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 it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando

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Fernando Gautier-Perez
Fernando Gautier-Perez
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LOCALISATION : à l'hôpital.



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MessageSujet: it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando   it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando EmptyJeu 24 Mai - 18:36


« La mort rattrape ceux qui la fuit. » Horace.


Ma mère me manque. Tous les jours. TOUS LES JOURS. Depuis cinq ans. Je ne me souviens que trop bien de ses derniers mots. « Vas mon fils, réalises tes rêves, sois heureux et je serai la mère la plus comblée du monde. » C’est comme ça qu’on s’est quitté, en sachant que ces mots seraient les derniers. « Te quiero ». Elle m’avait embrassé sur le front. Et je le sens encore ce baiser. J’en ai gardé la trace. Et j’étais parti. Sans me retourner, avec des larmes qui me coulaient sur le visage. Je savais que c’était pareil pour elle, qu’il suffisait que je tourne la tête, pour la voir effondrée. Mais si je l’avais fait, je ne serai jamais parti. Je voulais garder cette image, d’une femme forte et fière, d’une femme qui a tout sacrifié pour me rendre heureux. Et je devais partir, je devais vivre. On était d’accord. Je ne pouvais plus revenir sur cette décision. Elle savait que je prenais d’abord l’avion pour Londres, mais ensuite, elle ne connaissait rien de la suite de mon voyage, de ma destination. C’était mieux comme ça, elle ne pourrait pas me retrouver, elle ne me mettrait pas en danger. C’était le deal, affreux deal.

Ca fait cinq ans. Cinq ans que je rédige des brouillons de lettres, des phrases, des mots alignés que je n’envoie pas. Une fois seulement, j’ai failli. J’avais tout fait, la lettre était écrite, prête à l’envoi dans son enveloppe. J’étais devant l’urne de la poste. À côté, il y avait une poubelle. Et voilà.

Mais ce matin, c’est différent, je me suis levé avec un drôle de sentiment. Comme une nécessité. Parce qu’en ce moment je pense tout le temps à elle. Depuis que j’ai Kai, je pense au bonheur qu’aurait eu ma mère de la rencontrer. Je pense qu’elle mérite de savoir que je suis heureux, que j’ai réalisé tout ce dont je rêvais, qu’il ne me manque plus qu’une chose : elle. Et puis, finalement quel est le risque ? Je ne dirais pas où je me trouve. Les tampons de la poste me situeront aux Etats-Unis, mais… Et alors ? Je crois qu’en cinq ans, l’affaire a pu se tasser. Je crois que si vraiment ces merdeux de rital voulaient me retrouver, ils l’auraient fait. Je n’ai plus peur. Le besoin de ma mère est tellement pressant que j’en oublie tout. On a pas pu passer assez de temps. J’ai été le fils à son papa pendant tellement d’années que j’en oubliais presque que j’avais deux parents. J’en oubliais presque que l’un d’eux me portait un amour sans fin et indéfinissable. Ca, je ne l’ai vu que quand je suis parti.

« Mama.
Je ne sais pas comment j’ai pu rester tout ce temps sans t’écrire, sans te donner de mes nouvelles. On avait un deal : pas de nouvelles, pas de recherche, être heureux. J’ai rempli le contrat pendant tout ce temps mais je ne peux plus continuer. Je ne peux pas me résoudre à passer le reste de mes jours sans te revoir, sans t’entendre me chanter « Mi corazon », sans te présenter celle que j’aime, sans te parler de ma vie, sans te montrer mes tableaux. Je veux que tu connaisses tes petits enfants Mamita (oui, tu en auras, j’en suis sûr). Je veux que tu saches que j’ai accompli tout ce dont je rêvais.
Même si je sais déjà que tu diras que c’est pas ma faute, je suis désolé de t’avoir abandonné. Je m’en veux, j’ai peur pour toi Mamita. J’espère que tout va bien.
Te quiero.
Ps : Je te laisse mon email : fernando.perez@yahoo.com
Corazon. »

Je pose mon stylo sur la table. Je soupire. C’est jamais assez bien. Je ne dis jamais tout. C’est toujours bateau. Mais si ça continue, je n’enverrai jamais cette foutue lettre. Et il le faut. Aujourd’hui. Je la plie. J’attrape une enveloppe. Je ferme. Manque plus qu’une chose. Un petit détail. L’adresse. Je ne sais pas où vit ma mère. J’imagine qu’elle a déménagé. J’imagine qu’elle ne vit plus dans notre presque château et qu’elle s’est trouvé quelque chose de plus traditionnel. Peut-être qu’elle vit chez sa sœur ? J’en sais rien. Et c’est là que ça se complique. Je dois faire des recherches. L’avantage d’internet c’est qu’on peut pratiquement tout trouver. Du petit détail futil à l’information d’une importance capitale. J’ouvre mon ordinateur en respirant un bon coup. Il démarre et je suis impatient. Mes doigts tapotent les touches sans appuyer dessus, histoire de faire passer le stress. J’ouvre Google. Je cherche un annuaire suisse. Je tape – lentement – son nom : Gabriela Gautier-Pérez. Aucun résultat. Je me passe la main dans les cheveux avec déception. Peut-être qu’elle s’est retiré de l’annuaire. Je vais faire une recherche générale sur le moteur de recherche. Une quantité de résultats s’affichent. Evidemment beaucoup de résultats concernent mon père. Il y a des photos, des articles de journaux où ma mère est mentionnée. Mais pas grand-chose qui puisse m’intéresser. Puis, soudain, mon cœur manque un battement. Un lien retient mon attention et me laisse sans voix. Immobile. Choqué. Pétrifié. Je relis au moins cinquante fois le titre. « Avis de décès : Gabriela Gautier-Pérez, décédée le…. » Non, ce n’est pas elle. Impossible. Je n’ose même pas cliquer sur le lien. Je reste juste là, sans bouger, à fixer mon ordinateur. Pendant cinq, puis dix, puis vingt minutes. Sans rien faire, alors que des larmes abondent au bord de mes yeux. Mon doigt dérape, je clique.
Il y a une photo et la photo ne laisse aucun doute. C’est elle. C’est ma mère. Ma mère est partie. Pour toujours. Je suis orphelin. Pour de vrai. Elle est morte. Partie. Décédée. Arrachée à la vie. Elle avait quarante-huit ans. Bouffée par la maladie, arrachée à tout soupçon d’espoir de me revoir un jour. La mort me l’a enlevé. Ma mère. Ma maman.

Je me lève, machinalement. Abandonnant mon ordinateur en place. Trois semaines. Elle est morte depuis trois semaines. Et moi, je l’apprends sur internet, parce que je voulais la recontacter, parce que j’avais l’espoir naïf que tout allait s’arranger, qu’on se reverrait. Je me déplace vers la cuisine. « Mama… » Je murmure Une larme ruisselle sur mon visage. Ca faisait cinq ans que je n’avais pas pleuré, depuis que je l’ai quittée. J’attrape une assiette que je projette avec rage sur le mur d’en face. « Porque ? » Une deuxième y passe. Une troisième. Puis toutes. Quand je n’ai plus rien à balancer, je me jette sur le canapé. Et je chiale. Je chiale à l’épuisement.

J’ouvre les yeux, ça doit être midi le lendemain matin. Je ne sais pas combien d’heures j’ai dormi, mais mon sommeil a été bercé de cauchemar. En principe, je travaille aujourd’hui. D’ailleurs Jonhson m’a laissé dix mille appels en absence. Un simple SMS en guise de réponse. « Je suis malade, désolé. » Point à la ligne. Et je me murs dans mon silence. Et je me murs dans mon chagrin. Même à Kai, je ne lui réponds pas. Tout le monde croit que ma mère est morte depuis longtemps. C’est ce que je raconte en général. Que son décès m’a amené à quitter l’Espagne, que c’était trop douloureux de rester là-bas, et blabla. Mais cette fois c’est réel. Elle est morte. Et je n’en reviens toujours pas. Je ne bouge plus du canapé. En position fœtal je m’agrippe à une couverture qui est là par hasard. Je referme les yeux. Je veux dormir, m’échapper de cette cruelle réalité. Ne pas me sentir coupable. Partir loin, loin.

Ca sonne à la porte et je me réveille en sursaut. C’est bizarre, personne ne passe à cette heure-ci. Je daigne quand même me lever et marcher comme un cadavre vers la porte d’entrée. Je regarde à travers le juda : c’est Soledad. Ma meilleure amie. La seule qui connait tout de moi. La seule qui est au courant de toute l’histoire. La seule et l’unique. J’ai une seconde d’hésitation, puis je me décide à ouvrir. J’ai besoin de quelqu’un, j’ai besoin de soutien. J’ai besoin d’elle. « Sole… » Je marmonne d’une voix tremblante. Je dois avoir les cheveux ébouriffés et les yeux rouges – tellement ils sont asséchés. Je dois ressembler à un zombie. A un pauvre type. Peut-être que c’est à ça que ça ressemble un orphelin ? Finalement c’est ça qu’on ressent ? Quand on a plus de parents ? Ce putain de vide dans le cœur ?
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MessageSujet: Re: it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando   it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando EmptyLun 28 Mai - 17:11



When you try your best, but you don't succeed, when you get what you want, but not what you need, when you feel so tired, but you can't sleep... Stuck in reverse... And the tears come streaming down your face when you lose something you can't replace, when you love someone, but it goes to waste... Could it be worse ? Lights will guide you home and ignite your bones... ☇ FERNY&SOLE
« And I will try to fix you... »
La plupart des gens passent leurs journées à travailler. Ils se lèvent, croquent dans une tartine qu’ils ne finiront pas, avalent une gorgée de café qui squattera sur la table jusqu’au soir et s’en vont travailler pour quelques malheureux billets. Peu importe ce qu’ils font, peu importe qu’ils soient à quatre pattes à chaque heure pour nettoyer la saleté de l’humanité ou bien assis derrière un bureau à faire des statistiques sur la vitesse à laquelle notre monde se fout en l’air, à la fin de la journée, ils rentrent tous chez eux en oubliant de pointer leurs heures sup’. Et tant pis si ce sont des heures gaspillées, des heures à ne plus se rappeler comment on rit comment on vit. La vérité, c’est que l’argent est une excuse. La vérité, c’est qu’ici bas, personne ne bosse pour du fric. On bosse pour passer le temps, pour oublier les factures à payer, les tracas du moment et les tracas des lendemains. On bosse et quand on a fini la journée, quand on rentre chez nous, on ne retrouve rien sinon la tartine entamée et le café froid qu’on a oublié le matin. C’est pour tout ça qu’on se tue au boulot : pour oublier qu’on est seul ici bas et que parfois, on aimerait bien avoir quelqu’un avec qui partager ses rires, ses pleurs et même les grandes défaites. Et puis les grands malheurs, et puis les tragédies.

« Joa ? » Encore un silence, encore un soupir. Je sais pertinemment qu’il a entendu, que ça a tapé contre ses tympans et qu’il a sûrement eu envie de se boucher les oreilles pour ne plus retenir le son de ma voix. Ca a beau crever le cœur, on a quand même fini par laisser aux autres couples ce qui nous va si mal. Les mots d’amour, les assiettes décorées, les promesses qu’on ne saurait jamais tenir. Il nous reste les mots brouillons et ces assiettes cassées qu’on a trop souvent jetées contre les murs. C’est pour ça qu’on se tait. Pour ne plus recommencer les mêmes erreurs. J’crois qu’on est fatigué. De s’acharner tous les jours. De se cracher des mots qui font tourner de l’œil et de ne s’en vouloir qu’à moitié. On est fatigué. De parler alors qu’on n’a plus grand-chose à se dire. Plus grand-chose à s’offrir. Arrête de dire des conneries pareilles gamine. Arrête de croire que t’as assez vécu et que maintenant, tu peux t’permettre de te laisser aller un peu. Juste un peu. Rien qu’un peu. Parce qu’un peu plus un peu ça fait déjà trop de temps perdu, ça fait déjà trop de moments à jeter à la corbeille et trop de bocaux de larmes à remplir. Qu’est-ce que tu lui diras quand tu seras allongée dans ton lit d’hôpital à avaler les dernières bouffées de ta vie ? Qu’est-ce que tu lui répondras quand il te criera reste avec moi t’en vas pas, je n’ai même pas eu le temps d’acheter un bateau pour te faire faire le tour de ma vie et on a oublié de faire deux ou trois bambins ? Parce que moi je sais Soledad. T’auras plus la force de rien et tu lui murmureras sans affronter ses yeux bouffés par la peur j’suis désolée de m’être laissée aller Joa, j’suis désolée de m’être laissée aller et je sais qu’un jour tu auras la grande maison aux volets blancs dont tu as toujours rêvée, t’auras trois gosses aussi beaux que toi et tu leur apprendras à ne pas faire les mêmes erreurs que nous mon amour, tu leur apprendras qu’il faut pas se laisser aller parce que un peu plus un peu ça donne des regards qui s’éteignent et des mots qu’on n’aurait jamais voulu dire. Et puisqu’il est trop tard Joa, je tiens juste à dire que si on n’avait pas joué autant avec le temps, je t’aurais dit oui. T’aurais été l’homme de ma vie et peut-être même qu’on aurait été beau. Mais pleure pas mon amour, tu sais c’est pas si grave, une autre te rendra beau et tu verras mon amour, tu verras mon amour… que le bonheur n’a été inventé que pour toi et qu’il guérira ce visage que j’ai trop souvent abîmé à coup de un peu plus un peu. J’étouffe. J’ai besoin de m’échapper. J’ai besoin de claquer cette porte et d’aller retrouver celui qui me connait plus que je ne me connais moi-même. Celui qui me prend pour un soleil et me donne la force d’avaler mes cachets tous les matins. Alors j’attrape un post-it déjà noirci par l’encre et j’en rajoute une couche : partie voir ferny. Ps : il reste de la pizza dans le frigo.
Puis je claque la porte et je me barre à la recherche d’un peu de répit, à la recherche d’un peu d’nous deux.

[…]
J’appuie machinalement sur le bouton et c’est seulement lorsque la sonnerie retentit que je m’autorise à reprendre mon souffle. J’ai encore couru. D’abord jusqu’à l’hôpital en pensant que Fernando y serait. Ensuite jusqu’à chez lui en découvrant qu’il était inscrit aux abonnés absents. Et comme la porte ne s’ouvre pas, comme je reste sur le palier, je sens la panique caresser mes foutues entrailles. Qu’est-ce qu’il fout bordel ? J’en oublie mes poumons qui sifflent, j’en oublie ma vie qui se fait la belle à chaque fois que je force un peu trop et je me creuse les méninges. Ferny n’a loupé que deux fois le travail depuis que je le connais. Il avait trente de fièvre et ne pouvait même pas se lever pour aller pisser. Ca doit être ça. Il doit avoir attrapé un sale truc, un microbe qui s’attaque aux tripes et… « Sole… » Je relève la tête. Une seconde. Puis deux et encore quelques dizaines. J’sens les secondes s’écraser à nos pieds et je ferme les yeux. Juste un instant. Et quand je les rouvre, rien n’a changé. Ferny est toujours devant moi, à transpirer le chagrin, le désespoir et toutes ces choses qui ne sont pas faites pour lui. Il a de l’amertume plein les yeux et son sourire semble crevé. Hier il me riait encore au visage et aujourd’hui il n’y a plus une seule étincelle de joie dans son r’gard. Alors j’me rends compte que moi non plus je n’ai pas envie de rire, qu’la vie a l’air quinze fois plus moche qu’hier et que ses éclats de bonheur ne sont plus qu’un grand trou au fond de mon estomac. « Hé, Ferny… » Il est sens dessus dessous, amoché par le destin et toi tu le trouves quand même beau, hein Soledad ? Même s’il a les yeux rouges, même s’il a la tête de ces gars qui n’en ont plus rien à foutre de se raser ou de porter quinze jours de suite le même T-shirt. Toi tu continues de le trouver beau. Mais regarde le bordel. Regarde comme il a l’air enterré alors qu’il a encore les deux pieds bien encrés dans ce monde qui s’fout bien de ta gueule, de la sienne, de celle de l’humanité toute entière. Non, le prends pas dans tes bras gamine, pars tant qu’il en est encore temps. Lui fais pas ça. Parce que quand tu te transformeras en poussière et qu’il voudra refermer ses bras sur toi, il ne touchera que le vide. Et personne ne mérite ça Soledad. Faut pas rendre les gens malheureux, faut pas leur promettre des choses alors que tu sais qu’ils n’auront que l’absence. Barre-toi. Et laisse-le apprendre à se relever seul. Laisse-le oublier ton odeur, ta présence. Laisse-le oublier jusqu’à ton nom bordel. Je rentre dans l’appartement, ferme la porte derrière moi et me tourne à nouveau vers lui. Pas un pas. Il n’a pas bougé. Il a le regard si vague que j’ai l’impression de parcourir une centaine de kilomètres à chaque fois que je m’y perds. Mes doigts glissent sur son bras nu quelques instants… Et je finis par le serrer contre moi. Je presse mon corps contre le sien et quelque part, je crois que j’prie pour que le chagrin le lâche et s’attaque à moi. J’suis sûre que ce serait toujours moins douloureux que de le voir comme ça, si fragile. « On peut en parler mon trésor. » Silence. « Ou on peut aussi s’asseoir sur le sol et ne pas parler. » Il sait déjà tout ça. Il sait déjà tout ça parce que ça fait partie de nous. Les confessions. Les silences. Les éclats de joie et les éclats de pleurs. Y’a rien que nous ne traversons pas ensemble. Rien. C’est pour cette raison que je le tire près du canapé, qu’on s’assoit côte à côte et que je ne lâche pas sa main une seule seconde. Ce serait trop bête qu’il oublie que je compte être là encore longtemps. Que je grappillerai un maximum de moments à la maladie pour continuer à avancer dans ses pas. Ce serait trop bête qu’il ne se rappelle plus qu’il peut encore avoir besoin de moi et qu’on va pas lâcher l’affaire comme ça. Qu’il doit se battre parce que y’a rien de plus joli que nos doigts qui se croisent, que nos rires qui s’étreignent. Que l’amour qu’on se porte.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando   it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando EmptyDim 3 Juin - 0:08


« La mort rattrape ceux qui la fuit. » Horace.

C'est fou. Incroyable. Inimaginable. Tout peut s'éffondrer. Tout ne tient qu'à un fil. Une vie. Un destin. Tout est frêle, fragile. En un instant, en une seconde, en moins de temps qu'il n'en faut pour le réaliser, une vie est déjà brisée. Mon coeur, il s'est retrouvé arraché de ma poitrine. Arraché si violemment que je ne l'ai même pas senti. C'était trop rapide, trop inattendu. Imprévisible. Un trou béant. Rien. J'étais mort. Je suis mort. Mais je respire toujours. Je vis par procuration. J'ai perdu un partie de moi. Une partie essentielle. Et j'ai même pas pu lui dire au revoir. Et j'ai même pas pu accepter l'idée. Elle s'imposait déjà. J'avais pas envie d'accepter. J'ai pas envie. J'aurai jamais envie. Mais on m'y force. Le destin, Dieux, ou je ne sais quoi. Cette force qui décide que certains doivent mourir aujourd'hui et que les autres peuvent continuer, qu'ils vivront un jour de plus avec le poid de la perte des êtres aimés. Parce qu'il n'y a pas que ma mère qui est morte. C'est l'espoir, l'espoir que j'avais de la revoir. J'étais persuadé qu'un jour, ça arriverait. Que malgré ce qu'on s'était dit, notre au revoir n'était pas un adieu. Et pourtant, ça l'a été. Elle était déjà absente de ma vie, elle me manquait déjà, mais l'espoir lui, il était là, il m'aidait à tenir, il ne me quittait pas. Il était tout ce qui me restait d'elle. Et maintenant, il ne me reste plus rien, plus rien à part des souvenirs. Et une photo. La seule photo d'elle que j'ai. Elle et moi dans notre jardin. J'étais petit, je ris. Elle me tient dans ses bras. On était heureux. Ca s'voit qu'on s'aimait. Ca s'voit que j'étais sa fierté, qu'elle aurait pas pu vivre sans moi. Que ces cinq dernières années ont du être les pires de sa vie. Et donc je déteste encore plus mon père. C'est sa faute. C'est lui qui nous a imposé ça. Si j'avais encore des affaires à lui ici, je brûlerai tout, mais j'ai déjà tout brûler. Et pourtant, l'évidence de ma haine pour lui se fait encore plus forte aujourd'hui.

Le cadre dans les mains, je vais ouvrir à Soledad. J'ai besoin d'elle. D'elle contre moi. D'elle avec moi. D'elle. Parce que c'est ma meilleure amie, parce que c'est comme ma soeur, parce que c'est elle. Sole. Soledad, mon soleil. J'aimerais lui sourir, parce qu'elle le mérite, elle mérite mon sourire, elle mérite le bonheur. C'est mon but, de lui rendre la vie facile, de la rendre heureuse. Parce qu'il lui reste peu de temps, parce que j'ai pas envie d'être malheureux devant elle, elle mérite pas de s'apitoyer sur moi. Elle doit sourire. Elle semble inquiète, même carrément paniquée. Et je m'en veux presque de lui faire subir cette inquiétude. Néanmoins, l'image de ma mère ne me quitte pas et je ne parviens pas à abandonner ma tristesse. Elle me colle à la peau, elle s'imprègne en moi, elle s'installe. J'en veux pas mais elle veut pas s'en aller. Au fond elle est comme moi quand je devais partir et quitter ma mère, elle est nécessaire même si j'en veux pas. « Hé, Ferny… » Elle me serre tout contre elle et elle me fait du bien. Je sais qu'elle lutte pour rester forte, je sais qu'on est connecté, que nos émotions sont reliés et qu'il n'y a pas un malheur qu'on ne traverse et qu'on ne subit pas ensemble. Parfois, on dirait qu'on ne fait qu'un. Mais parfois, lors des jours de crise, l'un des deux se doit d'être la béquille de l'autre, celui qui l'empêchera de flancher, celui qui sera en mesure de rééquilibré la balance. « On peut en parler mon trésor. » Mais je réponds pas parce que j'ai trop mal, trop mal pour parler, trop mal pour lui expliquer. Parce que pour le moment je parviens à ne pas pleurer. Mais je suis persuadé qu'il suffit que je laisse échapper un mot pour que mes dernières forces me quittent, pour que je m'abandonne totalement à ma peine. « Ou on peut aussi s’asseoir sur le sol et ne pas parler. » On s'éxécute. On se pose par terre, en silence. Et ça nous convient, parce qu'il ne nous faut pas des mots pour nous comprendre. Avec Sole, on a notre language à nous. Les choses se font toutes seules. On comprend. Je pose ma tête sur son épaule, je sens ses doigts caresser mon bras. Le tableau doit être étrange: deux adultes, assis par terre, le regard dans le vide, absents. Mais peu importe, c'est nous, c'est comme ça. Et ça m'aide, un peu. Ca présence me réconforte déjà, je ne suis pas seul.

Je lui tends le cadre avec la photo, j'aimerais qu'elle comprenne vraiment. Ce serait injuste qu'elle ne sache pas l'exacte raison de mon état. Je pense que les choses, elle les comprendra, même rien qu'avec une photo. « Les meilleurs partent toujours les premiers... Je déteste cette expression. » J'aime pas les gens qui ont raison, j'aime pas le je sais tout, j'aime pas ça du tout. Les expressions sont souvent vraies. Surtout celle là. Et le pire c'est que Sole, elle va aussi partir un jour, un jour pas si lointain que ça. Ils vont aussi me l'enlever, ces gens là-haut qui décident de la mort des terriens. Je les déteste. Ils font que des choix de merde, même si il tirait au hasard ce serait mieux. J'suis sûr qu'ils kiffent ça les gens, nous rendre malheureux, nous enlever les gens qui font de notre vie un moment agréable. Eux ça les éclatent, c'est comme shooter les gens quand on joue à GTA, c'est un peu marrant. Alors qu'en vrai, la mort, c'est tragique. Et je supporte pas que Sole soit condamnée et aujourd'hui plus que jamais je me dis, que je ne m'en remettrai pas, que je ne supporterai pas de vivre sans elle. Mais je ne lui dis pas, parce que je ne peux pas. Parce que c'est le genre de chose qu'on ne veut pas se dire. « Sole, j'ai besoin d'aller en Suisse. Faut au moins que je vois sa tombe, faut au moins que je puisse lui dire au revoir. Ne me dis pas que c'est dangereux, je m'en fous. » Et oui, ça m'est venu comme ça, comme une évidence. Je dois le voir pour le croire. Je dois me recueillir, je dois dire ces choses, même si peut-être ma mère ne les entendra jamais, au moins elles seront dites. Il le faut, sinon je ne pourrais jamais faire mon deuil.

Et je ferme les yeux. Et je me rappelle de notre jardin, de la douce odeur des plantes. J'imagine que le parfum de Sole est celui de ma mère. Et je me blottis contre elle. Et doucement, d'une voix presque inaudible, je chante. Notre chanson. « Mi corazon » Notre chanson à nous. Ca me berce, ça me calme. Mon coeur s'allège presque. Presque.
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MessageSujet: Re: it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando   it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando EmptyMar 26 Juin - 21:28



When you try your best, but you don't succeed, when you get what you want, but not what you need, when you feel so tired, but you can't sleep... Stuck in reverse... And the tears come streaming down your face when you lose something you can't replace, when you love someone, but it goes to waste... Could it be worse ? Lights will guide you home and ignite your bones... ☇ FERNY&SOLE
« And I will try to fix you... »
On est là, assis sur le sol à s’accrocher du regard au mur d’en face et je ne peux pas m’empêcher d’imaginer ce qu’on regarderait s’il n’y avait que du vide. Est-ce qu’on oserait s’en approcher ? Est-ce qu’on oserait faire un pas de trop, coucher avec la chute ? Et puis crever ensemble. Et puis crever tout court. Parfois, il m’arrive d’y penser. A la mort. J’parle pas de ces pensées glauques qui habitent ces hommes qui n’ont jamais cru en leur organe gorgé de sang qui pompe, pompe tout ce qu’il y a de vivant en nous. Ce cœur qui pompe la vie. J’parle de la mort qu’on pourrait se donner pour prendre le destin au dépourvu, pour lui faire ravaler sa fierté et les jours tristes à mourir dont il s’est trop souvent débarrassé pour les enterrer au fond de nos baskets. Et tant pis si ça nous a défoncé les pieds et qu’on a fini par perdre tous nos appuis. Moi, j’tiens la main de mon meilleur ami, je regarde le mur lisse qui nous oppose et je me dis qu’on pourrait être bien là-bas, là où le destin n’a plus sa place. Ni la vie d’ailleurs. Là où on est vraiment libre. Enfin libre. Avec nous-mêmes et ceux qui veulent prendre un peu de nous. Et puis l’instant d’après, je me dis qu’il faut être sacrément dérangé pour décrocher le peu de battements de cœur qui reste au fond de nous et les jeter au vent. Comme ça. Comme si ici où là-bas n’avait aucune importance. Comme si s’en aller en oubliant de dire au revoir à ceux qu’on a trop aimés, ceux qu’on a mal aimés et ceux qu’on a même pas eus le temps de rencontrer ne faisait absolument pas mal. Parce qu’en réalité, j’suis certaine que même mille mètres au-dessus d’ici, on continue à en faire des cauchemars. On r’pense à tous ceux qu’on a laissés et on s’dit putain comme c’était beau, putain comme c’était mieux. Ton sourire me manque Eglantine, ton sourire me manque et c’est p’tet égoïste mais ça me bousille de voir que tu ris encore alors que j’suis plus là. Et toi Peter, j’aurais adoré rencontrer tes gosses, leur offrir des bonbecs et puis leur parler de ces temps qu’ils ne connaitront pas. T’as vieilli mais t’es restée la plus belle Maria, et toi Paulo qui aurait deviné que tu deviendrais astronaute ? La vérité gamine, la vérité c’est que t’es une froussarde. T’as peur. De vivre. De mourir. Mais ce qui te donne vraiment envie de remplir des bocaux de larmes, c’est de t’imaginer séparée de Ferny. Parce que ça crève les yeux que vous ne faites plus qu’un. Ca crève les yeux qu’il faut que vous soyez ensemble pour avancer correctement. Alors t’as peur. C’est pour ça que tu ne te décides jamais. Partir ou rester. C’est pour ça qu’tu endors de plus en plus souvent avec de la nostalgie plein les tripes. Toi, si tu dois mourir, tu veux que ce soit entière. Tu veux pas te r’trouver avec un bras en moins, tu veux rien laisser ici. Surtout pas ce grand bout d’joie qui en rendra heureuse une autre le jour où tu t’feras bouffer par les vers.

« Les meilleurs partent toujours les premiers... Je déteste cette expression. » J’attrape le cadre qu’il me tend et le regarde un instant. Une seconde, peut-être deux. Je suis déjà tombée des centaines de fois dessus. C’est une de ces photos sur lesquelles les sourires ne vieillissent jamais. C’est une de ces photos qui redonnent un peu de couleurs au monde. Je ferme les yeux et je retrace chaque trait de la photo, comme si elle était un morceau de mon passé. Il y a ce gosse qui rit, et je me dis que déjà à l’époque Ferny était plus beau qu’un tournesol. Il y a ce gosse heureux, cette mère sereine. Ca crève d’amour, de joie et puis voilà, j’me rappelle que ce n’est qu’une photo, qu’un bout de papier usé par le temps alors je rouvre les yeux, je rouvre les yeux et la réalité m’attrape à la gorge. Comme une idée qui revient de loin, j’comprends la gueule triste à mourir de Ferny. J’pense aux combats qu’il va devoir vivre à partir de maintenant, j’pense à la douleur qui va l’étreindre au coeur de la nuit et à l’absence qui s’en va jamais vraiment alors je serre sa main encore plus fort. Je ne trouve pas les mots et c’est pour ça que je serre de toutes mes forces, pour lui murmurer la vie est moche mon trésor, la vie est moche mais toi t’es sacrément beau et puis tu sais qu’elle soit ici ou là-bas est-ce que ça change vraiment quelque chose ? Moi j’suis sûre qu’elle t’aimait plus qu’elle n’aimait le reste et qu’elle est en train de crier cours mon fils, cours et sois heureux. Attrape toutes les lucioles que tu croiseras et ne les laisse pas filer. Cours et arrache de la vie à la vie. « Je suis désolée, mon trésor… » Soupir. « Tu te souviens, quand Pépé est parti ? On s'connaissait pas depuis longtemps et pourtant, quand tu m'as vue ce jour-là, tu m'a prise par la main et tu m'as emmenée chez toi. J'me souviens avoir pleuré jusqu'à ne plus avoir d'eau là-dedans... » Je désigne mon propre corps. « Et même quand y'en a plus eu, j'ai continué. Ça ne me faisait pas de bien de chialer comme ça, ça ne me faisait rien. J'savais que pleurer ne me le ramènerait pas alors je pleurais encore plus. Et puis un soir, tu m'as regardé droit dans les yeux et tu m'as dit faut que t'arrêtes de pleurer Soledad, faut que t'arrêtes de pleurer parce qu'il est encore là, ton grand-père. Y'a son chapeau à l'entrée et puis t'as vu tous ces silences ? Il est dedans. C'est comme ça que je me suis relevée, Ferny. C'est parce que t'étais là. Alors j'vais te faire une promesse. » Et moi qui n'ai jamais rien promis à personne, je plonge enfin mes pupilles dans ses siennes et je souris. Je souris parce que je l'aime. Parce que je l'aime et que ça me suffit pour sourire. « Y'aura rien qui nous séparera tant que tu n'iras pas mieux. Rien. Et surtout pas mes poumons en plastique. »

« Sole, j'ai besoin d'aller en Suisse. Faut au moins que je vois sa tombe, faut au moins que je puisse lui dire au revoir. Ne me dis pas que c'est dangereux, je m'en fous. » Je savais que ça sortirait d'entre ses lèvres. Je savais qu'il finirait par dire ça, qu'il finirait par choisir cette option pour faire taire la culpabilité qui palpe ses organes. J'crois que j'ai pas besoin de faire le tour des questions à se poser, ni celui de celles à ne pas se poser. J'crois que j'ai pas le courage de lui dire non, que j'ai juste ce foutu besoin de rallumer les étoiles dans ses yeux. Peu importe le prix à payer. « Je veux venir avec toi. S'il te plait. » Et lorsque sa tête se pose sur mes épaules et qu'il se met à chanter, je suis certaine de faire le bon choix. J'oublie la maladie, la prison dans laquelle je suis obligée de m'épanouir, j'oublie jusqu'à mon nom. Il n'y a plus que ce poids sur mes épaules, que cet air aux sons tristes à mourir. Il n'y a plus que ma moitié et un combat à gagner.

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Fernando Gautier-Perez
Fernando Gautier-Perez
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MessageSujet: Re: it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando   it was a dying good morning. Ҩ soledad & fernando EmptyJeu 28 Juin - 19:38


« La mort rattrape ceux qui la fuit. » Horace.


Silence. Silence. Parce que c’est toujours mieux de se murer dans le non bruit. C’est toujours mieux de ne pas ouvrir la bouche et de révéler ce qu’on a sur le cœur. C’est toujours mieux de se contenir à en exploser, de tout garder bouclé à double tour à l’intérieur. C’est toujours mieux de souffrir, en silence. Et puis même à deux, parce qu’à deux c’est mieux, parce que Soledad a le don –même si je ne suis pas sûr qu’on puisse appeler cela un don- de capturer mon mal être. Elle m’en arrache un bout, contre ma volonté, elle partage ma souffrance. Elle se mure dans le silence elle aussi. Et on souffre, ensemble. J’sais que c’est inévitable, qu’elle et moi on est relié par ce je ne sais quoi qui fait de nous deux êtres indissociables. J’sais que c’est inutile de m’en vouloir de la rendre malheureuse elle aussi. J’sais que c’est juste comme ça. « Je suis désolée mon trésor… » Sa douce voix me rassure, me berce en quelque sorte. Même si au fond, je ne fais pas attention aux mots, non, je me laisse simplement porter par les décibelles de sa corde vocale. « Tu te souviens, quand Pépé est parti ? On s'connaissait pas depuis longtemps et pourtant, quand tu m'as vue ce jour-là, tu m'a prise par la main et tu m'as emmenée chez toi. J'me souviens avoir pleuré jusqu'à ne plus avoir d'eau là-dedans... » Oui je m’en souviens, son grand-père, il m’a pas fallu plus d’une ou deux rencontres avec lui pour que je l’adore. Pas parce que nos conversations étaient incroyablement passionnantes, pas parce qu’on se tapait des délires à ne plus pouvoir respirer. Non, parce qu’il m’a enseigné ses silences. Parce que j’ai compris que les mots sont souvent inutiles. Et aussi parce qu’il m’a fait mieux accepter la maladie de Soledad. Je crois qu’il m’a transmi la force nécessaire pour soutenir Sole quand il ne serait plus là, j’crois qu’il m’a donné le flambeau en quelque sorte. Et quand il est parti, quand il s’en est allé, quand il a tiré sa révérence, j’étais là, tout près d’elle, tout près de lui, et on a réussi à s’en sortir. « Et même quand y'en a plus eu, j'ai continué. Ça ne me faisait pas de bien de chialer comme ça, ça ne me faisait rien. J'savais que pleurer ne me le ramènerait pas alors je pleurais encore plus. Et puis un soir, tu m'as regardé droit dans les yeux et tu m'as dit faut que t'arrêtes de pleurer Soledad, faut que t'arrêtes de pleurer parce qu'il est encore là, ton grand-père. Y'a son chapeau à l'entrée et puis t'as vu tous ces silences ? Il est dedans. C'est comme ça que je me suis relevée, Ferny. C'est parce que t'étais là. Alors j'vais te faire une promesse. » J’écoute attentivement, les yeux baignés de larmes, ému, triste. « Y'aura rien qui nous séparera tant que tu n'iras pas mieux. Rien. Et surtout pas mes poumons en plastique. » Les larmes coulent toutes seules. Elles coulent toutes seules parce que je sais que Soledad tiendra promesse, je sais qu’elle ne m’abandonnera pas. Mais qu’est-ce que ça veut dire au fond ? Un jour, oui, j’irai mieux. Un jour, elle me quittera. Et j’irai mal. Et j’aurai plus de Soledad pour me relever. Dans ce cas je veux pas aller mieux, je veux même crever de tristesse rien que pour rester avec elle, rien que pour qu’elle ne m’abandonne pas. J’veux jamais parler d’elle au passé. Jamais. Y a que le présent, y a que ça pour elle et moi. « D’accord… » Mais oui, je réponds simplement ça, parce que je ne peux pas aborder les choses avec elle. Elle souhaite que j’accepte l’inacceptable, que je sois conscient qu’elle pourrait partir n’importe quand. Elle veut que je sois prêt à recevoir ce foutu coup de téléphone de l’hôpital, celui qui t’annonce la mauvaise nouvelle. Elle veut pas que je pleure. Elle veut pas que ça me fasse mal. Et elle comprendra jamais que c’est inacceptable.

J’ai b’soin d’aller en Suisse. J’ai b’soin de voir ma mère. J’ai b’soin de comprendre. J’ai b’soin de réaliser que tout ça est réel. Faut que j’y aille, c’est tout. « Je veux venir avec toi. S’il te plait. » Je lui prends la main. « Je sais pas si j’aurai été capable d’y aller seul de toute façon… » Et je pose ma tête sur elle, je sens son parfum m’envahir, je sens sa présence me porter. Je sens notre silence, apaisant, doux et calme. Je chante, doucement, pas longtemps, j’ai envie de silence. Silence. Silence. Calme. On est bien, du moins on semble l’être. On a pas l’air en deuil. On dirait que c’est nous qui sommes morts. On dirait qu’on s’envole vers le paradis, ou bien n’importe quel endroit calme et doux. On oublie tout. On essaye de calmer nos pulsations, qui s’emballaient il y a encore quelques secondes. On essaye de respirer comme il faut. J’essaye d’assécher mes pomettes. J’aimerais sourire. J’aimerais que ce sentiment de bien être soit réel. Mais je sais très bien qu’il n’est qu’illusion. Je sais très bien qu’à peine le silence brisé, l’illusion se dissipera. Et j’ai pas envie de vivre dans les nuages. J’ai pas envie d’être aussi naïf. Alors je parle. « Comment tu crois que je pourrais me faire pardonner ? J’veux dire de l’avoir abandonner… » Ma voix tremble. Mes mots transpirent les larmes. Parce qu’au fond, c’est ça qui me ronge : la culpabilité. Parce qu’au fond c’est ça, j’ai besoin qu’elle me pardonne : mon égoïsme.
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