Ce n'est pas comme ça que j'imaginais ma vie. Non, je n'ai jamais voulu ça. Comment avais-je fait pour en arriver là ? « Oh mon dieu ... » Je fermais les yeux et me laissais tomber sur le canapé derrière moi. « Que ... Robyne ! Comment as-tu pu ... » Comment avais-je pu ? Ce salopard battait ma mère depuis ma naissance. « Sors d'ici ... SORS D'ICI ! » Je ré-ouvris les yeux, sans rien dire et fixais la petite femme toute tremblante qui se tenait debout devant moi. A ce moment-là, ma mère me parut belle, même très belle. Etais-je folle de penser cela à un moment pareil ? Certainement. Cependant, savoir qu'elle était enfin libre la rendait magnifique à mes yeux. Grâce à moi, elle était enfin débarrassée de cet horrible homme, bien qu'elle n'en avait pas encore conscience. « Tu ... Tu as entendu ?! SORS D'ICI ET NE REVIENS PLUS JAMAIS ! » Je me mis alors debout, pris mon sac sans rien dire et regardais ma mère une dernière fois avant de sortir de la maison.

Ne croyez pas que je suis une fille sans coeur. N'allez pas penser que tout ceci ne me fit rien car cela détruisit ma vie. De toute façon, elle l'avait toujours été. A cause de lui. A cause de cet homme que je me devais d'appeler "père". Mais cette appellation avait disparu en même temps que celui-ci était rentré en prison. Oui, après de longues années de maltraitance, j'avais enfin réussi à le tenir éloigné de ma mère. Une victoire oui, mais je devais en payer le prix. Cet évènement s'était déroulé quelques jours après mes 18 ans. J'en ai aujourd'hui vingt-trois et je n'ai jamais revu ma mère. En fait, c'est elle qui n'a jamais voulu me revoir. D'après ma soeur plus âgé, elle s'est à présent rendu compte à quel point mon père faisait de sa vie un enfer. Pourtant, elle n'est pas prête de me pardonner. Un jour peut être ? Je l'espère plus que tout ... Ainsi, après avoir été chassé du domaine familiale, je pris l'initiative de continuer mes études dans une université proche de New York. Passionnée de piano et de musique depuis ma plus tendre enfance, je suivis un cursus dans lequel je pouvais me perfectionner pour pouvoir plus tard trouver un métier dans ce domaine.

« ROBYNE C'EST HORRIBLE VIENS TOUT DE SUITE ! » « ... hm ? » Ma coloc' (et meilleure amie) me réveilla en sursaut. Qu'est-ce qui lui prenait ?! Même si je l'adorais, elle avait intérêt à avoir une excuse en béton pour avoir à me réveiller comme ça. Après un long baillement, je pris enfin l'initiative de me lever de mon lit pour me diriger vers celui de ma coloc'. Celle-ci y était allongée dessus et tenait son ordinateur portable sur ses genoux. Et après, on dit que c'est moi la geek ... « C'est pire que horrible ! C'est, c'est ... c'est pas possible, ça doit être une blague ! » Arrivée à côté d'elle, je posais mes yeux sur l'écran, fronçant les sourcils. J'avais du mal à lire, mes yeux étant encore un peu flou. Cependant, un gros titre me sauta à l'oeil. AILEEN QUITTE LE GROUPE. Quoi ? Impossible. J'étais surement en train de rêver. Oui voila, c'était un rêve et j'allai bientôt me réveiller ... Comme si l'un des membres de mon groupe préféré, celui dont je tenais le fan club pouvait abandonner le groupe ! Vraiment, quel rêve bizarre ! J'attendis alors quelques minutes. Ce ne fut que lorsque je vis la tête déconfite de ma colocataire que je compris que tout ceci était bien réel. « Il ... il doit surement avoir une bonne raison. » Répondis-je, gardant mon calme, bien que cette nouvelle me faisait l'effet d'une bombe.

« Vous avez le poste ! » J'étais de retour dans ma ville natale. Enfin. Il faisait tellement bon d'y vivre ! Tout ici m'avait manqué. Je ne regrettais en rien d'avoir délaissé mes études pour revenir vivre ici. En effet, l'université n'était finalement pas faite pour moi. Je m'étais donc mise en tête de chercher du boulot à Arrowsic et j'en avais vite trouvé un, celui de journaliste dans la rubrique musicale du journal locale. Un boulot qui, à présent, me convient parfaitement. Je me suis également trouvé un appartement dans lequel je vis seule. La solitude ne me dérange pas. Mais n'allez pas croire que je fuis les gens car, malgré les apparences, je suis très sociable. J'arrive à me faire des amis où que j'aille, ce qui, je pense, est une très bonne chose pour moi. Simplement le soir, je préfère me retrouver ...

« Tu n'aurais pas du partir. » Si vous saviez l'effort que je venais de faire pour parler d'un ton aussi détaché ! Aileen tourna de nouveau la tête vers sa boisson. Oui, celui-ci se tenait assis sur un chaise, juste devant moi. Jamais je n'aurais imaginé le rencontrer un jour ici. En fait, jamais n'aurais imaginé le rencontrer tout court. « Ne me juge pas, tu ne me connais pas. » Le voir ainsi en train de boire dans un bar changeait complètement la vision que je m'étais faite de lui. A ce moment là, il me semblait bien plus ... humain. « Aileen Clay McDeleon. 25 ans. Bassiste hors pair. Je te connais. Je tenais votre fan club, imbécile ! » C'est ainsi que s'était déroulé notre rencontre, un verre à la main, la clope aux lèvres. Si le rencontrer dans un endroit pareil avait été pour moi une chose aussi bizarre, devenir son ami m'avait presque semblé normal. Aujourd'hui, l'un sans l'autre, c'est comme un orage sans éclair, un soleil sans rayon, un océan sans eau. Nous sommes proches, très proches. C'est d'ailleurs l'une des seules personnes en qui j'ai une entière confiance. Oui, je me confie à lui tout comme il se confie à moi. Il est là pour moi et je le suis aussi pour lui. Oui, tout est bien.