Ce sentiment était affreux, un mélange de colère, d’inquiétude et de surprise, un cocktail qu’Astrée ne connaissait en rien habituellement. Elle repassa encore une fois ce fichu enregistrement qu’elle pouvait maintenant réciter par cœur, elle avait toutes les conneries de Mattia et de Llewyn,  toutes les horreurs qu’ils avaient pu se dire, c’est pas vrai ,comment ça avait pu se produire ? Son meilleur ami depuis les couches-culotes  et le garçon le plus formidable de tout lycée en train de se massacrer verbalement –et heureusement que ce n’était que verbalement-. Elle avait une envie folle d’aller voir Mattia, de lui mettre une bonne claque et lui demander des explications. Comprendre pourquoi il avait était aussi con que Kavi, depuis quand il faisait partie des tyrans qui pourrissent la vie des autres ? Et puis surtout, il devait savoir qu’encore aujourd’hui le lycée suivait son exemple des avis de Llewyn. Oui, elle avait envie de faire ça, de comprendre qu’il n’avait pas fait les bonnes choses mais quelque part elle se doutait qu’il le savait déjà et qu’il était en réalité trop têtu pour s’excuser surtout maintenant que Llewyn avait dit le mot monstre. Oui, il y avait ça mais en fait, l’attitude de Mattia n’était pas le pire, non, le pire c’était les mots de Llewyn. « - Et j'aurais peut-être craqué avant Liam et tu aurais eu ma mort sur la conscience. T'es sûr que t'as pas envie de t'excuser parce que j'ai l'impression que t'aurais bien besoin de te faire pardonner. ». Elle n’aurait su dire pourquoi mais ces mots-là lui avaient retourné le cœur. Mattia aurait le droit à sa leçon de morale version Astrée mais, la priorité, c’était Llewyn.

Elle avait donc quitté sa chambre, caméra en main avec la ferme intention de la rendre à son propriétaire mais surtout de lui parler. « Astrée ? Tu sors ? ». Elle releva les yeux vers son oncle en terminant de mettre sa chaussure. « Oui, je vais chez un ami, j’ai quelque chose à lui rendre. ». Son oncle fronça les sourcils. « Ce n’est pas Mattia donc…. ? Non en fait je ne veux pas savoir ! Juste…eu… n’oublie pas ton rendez-vous chez le psy cette fois. ». Astrée ne put s’empêcher de laisser s’échapper un rire amusé devant la gêne de son oncle, même son père était moins frileux au sujet des garçons. M’enfin, si Ted était toujours célibataire c’est bien parce qu’il ne savait définitivement pas y faire avec les filles hein. « T’inquiète pas pour ça ! ». Elle lui fit un beau sourire avant de quitter la maison, elle avait largement le temps avant d’aller chez le psy et de prendre un sermon parce qu’elle avait oublié ses trois dernières séances.

Elle ne savait pas ce qu’elle allait dire à Llewyn, quelle émotion pourrait l’emporter sur l’autre, comment expliquer la situation mais… elle devait le faire. Elle espérait aussi qu’il ne lui en voudrait pas d’être la meilleure amie de Mattia, parce que, ce n’était pas quelque chose qu’elle pouvait changer et elle ne voulait pas perdre Llewyn une nouvelle fois. Devant la porte, elle inspira un grand coup avant de toquer, priant pour tomber directement sur lui.

Parfois cette intrusion dans votre intimité peut être ce dont vous avez besoin •

J'avais les yeux posaient sur mon plafond, alors que je venais de finir mon livre. Celui-ci était posé retourné sur mon ventre. Je ne sais pas pourquoi, je souriais. Bêtement. J'avais l'impression d'avoir accompli quelque chose de fou. Quelque chose d'énorme et j'étais fière de moi. Hier soir, quand je suis tombé sur ce petit livre, tombé depuis des mois derrières une étagère, je m'étais dit que j'allais le lire. Lui donnait la chance qu'on n'offre pas à ces romans oubliés et je ne le regrettais pas. Ouais, j'étais content. J'étais de bonne humeur d'un coup. Je crois que j'en avais bien eu besoin. Mon oncle venait juste de repartir avec son camion, prêt à traverser le pays pour déposer de la marchandise. Il y avait encore un énorme paquet de dollars posaient sur la table du salon. Il m'avait d'ailleurs questionné, en me demandant pourquoi je n'avais pas encore utilisé l'iPhone qu'il m'avait offert. L'objet était encore dans sa boite neuf. S'il voulait prendre de mes nouvelles, il n'avait qu'à appeler directement à la maison. Bon, ok, d'accord, si j'ai bien compris il avait pris un forfait avec appel illimité vers le téléphone de votre choix... mais ça me servait vraiment à rien. Mon bon vieux téléphone était mort, mais il ne me servait à rien aussi. Enfin bref, il était pari en me menaçant Si jamais je ne l'allumais pas d'ici demain et bien... je le découvrais à son retour. Peut-être qu'il se donnait le temps de la route pour réfléchir à une punition digne de ce nom, même si j'étais persuadé qu'il allait complètement oublier. En tout cas, dans mon coin, j'étais plutôt content. Et j'étais prêt à faire ma sieste, tranquille. Il faisait bon, le radiateur fonctionnait enfin, j'avais de la pizza à préparer après et un bon vieux films à regarder à la télé. J'étais bien partie pour une sieste quand quelqu'un toqua à l'entrée. Wouah... WOUAH.

Je me lève alors d'un coup, laissant tomber mon livre au sol. « - désolé. » lançait-en le ramassant alors que je me précipitais vers la porte. La maison était plutôt propre, parce que j'étais maniaque dans le genre - un trait qui appartenait à mon père - mais reste que mon oncle était là et que je n'avais pas encore rangé derrière lui. Alors il y avait de la bière sur la table, des chaussures salle en bas du canapé et un gâteau à moitié entamé qu'il avait abandonné avec une bonne liasse de billet vert. Quant à moi, j'étais en pyjama. Caleçon et Tee-shirt de Spider-Man quoi. Oh, avec des chaussettes de foot. Je lance alors un coup d'oeil par la fenêtre sur le côté pour voir Astrée... ATTENDEZ QUOI ? « - Merde, merde, merde... » Sans réfléchir je fonce dans ma chambre chercher un jean que j'enfile en trois secondes tout en essayant d'avancer vers la porte. *ne pars pas, ne pars pas*

« - Heyyyyy. »

La porte grande ouverte, je souriais à Astrée. Ça se voyait que j'étais épuisé ? Hein ? Peut-être. « - Je, heu tu... tu vas bien ? » J'essayais de sourire, mais je venais de battre tous les clichés des sourires gênais. Finalement, je veux bien l'utiliser ce téléphone, si ça me préviens qu'Astrée arrive...

Astrée attendait devant la porte non sans se mordre la lèvre inférieure, et s’il n’était pas là ? Il fallait dire qu’avec Llewyn et son aversion pour la technologie, c’était difficile de le prévenir qu’elle débarquait –bien qu’elle n’était pas franchement du genre prévenir non plus- et ce n’était pas facile pour lui demander où il était non plus. Elle passait d’un pied à l’autre, hésitant à faire demi-tour et elle allait craquer quand la porte s’ouvrit sur un sourire gêné qu’elle connaissait bien. « - Heyyyyy. ».  Astrée replaça une mèche de cheveux derrière son oreille avant d’afficher un beau sourire. « Salut, je te dérange pas ? ». Non parce que comme elle se doutait qu’il avait couru, elle y pensait maintenant, peut-être qu’elle l’avait tiré de ses occupations. « - Je, heu tu... tu vas bien ? ». Il essayait de sourire mais il y avait encore toute la gêne du précédent sur son visage, Astrée ne put s’empêcher d’afficher un sourire amusé. Elle n’avait pas voulu le mettre mal à l’aise, le pressé ou quoi ce soit mais, il était craquant comme ça.

« Je vais bien et toi ? ». Elle posa alors son regard sur son t-shirt, non sans froncer les sourcils –mais toujours avec un sourire amusé-. « Spiderman ? Mince, j’aurais plutôt pensé à Hulk. ». Elle eut un petit rire, elle repensait simplement à leur conversation au lycée, au fond s’il embrassait aussi bien que Peter Parker, elle n’avait rien contre… Well, qu’est-ce qui lui prenait de penser à ça ? Elle n’était pas du tout là pour ça et voilà qu’elle se retrouvait avec un sourire gêné inexpliqué.

« Je…eu… Je peux entrer ? ». Elle aurait aussi pu lui rendre sa caméra directement et repartir mais elle voulait vraiment lui parler de cette conversation avec Mattia et elle ne savait pas quel ton cela pouvait prendre alors autant éviter que les choses se déroulent sur le seuil d’une porte non ?

Parfois cette intrusion dans votre intimité peut être ce dont vous avez besoin •

J'avais honte. On aurait dit le début d'une comédie pourri. Sérieusement, je n'étais pas du tout en état d'accueillir qui que ce soit chez moi. Astrée encore moins. Mais quand même, j'oublie qu'il y a d'autres personnes autour de moi. Arrêter de trainer en pyjama devrait-être une priorité sur ma liste des choses à changer en moi. J'essayais d'offrir mon plus beau sourire, espérant que le reste de mon apparence passerait inaperçu. J'étais très surpris de voir Astrée chez moi. Ce n'est pas nouveau, elle était déjà venue, mais il y a longtemps quand même... J'étais quand même étonné qu'elle se souvienne de l'endroit. Mais bon, outre mon apparence de gros paumé de la vie et la maison de mon oncle digne de celle des films d'horreur - seulement de l'extérieur - j'étais plutôt content. Je sais que j'ai tendance à trop rester chez moi et à ne pas aller vers les autres, mais je n'ai jamais empêché personne de venir vers moi. Mais comme personne n'y pense, alors forcément...

« - Euh, non... non pas du tout. » C'est ça. Oui, j'étais juste en train de... bouquiner. Non je rêvassait en fait. C'était plus vrai. Pire, j'étais sur le point de faire une sieste, comme un vieux pépé des années 60 qui après avoir craché dans son pot estimé avoir fait assez de sa journée. J'étais ridicule quoi.

« - Oh euh, il faut bien que je soutienne mes amis les super-héros, haha. » Tait-toi Llewyn. Sérieusement. J'étais à deux doigts de courir me cacher sous ma couette tellement j'avais honte de ce que je racontais. « - Oui, oui va s'y, entre. » Je fis place, pour la laisser passer devant moi. Oui, la première chose à laquelle je pense c'est à ce qui se trouve chez moi. Mais c'était Astrée. Si nous reprenons à zéro notre amitié, autant resté aussi honnête que d'habitude. De toute façon, je ne savais pas mentir. Et puis je pouvais compter sur elle, je le savais. Si je devais faire confiance à quelqu'un, ça serait bien Astrée alors malgré le léger gêne que je ressentais, ça m'était égale qu'elle découvre l'endroit où je vis. Qu'elle tombe même sur des trucs chelou. Je commençais quand même à me demander pourquoi elle était là. Il faut dire qu'on n'avait rien prévu pour aujourd'hui - enfin je pense.

« - Tu veux boire quelque chose ? J'dois bien avoir du thé froid quelque part... » Je fermais la porte - j'avais pas envie que quelqu'un passe et ensuite raconte à mon oncle que je fou la merde en son absence. On a des voisins assez lourds d'ailleurs. Je me retourne de nouveau vers Astrée. Je ne savais pas quoi dire. J'étais littéralement muet, comme si rien ne pouvait sortir. Il faut dire que je ne savais pas quoi faire dans ce genre de situation. En dehors de donner à bouffer et à boire, tenir une conversation, ce n'était pas la chose que je savais le mieux faire. En fait, je savais surtout parler pour ne rien dire. Ça s'était ma spécialité. D'un coup, j'eu une idée. « - Si tu es venue pour la vidéo du gala, je n'ai pas encore eut le temps d'arranger ça... » D'ailleurs, elle était où ma caméra ?