venait d'imploser à l'intérieur, semant de ci, de là, quelques résidus de stress, se répandant dans le creux de son ventre, comme le sang d'une hémorragie interne. Le souffle coupé, plié en deux, Mattia eut envie de gerber. De gerber et de lui foutre son poing dans sa gueule. Comme lui. Jouer au plus fort. Le discours d'Ashton ne rentra pas dans le cerveau de Mattia. Il l'entendait, mais il ne l'écoutait. Bien trop occupé à ses contenir. A essayer d'oublier cette douleur. A essayer d'oublier le mal qu'il avait, et dont Ashton semblait heureux de lui rappeler. Et à essayer d'oublier ces yeux embués de larmes. Parce qu'à cet instant, Mattia avait les larmes aux yeux. Parce qu'il avait mal, physiquement par ce coup, et moralement par toute cette histoire. Parce qu'il ne pouvait pas dire haut et fort tout ce qui l'ennuyait. Parce qu'il se retrouvait, dans cette histoire, coincé entre deux feux. L'un était plus attrayant que l'autre, mais l'autre était plus effrayant. Alors, lui, il avait choisi l'autre, préférant dénigrer Ella plutôt qu'autre chose.

Voyant Ashton bouger sa main, et la monter, Mattia eut un réflexe. Il leva son bras devant son visage pour se protéger, croyant qu'un autre coup allait arriver. Parce qu'après un coup, il y en avait toujours un autre. Puis un autre, puis un autre... Mais cette fois, aucun coup n'arriva. Il ne fallait pas qu'il craigne Ashton comme ça. Il sentit juste la grosse paluche d'Ashton se mettre sur sa gorge et, contraint de se redresser, Mattia finit par reposer ses yeux embués sur lui. «  Tu vois, quand elle m’a annoncé qu’elle était enceinte, elle a tout fait pour atténuer ta part de responsabilité, pour que j’oublie que t’étais le père et que surtout je ne t’en veuille pas. Alors que toi tu l’enfonces en sachant pertinemment qu’à cet instant elle rêve de se tirer une balle pour ne pas avoir à choisir ! » Cette dernière phrase fut la pire de toute. Mattia se sentit mal; il détourna le regard, préférant fixer un point au loin, plutôt que de voir Ashton, les yeux dans les yeux. Parce qu'une larme coula. Parce qu'Asthon avait raison, c'était un idiot. Ella faisait tout pour lui, et lui ne faisait rien. Il l'avait enfoncé depuis ce jour-là. Il l'avait tué par des paroles vénéneuses. Et lui, il était là, la gorge plaquée sous la main d'Ashton, respirant difficilement, mais jouant de tout pour se sortir de cette affaire. « Elle a un cœur. » lui cracha-t-il alors, empestant les narines de Mattia par son odeur d'alcool.

Lâchant alors le cou de Mattia, celui-ci parvint à mieux respirer. Son regard, toujours rempli de larmes, se posa une nouvelle fois sur Ashton. Les yeux de celui-ci lui lançaient des éclairs, prêts à le foudroyer sur place. Le message était clair T'as pas intérêt à bouger. Le souffle court, au vue de tout ce qu'il venait de subir, Mattia passa sa main sur son cou, presque pour vérifier qu'il était toujours là. Il ne répondit rien pendant quelques secondes; parce que la douleur dans son ventre et à sa gorge l'en empêchait, et parce que son coeur préférait un instant de répit.

Puis, il ouvrit une fois la bouche. Une voix, enrouée, s'éleva alors. « Je le sais tout ça, et je suis désolé. » Il avala sa salive. S'excuser, c'était toujours difficile. Mais pour une fois, ce n'était pas ce mot qui écorchait sa bouche, c'était juste ses cordes vocales, qui avaient un peu de mal à se mettre en route. « Je sais que je lui fais du mal. » oui, il le savait depuis le premier jour. Depuis qu'il l'avait largué en fait, quand il lui avait presque lancé un ultimatum; lui, ou ce truc dans son ventre. Mais au moins, là, il le reconnaissait devant son frère, devant celui qui prenait le plus soin d'elle, bien plus que son propre père à elle. N'y pouvant plus, il posa son regard ailleurs que sur la stature de son professeur.

Cette fois, les mots qu'il sortait étaient mûrement réfléchi. Posant sa main sur son ventre -toujours douloureux-, il reposa de nouveau son regard sur Ashton. « Je voudrais juste que t'essayes, pendant deux minutes, de te mettre dans ma peau. De revenir douze ans en arrière. Imagine qu'une de tes amies à l'époque, t'annonces qu'elle était enceinte. T'aurais réagit comment? Tu l'aurais demandé en mariage, peut-être? » Cette dernière phrase fut dite d'un ton calme, sans aucune once d'arrogance. Fallait pas non plus qu'il le prenne mal, alors que là, il faisait un énorme effort pour rester calme! « Alors, ouais, je sais, j'ai réagi de façon égoïste. Mais un gosse, on l'a pour toute sa vie après. On doit s'en occuper pendant vingt-et-un ans.. Je n'en ai que dix-sept,.. s'imaginer ça, c'est flippant. » fit-il alors. Puis, pour terminer, il siffla un « Je sais pas comment Ella fait. » mais secrètement, il l'admirait.

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Le jeune homme avait les larmes aux yeux, c’était comme ce coup envoyé par Ashton lui avait fait ressentir toute la douleur qu’il tentait de contenir, à croire qu’Ashton avait cherché à le rendre aussi mal que sa petite sœur. Est-ce qu’il regrettait en voyant les larmes au bord des yeux de son élève ? Non, ça ne voulait pas dire qu’il était désolé, il avait cherché ce coup et Ashton était encore trop aveuglé par la colère pour oser penser aux regrets. Voyant la main du prof bouger, Mattia protégea son visage, comme s’il s’attendait à un autre coup, ça semblait être le réflexe d’une habitude qui durait depuis longtemps –trop longtemps- Ashton fronça les sourcils, surpris mais, chasse rapidement cette pensée, persuadé que ce n’était pas le bon moment pour y penser, mais, qu’il y ferait plus attention par la suite, Mattia s’était peut-être attiré des emmerdes avec quelques merdeux, ou un autre truc dans le genre. La main sur la gorge du jeune homme, ce geste l’obligea à se redresser et à affronter le regard de son professeur qu’il abandonna face au poids des mots, il préféra fixer autre chose, tout sauf, les prunelles du jeune homme, une larme roula sur la joue du blondinet, peut-être que finalement, il souffrait aussi de cette histoire, peut-être qu’il n’en avait pas rien à faire, qu’il avait simplement tenté de fuir cette putain de réalité. Enfin, Ashton finit par lâcher l’adolescent, il avait le souffle court et passa sa main sur son cou, se murant dans le silence, certainement pour retrouver ses esprits, se remettre de ses émotions.

Toutefois, la voix bloquée du gamin finit par s’élever, au bout d’un certain temps qu’Ashton ne cherchait pas à saisir. « Je le sais tout ça, et je suis désolé. » Le jeune homme avala sa salive, il avait eu le courage de s’excuser, c’était déjà pas mal, Ashton devrait sans doute en faire autant pour le coup mais, pour l’instant il n’était pas apte à le faire parce qu’il ne l’était pas, déjà qu’à la base, il n’était pas du genre à lâcher des excuses comme ça mais, en ayant bu, encore moins, son entêtement était multiplié par mille, évidemment, cela ne voulait pas dire qu’il n’admirait pas, d’ailleurs son regard sur l’adolescent s’était quelque peu adouci. « Je sais que je lui fais du mal. » Au moins, il l’avouait, contrairement à tout à l’heure il ne niait plus, c’était tout de même con d’être passé par un coup –surtout que Mattia s’en tenait encore le ventre- pour obtenir une conversation plus sincère mais, au moins ça fonctionnait. Ashton le regardait droit dans les yeux et fit un léger signe de la tête, simplement pour faire comprendre à Mattia qu’il l’entendait, qu’il l’écoutait. « Je voudrais juste que t'essayes, pendant deux minutes, de te mettre dans ma peau. De revenir douze ans en arrière. Imagine qu'une de tes amies à l'époque, t'annonces qu'elle était enceinte. T'aurais réagi comment? Tu l'aurais demandé en mariage, peut-être? » L’adolescent faisait preuve de calme ce qui bouleversait la situation, Ashton parvenait à retrouver ses esprits par la même occasion et à faire descendre sa jauge de colère –bien qu’elle était encore loin du point zéro, il y avait très peu de chances de voir Ashton détendu ce soir-. « Alors, ouais, je sais, j'ai réagi de façon égoïste. Mais un gosse, on l'a pour toute sa vie après. On doit s'en occuper pendant vingt-et-un ans.. Je n'en ai que dix-sept,.. S’imaginer ça, c'est flippant. » C’est sûr que c’était flippant, ça Ashton le comprenait bien même à vingt-six ans –parce qu’il en avait vingt-six à l’époque et non vingt-sept- il avait flippé à l’idée d’avoir un bébé, il n’en voulait et ne se sentait pas prêt à être père alors, oui, la peur il a la comprenait, pour le reste, c’était une autre histoire. . « Je sais pas comment Ella fait. » Et lui non plus, même en connaissant sa sœur, il ne savait pas où elle puisait la force de garder ce petit bébé dans son ventre et d’envisager ne serait-ce qu’une seconde de lui offrir toute sa vie.

Ashton attrapa son paquet de cigarette, pour s’en allumer une avant de se jeter dans quelconque réponse, il se foutait bien que Mattia le voit fumer, il avait repris au départ de sa femme et ne s’en cachait, il en fumait une à chaque fois qu’il pensait à elle ou à leur enfant, autant dire qu’avec l’histoire des deux adolescents, il n’avait pas fini d’en griller. « À ton âge je n’étais attaché à aucune des filles que je fréquentais, au mieux, elles faisaient deux nuits, après quoi elles dégageaient. Je ne voulais rien savoir d’elle, je me foutais même de leur prénom. Si l’une d’entre elle m’avait dit qu’elle était enceinte je lui aurais dit que si elle voulait jouer à la poupée c’était son affaire pas la mienne. » Ashton inspira une bouffée de nicotine, il marquait juste une pause, il n’en avait pas fini. « Mais si mon ex-femme, la seule femme pour qui j’ai eu des sentiments m’avait dit qu’elle était enceinte, au début de notre relation, j’aurais pris peur, ça c’est sûr et j’aurais peut-être fait l’erreur de la quitter pour y voir plus clair et me rendre compte qu’avec ou sans bébé, il n’y avait qu’elle mais, je n’aurais pas pu l’enfoncer comme je l’aurais fait avec toutes ces… poupées. » Ouais, la différence était là, il n’aurait pas pu l’enfoncer et aurait fini à la supplier à quatre pattes de lui laisser une chance de revenir –même si l’idée même de tenir un bébé dans les bras lui foutait la chair de poule- il n’aurait pas pu rester sans elle et même en étant séparé, il aurait trouvé un moyen ou un autre d’être présent dans sa vie, ne pouvait pas la laisser seule dans cette grossesse. Alors oui, il comprenait la peur de Mattia et le fait qu’il ait quitté sa sœur mais, il ne pouvait pas cautionner qu’il l’écrase comme ça, le vrai problème c’était juste ça, il ne demandait pas grand-chose au blondinet simplement un peu plus de respect pour la belle blondinette. Il tira un peu plus sur sa cigarette en repensant à son bel ange blond, en larme sur son lit, comment faisait-elle ? C’était une force que les femmes avait et qu’il manquait aux hommes, la raison même pour laquelle c’était elle qui portait l’enfant et non pas inverse, les hommes étaient trop faibles, ils s’écrouleraient à la première occasion alors que pendant neuf mois, les femmes se battent comme des lionnes. « J’en sais rien, en tout cas te fais pas trop d’illusion, je suis pratiquement certain qu’Ella n’avortera pas. Elle ne m’a rien dit mais, de mon point de vue, elle en est incapable et elle semble persuadée que dans tous les cas, tu ne reviendras pas. » Et parce qu’elle aurait la sensation de tuer quelqu’un, de détruire une vie et un destin, elle était incapable de détruire quelque chose qui a ses yeux d’enfants –enfin d’adolescents- était le symbole même de l’acte d’amour le plus parfait, et que malgré toutes les conséquences, elle ne pouvait pas vivre sous un poids de regrets qui détruirait son monde de petit poney et fées qui se marient avec des bisousnours. Il la voyait plus en train de fantasmer sur les prénoms à donner au bébé plutôt qu’à se ronger les doigts à attendre qu’on lui retire son petit bébé. « Bon par contre, que les choses soient claires, les cours de sport ne sont pas en option, on laissera nos conflits à la porte du vestiaires mais, interdit d’être absent. » Ashton avait dit ça de façon sérieuse, maintenant qu’il faisait à nouveau face à l’adolescent qu’il connaissait il pouvait lui dire, qu’il avait intérêt à être présent, parce qu’Ashton en tolérerait aucune excuse, il jeta le mégot de sa cigarette. « Et désolé pour le coup. » Mais t’as agis comme un petit merdeux et je ne frappais pas Mattia mais un abruti. Ashton aurait pu lui dire ça pour compléter des excuses qu’il détestait faire – mais, qui étaient nécessaires et sincères- mais, il avait préféré s’abstenir et laisser son regard sérieux sur le blondinet.

Quand il eut fini de parler, il aperçut Ashton mettre la main dans une de ses poches et en sortir un paquet de cigarettes. Alcool. Tabac. Décidément, Ashton pétait véritablement les plombs. Il lui aurait bien dit, verbalement, que le sport et les addictions ne faisaient pas bon ménage, mais ce n'était pas le bon moment. Il n'apprécierait sans doute pas, et de toute façon, lui même n'avait guère envie. « À ton âge je n’étais attaché à aucune des filles que je fréquentais, au mieux, elles faisaient deux nuits, après quoi elles dégageaient. Je ne voulais rien savoir d’elle, je me foutais même de leur prénom. Si l’une d’entre elle m’avait dit qu’elle était enceinte je lui aurais dit que si elle voulait jouer à la poupée c’était son affaire pas la mienne. » Comme Mattia. A la différence qu'Ella n'avait pas fait que deux nuits.« Mais si mon ex-femme, la seule femme pour qui j’ai eu des sentiments m’avait dit qu’elle était enceinte, au début de notre relation, j’aurais pris peur, ça c’est sûr et j’aurais peut-être fait l’erreur de la quitter pour y voir plus clair et me rendre compte qu’avec ou sans bébé, il n’y avait qu’elle mais, je n’aurais pas pu l’enfoncer comme je l’aurais fait avec toutes ces… poupées. » Ca, au moins, c'était dit. Mattia jeta un rapide coup d'oeil à Ashton avant de détourner le regard. Enfoncer Ella, ce n'était peut-être pas se plus brillante idée. Mais.. C'était tellement plus simple de faire ça! De remettre la faute sur elle-même, d'oublier qu'il fallait être deux pour faire un gosse, de lui en vouloir. Et puis, il voulait juste éviter que la rumeur se répande. C'est tout. Il voulait juste ça.

Il reporta son attention sur Ashton, qui, encore, tira une latte. De tout ce qu'il avait dit avant, il n'avait pas réagit. Préférant se taire plutôt que de risquer une phrase qui aurait énervé Ash'. « J’en sais rien » Même son frère ne savait pas comment elle faisait. «  en tout cas te fais pas trop d’illusion, je suis pratiquement certain qu’Ella n’avortera pas. Elle ne m’a rien dit mais, de mon point de vue, elle en est incapable et elle semble persuadée que dans tous les cas, tu ne reviendras pas. » Cette phrase eut l'effet d'une claque. Mattia venait de se reprendre un deuxième coup. Ce qui allait arriver, qu'elle le garde ce gosse, c'était la pire chose qu'il pouvait imaginer. Le tennisman espérait qu'elle avorte, qu'elle laisse un médecin récurer le fond de son utérus. Il préférait mille fois ça plutôt qu'elle dise je le garde. Il ne s'imaginait pas, parcourant les rues d'Arrowsic, et tomber sur Ella, un bébé dans les bras. Son bébé. C'était impensable. Impensable et irréaliste. Ils avaient dix-sept ans, bordel! Ils devaient jouer à la console, boire comme des trous dans les soirées, s'amuser de voir leur prof gueuler, rire avec leurs copains, et trouver une voie pour leur avenir. C'était juste ça ce qu'ils devaient faire. Rien d'autres!

Ce fut les paroles d'Ashton qui le ramenèrent petit à petit à la réalité, le faisant redescendre sur terre. « Bon par contre, que les choses soient claires, les cours de sport ne sont pas en option, on laissera nos conflits à la porte du vestiaires mais, interdit d’être absent. » Mattia hocha la tête, laissant échapper un tout -tout- petit rire. Ouais il viendrait à ses cours. S'il restait le même que d'ici les quelques dernières secondes. Si il redevenait l'Ashton d'avant, celui qui s'était énervé, et l'avait frappé, là, il arrêterait d'y aller. Mais pour le moment, pas de problème, il viendrait à ses cours. De toute façon, ces cours, c'était presque les plus importants. Et là, il jeta le mégot de sa clope. « Et désolé pour le coup. » Mattia haussa les épaules, bafouant un « pasgrave ». Il disait ça, mais n'empêche qu'il sentait encore exactement l'endroit où il l'avait frappé.

Posant son regard ailleurs que sur Ashton, Mattia répondit alors, pour tout ce qui était d'avant, se disant que répondre cela était le moins qu'il puisse faire. « J'essayerai. » Essayer de ne pas l'enfoncer. Essayer de ne pas la dénigrer. Mais aussi, et surtout, essayer de rester sympa avec, et si ça ne marchait pas, essayer de se tenir à l'écart d'elle. En gros, ce mot-là, essayer, ça voulait tout dire et rien dire. Le mot idéal donc. Le mot qui te permet de tenir tes promesses dans tout les cas. Il soupira alors, et cette fois osa lui parler. Franchement. Sans passer par des détours. « et toi, tu devrais arrêter de boire.. » Parce que boire, c'était con. Parce qu'une personne bourrée, c'était une personne qui ne se contrôlait pas. Et puis, parce qu'après toute la morale qu'il venait de se prendre, il pouvait bien, un peu, la lui faire à lui.

Spoiler:

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Le jeune homme n’avait pas réagi à tout ce que le professeur avait pu dire, certainement que les paroles rentraient dans sa tête sans qu’il trouve à y répondre, l’essentiel était qu’il y pense et Ashton n’en demandait pas plus. Enfin, le professeur eu tout de même un très léger rire, presque inaudible, en entendant que les cours du brunet n’étaient pas optionnels, au fond, Ash savait que Mattia en avait conscience mais, il tenait tout de même à lui signaler tout comme il tenait à s’excuser pour le coup –il avait était un peu loin même si Mattia avait aussi exagéré de son côté- ce à quoi le blondinet bafoua un simple « pasgrave » Pas grave… Ashton était certain que l’adolescent sentait encore la douleur à l’endroit exact où il avait frappé mais, c’était fait, il ne pouvait pas remonter le temps alors il se contenta de hocher la tête considérant l’épisode comme clôt.

L’adolescent détourna le regard du brunet qui hésitait à sortir une autre cigarette face au déchaînement de ses pensées qui le ramenait inlassablement à ses souvenirs les plus douloureux, ce soir, ce n’était pas son soir, ce soir, tout était fait pour qu’il pense à elles, sa femme et sa fille –non, Ashton n’avait vraiment jamais envisagé la possibilité que cet enfant aurait pu être un garçon, pour lui c’était une fille, point.- En fait, il s’était perdu dans ses pensées au point d’oublier la présence de son élève, au point d’oublier la rue, les bruits alentour et tout ce qui pouvait se trouver à proximité. Ce fut le « J'essayerai. » de Mattia qui le ramena sur Terre. Il essayerait ? Le brunet eu besoin des quelques secondes avant de comprendre qu’il s’agissait là de la réponse à tout ce qu’il avait dit précédemment et là il ne savait pas trop comment l’interpréter, essayer c’était envisager l’échec mais, essayer quoi ? De respecter Ella ? De ne pas l’enfoncer ? ça ce n’était pas très compliqué, il n’avait qu’à cesser de parler d’elle et la laisser se noyer dans ses romans à l’eau de rose et se débrouiller comme elle pouvait avec un mioche dans les bras, vraiment, là-dedans, il n’y avait aucune difficulté et Ashton n’en demandait pas plus. « Essayer c’est envisager l’échec, tu vas réussir. » Ashton lâcha ça naturellement sans revenir plus que ça sur le sujet, c’était dit, maintenant, Ashton voulait qu’il lui montre qu’il était capable de laisser Ella poursuivre sa vie, qu’elle avait eu assez d’importance pour lui pour ne pas l’achever.

« et toi, tu devrais arrêter de boire.. » Ashton posa ses yeux surpris sur le jeune homme, il ne s’attendait pas à ce qu’il place cette réflexion, un léger rire s’échappa de ses lèvres –un rire gêné- avant qu’il ne passa sa main dans ses cheveux et qu’il ne regarde le blondinet dans les yeux. « C’est occasionnel. » Non, il ne pouvait pas avouer au jeune qu’il avait un problème avec l’alcool étant donné qu’il ne se l’avouait même pas à lui-même, il n’y avait rien à faire, même plongé dans les yeux de Gracie, il niait comme un chinois au marché des objets magiques. En même temps, c’était ça, être dépend, avoir un problème et ne pas pouvoir l’admettre, ne pas se rendre compte à quel point on est accroc, il était dépendent de l’alcool comme il avait été dépendent de l’amour de sa femme, il avait simplement comblé le manque en buvant mais, ça il ne pouvait pas l’admettre, c’était trop douloureux, trop compliqué. Et pourtant, il avait bien un problème avec l’alcool, il avait bien cette bouteille dans sa voiture pour le prouver, l’état de son appartement et toutes ces soirées à boire seul, au bar. « C’était simplement un petit verre entre collègue. » En somme, l’excuse était crédible et Ashton mentait vraiment bien mais, le problème c’est qu’il était à Arrowsic et que les rumeurs faisaient vite le tour du quartier –heureusement pour lui aucune mère de famille n’avait encore osé protester contre lui, exigeant son renvois mais, ça, il le devait surtout à son abstinence parfaite pendant le travail.-

Lorsque Mattia éleva la voix pour lui dire qu'il essayerait, le frère d'Ella sembla surpris. Sa réponse fut digne des sportifs. « Essayer c’est envisager l’échec, tu vas réussir. » Sorti du contexte, tout le monde pouvait se douter que cette phrase venait d'un battant, d'une personne qui ne lâchait jamais rien. Un sportif par exemple. Mais ceci dit, Mattia se tut, sans vraiment oser dire ce qu'il avait sur le coeur. Parce que ouais, il pouvait essayer. Mais il n'était pas sûr de réussir. Pas dans ces conditions. Et puis, c'était toujours plus facile à dire qu'à faire. Et apparemment, il était le seul à le remarquer.

Alors, quand il ouvrit une deuxième fois la bouche, ce ne fut pas pour lui dire que réussir, c'était plus facile à dire qu'à faire, mais c'était pour lui dire d'arrêter de boire. Son prof de sport empestait l'alcool. Ashton sembla surprit. Il posa ses yeux sur lui, et il laissa échapper un petit rire. Rire que Mattia n'entendit pas comme étant un rire drôle. C'était plutôt le genre de rire qu'on fait quand on se fait prendre en pleine bétise, et qu'on essaye de se rattraper. Le genre de rire gêné. « C’est occasionnel. » Occasionnel; ouais. Peut-être. Mais ceci dit, là, à cet instant précis, il avait déjà assez bu. Bien trop. Mattia pensait qu'en temps normal, face à un Ashton sobre, son ventre n'aurait pas mal. Evidemment, Ashton aurait crié. Gueulé. Hurlé. Mais en aucun cas, il ne l'aurait frappé comme ça. Du moins, pas d'un coup poing si violent.
C'était ça, l'alcool. Un poison qui se faufile dans ton corps, et qui prend, petit à petit, le contrôle de tout tes faits et gestes. Tu ne te rends même plus compte de ce que tu fais. Tu agis. Instinctivement. Et surtout violemment. Mattia ne connaissait que trop bien tout ça.

Et puis, le regard toujours rivé sur lui, il finit par ajouter. « C’était simplement un petit verre entre collègue. ». Comme s'il avait besoin de se donner une excuse -excuse plausible ceci dit. Les profs pouvaient bien, de temps en temps, décompresser, et aller se prendre un petit verre chez l'un ou chez l'autre. Mais là, quand Mattia l'avait croisé, il était seul. En plus de cela, il était seul, quelque peu bourré, et en colère. Mattia doutait que ce soit sa simple vue qui l'est à ce point énervé. Quoique.. Mattia qui jusque là gardait les yeux sur lui répondit alors. « Pas qu'un verre apparemment.. »
Passant sa main sur sa tête, le tennisman se sentit mal à l'aise. Autant il avait pour habitude d'entendre les remarques des gens, autant il n'avait que rarement d'être dans le situation inverse; celle où il jouait le rôle du moralisateur. D'ailleurs, si il ne s'était pas s'agit d'Ashton Clarke, mais d'un quelconque prof, Mattia lui aurait sans doute dit 'au revoir', et se serait tiré. Mais malgré qu'Ashton était le frère d'Ella, malgré qu'il venait de lui tirer une oreille, et de lui foutre un coup dans le ventre -d'ailleurs, il avait encore chaud en haut, et mal près de son nombril-, Mattia ne pouvait pas le laisser s'enfoncer comme ça dans l'alcool sans lui dire deux-trois mots. Surtout qu'en plus, il s'était excusé juste avant. « Je sais que j'ai rien à te dire, mais il y a des rumeurs qui circulent au lycée. » Il regarda vite fait à côté d'eux, avant de reposer son regard sur celui d'Ashton. « Il paraît que t'es -je cite- 'chiant', 'râleur', 'exécrable', 'irritable'. Et malgré les deux premiers mots qu'on entend toujours sur toi, je trouve ça bizarre. » Il lui fit un tout léger sourire avant de conclure. « L'alcool que tu bois, c'est peut-être pas si occasionnel que ça. »

Voilà. C'était dit. Aussi dur que ce soit, c'était sorti tout seul. Même s'il avait un peu peur de sa réaction, Mattia était quand même content de l'avoir dit. Et puis franchement, avec ce qu'il venait de se prendre, il pouvait se permettre d'être, un petit peu, moralisateur à son tour.

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Le petit jeune s’aventurait sur une pente savonneuse, Ashton n’a vouerait pas qu’il buvait et n’était pas du genre à apprécier le sujet, il détestait qu’on lui aligne sa pire faiblesse comme ça, surtout qu’il ne voulait vraiment pas l’admettre et quand il s’agissait de ça, il devenait aussi têtu que quand il s’agissait de sa sœur- heureusement pour Mattia, normalement, il était moins violent-. Toutefois, l’adolescent n’avait pas tords pour autant, il avait même parfaitement raison, Ashton avait un vrai problème avec l’alcool, il suffisait de lui mettre une bouteille sous le nez pour le constater ou de l’observer tard le soir crier le nom de sa femme dans les bras d’une inconnue sans nom ou dans son appartement à pleurer comme un enfant à qui on aurait retiré sa maman, un enfant qui aurait vu sa mère mourir. Jusqu’à présent –et heureusement pour Ashton- il n’y avait qu’Ella qui était plus ou moins au courant –encore qu’elle ne savait pas l’ampleur des dégâts- et le professeur préférait que le reste du monde l’ignore – ce qui était paradoxale avec son idée qu’il n’avait pas de problèmes-. Quoiqu’il en soit, il ne trouva rien d’autre que l’occasion comme excuse –même si son rire le trahissait largement-. A la limite, l’excuse pouvait être valable, mais, il était complètement ivre, il n’avait pas bu qu’un verre « avec ses collègues » comme il osait le prétendre et ça, le blondinet l’avait bien remarqué visiblement. Il gardait les yeux sur son professeur et semblait ne pas croire une seule parole de celui-ci. « Pas qu'un verre apparemment.. » Ashton haussa les épaules, apparemment, l’adolescent n’avait pas l’intention d’en rester là, il avait bien l’intention de faire la morale à celui qui ne se gênait pas pour lui faire, qui faisait tout pour qu’il ne vienne pas à lui ressembler, qu’il ne fasse pas les mêmes erreurs que lui ou qu’il n’agisse pas de telle façon à ce qu’il ait à le regretter –bon les conseils concernant sa sœur était à mettre à part, Ella passait avant le monde entier-. « Non pas qu’un… » Il n’allait pas lui dire qu’il s’agissait en réalité de deux bouteilles, qu’il en avait encore une dans le coffre et surtout qu’il avait bu seul, il ne pouvait pas parce qu’il avait déjà du mal à se dire que c’était bien lui qui avait dit ça et puis, il partait du principe que ça ne regardait que lui –l’une des nombreuses erreurs de la grande majorité des alcooliques, disait-on-.

Dans cette situation, Ashton rêvait à nouveau de sa bouteille d’alcool ou d’une cigarette de plus, quelque chose pour lui irriter la gorge, pour lui rappeler qu’il était vivant tout en soulageant ses angoisse mais, il ne fit rien, il avait bien compris que ce n’était pas le moment, que le blondinet l’observait, l’enregistrait et le jugeait. « Je sais que j'ai rien à te dire, mais il y a des rumeurs qui circulent au lycée. » Les rumeurs ? ça Ashton s’en foutait comme de l’an quarante, il y en avait toujours eu à son sujet et tant qu’on ne l’accusait pas de détournement de mineur et d’abus d’autorité, franchement, il n’en avait rien à péter de ce qu’on pouvait bien dire de lui, il avait l’habitude de cette haine, de cette colère à son égard et il vivait bien la situation, parce qu’au milieu de ça, il y avait quelques élèves qui se donnaient à fond et qui appréciaient les vraies valeurs du monde et pas seulement du sport. « Ça a une importance ? » L’adolescent reposa son regard sur Ashton, prêt à lui expliquer le fond de sa pensée. « Il paraît que t'es -je cite- 'chiant', 'râleur', 'exécrable', 'irritable'. Et malgré les deux premiers mots qu'on entend toujours sur toi, je trouve ça bizarre. » Oh ça ! Il aurait aimé les y voir tous ces gamins, en instance de divorce suite à la perte de leur enfant et avec une petite sœur complètement perdue qui voudrait foutre sa vie en l’air, il aurait aimé les voir patauger dans cette enfer et affronter la solitude, dans le lit le soir, le matin et même dans les couloirs du lycée, il aurait aimé les voir à sa place pour pouvoir leur exploser la tête contre un mur en leur expliquant qu’ils n’auraient pas fait mieux et qu’à leur âge ils ne savaient rien de la vie et qu’ils n’avaient pas à juger, tout ce que le professeur leur demandait, c’était de se donner à fond. Ce n’était pas si compliqué, le reste, il n’en avait rien à foutre. « L'alcool que tu bois, c'est peut-être pas si occasionnel que ça. » Ashton ne broncha pas en entendant la remarque, il se contenta d’un vague mouvement du corps qui ne traduisait pas grand chance, si ce n’est son indifférence –parce qu’il était resté sur les rumeurs et que tout ça lui paraissait minime face à la perte de ses deux amours et puis, ce n’était comme pas comme si il jugeait ses problèmes d’alcool réels-. « J’ai toujours été sobre au lycée et ce, depuis mes débuts si c’est ce que tu insinues Mattia. » Ashton était resté très calme parce que ce n’était pas un mensonge, Ashton n’avait peut-être pas les méthodes les plus acceptable mais, il était toujours parfaitement clean quand il faisait son cours, il ne fumait même pas avant d’aller en cours, c’était trop important pour que sa dépendance atteigne ce niveau, les frontières s’étaient imposées d’elles-mêmes. « Et puis c’est pas un scoop que je suis chiant et tout le reste hein… » Ah non ! Mattia n’avait définitivement pas choisit la facilité en s’attaquant à Ashton, c’était vraiment un âne, jusqu’au bout, il jouerait la carte de la naïveté –ce qu’il n’était en aucun cas contrairement à sa sœur- pour ne pas avoir à parler de ce qui l’irritait autant.

Montrer à quelqu'un qu'il avait un problème avec l'alcool, c'était comme faire avouer à un coupable entêté qu'il n'était pas si innocent que ça. Chaque personne réagit différent à ses propos; ça peut aller du simple entêtement, ou alors au silence le plus froid. Ashton, lui, ne jouait pas dans la dernière catégorie. Au contraire, il parlait. Mais il parlait pour ne pas dire grand chose sur le sujet. Lorsque Mattia lui annonça qu'il n'avait pas bu qu'un verre apparemment, son professeur haussa les épaules. Et, à sa plus grande surprise, il ajouta même quelques mots. « Non pas qu’un… » Ok, c'était vague comme réponse, et ça ne disait pas tout ce qu'Ashton avait avalé. Mais au moins, il avouait qu'il n'avait pas bu qu'un verre. Et ce, c'était déjà énorme.

Et Mattia ouvrit la bouche, parlant des rumeurs qui circulaient au lycée. Ashton paraissait s'en ficher, demander même si ça avait une importance. Et oui, justement, ça en avait une. Les rumeurs avaient toujours des importances. Peut-être qu'il s'en fichait, parce que ça le concernait. Mais si jamais Mattia balançait une rumeur sur Ella dans le lycée, Ashton serait le premier à gueuler. Le premier à réagir. Comme quoi, finalement, les rumeurs avaient de l'importance.
Mattia finit par lui dire que son verre n'était peut-être si occasionnel que ça, et Ashton ne répondit rien, se contentant de bouger pour montrer qu'il s'en fichait. Ouais, ça il l'avait bien comprit. Tant pis pour lui.
Son regard rivé sur lui, son professeur s'approcha de lui pour lui dire « J’ai toujours été sobre au lycée et ce, depuis mes débuts si c’est ce que tu insinues Mattia. » Son ton de voix était calme, et contrastait avec ne serait-ce qu'il y a deux minutes. Et ça, ça inquiétait Mattia. Il aurait préféré le voir s'énerver, encore une fois. Quitte à se prendre un coup. Mais là, à le voir si calme, si détendu, ça ne présageait rien de bon. Ca voulait juste dire qu'il arrivait à se contenir, à ne pas avouer. S'il s'énervait, il se vendrait tout seul; ce serait un aveu sans paroles. Mais nan, là, rien. Il restait stoïque, planté devant lui, ajoutant même un «  Et puis c’est pas un scoop que je suis chiant et tout le reste hein… » Non, ce n'était effectivement pas un scoop. Ashton avait une sacrée réputation au lycée. Le genre de bonhomme que les élèves n'aimaient pas forcément; c'était loin d'être une crème, loin d'être un prof toujours sympa. Quand il s'énervait, les élèves craignaient de devenir sourds.

Avec un sourire, Mattia répondit « Non, effectivement, c'est pas un scoop. Je crois que t'es le prof avec la pire réputation.. » Il rit légèrement. Parce que rire, ça lui faisait du bien après tout ça. Parce que rire, ça dédramatisait un peu la situation. Parce que cette situation craignait vraiment. Un futur papa de dix-sept ans face à un homme alcoolique. Au final, les deux faisaient la même chose; ils reniaient la vérité. Mattia, du haut de son petit âge, n'admettait pas qu'Ella était enceinte, et quand enfin, il se disait qu'elle allait avoir un bébé de lui, il repoussait cette idée, essayant par tout les moyens de trouver une excuse; Il n'était pas le père, elle avait été voir ailleurs, et etc... Ashton faisait pareil. Sa femme le quittait, tout le monde le savait, et lui non plus n'admettait pas la vérité. Alors, plutôt que de l'affronter seul, il se jetait sur l'alcool. Mattia en était persuadé. Il en aurait mis sa main à couper; pour lui, Ashton buvait un peu trop. Et cette idée l'écoeurait.

« T'as peut-être toujours été sobre au lycée, mais tu n'as jamais été aussi irritable que ces temps-ci.. Il paraît que tu supportes rien. » Il se tut un instant, passant sa main dans ses cheveux, lui laissant de comprendre où il voulait en venir. « C'est peut-être justement, parce que t'as envie de boire.. » finit-il par avouer.


Sentant que finalement, Ashton pouvait commencer à s'énerver, Mattia bougea légèrement. D'une de ses mains, il attrapa son sac de sport qu'il avait juste avant de venir, et qu'il avait laissé trainer sur le banc. « Tu veux que je te dise? » Il l'observa un instant, son regard dans le sien, prêt à partir. [color=mediumseagreen] « C'est pas en devenant alcoolique que t'aideras ta soeur » Ta soeur. Pas Ella. Dans les paroles de Mattia, maintenant, parfois lorsqu'il parlait d'Ella, il trouvait autre chose à dire plutôt que son prénom. Mon ex. Ta soeur. Ton amie. Tout y passait. Ca lui faisait toujours moins mal que de dire Ella. Parce que maintenant, son prénom rimait dans son esprit avec le mot enceinte. Et comme le mot enceinte rimait toujours avec le mot bébé, il préférait oublier de dire à voix haute Ella.

Ses yeux toujours rivés sur Ashton, il l'observa, guettant sa réponse, prêt à bientôt s'en aller. Il n'avait pas du tout envie qu'Ashton se noye dans cette boisson dégueulasse. Qu'il boit de temps en temps, lors de soirée, c'était normal. Mais qu'il boit tout le temps, seul, devant sa télé, à côté de son téléphone, ça, ça l'était moins. Et parce qu'il connaissait les ravages que l'alcool pouvait faire dans une famille, Mattia préférait le lui dire. Sans avouer pourquoi il en disait autant.

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Sa réputation, c’était bien une chose dont Ashton se fichait, il avait appris à se faire à l’idée qu’on le considère comme un bon prof mais un vrai salop, il avait fini par ne plus entendre ses collègues prononcer son prénom pour y ajouter, insupportable, imbuvable, aucun tact et tout ce qui s’en suit. Ashton était comme il était et s’il était capable de se remettre en questions sur pleins de choses – il n’avait pas la prétention de tout savoir, loin de là même – il n’était pas prêt à changer ses méthodes de travail ou changer son comportement –du moins pour les cours, parce que le comportement, c’est comme le caractère, il évolue, il change-. Alors franchement, les rumeurs ne l’étonnaient pas, ce qui l’étonnait c’était plutôt que Mattia prenne la peine de le mentionner, ça n’apportait rien à la conversation, ou du moins, il n’avait pas encore compris où le jeune homme voulait vraiment en venir. « Non, effectivement, c'est pas un scoop. Je crois que t'es le prof avec la pire réputation.. » Le jeune homme ria là où Ashton se contenta d’un sourire amusé, au moins ça détendait la situation, mais, Ashton préférait le pas trop rire sachant pertinemment que le blondinet allait rebondir sur le sujet qui l’intéressait vraiment, à savoir, l’alcool. « Paradoxalement, je suis un des professeurs qui soutient le plus les élèves méritant au conseil de classe, mieux encore, bon nombre de petits lycéens viennent me confier leur problème plutôt qu’à un autre prof qui risquerait d’agir contre son gré. » Et c’est vrai, Ashton était l’un des rares –parce qu’il y en avait d’autres et il pensait notamment à Nolan- qui soutenait vraiment les élèves aux conseils de classe plutôt que de les enfoncer, et le reste n’était pas faux non plus.

Comme prévu, Mattia reparla rapidement de l’alcool. « T'as peut-être toujours été sobre au lycée, mais tu n'as jamais été aussi irritable que ces temps-ci.. Il paraît que tu supportes rien. » Il n’allait pas nier mais, il ne voyait pas en quoi c’était si important, tout le monde savait qu’il c’était fait largué, après tout, ils étaient à Arrowsic, donc la raison de cette mauvaise humeur était plus qu’évidente. « C'est peut-être justement, parce que t'as envie de boire.. » Qué, que quoi ? Ashton regarda l’adolescent surprit par cette déduction, en somme, il n’avait pas tort mais, ça, il ne fallait pas compter sur Ashton pour laisser entendre ça. « Et peut-être que tu fais complètement fausse route Mattia. » Ne pas en dire trop, ne pas en dire plus et surtout ne pas s’énerver, en fait, ça pouvait passer pour une stratégie mais Ashton avait ça dans la peau naturellement contrairement à sa sœur, il n’avait pas besoin de se forcer, ça sortait aussi facilement qu’une vérité.

Mattia attrapa son sac, après avoir bougé comme pour s’éloigner de son professeur –peut-être avait-il peur d’énerver Ashton ?-. « Tu veux que je te dise? » Le jeune homme planta son regard dans celui du brunet, prêt à partir, ça sonnait presque comme une dernière remarque, Ashton ne dit rien, se contentant d’écouter. « C'est pas en devenant alcoolique que t'aideras ta soeur » Ashton afficha une mine dégoûtée, rien qu’en entendant « ta sœur » sortant de la bouche du jeune, ça plus l’idée de la mêler à l’alcool…Il ferma fermement le poing comme pour renoncer à cette colère qui montait en lui –à croire que Ella était sujet à sa colère, dès qu’on parlait d’elle les choses dégénéraient-. « Ella n’a besoin de l’aide de personne, ni de la tienne, ni de la mienne. Elle fait partie des personnes qui ont la décence de nous laisser croire que sans nous, elles ne sont rien, mais, Ella se débrouille très bien toute seule. » Oui, il pensait ce qu’il disait, il savait que la vie d’Ella avec lui, sans lui, avec ses parents, sans ses parents, avec Mattia, sans Mattia, ça revenait au même, elle pouvait souffrir de l’absence mais elle s’en sortirait toujours seule, elle n’avait pas besoin d’aide, même pas pour ce bébé.

Lorsque Mattia ouvrit la bouche pour lui dire qu'effectivement, il n'avait pas tord, cette rumeur n'était pas un scoop, Ashton se permit de sourire et d'ajouter autre chose. « Paradoxalement, je suis un des professeurs qui soutient le plus les élèves méritant au conseil de classe, mieux encore, bon nombre de petits lycéens viennent me confier leur problème plutôt qu’à un autre prof qui risquerait d’agir contre son gré. » Et bam. Il venait de rebondir comme jamais personne ne le faisait; et le pire, c'est que tout ça, c'était vrai. Au lycée, il y avait deux catégories de professeur. D'un côté, il y avait ceux qui faisaient leur boulot, tranquillement, essayant de paraître le plus gentil possible, et qui, une fois que tu avais quitté ses cours, tu n'étais plus personne. Ceux-là, ça ne servait à rien d'aller les voir. Ils restaient cloîtrés dans leur petit monde à eux où les élèves n'étaient que des poupées. Dès que l'un d'entre eux avait un soucis, ils n'existaient pas aux yeux du prof, et il n'avait plus qu'à se débrouiller tout seul. Ashton faisait partie d'une deuxième catégorie. Nolan, le prof de littérature aussi d'ailleurs, et ça, Mattia allait l'apprendre à ses dépends quelques jours plus tard. Il était de notoriété publique que le prof de sport, bien que poussant des gueulantes mémorables, était aussi celui qui avait le plus le coeur sur la main. Il soutenait toujours ses élèves. Si quelqu'un avait un soucis, il pouvait aller le voir sans aucun problème. Une rumeur avec même circuler une fois, comme quoi Ashton avait même tout fait pour éviter un conseil de discipline à Mattia. Ce dernier ne savait pas si c'était vrai ou pas; tant qu'il n'avait pas été viré, il s'en fichait. Mais au fond de lui, il se doutait bien qu'au moins une fois, ça avait du arriver. Avec tout les problèmes qu'il avait ramené au lycée, avec toutes les heures de colle qu'il avait eu, et avec toutes les fois où il avait gueulé sur un prof, c'était un miracle de ne jamais avoir été en conseil de discipline. Il ne l'avait jamais formulé à haute voix, mais lui-aussi se doutait bien que c'était en partie grâce à Ashton...Et c’est vrai, Ashton était l’un des rares –parce qu’il y en avait d’autres et il pensait notamment à Nolan- qui soutenait vraiment les élèves aux conseils de classe plutôt que de les enfoncer, et le reste n’était pas faux non plus.

Plutôt que de rentrer sur ce sujet épineux, Mattia fit juste un hochement de tête, et rébondit sur l'alcool. En voyant le regard éberlué que celui-ci lui fit, Mattia comprit qu'il était peut-être temps pour lui de s'en aller. Ashton était capable de s'énerver en deux secondes; et là, c'était fort probable qu'il le fasse. « Et peut-être que tu fais complètement fausse route Mattia. » Peut-être oui. Ou peut-être pas.

Mattia finit par prendre son sac, et lui dire, comme pour toute dernière remarque que ce n'était pas comme ça qu'il allait sa soeur. En voyant la tête d'Ashton et le regard qu'il lui lançait, Mattia se dit qu'effectivement, se sauver, c'était la meilleure des solutions. Du coup de l'oeil, il aperçut le poing d'Ashton se resserrer. « Ella n’a besoin de l’aide de personne, ni de la tienne, ni de la mienne. Elle fait partie des personnes qui ont la décence de nous laisser croire que sans nous, elles ne sont rien, mais, Ella se débrouille très bien toute seule. » Les yeux de Mattia s'agrandirent. Pensait-il vraiment ce qu'il disait? Pensait-il que sa soeur était capable de s'en sortir toute seule avec un morveux dans les bras? Là, à cet instant, à ce moment précis, Mattia eut pitié d'elle. Lui, il ne pouvait rien faire. Dès qu'il la croisait, maintenant, il évitait soigneusement son chemin, préférant s'abstenir de lui parler plutôt que de risquer de s'engueuler. Et puis, surtout, il lui en voulait d'être tomber enceinte. Dans les conneries que l'on fait, il faut toujours un coupable, un responsable. Pour lui, c'était Ella. Alors, non, lui, il ne pouvait rien faire pour elle. Mais ce n'était pas pour autant qu'elle serait capable de se débrouiller toute seule. Ses gros yeux posés sur son prof, il lâcha alors un « Ta soeur n'est pas un superwoman.. » d'un ton sérieux. Elle faisait toujours tout sans l'aide de personne, c'était vrai. Mais là, il n'était pas sûr qu'elle puisse continuer à tout faire sans quelqu'un à ses côtés. « Putain, Ashton, elle a dix-sept ans, et elle attend un gosse. » répliqua-t-il, peut-être plus pour lui que pour Ashton. Ses yeux s'étaient une nouvelle fois remplis de larmes. Il avala avec grand difficulté sa salive, et lui lâcha alors. « J'ai beau raconté plein de choses, j'suis pas sûr que ce soit si facile pour elle » Mais je ne peux pas l'aider Ashton. Il ne pouvait pas. C'était trop dur. Trop fort. Trop invraisemblable. Murmurant alors un « La lâche pas non plus » qu'Ashton n'entendit pas, Mattia lui tourna le dos, priant pour qu'il ne rattrape ni son bras, ni le bout de son oreille. Pour la première fois, il avait mal pour Ella. Parce que -même si c'était de sa faute-, elle vivait un moment difficile, et qu'en plus, il avait l'impression d'avoir visé juste; son frère devenait petit à petit un alcoolique.

« Tâchons de vivre de manière à ce que personne n’ait à se réjouir de notre mort. »

Revenir sur Ella, c’était sans aucun doute une mauvaise idée, Ashton était tellement susceptible quand il s’agissait de sa sœur, il savait lui-même qu’il ne devrait pas agir comme ça avec elle, dès qu’on parlait d’elle, qu’il ne pouvait être son frère et son père en même temps, pourtant, c’était ce qu’il faisait depuis son plus jeune âge et plus particulièrement depuis qu’elle avait neuf ans. Maintenant, dès qu’on parlait d’elle d’une manière qui ne lui convenait pas la colère montait fois deux et il devait admettre que bien souvent –comme là par exemple- il avait du mal à ne pas serrer les poings. Toutefois, le grand frère était persuadé d’une chose c’est que sa sœur était capable d’avoir un enfant et de l’élever sans qu’on son frère ne l’aide d’aucune manière, du coup ça n’avait pas vraiment d’importance qu’il touche à l’alcool ou non, que Mattia l’abandonne ou non, que ses parents s’énervent ou non. Oui, Ashton n’était pas tout ce qu’il y avait de plus réaliste avec Ella mais, il avait tellement l’habitude de voir ce petit bout de femme se débrouiller toute seule qu’il ne réalisait pas que là, elle était vraiment dans la merde et que là elle aurait plus que jamais besoin de s’appuyer sur son épaule. Paradoxalement, il savait qu’elle allait incroyablement mal et enfin bref, l’esprit d’Ashton et sa relation avec Ella étaient assez complexes à comprendre.

Mattia planta ses yeux ronds sur son prof, visiblement surpris de l’entendre dire ça – et en même temps, il y avait de quoi-. « Ta soeur n'est pas un superwoman.. » Ah ? Il avait remarqué que son frère visait un peu haut et qu’Ella n’était pas vraiment capable de surmonter tout ça ? Ça en faisait au moins un sur deux. De manière ironique, celui qui n’avait rien capté était là pour Ella et à l’inverse, l’autre qui avait tout compris n’était pas là pour elle, finalement, la situation entre le prof et l’élève avait vraiment quelque chose de risible et celle qui était bien le plus à plaindre c’était la blonde au milieu de tout ça qui n’avait rien demandé qui était encore vierge il y a quelques mois et qui avait fini par s’enticher de ce beau blondinet – comme quoi Ashton aurait finalement eu raison de la mettre dans un couvent-. « Putain, Ashton, elle a dix-sept ans, et elle attend un gosse. » Ashton le regardait, impassible, il savait tout ça, il se l’était répété tellement fois que c’est bon, lui, c’était rentré dans sa tête bien que ça ne lui fasse absolument pas plaisir, le jeune homme l’avait certainement dit plus pour lui-même que pour le brunet. Mattia avait des larmes qui bordaient ses yeux et il déglutissait péniblement, Ashton n’aurait su dire pourquoi et encore moins quoi faire, il restait là sans un mot, sans un mouvement. « J'ai beau raconté plein de choses, j'suis pas sûr que ce soit si facile pour elle » Ashton secoua la tête de gauche à droite alors que Mattia lui tournait le dos pour partir, soufflant des mots inaudibles, cette fois, Ashton ne le rattraperait pas, il lui avait dit l’essentiel, et là, il avait besoin de boire cette bouteille qui restait dans sa voiture, il n’avait plus envie de penser à la douleur et à la difficulté à laquelle Ella devait faire preuve.