Boulot, boulot, boulot. Je commence à me faire chier comme un rat mort dans cette ville. Passer de New York, la ville qui ne dort jamais, où j'avais vécu pendant quatre années à Arrowsic, ville de ma naissance, avec son petit lycée, son parc, son super marché et … et rien d'autre, ça fait un sacré choc. Dire que je n'étais même pas revenu une seule fois pour voir mon père pendant tout ce temps ; il me manquait plus que tout, ayant toujours été très proche de lui, mais la peur de recroiser Némo au coin d'une ruelle était trop forte, ça m'en rendait presque malade. Le retour avait été un peu précipité, sur un coup de tête en quelques sortes, alors que ma carrière en tant que journaliste semblait acquise, posé sur de bonnes bases et grimpant doucement les échelons, un par un. Il y a deux semaines, j'avais reçu un appel d'Otilla, l'infirmière personnelle de mon paternel, qui m'annonçait qu'il se faisait réellement vieux maintenant, qu'il avait besoin d'une présence, qu'il était malade et que ses forces commençaient à doucement l'abandonner. Je n'avais plus vraiment le choix ; j'aime mon père, je ne pouvais pas le laisser seul dans la maison qui m'avait vu grandir, en lui tournant le dos pour quoi au juste ? Un boulot. Alors me voilà, de retour parmi les vieux souvenirs qui déboulent en filigranes, s'entre choquant dans mon esprit déjà assez confus comme ça.

J'avais opté pour le lycée aujourd'hui. Petit tour vers le bureau du principal pour quémander un poste, que ça soit en tant que surveillant ou même employé je ne sais où dans l'établissement, tout me convenait. Je grimpe les marches du hall et c'est comme une grande claque. La nostalgie débarque avec une vitesse cruelle, m'arrache un sourire au fil des vieilles images. Les gamins qu'on était, à courir partout pour rentrer à la maison, ou aller se poser dans le parc en insultant le monde entier, clopes piquées à nos parents pendues aux lèvres. C'est fini cette époque, over. « Andrea ? Mais qu'est-ce que tu fais là ? » Une voix féminine me tire de mes pensées, et je redresse le menton, me concentre sur la jolie blondinette qui débarque en souriant. « Kate ? » Kate, ou la stagiaire que j'avais eu il y a quelques mois à New York. Jeune lycéenne avec qui la relation passait aussi bien que mal. Tout dépendait des jours, ou même des sujets abordés. Je soupire doucement, en passant ma main dans mes cheveux, jetant un regard circulaire au lycée. « J'viens me chercher du boulot. New York m'ennuyait, le journalisme aussi, alors j'me suis dit que j'allais revenir ici et devenir pion. » Blague bien entendu. « Tu as terminé tes cours ? »