Shane aurait adoré être plus souvent investi d’une mission comme celle-ci. Entendons par là qu’il n’y avait rien de désagréable à recevoir une coquette somme d’argent uniquement pour passer du temps avec une donzelle pour le moins agréable à regarder, tout en ayant pour objectif de la mettre dans son lit. Non vraiment, c’était du pain béni cette affaire. Sans compter que la charmante Juliet avait le parfait profil de la fille aisément manipulable : elle était adorable, gentille, un brin naïve et surtout désespérément déçue par la gente masculine. C’était du moins le portrait qu’en dressait son époux. C’est lui qui, au cours d’une rencontre fortuite dans un bar, lui avait demandé de séduire sa chère et tendre. Sordide, n’est-ce pas ? Mais Shane n’avait guère d’état d’âme. Encore moins lorsqu’on le payait aussi grassement. Du coup, le jeune détective privé s’était empressé d’endosser un rôle qui ne lui correspondait pas vraiment : l’homme sombre et tourmenté se faisait passer pour un jeune journaliste fraichement arrivé en ville et désireux de faire de nouvelles rencontres. En tous points de vue, Shane se faisait passer pour un gars sympa, digne de gagner la confiance de Juliet. Lentement mais surement, il tâchait d'y parvenir. Il avait commencé par provoquer une rencontre fortuite entre eux. Elle marchait dans la rue, il l’avait bousculé, s’était immédiatement excusé tout en l’aidant à ramasser ses affaires. Deux jours plus tard, il avait fait mine de venir prendre un café au même endroit qu’elle et avait renversé un bocal de sucre à ses pieds. Il s’était excusé et avait fait semblant de la reconnaitre, tout en affirmant que le destin était parfois étrange et plein de surprises. Tu parles !!! Mais Juliet n’y avait vu que du feu et Shane lui avait alors gentiment proposé de lui offrir un verre pour s’excuser. Le courant était immédiatement passé entre eux et pour cause !! Shane connaissait tous les goûts de la jeune femme. Son mari les lui avait dépeints dans les moindres détails, de ce fait, Shane n’avait qu’à s’y adapter pour qu’elle pense qu’ils avaient effectivement de nombreux points communs. C’était d’une facilité presque déconcertante ! L’affaire était presque réglée… Cela faisait maintenant près d’un mois que Juliet et Shane se fréquentaient. De simples connaissances, ils étaient rapidement devenus amis. Du moins, le croyait-elle car dans le fond, Shane ne s’intéressait guère à la demoiselle. Il gardait à l’esprit son objectif : la mettre dans son lit, recevoir son fric et se casser ailleurs. Mais pour cela, il fallait qu’il continue son petit numéro fort bien rodé. Un jeu d’enfant me direz-vous. Au cours d’une conversation, les deux jeunes gens étaient venus à parler d’emménager ensemble. Si l’idée avait intérieurement fait sourire Shane, il avait rapidement compris que cela pourrait jouer en sa faveur. Coucher avec elle deviendrait incroyablement facile. Il allait parvenir à la séduire en un rien de temps, il en était convaincu. De fait, ils avaient reparlé de cette idée et s’étaient mis à chercher un appartement. Appartement dans lequel ils devaient désormais emménager.
Ce matin-là, Shane se tenait au pied de l’immeuble qu’ils devaient désormais occuper. Il attendait que Juliet arrive tout en fumant une cigarette. Bon sang, fallait vraiment qu’il ait besoin de ce pognon pour jouer les jolis cœurs de la sorte !! Qu’est-ce qu’il en avait à foutre de l’aider à porter ces cartons !! Mais bon, il fallait qu’il continue dans sa lignée de parfait gentleman et pour ça, le moindre détail avait son importance. Ainsi, lorsque le taxi de Juliet s’arrêta dans la rue, Shane se força à adopter un sourire à la fois charmeur et ravi. Il aurait pu recevoir un oscar pour ça. Il s’approcha du taxi et ouvrit la porte de Juliet avant de lui tendre sa main. « Si mademoiselle veut bien se donner la peine.» Amusé, il se mit à sourire et lorsqu’elle fut descendue il déposa un baiser sur sa main. « Tu es absolument ravissante.» Ca en revanche, ce n’était pas un mensonge. Juliet était une jeune femme vraiment divine. Pas étonnant que son mari soit prêt à tout pour la récupérer. « Prête pour une nouvelle vie ? J’ai commencé à monter mes affaires, je ne savais pas trop quelle chambre tu préfèrerais occuper alors j’ai tout laissé dans le salon. Je te laisse le privilège de choisir.» Il lui adressa un clin d’œil complice et aida le chauffeur à sortir les cartons de la belle. Il le remercia, lui régla son dû et cartons en mains, s’avança dans le hall de l’immeuble.
Cela faisait presque deux mois que j’avais démarré ma nouvelle vie ici, à Arrowsic. Et si dans un premier temps, j’avais voulu vivre seule, j’avais bien vite dû me résoudre à chercher une colocation. Le prix d’un loyer étant assez élevé, j’avais tout simplement du mal à joindre les deux bouts. Surtout que mon boulot de serveuse ne payait pas des masses. Et que je n’étais pas encore assez connue pour vivre de mon boulot de styliste. Clairement, je n’avais plus les moyens de vivre seule. Le tour du monde duquel je venais de rentrer m’avait coûté une bonne partie de mon argent. Enfin, pas vraiment de « mon » argent. Plutôt celui de mon mari. Enfin, ex-mari. En apprenant son infidélité, j’avais pris la décision de le quitter. De partir, loin, sans le prévenir et en me servant généreusement sur ses comptes bancaires. Fallait pas me prendre pour une conne ! Et puis, même si je lui avait pris une coquette somme, il n’était pas resté sans rien. Je lui avais tout de même laissé largement de quoi vivre. Sauf que désormais, après tant de dépenses pour cet immense voyage, durant lequel j’avais visité de nombreux pays, je retrouvais une situation plutôt modeste. Mais soit, il était temps que je me pose enfin quelque part et que je démarre une nouvelle vie. Quitte à la commençait en prenant un appartement en colocation. Cela ne m’arrangeait à la base pas des masses. L’idée de partager mon appartement avec quelqu’un ne m’enchantait pas vraiment. Surtout lorsque l’on ne connaît pas la personne. C’est toujours délicat et risqué. Mais heureusement, je n’allais pas être confrontée à ce problème puisque je connaissais mon colocataire. Quelques rencontres fortuites nous avaient amenées à faire plus ample connaissance pour finalement nous lier d’amitié. Jusqu’à ce qu’un jour, je lui parle de cette histoire de colocation. Et que j’en vienne même à lui proposer de vivre avec moi. Je n’étais pas sûre que ce soit une bonne idée, mais je préférais amplement cohabiter avec lui qu’avec un parfait inconnu. J’appréhendais toutefois un peu cette colocation puisque je n’avais vécu qu’avec une seule personne ; Cameron, mon ex-mari. Et même si je m’entendais plutôt bien avec Shane, vivre avec lui allait sans doute être totalement autre chose et j’espérais que tout cela se passe bien.
Ainsi, ce matin-là, j’avais prit un taxi afin de rejoindre notre appartement et d’y emménager. Lorsque le véhicule se rapprocha de l’immeuble, j’aperçu au loin Shane, déjà sur place. Il ne manqua d’ailleurs pas de venir m’ouvrir la porte, affichant par la même occasion un sourire charmeur. « Si mademoiselle veut bien se donner la peine.» Affichant également un large sourire, je saisis sa main et sortit de la voiture. Et, lorsqu’il daigna déposer un baiser sur ma main, je ne pu que me réjouir de devoir cohabiter avec un homme aussi gentleman. « Tu es absolument ravissante.» Le seul problème résidait dans le fait qu’il avait ce petit côté charmeur. Et qu’il était un homme sacrément charmant. Certes, à première vue, cela ne constitue pas véritablement un problème. Mais cela en était un pour moi. Il apparaissait pour l’instant comme l’homme parfait. Gentil, serviable, charmant, gentleman, flatteur… Sauf que j’avais bien compris que l’homme parfait n’existait pas. Et j’avais suffisamment été déçue par les hommes. Il n’était plus question que je me fasse avoir ! Je voulais donc laisser ma vie sentimentale de côté et me consacrer pleinement à mon travail. Sauf que j’avais un peu peur de finir par craquer pour Shane. Et c’était tout bonnement hors de question ! Je ne voulais plus prendre le risque de souffrir. Puis il était trop parfait. Il devait bien avoir quelques défauts aussi. Ou cacher quelque chose… « Merci. » répondis-je alors en le gratifiant d’un large sourire. J’allais devoir faire la part des choses, et demeurer sacrément prudente pour ne pas tomber dans ses filets. Ni même dans ceux de n’importe quel autre homme. J’en avais assez bavé ! « Prête pour une nouvelle vie ? J’ai commencé à monter mes affaires, je ne savais pas trop quelle chambre tu préfèrerais occuper alors j’ai tout laissé dans le salon. Je te laisse le privilège de choisir.» J’haussais vaguement les épaules, n’accordant pas vraiment d’importance à la chambre que j’allais occuper. Tant que j’avais la place d’y installer un petit bureau pour y travailler, cela me convenait parfaitement. « Oh, c’est gentil mais je m’adapte… Tu préfères peut-être celle avec le balcon ? Personnellement, je n’en aurais pas vraiment l’utilité…» demandais-je alors en apercevant sa cigarette et songeant qu’il préfèrerait peut être celle ci s’il souhaitait fumer dehors. Je l’aidais ensuite à récupérer mes cartons et lui emboitait le pas dans l’immeuble. « Tu as commencé à aménager quand ? Hier ? Ce matin ? » demandais-je tandis que nous rejoignions notre appartement.
Endosser le rôle de l’homme parfait était chose aisée pour le jeune détective. Pourtant, toutes ces mièvreries allaient à l’encontre de ce qu’il était fondamentalement et qui avaient sur lui un pouvoir soporifique proprement épatant. Seulement, il avait appris avec le temps que les femmes sont sensibles à toutes ces petites attentions qu’elles nomment pompeusement de la « galanterie ». S’il fallait en passer par là pour plaire à Juliet, alors soit !! Toujours d’une humeur en apparence joyeuse, Shane se dirigea vers l’ascenseur tout en écoutant les propos de la jolie brunette concernant le choix de la chambre. Pour sa part, il se fichait bien de savoir quelle chambre il allait devoir occuper, car il savait que d’ici peu de temps, il partagerait le lit de la belle Juliet. « Oh, c’est gentil mais je m’adapte… Tu préfères peut-être celle avec le balcon ? Personnellement, je n’en aurais pas vraiment l’utilité…» Pourquoi pas. Si ça pouvait lui permettre de fumer une clope tranquille sur le balcon avant d’aller dormir… Toutefois, la réponse ne lui semblait pas particulièrement adaptée, aussi, ne put-il s’empêcher d’afficher un sourire amusé. « Ah non ? Tu veux dire qu’aucun galant homme ne viendra sous ton balcon afin de te chanter la sérénade au clair de lune ? » Il retint un sourire plus prononcé puis haussa les épaules en reprenant son sérieux. « Bon, si vraiment tu penses que le balcon ne te sera d’aucune utilité, j’accepte volontiers. Je ne voudrais pas t’incommoder avec ma fumée. Je sais que c’est une vilaine manie, j’essaie d’arrêter depuis des lustres mais rien n’y fait ! » Nouvelle connerie. Il n’avait jamais tenté d’arrêter de fumer et n’en avait pas la moindre intention. A croire que mentir sur tout et n’importe quoi devenait un véritable jeu d’enfant. Un jeu auquel Shane se laissait prendre avec grand plaisir d’ailleurs. « Tu as commencé à aménager quand ? Hier ? Ce matin ? » Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent au même instant et Shane laissa Juliet en sortir avant de lui emboiter le pas en direction de leur porte d’entrée. « Ce matin. Autant dire que j’étais ravi de quitter l’hôtel miteux qui me servait de logement au cours des dernières semaines.» Nouveau mensonge. Shane vivait dans un appartement fort convenable à l’autre bout de la ville mais histoire de trouver un bon prétexte pour emménager avec Juliet, il lui avait fait croire qu’il venait d’arriver dans le coin et que son boulot ne lui avait pas encore permis d’entamer des recherches de logement. « Puis tu imagines bien que jamais je n’aurais osé passer une première nuit ici sans toi. D’ailleurs, j’ai prévu une excellente bouteille de champagne pour ce soir. Il faut que l’on fête dignement notre collocation, tu ne crois pas ?» Un sourire aux lèvres, il ouvrit la porte de l’appartement.
Celui-ci était plutôt modeste et se trouvait au troisième étage d’un bâtiment d’époque, fraichement restauré. Loin d’être immense, il n’en demeurait pas moins suffisamment spacieux pour deux personnes. Il ne restait plus qu’à repeindre chaque pièce selon leurs goûts et éventuellement s’atteler à la décoration qui pour l’instant, était typiquement masculine. Shane avait déjà eu le temps d’installer quelques-unes de ses affaires et il manquait vraiment une touche féminine. Vous savez, ce petit quelque chose qui rendrait l’atmosphère plus chaleureuse encore. Heureusement, la présence de Juliet allait sans doute remédier à cela. Quoi que … ils n’allaient sans doute pas vivre ensemble aussi longtemps qu’elle l’imaginait. Shane déposa délicatement les cartons de Juliet dans l’entrée et désigna les siens qui se trouvaient encore dans le salon. « Je suis comme toi, je voyage léger. Ne t’en fais pas, je n’ai pas l’intention de tout laisser trainer. Ce sera rapidement rangé.» Sans être maniaque, Shane était dans l’ensemble quelqu’un d’organisé. Bordélique mais raisonnablement. Ses seuls travers se limitaient à laisser trainer des bouquins ouverts un peu partout dans l’appartement, oublier ses affaires de sport dans l’entrée ou encore laisser trainer des vêtements dans le couloir quand il était bien trop fatigué pour songer à quoi que ce soit d’autre qu’à dormir et que le moment idéal pour se déshabiller était le trajet qui séparait la porte d’entrée de celle de sa chambre. D’ailleurs, il faudrait qu’il perde cette manie maintenant que Juliet et lui allaient vivre sous le même toit.
Avec ce que j'avais pu endurer avec Cameron, mon ex-mari, il était tout bonnement hors de question que je m'intéresse, de près ou de loin, à n'importe quel autre homme. Aussi parfait puisse-t-il sembler. Et pour être parfait, Shane semblait tout à fait l'être. Pourtant, si je lui avais proposé cette colocation, c'était en tout bien tout honneur. Loin de moi l'idée de profiter de la situation... Non, surtout pas !! Pourtant, plus je passais de temps avec lui, plus je remettais en cause cette décision. Il était si adorable, si gentil, si loin de tous les hommes que j'avais pu rencontrer... Et si c'était le bon ? Non, il fallait absolument que je me sorte cela de l'esprit. Après être venu à ma rencontre à la sortie du taxi, le jeune homme évoqua la répartition des chambres et je lui expliquais rapidement que cela m'importai peu. « Ah non ? Tu veux dire qu’aucun galant homme ne viendra sous ton balcon afin de te chanter la sérénade au clair de lune ? » Je ne pu retenir un bref éclat de rire tout en levant les yeux au ciel, amusée par sa suggestion. « Bon, si vraiment tu penses que le balcon ne te sera d’aucune utilité, j’accepte volontiers. Je ne voudrais pas t’incommoder avec ma fumée. Je sais que c’est une vilaine manie, j’essaie d’arrêter depuis des lustres mais rien n’y fait ! » Même si je ne fumais pas, le fait qu'il fume ne me dérangeait pas outre mesure. Je trouvais cela simplement con pour sa santé. Mais il était assez grand pour faire ce que bon lui semblait. Puis il tentait quand même d'arrêter, c'était tout à son honneur. D'ailleurs à aucun moment, je ne remis en cause sa parole. Pourquoi me raconterait-il des conneries ? Surtout sur un tel détail ? Non, cela me paraissait tellement insensé que je n'y songeais pas. « Il paraît que tout est une question de volonté... Tu finiras sans doute par y parvenir un jour ou l'autre. » Une fois dans l'immeuble, je suivais donc Shane jusqu'à l'appartement et en profitais pour lui demander depuis quand il était là. « Ce matin. Autant dire que j’étais ravi de quitter l’hôtel miteux qui me servait de logement au cours des dernières semaines.» Après avoir rapidement acquiescé, j'enchaînais. « Tu m'étonnes ! D'ailleurs je ne t'ai jamais demandé mais, qu'est-ce qui t'as amené sur Arrowsic ? » demandais-je alors, songeant que, tout comme moi, il était ici depuis peu. Enfin, c'était ce qu'il m'avait dit. Mais encore une fois, je le croyais sur parole. Pourquoi douter ?
« Puis tu imagines bien que jamais je n’aurais osé passer une première nuit ici sans toi. D’ailleurs, j’ai prévu une excellente bouteille de champagne pour ce soir. Il faut que l’on fête dignement notre collocation, tu ne crois pas ?» Un large sourire étira mes lèvres tandis que je plongeais mon regard dans le sien. « Assurément ! Et puis, j'en profiterais pour passer derrière les fourneaux et nous concocter de bons petits plats pour notre première soirée ici ! » soulignais-je alors affichant toujours un large sourire. Après qu'il ait ouvert la porte de l'appartement, j'y entrais et posais mes cartons dans un coin, à proximité de ceux qu'il venait lui-même de poser. Une fois cela fait, je me redressais et, posant mes mains sur mes hanches, je balayais du regard l'appartement. J'avais eu l'occasion de le visiter auparavant mais avais certainement oublié certains détails. Je songeais avec un vague sourire au bout des lèvres que cet appartement semblait parfait pour nous et qu'il était suffisamment grand pour que l'on ne se marche pas dessus. Autant dire que tout était réuni pour que la collocation se passe bien. « Je suis comme toi, je voyage léger. Ne t’en fais pas, je n’ai pas l’intention de tout laisser trainer. Ce sera rapidement rangé.» Tant que le salon demeurait accessible et ne croulait pas sous les cartons, cela m'allait ! J'étais loin d'être maniaque. Sans être bordélique non plus. J'étais plutôt entre les deux et espérais toutefois que Shane allait y mettre du sien et ranger au moins ses affaires régulièrement. Je n'avais pas l'intention de passer derrière lui ! « Pas de soucis ! De mon côté, je vais directement mener les cartons dans ma chambre et m'occuperais de ranger après... » Enfin, il n'y avait pas grand chose à ranger. Des fringues principalement. Et des bibelots. Quelques souvenirs ramenés de Chine, d'Espagne, de Finlande ou encore de Tunisie... C'était d'ailleurs pour cela que je n'avais pas énormément d'affaires. Ayant beaucoup voyagé au cours des années précédentes, je préférais ne pas m'débarassantobjets inutiles... A peine eus-je terminé ma phrase que je récupérais rapidement mes cartons et les déposais dans ma chambre, débarrassant ainsi un peu les pièces principales de l'appartement. Ce n'était déjà pas très grand, inutile de perdre plus de place bêtement.
« Tu m'étonnes ! D'ailleurs je ne t'ai jamais demandé mais, qu'est-ce qui t'as amené sur Arrowsic ? » Durant un quart de seconde et tandis qu’il lui tournait le dos, Shane ne put réprimer un sourire narquois. Il se voyait mal faire preuve d’une franchise implacable en lui avouant toute la vérité. Heureusement qu’il était un as du mensonge et de la dissimulation. « Et bien… je devais écrire un papier pour le journal local. Le rédacteur en chef a trouvé mon travail intéressant et m’a proposé un poste bien plus alléchant que celui que j’occupais auparavant. J’ai toujours aimé partir à l’aventure, m’élancer vers de nouveaux horizons sans véritablement réfléchir. L’occasion était trop belle.» Et bien !! Les mots parvenaient à franchir la barrière de ses lèvres avec une facilité incroyable. C’est à peine s’il réfléchissait à ses mensonges quand il les prononçait. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’il se souvienne des moindres détails de sa vie fictive par la suite. « Et toi ? Comment t’es-tu retrouvée ici ? Je constate que tu es assez mystérieuse lorsqu’il s’agit de parler de toi. Loin de moi l’idée de t’inciter à le faire mais … si jamais tu as envie de te confier, sache que je serai toujours là pour t’écouter.» Ah le numéro de l’ami toujours présent et disponible !! Il savait que cela faisait son petit effet sur les femmes. En un sens, il était véritablement curieux de connaitre le point de vue de Juliet sur son passé. Même si Cameron lui en avait confié les moindres détails, il s’agissait de sa vision des choses et probablement que Juliet en donnerait une toute autre version.
Une fois qu’ils furent à l’intérieur de l’appartement, chacun d’eux commença à prendre ses marques. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’ils ne s’habituent à ce nouveau mode de vie. Shane allait tout faire pour la collocation se passe au mieux. De toute façon, il n’avait d’autre choix que celui de s’en accommoder et de faire en sorte que tout soit parfait s’il tenait à séduire Juliet. Derrière ce masque de prince charmant se cachait en réalité un démon prêt à passer à l’action à n’importe quel moment. Il se fichait bien des répercutions que son comportement pourrait avoir sur la jeune femme. Les dommages collatéraux n’étaient pas de son ressort. Continuant son petit manège, il avait même osé lui suggérer de partager une coupe de champagne histoire de fêter leur collocation. « Assurément ! Et puis, j'en profiterais pour passer derrière les fourneaux et nous concocter de bons petits plats pour notre première soirée ici ! » Forcément, c’était difficile de résister à une proposition aussi alléchante ! Juliet était vraiment une femme épatante. S’il n’avait pas eu pour mission de la séduire, Shane se serait probablement laissé prendre au jeu. Elle était différente de toutes les femmes qu’il avait pu fréquenter jusqu’ici et autant dire qu’elles étaient nombreuses. De toute évidence, le jeune détective n’était pas un modèle de vertu ! Il était même tout le contraire et parvenir à le cerner était une tâche relativement compliquée. Telle une abeille, il aimait butiner d’une fleur à l’autre devenant ainsi un véritable coureur de jupon. Malgré tout, il était attaché à sa liberté. La vie en couple le rebutait au plus haut point tant et si bien qu’il n’avait encore jamais eu de relation sérieuse. Toute sa vie était ponctuée d’aventures sans lendemain ou d’histoires très brèves. Etait-ce inquiétant à son âge ? Il aimait se dire que non d’autant qu’il détestait se montrer conventionnel. Enfin bref ! « Je suis impatient de découvrir tes talents de cuisinière dans ce cas. Hmm… pour ma part j’évite de m’adonner à ce genre d’activités que je juge extrêmement périlleuses. En fait, c’est à peine si je sais faire cuire un plat de pâtes sans provoquer un incendie. En revanche, je détiens le secret d’une mousse au chocolat absolument délicieuse. Si tu es sage, je te promets de te faire goûter ma spécialité prochainement.» Il lui adressa un sourire sincèrement complice. Mine de rien, il se surprenait à l’apprécier quand même…
« Pas de soucis ! De mon côté, je vais directement mener les cartons dans ma chambre et m'occuperais de ranger après... » Shane la regarda soulever un premier ca rton mais s’empressa bien rapidement de le lui ôter des mains. Il était vraiment lourd et il ne tenait pas à ce qu’elle se blesse. « Attends, je vais te donner un coup de main. C’est assez lourd.» Sans attendre, le jeune homme se dirigea vers la future chambre de Juliet, y entra et déposa le premier carton. S’en suivit une suite d’allers et retours afin qu’elle puisse commencer à ranger ses affaires. Lorsqu’il déposa le dernier carton, Shane se redressa d’une manière … particulière. Disons qu’il attendit le moment propice pour se remettre droit, le moment où son corps allait se retrouver tout contre celui de la jeune femme. Oh de l’extérieur, cela pouvait passer pour un geste totalement inattendu et non calculé à l’avance. En réalité, Shane avait parfaitement calculé son coup tant et si bien qu’à l’instant même où il se redressa, il se retrouva nez à nez avec la belle Juliet, en une proximité presque troublante. Il la dévisagea le temps de quelques secondes et se recula en faisant mine d’être confus et légèrement troublé.« Désolé … »
Même si nous nous connaissions depuis plusieurs semaines désormais, il y avait certaines choses que je ne savais pas à propos de Shane. Et inversement. Puis c'était tout à fait normal. Il allait nous falloir du temps pour faire plus ample connaissance. « Et bien… je devais écrire un papier pour le journal local. Le rédacteur en chef a trouvé mon travail intéressant et m’a proposé un poste bien plus alléchant que celui que j’occupais auparavant. J’ai toujours aimé partir à l’aventure, m’élancer vers de nouveaux horizons sans véritablement réfléchir. L’occasion était trop belle.» J'acquiesçai vaguement, songeant que cela nous faisait déjà un point commun. Partir à l'aventure, se lancer dans de nouvelles choses, c'était aussi quelque chose que j'aimais faire. La preuve était ce tour du monde que j'avais décidé de faire, principalement sur un coup de tête. « Et toi ? Comment t’es-tu retrouvée ici ? Je constate que tu es assez mystérieuse lorsqu’il s’agit de parler de toi. Loin de moi l’idée de t’inciter à le faire mais … si jamais tu as envie de te confier, sache que je serai toujours là pour t’écouter.» J'affichais alors un sourire sincère accompagné d'un bref signe de la tête. Je ne cherchais pas spécialement à cacher quoi que ce soit. Je n'avais rien à me reprocher. Au contraire, j'étais la victime! Mais évoquer tout cela me rappelait de mauvais souvenirs et c'était bien pour cette raison que je faisais souvent l'impasse sur mon passé. « Je t'en remercie, c'est vraiment adorable. Mais quant à ma venue ici, ce n'est rien d'extraordinaire... Une déception amoureuse m'a poussé à partir de Londres, où je vivais, pour me lancer dans un tour de monde. J'avais besoin de me changer les idées... Et j'ai ainsi voyagé pendant deux ans jusqu'à finalement décider de me poser ici... » expliquais-je alors tout naturellement, sans toutefois m'épancher sur les raisons de mon départ. S'il me demandait, j'en viendrais peut être à lui en dire plus, mais je me voyais mal lui déballer toute ma vie sentimentale ainsi. Une fois au sein de l'appartement, il fut rapidement question de fêter notre colocation. Colocation qui s'annonçait d'ailleurs très bien ! C'était tout de même une grande nouveauté pour moi, que de devoir cohabiter avec quelqu'un. La seule personne avec qui j'avais vécu était Cameron, mon (ex)mari. Autant dire que là, les choses allaient être totalement différentes. Et évidemment, j'allais faire de mon mieux pour que tout se passe bien.
« Je suis impatient de découvrir tes talents de cuisinière dans ce cas. Hmm… pour ma part j’évite de m’adonner à ce genre d’activités que je juge extrêmement périlleuses. En fait, c’est à peine si je sais faire cuire un plat de pâtes sans provoquer un incendie. En revanche, je détiens le secret d’une mousse au chocolat absolument délicieuse. Si tu es sage, je te promets de te faire goûter ma spécialité prochainement.» Sans être une grande cuisinière, je me débrouillais, semble-t-il, pas trop mal dans le domaine. Et j'étais impatiente de goûter sa fameuse mousse au chocolat. Et le fait d'apprendre qu'il était un piètre cuisinier me rassurait tout de même un peu. Il n'était pas parfait ! Et puis, j'aimais bien cuisiner, alors j'acceptais sans soucis de prendre en charge les repas. Tant qu'il n'abusait pas de ma gentillesse... « Oh, j'ai hâte dans ce cas ! Et si tu veux, je t'apprendrais quelques recettes simples et classiques...» proposais-je alors en souriant, songeant que cela pourrait bien lui être utile un jour ou l'autre. Puis c'était toujours un plus pour sa future vie de couple. Avoir un homme qui cuisine est, aujourd'hui, de plus en plus courant.... Bref, même s'il n'était pas parfait – et j'en avais désormais la preuve – il semblait être un homme bien sous tous les aspects. Et avec lequel je me sentais plutôt bien, en confiance. Oui, clairement, j'appréciais déjà Shane et me réjouissait de l'avoir comme colocataire. A peine eus-je décrété que j'allais poser mes cartons dans ma chambre qu'il s'emparer de celui que je m'apprêtais à soulever « Attends, je vais te donner un coup de main. C’est assez lourd.» Je lui adressais un vague sourire. « Merci » Et je récupérais alors les cartons plus légers que je venais déposer peu à peu dans ma chambre. Après quelques allers-retours, je posais le dernier carton au sol et me relevais. Ce fut sans compter Shane, qui se redressa en même temps , ce qui créa une forte proximité entre nos corps. Surprise par un tel rapprochement, je bloquais momentanément ma respiration, sans même m'en rendre compte. Cette soudaine proximité m'avait sacrément troublé. « Wow... » Toutefois, il recula presque aussitôt et j'osais alors espérer qu'il n'avait pas eu le temps de remarquer ce léger trouble qui s'était formé dans mon esprit quelques secondes auparavant. « Désolé … » Je fronçais alors vaguement les sourcils en le voyant soudainement aussi confus. Presque troublé... Etais-je réellement en mesure de le troubler ? Moi ? J'osais croire que non... Parce que si les choses étaient réciproques, j'avais peur de ne pas parvenir à lui résister longtemps. Pourtant, j'étais bien décidé à rayer les hommes de ma vie. Du moins, mettre ma vie sentimentale de côté. « Non, non, c'est rien... » affirmais-je alors en reprenant également mes distances et en tentant de masquer ce léger trouble.
Shane acquiesça aux propos de la jeune femme, sans pour autant insister davantage sur le sujet. En réalité, il connaissait bien l’histoire de Juliet et par conséquent, savait qu’il s’agissait là d’une période extrêmement douloureuse de sa vie passée. Le fait de l’amener dans cette direction n’était qu’un prétexte pour lui faire entendre qu’elle pouvait compter sur lui si toutefois elle éprouvait le besoin de discuter et de s’épancher sur le sujet. Shane tenait vraiment à ce qu’elle comprenne qu’il serait toujours disposé à lui venir en aide. Du moins, en apparence. La réalité était bien moins glorieuse : il n’avait que faire de connaitre l’histoire sordide d’un couple sur le déclin. Il aurait volontiers suggéré à Juliet de lui rendre la pareille mais elle semblait bien trop droite et sensible pour s’amuser à cela. Compte tenu du fait que cet emménagement devait être sous le signe de la bonne humeur, Shane détourna la conversation et c’est le plus naturellement du monde qu’ils en vinrent à parler cuisine. Un domaine dans lequel il n’excellait pas vraiment, il fallait le reconnaitre. Ce n’était pourtant pas faute d’avoir tenté quelques expériences derrière les fourneaux mais toutes s’étaient soldées par de lamentables échecs. A croire qu’il n’était vraiment pas fait pour ça. Seule la mousse au chocolat lui permettait de se rattraper et de passer du statut de « franchement médiocre » à « novice ». « Oh, j'ai hâte dans ce cas ! Et si tu veux, je t'apprendrais quelques recettes simples et classiques...» Il fallait y voir une nouvelle occasion de passer du temps avec Juliet alors forcément, il n’allait pas décliner cette proposition. « Dans ce cas, je te conseille fortement de t’armer d’une patience exemplaire !! Non pas que je sois un élève dissipé, mais je crois que les ustensiles de cuisine ont décidé de se liguer contre moi.» Un nouveau sourire apparut sur son visage angélique. Personne n’aurait pu imaginer un seul instant que Shane était en réalité un être totalement dénué de sentiments. Peut-être n’avait-il jamais appris à les reconnaitre et à les exprimer, allez savoir… Toujours est-il qu’il manipulait son entourage avec beaucoup d’habileté.
Maintenant qu’il vivait sous le même toit que Juliet, il n’y avait plus une minute à perdre. Shane savait que le moindre détail pouvait avoir son importance. Aussi, il n’hésitait pas à se montrer à la fois courtois et serviable comme si c’était à ses yeux la chose la plus naturelle au monde. Il aida donc la jeune femme à transporter ses cartons jusque dans sa chambre et en profita même pour créer une proximité presque dérangeante entre eux. Son but était bien de déstabiliser Juliet et bien qu’il tâcha de feindre un certain malaise, le jeune homme était sincèrement satisfait de son petit numéro. Les femmes étaient d’une crédulité incroyable !! Naturellement, il remarqua le trouble de la demoiselle et se sentit jubiler intérieurement. C’était sadique comme comportement mais il n’en avait rien à faire ! On le payait pour ça. C’était un boulot comme un autre. Malsain, certes, mais un boulot quand même. Shane s’empressa de s’excuser et attendit la réponse de Juliet. Bien, son petit plan avait fonctionné à merveille. Il n’avait plus qu’à continuer sur la même lancée. « Je… je vais aller ranger mes affaires également. Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas.» Il lui adressa un dernier sourire confus puis quitta la pièce avant que ses lèvres ne s’étirent en une expression beaucoup plus ravie. Juliet était semblable à un agneau doux et innocent. Elle était une véritable petite merveille avec laquelle on lui donnait l’occasion de jouer. Non vraiment, il adorait son job.
Assez naturellement, j'évoquais rapidement ma vie passée. Enfin, surtout les raisons qui m'avaient poussées à quitter Londres et à venir m'installer ici, à Arrowsic. Et j'étais suffisamment en confiance avec Shane pour évoquer sommairement ma 'déception amoureuse' sans toutefois entrer dans les détails. Je trouvais cela un peu trop culotté alors que nous ne nous connaissions que depuis quelques semaines. En revanche, je fus agréablement surprise par le fait qu'il ne me questionna pas plus à ce sujet. Je m'attendais à de nouvelles questions alors qu'il n'en fut rien. Lui au moins, il savait se tenir ! Du moins, c'est ce que je supposais. Qu'il était suffisamment intelligent et avait suffisamment de retenue pour ne pas insister en m'affligeant un véritable interrogatoire. Jamais je ne songeais au fait qu'il pouvait déjà connaître mon histoire. Non, ce genre de pensées étaient vraiment loin, très loin de moi... Toutefois, je fus soulagée lorsque nous changeâmes de sujet pour finalement évoquer la cuisine. Et assez spontanément, je lui proposais de lui apprendre quelques recettes. Les bases de la cuisine en quelques sortes. Histoire qu'il puisse vivre seul et se nourrir sainement, sans passer uniquement par les plats tout prêts à faire chauffer. « Dans ce cas, je te conseille fortement de t’armer d’une patience exemplaire !! Non pas que je sois un élève dissipé, mais je crois que les ustensiles de cuisine ont décidé de se liguer contre moi.» Je ris doucement en levant les yeux au ciel. A l'entendre, il était maudit ! Mais cela ne me faisait absolument pas peur ! Il n'était pas plus bête qu'un autre et j'étais persuadée qu'avec un peu de bonne volonté, il parviendrait à se faire quelques petits plats. « Crois-moi, il en faut bien plus pour me décourager ! Et puis, les challenges ne me font pas peur ! » soulignais-je avec un petit sourire en coin. Oui, pour être déterminée, je l'étais. Alors apprendre à Shane comment cuire quatre malheureuses pâtes me paraissait tout à fait faisable, si bien sûr, il était partant. Et même si cela allait nous permettre de passer plus de temps ensemble, je voyais cela de manière tout à fait innocente. A aucun moment, je n'imaginais ce qu'il avait réellement derrière la tête.
Et même si ce n'était qu'un détail, j'appréciais de le voir aussi serviable et dévoué. Sans que je lui demande quoi que ce soit, il m'aida à transporter mes cartons jusqu'à ma future chambre. D'ailleurs, sans doute de manière totalement involontaire, il créa une certaine proximité physique entre nous. Suffisamment forte pour que j'en sois troublée. Lui aussi d'ailleurs. Et même si c'était flatteur, cela ne me disait rien qui vaille. Si je le troublais, il allait peut être bien me tourner autour... Et même s'il m'était si agréable – et pas seulement à regarder ! - je ne voulais rien de plus qu'une amitié avec lui. Plus serait prendre le risque de souffrir. Et c'était tout bonnement hors de question que je prenne à nouveau un tel risque. « Je… je vais aller ranger mes affaires également. Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas.» Je lui souris vaguement et déviais ensuite rapidement le regard. Une telle proximité m'avait fait un peu trop d'effet pour que je puisse aisément soutenir son regard. Cependant, je ne pu m'empêcher de le suivre du regard lorsqu'il quitta ma chambre. Une fois que j'étais de nouveau totalement seule, j'entrepris de ranger mes affaires. Une fois cela fait, je regagnais le salon pour y ranger quelques bibelots et décorations. En rangeant tout cela, je retombais d'ailleurs sur mon alliance. Merde. Je posais les yeux dessus durant quelques longues secondes. Cela faisait une éternité que je ne la portais plus. Et le simple fait de la revoir me rappelait de mauvais souvenirs. Pourtant, j'étais incapable de m'en séparer totalement. Je soupirais alors doucement et la rangeant dans une petite boîte que je plaçais sur l'étagère du salon. Je me dirigeais ensuite vers la cuisine et ouvrait le frigo, observant ce que j'avais sous la main pour nous préparer le repas. Ce n'était pas énorme mais ça ferait l'affaire. Lorsque Shane me rejoignit au salon, je levais les yeux vers lui et affichais un vague sourire. « Ça y est, j'ai rangé mes affaires. Je me suis d'ailleurs permit de rajouter quelques bricoles de déco ici, j'espère que ça ne te gène pas... » glissais-je alors avant d'afficher une légère moue. « Par contre, certaines lattes de mon lit sont cassées... Il va donc falloir que je règle ça au plus vite, aujourd'hui ou dans les jours à venir... Parce que pour le moment, je doute pouvoir passer une nuit dessus sans le casser totalement. Donc je risque de passer la nuit sur le canapé, par précaution... » lui expliquais-je avec un petit sourire confus.
« Ça y est, j'ai rangé mes affaires. Je me suis d'ailleurs permit de rajouter quelques bricoles de déco ici, j'espère que ça ne te gène pas... » De retour dans le salon, Shane examina attentivement la décoration afin de comprendre à quoi la jeune femme faisait allusion. Un sourire s’étira sur son visage et il esquissa un mouvement de tête pour lui faire comprendre qu’il n’y voyait aucun inconvénient. Cet appartement était désormais leur domicile et il semble évident que chacun devait y apporter sa petite touche personnelle. « Absolument pas ! Au contraire, tu as bien fait. A l’occasion, on pourra envisager de passer un coup de peinture sur les murs histoire que tout soit parfait.» Les mains dans les poches, Shane fit un tour sur lui-même en admirant la décoration puis le plafond. Bizarrement, il se laissait prendre au jeu de retaper cet endroit selon ses goûts et ceux de Juliet. Pour peu, il en aurait presque oublié que tout ceci n’était qu’une vaste mascarade et qu’il ne demeurerait pas ici durant une éternité. « Par contre, certaines lattes de mon lit sont cassées... Il va donc falloir que je règle ça au plus vite, aujourd'hui ou dans les jours à venir... Parce que pour le moment, je doute pouvoir passer une nuit dessus sans le casser totalement. Donc je risque de passer la nuit sur le canapé, par précaution... » Ah ? Voilà un détail qu’ils n’avaient pas vu venir. En un sens, Shane se sentait gêné de la voir passer la première nuit sur le canapé. Non seulement l’appartement était encore en désordre mais cela allait cruellement manquer d’intimité pour elle. Certes, cela aurait pu arranger ses affaires mais Shane n’était pas stupide au point d’imaginer que son plan allait fonctionner dès le premier soir. Il savait qu’il aurait besoin de beaucoup de temps et de patience pour dompter le cœur de Juliet. Qu’importe, étant donné que Cameron ne lui avait posé aucune restriction de ce côté-là. Au contraire, il lui avait clairement fait entendre qu’il pouvait prendre tout son temps. « Non, je refuse de te voir passer la nuit sur le canapé du salon. Disons que pour cette nuit, tu iras dormir dans ma chambre. Je t’assure que cela ne me dérange pas le moins du monde. Sans compter que j’avais l’intention de me coucher assez tard, il faut que je termine de bosser sur un article et je ne suis vraiment pas au point. Demain, nous aviserons pour ton lit.» Feindre la galanterie !! La base de la séduction en fait ! Pourtant, il y avait du vrai dans ce qu’il disait. Shane aurait été embêté de la voir dormir sur ce canapé certes très commode pour s’affaler devant un bon film mais relativement inconfortable pour y passer la nuit. Ne s’attardant pas davantage sur le sujet, Shane contempla les quelques éléments de décoration installés par la jeune femme et prit un air admiratif. Cette fois-ci, il n’était pas en train de feindre un intérêt quelconque. « On voit que tu as énormément voyagé. J’imagine que tu as ramené la plupart de ces objets de tes nombreux périples ? Où es-tu allée exactement ?» Il ne s’agissait nullement de l’amener à parler de son passé ou de la raison pour laquelle elle avait entamé son tour du monde. Non, Shane voulait juste apprendre à la connaitre et étant donné qu’il aimait beaucoup voyager, il était curieux d’entendre ce que la jeune femme avait à lui dire. « Quand j’étais gamin, je rêvais de pouvoir faire le tour du monde. Je voulais devenir aviateur ou archéologue … je pense que je passais trop de temps devant les aventures d’Indiana Jones. J’avais envie de connaitre autre chose que l’Italie… le monde recèle d’endroits fabuleux que la plupart des gens ne verront jamais. C’est dommage. » Il se mit à sourire de plus belle et enchaina : « Et sans indiscrétion, tu comptes repartir ou ton choix de t’installer ici est-il définitif ? »
« Absolument pas ! Au contraire, tu as bien fait. A l’occasion, on pourra envisager de passer un coup de peinture sur les murs histoire que tout soit parfait.» J'acquiesçai alors, commençant à me demander de quelle couleur nous pourrions repeindre ces murs ci. Et ceux de ma chambre. Taupe ? Ou peut-être beige ? Ou lilas ? Peu importe ! Nous verrons bien cela plus tard. Il fallait déjà que nous finissions de nous installer et prenions nos marques. La peinture viendra après ! « Oui, bonne idée ! Je trouve ces murs un peu trop fades... » constatais-je en affichant une légère moue. Mais j'avais réellement envie que l'on retouche un peu à cet endroit pour le rendre plus agréable. Après tout, nous étions censés vivre là, ensemble, jusqu'à nouvel ordre. Cela pouvait très bien durer des semaines, des mois, voire des années. Il valait donc mieux que l'on adapte vraiment notre appartement à nos goûts et que l'on s'y sente ainsi parfaitement à l'aise. Je lui expliquais alors que j'avais remarqué que certaines lattes de mon lit étaient cassées et qu'il allait donc être difficile de dormir dessus tant que le sommier ne serait pas changé. Ainsi, j'indiquais à Shane que je dormirais très certainement sur le canapé. Ce n'était, certes, pas la meilleure des solutions mais ce n'était là que l'affaire d'une nuit ou deux. Le temps de régler le problème. « Non, je refuse de te voir passer la nuit sur le canapé du salon. Disons que pour cette nuit, tu iras dormir dans ma chambre. Je t’assure que cela ne me dérange pas le moins du monde. Sans compter que j’avais l’intention de me coucher assez tard, il faut que je termine de bosser sur un article et je ne suis vraiment pas au point. Demain, nous aviserons pour ton lit.» Je posais le regard sur lui et affichait un large sourire sincère. Il était vraiment adorable. Et j'étais assez touchée par sa réaction. Clairement, il aurait pu se ficher de cela et me laisser dormir sur le canapé, au lieu de cela, il me laissait – à priori volontiers – son lit. « Merci, c'est vraiment adorable mais... et toi ? Même si tu bosses jusqu'à tard, tu ne vas tout de même pas passer une nuit blanche... Tu dormiras où ? Il n'est pas question que tu dormes sur le canapé ! » m'exclamais-je alors. Je ne pouvais clairement pas le laisser dormir, à ma place, sur le canapé.
A tel point que j'étais à deux doigts de lui proposer de dormir avec moi. Je ne voulais cependant pas créer une quelconque ambiguïté entre nous, encore moins qu'il s'imagine certaines choses. Si je venais à lui proposer cela, ce serait en toute innocence et pour qu'il n'ait pas à passer une nuit sur le canapé, ce qui n'était clairement pas une des choses les plus agréables. A choisir, je préférais donc le laisser dormir avec moi plutôt que sur le canapé. Mais dans l'immédiat, je n'osais pas lui en faire la proposition directe, de peur qu'il interprète mal cette proposition. « On voit que tu as énormément voyagé. J’imagine que tu as ramené la plupart de ces objets de tes nombreux périples ? Où es-tu allée exactement ?» J'haussais alors rapidement les sourcils en souriant doucement tandis que je me dirigeais sur le canapé où je pris finalement place. « Oui, tout ce que j'ai ici provient de mes voyages. Ou presque... Et bien, je suis allée dans la plupart des pays d’Amérique Latine, au Canada, en France, Espagne, Italie, dans quelques pays scandinaves, en Afrique et dans sur quelques îles. J'ai aussi visité quelques pays en Asie, mais pas beaucoup...Et j'en oublie sans doute !» expliquais-je alors, songeuse, essayant de me remémorer tous les pays visités. Il y en avait tellement qu'il m'était presque impossible de tous les énumérer. « Et toi, tu as voyagé ? Peut-être pour ton boulot, non ? D'ailleurs tu es spécialisé dans un domaine précis ? » demandais-je alors avec un réel intérêt. « Quand j’étais gamin, je rêvais de pouvoir faire le tour du monde. Je voulais devenir aviateur ou archéologue … je pense que je passais trop de temps devant les aventures d’Indiana Jones. J’avais envie de connaitre autre chose que l’Italie… le monde recèle d’endroits fabuleux que la plupart des gens ne verront jamais. C’est dommage. » J'approuvais parfaitement ses propos. Mes différents voyages m'avaient fait découvrir des lieux magnifiques que je n'aurais jamais imaginé et je ne pouvais qu'encourager les gens à voyager eux-aussi pour découvrir ces merveilles dont la planète recelait. « Je partage totalement ton avis ! Il y a tellement de lieux à voir, à découvrir... J'ai même l'impression qu'une vie ne suffirait pas à cela ! » répondis-je en souriant. « Et sans indiscrétion, tu comptes repartir ou ton choix de t’installer ici est-il définitif ? » Après une vague moue songeuse, je plongeais mon regard dans le sien. « Je pense que je vais rester... Il est temps que je me pose un peu. Et la ville a vraiment l'air agréable alors, pourquoi pas ? Ceci dit, je n'ai pas d'attache, rien ni personne qui me retient ici donc au pire, je peux repartir... Mais ce n'est franchement pas dans mes projets actuels. »
Shane ne voyait strictement aucun inconvénient à lui céder sa chambre le temps d’une nuit. Sans compter que comme il avait pris soin de le préciser, il avait encore beaucoup de travail à accomplir et risquait donc de rester éveillé jusque tard. Naturellement, ce n’était nullement la rédaction d’un nouvel article qui l’attendait mais des affaires plus … confidentielles. Le genre d’affaires qu’il convenait de cacher à Juliet. « Merci, c'est vraiment adorable mais... et toi ? Même si tu bosses jusqu'à tard, tu ne vas tout de même pas passer une nuit blanche... Tu dormiras où ? Il n'est pas question que tu dormes sur le canapé ! » Shane haussa les épaules avec désinvolture. Vraiment, passer la nuit sur le canapé ne le dérangeait pas le moins du monde. Il avait l’habitude de se coucher tard et Juliet avait certainement besoin de repos. A voir son hésitation, Shane se demanda l’espace d’un instant si la jeune femme n’avait pas l’intention de lui proposer de dormir avec elle. Voilà qui serait fort intéressant … mais beaucoup trop prématuré !! Même si son but ultime était de la mettre dans son lit, Shane tenait à faire les choses en douceur. Sans compter qu’il ne s’agissait pas seulement d’avoir une aventure avec Juliet mais bel et bien de la séduire de telle sorte qu’elle soit anéantie lorsqu’elle découvrira l’abominable salaud qu’il est en réalité. Alors pour le moment, il était préférable pour lui de continuer à endosser le rôle de cet homme courtois et subtil qu’elle connaissait jusqu’ici. « Je ne vais probablement pas passer une nuit blanche mais je vais avoir besoin de pas mal d’espace pour faire mes recherches. Je vais certainement aller et venir et je ne tiens pas à te déranger. Tu seras beaucoup mieux dans ma chambre, allongée dans un vrai lit. Ne t’en fais pas pour moi, il n’est pas si mal que ça ce canapé !» Il lui lança un sourire complice avant de faire dévier la conversation vers un tout autre sujet…
Juliet avait beaucoup voyagé, c’était un fait notoire. Lorsqu’elle énuméra une partie des pays qu’elle avait eu l’occasion de visiter, le jeune homme en demeura sincèrement admiratif. Il aurait véritablement aimé avoir la chance de découvrir certaines parties du monde qu’il n’avait eu l’occasion d’admirer qu’en photos ou dans des reportages télévisés. Quand elle évoqua l’Italie, il esquissa un léger sourire. Son pays natal. « Et toi, tu as voyagé ? Peut-être pour ton boulot, non ? D'ailleurs tu es spécialisé dans un domaine précis ? » Effectivement, Shane avait été amené à beaucoup voyagé ces dernières années. Mais pas pour les raisons qu’elle imaginait. En tant que détective privé, il avait eu l’occasion de partir à l’étranger à plusieurs reprises. Principalement en Europe, au Mexique et au Canada. Mais il fallait qu’il transforme tout ça en un savant mensonge. Car Shane ne pouvait être lui-même… aux yeux de Juliet, il était un simple journaliste sans histoire. D’ailleurs, il fallait maintenant qu’il brode un peu plus autour de son soi-disant métier. Il acquiesça à ses propos et glissa ses mains dans ses poches d’un air décontracté. Même un détecteur de mensonges n’aurait pu voir clair dans son jeu. « Oui, en effet. Pour répondre à ta question, je suis spécialisé dans tout ce qui touche aux affaires publiques, le gouvernement, la diplomatie etc… un vaste sujet me diras-tu !! Même si j’ai passé toute mon enfance et mon adolescence aux Etats-Unis, je suis retourné étudier en Italie, le pays où je suis né. J’ai effectué un semestre en France et un autre en Irlande… le reste de mes déplacements sont principalement touristiques. Des vacances au Canada … un été au Mexique et j’en passe. Je n’ai toutefois pas eu la chance de voir toutes les merveilles que tu as eu l’occasion de découvrir. Un jour peut-être… » C’était une véritable envie et non un énième mensonge. Shane était de nature curieuse et rêvait de découvrir le monde. Peut-être qu’il aurait l’occasion de faire un voyage avec Jul’ un jour, allez savoir ! « Je pense que je vais rester... Il est temps que je me pose un peu. Et la ville a vraiment l'air agréable alors, pourquoi pas ? Ceci dit, je n'ai pas d'attache, rien ni personne qui me retient ici donc au pire, je peux repartir... Mais ce n'est franchement pas dans mes projets actuels. » Tant mieux… car si l’envie lui venait de tout plaquer, Shane se devait de savoir où elle avait l’intention d’aller. Il en serait ainsi tant que sa mission n’aurait pas touché à son terme. Pourtant, il ne pouvait s’empêcher de la trouver touchante … plus il apprenait à la connaitre et plus Shane se demandait comment Cameron avait pu tromper une fille aussi formidable. « Il faut savoir profiter de l’instant présent comme on dit ! Pour être franc avec toi, je suis un peu dans le même cas de figure. Rien ni personne ne me retient ici. Mais bon, qui sait ce que la vie nous réserve ? »
C’était sans aucune arrière pensée que j’étais prête à lui proposer de dormir avec moi. Juste cette nuit, évidemment. Car j’étais plutôt mal à l’aise à l’idée qu’il dorme sur le canapé alors qu’il n’avait, à la base, aucune raison de le faire. De nous deux, cela été plus à moi de passer la nuit là dessus. Après tout, c’était mon lit qui était abimé, pas le sien. « Je ne vais probablement pas passer une nuit blanche mais je vais avoir besoin de pas mal d’espace pour faire mes recherches. Je vais certainement aller et venir et je ne tiens pas à te déranger. Tu seras beaucoup mieux dans ma chambre, allongée dans un vrai lit. Ne t’en fais pas pour moi, il n’est pas si mal que ça ce canapé !» J’haussais alors les épaules, ne voulant pas paraître trop insistante. S’il tenait absolument à dormir sur le canapé, je ne pouvais rien faire pour l’en empêcher. Puis, il faisait ce qu’il voulait ! « Fais comme tu veux… Mais saches que si tu n’es pas à ton aise sur le canapé, tu peux finir la nuit à mes côtés… Enfin, dans ‘ton’ lit. » Proposais-je ensuite avec un vague sourire, déviant rapidement le regard en craignant qu’il imagine d’autres choses. Surtout depuis ce moment de trouble, quelques minutes auparavant, dans ma chambre. Loin de moi l’idée de profiter de ce problème pour me rapprocher de lui au cours de la nuit ! Je n’avais pas pour habitude de fonctionner ainsi. Et puis, je n’avais pas envie de tenter quoi que ce soit, avec lui ou avec un autre. Alors même si Shane était un homme adorable, profondément gentil et que j’appréciais fortement, il resterait seulement un ami. Du moins, je l’espérais et comptait bien garder notre relation ainsi. D’ailleurs, ce fut en toute honnêteté que je lui confiais les raisons de mon départ. Puis, je lui énumérais rapidement les différents lieux que j’avais eu la chance de découvrir durant mon périple. En deux ans, j’en avais vu des pays ! J’avais d’ailleurs vécu un peu partout, aussi bien séjourné dans des hôtels riches que chez l’habitant, dans des lieux parfois pleins de misère. Clairement, j’avais vu de tout durant ces longs mois de voyage.
« Oui, en effet. Pour répondre à ta question, je suis spécialisé dans tout ce qui touche aux affaires publiques, le gouvernement, la diplomatie etc… un vaste sujet me diras-tu !! Même si j’ai passé toute mon enfance et mon adolescence aux Etats-Unis, je suis retourné étudier en Italie, le pays où je suis né. J’ai effectué un semestre en France et un autre en Irlande… le reste de mes déplacements sont principalement touristiques. Des vacances au Canada … un été au Mexique et j’en passe. Je n’ai toutefois pas eu la chance de voir toutes les merveilles que tu as eu l’occasion de découvrir. Un jour peut-être… » J’écoutais alors sa réponse avec attention, également admirative de son parcours. Même si c’était des déplacements touristiques, il avait eu l’occasion de visiter certains pays. Et parfois d’y séjourner plus longtemps que moi. Car contrairement à lui, je n’avais jamais séjourné plus de quelques semaines dans un pays. Non pas par soucis d’argent ou de difficulté d’adaptation. Simplement car si je voulais découvrir d’autres lieux, je devais me bouger et ne pas rester trop longtemps dans un pays afin de profiter un maximum. « Je n’ai pas vu que des merveilles, tu sais… Il y a des pays où la vie semble vraiment difficile, où la misère est partout… Il fallait parfois avoir le cœur bien accroché ! C’est uniquement dans ces moments là que tu réalises la chance que tu as de vivre convenablement... » soulignais-je alors, le regard dans le vide avant de me ressaisir et de lever les yeux dans sa direction. « Bref, passons ! Je suis sûre que tu auras aussi l’occasion de voyager et découvrir certains pays vraiment splendides ! » l’encourageais-je alors avec un large sourire. Et qui sait ? Peut-être que nous aurions l’occasion de voyager ensemble ? Enfin, ce n’était pas pour de suite. Du moins pour moi. Comme je le lui précisais, j’étais là avec la ferme intention de me poser un peu. Et il était donc hors de question de partir prochainement ! Je n’en avais d’ailleurs plus vraiment les moyens… Et il fallait que je me concentre plutôt sur mon travail. J’étais là pour ça après tout ! « Il faut savoir profiter de l’instant présent comme on dit ! Pour être franc avec toi, je suis un peu dans le même cas de figure. Rien ni personne ne me retient ici. Mais bon, qui sait ce que la vie nous réserve ? » J’acquiesçai vivement. Sur ce point là, je ne pouvais absolument pas le contredire ! « Totalement d’accord avec toi ! Et puis, qui vivra verra ! Ce sont souvent des rencontres qui changent le cours d’une vie… Peut-être qu’un jour, l’un de nous rencontrera quelqu’un qu’il acceptera de suivre à l’autre bout de la terre ! » Répondis-je en plaisantant vaguement, songeant toutefois qu’il y avait peut être une part de vrai là dedans.
« Totalement d’accord avec toi ! Et puis, qui vivra verra ! Ce sont souvent des rencontres qui changent le cours d’une vie… Peut-être qu’un jour, l’un de nous rencontrera quelqu’un qu’il acceptera de suivre à l’autre bout de la terre ! » Shane esquissa un sourire, pas franchement certain d’être concerné par ce genre de surprises du destin. Lui, il était condamné à mener une vie différente. Une vie de solitude et de méfaits répréhensibles. Ce qu’il faisait était mal, il en avait conscience mais cela ne semblait pas l’atteindre outre-mesure. Parfois, il enviait toutes ces personnes qui savaient se contenter d’une vie simple et parvenaient à en tirer un réel bonheur. « Certes … mais j’avoue que tout ça me dépasse un peu. J’ai toujours été du genre cavalier solitaire … je doute fort de mon aptitude à suivre qui que ce soit à l’autre bout du monde. Mais seuls les idiots ne changent pas d’avis. Non, la vérité c’est que …» Shane marqua une pause, cherchant ses mots. Il avait trouvé un moyen d’amener Juliet vers un sujet plus sensible histoire de savoir comment il devrait véritablement s’y prendre avec elle. Il soupira, embarrassé. Il passa une main sur sa nuque, s’accordant quelques instants. « Pour être franc avec toi, je ne sais pas trop ce qui cloche chez moi mais je ne suis pas un as des relations suivies. Au risque de te surprendre, je n’ai jamais véritablement été en couple. Je n’arrive pas à m’attacher, ni même à me projeter. Je rencontre des filles toutes plus géniales les unes que les autres mais je ne sais pas … il me manque toujours quelque chose. Ou plutôt quelqu’un. Du coup, je passe ma vie à bosser et je ne m’accorde jamais de temps. Je pense qu’à force de vouloir bien faire les choses, j’ai fini par m’enfermer dans ma bulle… » Il haussa les épaules, un petit sourire gêné au coin des lèvres. Il ne l’était pas vraiment en réalité. Shane était solitaire, un point c’est tout. Les trucs de gonzesses, les câlins et les soirées romantiques, ce n’était vraiment pas sa tasse de thé. Il y avait cependant du vrai dans ce qu’il disait : il n’avait jamais véritablement été en couple. « En tout cas, je te souhaite vraiment de rencontrer la personne avec qui tu seras prête à aller jusqu’au bout du monde. Je pense que tu le mérites vraiment.» Il laissa quelques instants de flottement, son regard se perdant dans celui de la jeune femme. Cela ne faisait que quelques semaines qu’il la connaissait mais il en savait suffisamment sur elle pour savoir qu’elle était vraiment une fille bien. Pour peu, il aurait presque été tenté de lui dire de prendre la fuite avant que Cameron ne lui mette de nouveau la main dessus.
Sur ces mots, Shane s’éclipsa dans la cuisine afin de prendre une bouteille d’un champagne grand cru qu’il avait pu de ramener de son dernier voyage en Europe. Une pure merveille qu’il avait eu l’occasion de déguster et qui lui avait été suggérée par un sommelier de renom, dans l’un des plus grands restaurants de la capitale française. Depuis toujours, le jeune homme était un amateur de bon vin et de champagne, il tenait désormais à initier son amie à tous ces arômes merveilleux tout en trinquant à leur nouvelle vie. Avant de retourner dans le salon, il s’empara de deux coupes. Juliet allait probablement adorer toutes ces saveurs. « Comme promis, une petite récompense pour tous nos efforts et pour fêter notre première soirée à l’appartement.» Le bouchon sauta et Shane leur servit deux coupes de façon équitable. Il en tendit une à Juliet et leva la sienne. « A cette nouvelle vie, à nous deux, à cette merveilleuse rencontre…» Car elle en était véritablement une. Juliet était une jeune femme incroyable qu’il aurait adoré rencontrer dans d’autres circonstances. Si seulement il n’avait pas été payé pour la faire souffrir …
« Certes … mais j’avoue que tout ça me dépasse un peu. J’ai toujours été du genre cavalier solitaire … je doute fort de mon aptitude à suivre qui que ce soit à l’autre bout du monde. Mais seuls les idiots ne changent pas d’avis. Non, la vérité c’est que …» J’arquais vaguement un sourcil, l’écoutant avec attention. Je voyais bien qu’il semblait désormais plus embarrassé, cherchant ses mots, comme s’il s’apprêtait à aborder un sujet délicat. Je le laissais donc faire et prendre le temps qu’il souhaitait. « Pour être franc avec toi, je ne sais pas trop ce qui cloche chez moi mais je ne suis pas un as des relations suivies. Au risque de te surprendre, je n’ai jamais véritablement été en couple. Je n’arrive pas à m’attacher, ni même à me projeter. Je rencontre des filles toutes plus géniales les unes que les autres mais je ne sais pas … il me manque toujours quelque chose. Ou plutôt quelqu’un. Du coup, je passe ma vie à bosser et je ne m’accorde jamais de temps. Je pense qu’à force de vouloir bien faire les choses, j’ai fini par m’enfermer dans ma bulle… » Je pinçai les lèvres et haussais vaguement les épaules. Il n’avait cependant pas à avoir honte de cela. C’était dans son tempérament. Certaines personnes ne supportent pas le célibat, d’autres ne peuvent pas s’attacher à quelqu’un. « Tu sais, comme on dit, ‘mieux vaut être seul que mal accompagné’. C’est dans ton caractère, tu n’as pas à en être gêné, tant que tu es heureux ainsi… Puis, certaines personnes sont prêtes à attendre des années pour trouver la perle rare, sans se jeter tête baissée vers la première relation qui leur tend les bras. Je trouve d’ailleurs que c’est tout à leur honneur… » Soulignais-je alors avec un vague sourire avant d’enchaîner. « Tu à l’air d’être quelqu’un de bien… Peut-être qu’un jour, tu rencontreras la personne qu’il te faut et qui te fera oublier tous tes doutes. Et alors, les choses se feront naturellement… Puis, si ce n’est pas le cas, si tu demeure seul, dis-toi bien que ce n’est pas dramatique. Au contraire… cela vaut peut être mieux dans certains cas… » Répondis-je songeuse, repensant à ma propre histoire et à ma décision de laisser de côté ma vie sentimentale. Au final, nous voilà déjà un autre point commun.
« En tout cas, je te souhaite vraiment de rencontrer la personne avec qui tu seras prête à aller jusqu’au bout du monde. Je pense que tu le mérites vraiment.» J’affichais alors un vague sourire gêné et haussais les épaules. C’était vraiment gentil de sa part. Sauf que j’avais laissé de côté tout espoir de rencontrer cette personne. « C’est gentil mais… à l’inverse de toi, j’ai volontairement décidé de ne plus m’attacher et de me consacrer davantage à mon boulot qu’à ma vie sentimentale. D’ailleurs, tu évoquais la tienne mais la mienne n’est pas très brillante non plus… A même pas 18 ans, j’ai du épouser un homme pour nous sortir, ma mère et moi, de la misère. Mariage arrangé, donc. Mais avec le temps, j’ai commencé à éprouver des sentiments pour lui. Et …inversement… je crois. Parce que malgré tout, il est allé voir ailleurs. C’est pour ça que je suis partie… Mais il a été le seul homme que j’ai véritablement eu dans ma vie... » expliquais-je alors, regard rivé vers le sol. Il s’était confié sur sa vie sentimentale, il me semblait normal de faire de même. Ne serait-ce que pour lui prouver qu’il n’était en rien un cas isolé. Puis le jeune homme s’éclipsa un instant et revint avec une bouteille de champagne et deux coupes. « Comme promis, une petite récompense pour tous nos efforts et pour fêter notre première soirée à l’appartement.» J’affichais alors un large sourire. Oui, il valait mieux que nous nous concentrions sur cette nouvelle vie et que nous fêtions cela plutôt que d’évoquer nos misérables vies sentimentales. Je récupérais alors la coupe qu’il me tendait et la levais également. « A cette nouvelle vie, à nous deux, à cette merveilleuse rencontre…» Je lui adressais alors un tendre sourire. J’aurais pu en dire exactement de même envers lui. Car il était quelqu’un d’adorable et avec qui j’aurais sans doute espéré plus si je n’avais pas tant souffert côté cœur. « Oui, à nous, à notre amitié, et à ce nouveau départ… » dis-je alors en faisait tinter mon verre contre le sien.
Juliet ne le savait pas encore, mais elle se trouvait face au plus gros baratineur de tous les temps. Shane avait l’art et la manière d’orienter la conversation dans la direction qui lui convenait, amenant progressivement la jeune femme à se confier et s’ouvrir davantage. Gagner sa confiance était primordial, voilà donc pourquoi il décida de lui faire quelques fausses révélations sur sa personne. En réalité, il n’en avait rien à cirer de n’avoir personne avec qui partager son quotidien !! Aimer ? Cela voulait dire quoi au juste ? En était-il seulement capable ? Shane était un sale con, il le savait mais cette constatation lui passait bien au-dessus de la tête. Il faut de tout pour faire un monde. S’embarrasser la vie avec une fille n’était pas à l’ordre du jour. En fait, cela faisait une éternité qu’il avait laissé de côté ce genre de niaiseries afin de se concentrer sur la partie la plus superficielle des femmes qu’il rencontrait. Jouer les bourreaux des cœurs était devenue son activité favorite et jusqu’à preuve du contraire, aucune femme n’avait jamais su le troubler d’aucune manière que ce soit. Shane n’était pas du genre à s’attacher ou ne serait-ce qu’à éprouver un semblant de frisson en présence d’une autre personne. « Tu à l’air d’être quelqu’un de bien… Peut-être qu’un jour, tu rencontreras la personne qu’il te faut et qui te fera oublier tous tes doutes. Et alors, les choses se feront naturellement… Puis, si ce n’est pas le cas, si tu demeure seul, dis-toi bien que ce n’est pas dramatique. Au contraire… cela vaut peut être mieux dans certains cas… » Shane esquissa un léger sourire et acquiesça. Inutile de le préciser, il savait depuis toujours qu’il était préférable de s’enfermer dans la solitude que d’accorder sa confiance à autrui. Puis c’était dans sa nature de se débrouiller sans l’aide de quiconque. S’encombrer la vie avec une femme ne faisait pas partie de ses projets.
Encore un tout petit effort et Shane parvint à la faire parler… voilà qui devenait fort intéressant. D’autant que si elle mentait, il le saurait immédiatement puisqu’il connaissait parfaitement bien son passé ainsi que les raisons qui l’avaient poussée à quitter son époux pour se lancer dans un périple sans fin. Il l’écouta attentivement, avec un réel intérêt. Shane avait un avis bien tranché sur la question : son mari n’avait que ce qu’il méritait et elle avait eu raison de s’en aller. Et dire qu’il allait être le monstre infâme qui allait la repousser dans ses bras !! Il en aurait presque éprouvé un certain remord. Presque.« Je suis sincèrement navré. Je ne voulais pas te pousser à repenser à de si mauvais souvenirs. Hum… Je sais que je ne devrais pas me permettre ce genre de remarque mais tant pis, je me lance quand même ! Je pense que tu ne devrais pas renoncer aussi facilement. Ce mariage… cette vie… tu n’avais pas le choix. Et si cet homme est un crétin et n’a pas su voir quelle femme merveilleuse se tenait à ses côtés, c’est son problème ! Cela ne doit pas t’empêcher d’être heureuse et d’avancer.» Instinctivement, il s’était rapproché d’elle et avait même osé glisser un doigt sous son menton afin qu’elle cesse de fixer le sol avec tant d’intérêt et qu’elle puisse replonger son regard de braise dans le sien. « Au diable les mauvais souvenirs, je préfère te voir sourire. Et tu sais quoi ? Y’a rien de telle qu’une bonne bouteille de champagne pour se remettre du baume au cœur.» Et c’est à cet instant qu’il quitta le salon durant une petite minute pour aller chercher la bouteille, revenir et trinquer avec Juliet. « Fabuleux. Au fait, y’a quelque chose à manger dans le frigo ou on passe une commande ? Pizza-champagne … c’est pas mal comme mélange.» Une grimace amusée se dessina sur son visage.
Plus je passais du temps avec lui, plus j’appréciais Shane. J’était d’ailleurs suffisamment en confiance pour me confier sur ma vie sentimentale. Il avait fait de même peu avant, je me sentais donc obligée d’en faire de même. J’étais d’ailleurs loin de me douter qu’il me manipulait avec une facilité déconcertante. Ainsi, sans même qu’il me questionne directement, j’évoquais mon passé. Mon mariage, Cameron, son infidélité, mon départ. Je lui en disais évidemment les grandes lignes, ne voulant tout de même pas rentrer dans les détails. D’une part, je doutais que cela l’intéresse vraiment. D’autre part, c’était assez douloureux. Même si cela remontait à quelques années, Cameron avait été le seul homme de ma vie qui avait autant compté alors songer à tout cela avait tendance à me plomber le moral. « Je suis sincèrement navré. Je ne voulais pas te pousser à repenser à de si mauvais souvenirs. Hum… Je sais que je ne devrais pas me permettre ce genre de remarque mais tant pis, je me lance quand même ! Je pense que tu ne devrais pas renoncer aussi facilement. Ce mariage… cette vie… tu n’avais pas le choix. Et si cet homme est un crétin et n’a pas su voir quelle femme merveilleuse se tenait à ses côtés, c’est son problème ! Cela ne doit pas t’empêcher d’être heureuse et d’avancer.» Je posais sur lui un regard à la fois attendrit et surprit lorsqu’il glissa son doigt sous mon menton afin de me faire relever le visage. Je comprenais tout à fait son point de vue. Et il n’avait pas totalement tort. Mais j’avais tellement été déçue par la gent masculine – pas uniquement par Cameron mais par les hommes que j’avais pu rencontrer avant lui ou au cours de mes voyages – qu’il m’était actuellement impossible d’envisager quoi que ce soit de sérieux avec un homme. « Non, ce n’est rien, cela appartient au passé… Et, je n’ai pas spécialement l’habitude de renoncer à quoi que ce soit mais vraiment, j’ai suffisamment souffert avec les hommes. Pas seulement Cameron. Mais la plupart des hommes que j’ai pu rencontrer… Donc franchement, pour le moment, je préfère me consacrer pleinement à mon boulot… » Pourtant, je demeurais une personne assez rêveuse, naïve. Il n’y avait qu’à voir ce que je venais de lui soumettre. Le fait qu’il pourrait rencontrer quelqu’un qu’il serait prêt à suivre à l’autre bout du monde… Oui, clairement, une toute petite partie en moi rêvait encore du grand amour et de tout cela… Mais paradoxalement, je voulais garder mes distances avec les hommes. Pour le moment du moins.
« Au diable les mauvais souvenirs, je préfère te voir sourire. Et tu sais quoi ? Y’a rien de telle qu’une bonne bouteille de champagne pour se remettre du baume au cœur.» Oui, bonne idée ! Même si cela appartenait au passé, j’avais tendance à perdre une partie de ma bonne humeur lorsqu’il était question de cela. Il valait donc mieux changer de sujet. Ce serait franchement dommage d’avoir une baisse de moral, surtout pour cette première soirée passée ensemble. Je tentais donc d’oublier tout cela et de me concentrer sur cette nouvelle vie qui démarrait. Rapidement, je retrouvais d’ailleurs mon sourire habituel. Certes, il cachait souvent quelques blessures. J’étais du genre à sourire et soutenir que tout allait bien, même quand cela n’allait pas. Je n’aimais pas me plaindre ou faire susciter la pitié. Je préférais donc largement faire croire que tout allait bien, même lorsque ce n’était pas le cas. Mais en l’occurrence, malgré la conversation précédente, mon sourire était sincère. Lorsqu’il revint avec le champagne et le coupe, nous trinquâmes presqu’aussitôt. « Fabuleux. Au fait, y’a quelque chose à manger dans le frigo ou on passe une commande ? Pizza-champagne … c’est pas mal comme mélange.» J’affichais une légère moue. Je lui avais tout de même promis un bon repas. Sauf qu’étant donné le contenu du frigo, cela n’allait pas être simple ! « Vu ce qu’il y a dans le frigo, je crois qu’il vaudrait mieux commander une pizza… Je te préparerais un bon repas dès que le frigo sera un peu plus rempli ! » Répondis-je alors en laissant de côté notre conversation précédente. « C’est la première fois que tu vis en coloc’ ? » demandais-je soudainement, cherchant un sujet de conversation. C’était toujours mieux que rien.
Dernière édition par Juliet A. Montgomery le Jeu 19 Sep - 21:56, édité 1 fois
Sans l’interrompre à aucun moment, Shane prêta une oreille attentive aux confessions de la jeune femme, comprenant toutefois qu’elle laissait de côté l’essentiel et ne faisait que survoler les différents épisodes marquants de sa vie. Les histoires rocambolesques des affaires sur lesquelles il travaillait avaient toujours eu tendance à beaucoup l’amuser et en l’occurrence, celle de Juliet était loin d’être banale. S’il n’était pas totalement certain de la véracité de ses propos, il aurait aisément pu croire qu’elle lui racontait des craques histoires de mettre un peu de piment à son récit. Le mariage arrangé, le mari manipulateur, la fuite et le tour du monde improvisé… tout cela sonnait tellement cliché ! Hélas pour elle, tout était bien réel, y compris le comportement lâche et pitoyable de son époux. Pas étonnant qu’elle n’ait plus la moindre envie d’accorder sa confiance à qui que ce soit. Malheureusement, ce qu’il s’apprêtait à faire avec elle n’était guère plus reluisant et ne l’aiderait certainement pas à aller de l’avant de ce côté-ci. Cependant, Shane notait qu’en dépit de son discours formel sur sa volonté de ne plus accorder sa confiance aux hommes, elle avait tout de même accepté de partager un appartement avec une personne qu’elle connaissait à peine et venait même de s’ouvrir à lui. C’était déjà un grand pas et il comprit alors qu’il était sur la bonne voie. Lentement mais sûrement, il parviendrait à ses fins. Toutefois, le jeune détective savait qu’il n’en obtiendrait pas davantage pour l’instant et décida donc de passer à un sujet plus festif en lui proposant de savourer une délicieuse bouteille de champagne et quand vint la question du repas, il proposa nonchalamment de passer une commande puisque le frigo était encore vide. « Vu ce qu’il y a dans le frigo, je crois qu’il vaudrait mieux commander une pizza… Je te préparerais un bon repas dès que le frigo sera un peu plus rempli ! » Il acquiesça avec un sourire franc aux lèvres avant de s’emparer de son téléphone portable dans lequel il conservait les numéros de téléphone utiles en cas de commande. Autant dire qu’il y avait recours assez régulièrement… « Ne t’en fais pas pour ça, j’aurais d’autres occasions de découvrir tes talents de cuisinière. Et puis j’imagine qu’avec tout le travail que tu as fourni aujourd’hui, tu n’as probablement pas envie de perdre encore du temps derrière les fourneaux. Je m’en voudrais mortellement que tu ne prennes pas le temps de te reposer à cause de moi. Alors ne t’en fais pas, je m’occupe de tout. Pour ce soir, ça fera amplement l’affaire.» Un sourire amusé fendant ses lèvres, Shane porta le portable à son oreille et commanda les pizzas après avoir pris soin de demander à Juliet ce qu’elle préférait, naturellement. Quand il raccrocha, le jeune homme reprit sa coupe de champagne entre les mains et alla s’asseoir sur le canapé. « C’est la première fois que tu vis en coloc’ ? » C’était même la première fois qu’il partageait un appartement avec quelqu’un. Avant de répondre, Shane vint s’asseoir sur le canapé et appuya ses coudes contre ses genoux, penché en avant. « Absolument. L’occasion ne s’est jamais présentée auparavant et étant donné que je suis de nature solitaire, je n’avais jamais envisagé cette option avant qu’on en discute. Cela dit, je ne pense pas que ma présence te sera dérangeante étant donné que je passe beaucoup de temps à l’extérieur. Le reste du temps, je suis assez discret quoi qu’un peu bordélique, il faut bien l’admettre. J’imagine que c’est une première pour toi aussi ? Hmm… est-ce qu’il y a des « règles » que tu voudrais qu’on instaure ? »
J’étais moi-même assez surprise de la facilité avec laquelle j’arrivais à me confier à Shane alors qu’il n’était finalement qu’un inconnu. Certes, nous nous connaissions depuis un mois mais cela ne faisait pas de nous des amis proches, ou des confidents. De bonnes connaissances. Voire de vagues amis. Pas plus. Et pourtant, moi qui n’aimais pas évoquer mon passer et encore moi ma vie sentimentale, me voyais soudainement en train de lui résumer tout cela. Presque naturellement. Sans craindre un quelconque jugement de sa part, ou moquerie. Non, je le savais plus intelligent que cela. Pourtant, face à mon histoire pour le moins rocambolesque et peu banale, il aurait très bien pu me rire au nez et ne pas me prendre au sérieux. Pourtant, il semblait, à l’inverse, presque compatir. Cela ne pouvait que m’encourager à me confier toujours plus. En même temps, il était si gentil, si compréhensif, qu’il inspirait forcément la confiance. Il avait d’ailleurs la mienne, et ce, depuis un moment. Et plus le temps passait, plus je me sentais en confiance avec lui. C’était d’ailleurs quelque chose de presque exceptionnel ! J’étais en train, pour la première fois depuis un long moment, de refaire confiance à un homme… Certes, c’était purement amical. Du moins, je n’étais pas encore prête à me relancer dans une histoire d’amour. Mais c’était déjà un sacré pas en avant de ma part que de lui accordait ma confiance. Ce n’était d’ailleurs pas pour rien que je lui avais proposé cette colocation. Parce qu’à la base, l’idée de vivre avec un parfait inconnu ne m’attirait pas vraiment. Heureusement, j’avais trouvé Shane. Et j’estimais que c’était au final une assez bonne idée de partager cet appartement avec lui. Ainsi, j’acceptais immédiatement de fêter notre emménagement avec une coupe de champagne et, lorsqu’il fut question du repas, j’admettais qu’il n’y avait pas grand-chose dans le frigo et qu’il valait mieux commander quelques pizzas.
« Ne t’en fais pas pour ça, j’aurais d’autres occasions de découvrir tes talents de cuisinière. Et puis j’imagine qu’avec tout le travail que tu as fourni aujourd’hui, tu n’as probablement pas envie de perdre encore du temps derrière les fourneaux. Je m’en voudrais mortellement que tu ne prennes pas le temps de te reposer à cause de moi. Alors ne t’en fais pas, je m’occupe de tout. Pour ce soir, ça fera amplement l’affaire.» Je levais alors rapidement les yeux au ciel. Je n’étais pas non plus surbookée, ni même submergée d’une quelconque manière que ce soit. Mais il était vrai que je ne m’étais pas vraiment préoccupée du contenu du frigo. Si bien qu’au final, nous n’avions pas grand-chose à nous mettre sous la dent. Je remarquais d’ailleurs qu’il avait réellement un sourire à tomber. Si bien que je préférais rapidement détourner le regard. A croire qu’il était en train de me faire de l’effet… Non… Non ! Il était hors de question que je commence à avoir des vues sur lui ! Je me sortais alors rapidement ce genre d’idées de la tête et tentais de faire comme si de rien n’était. « C’est vrai qu’entre mon boulot de serveuse et l’emménagement, j’ai complètement oublié d’aller faire quelques courses… J’irai demain ! Et puis, pizza-champagne, pour une première soirée, ce n’est pas si mal ! » plaisantais-je alors avant qu’il ne récupère son téléphone portable pour commander ces fameuses pizzas. Une fois ceci fait, je lui demandais s’il avait déjà vécu en colocation. Etant donné son caractère solitaire, je me doutais que non, mais on ne sait jamais… « Absolument. L’occasion ne s’est jamais présentée auparavant et étant donné que je suis de nature solitaire, je n’avais jamais envisagé cette option avant qu’on en discute. Cela dit, je ne pense pas que ma présence te sera dérangeante étant donné que je passe beaucoup de temps à l’extérieur. Le reste du temps, je suis assez discret quoi qu’un peu bordélique, il faut bien l’admettre. J’imagine que c’est une première pour toi aussi ? Hmm… est-ce qu’il y a des « règles » que tu voudrais qu’on instaure ? » Je réfléchis rapidement avant de secouer vaguement la tête de droite à gauche. « Oui, première véritable colocation pour moi aussi ! Et pour les ‘règles’, non, enfin, je n’en vois pas vraiment l’utilité… Je pense qu’on est assez grands pour cohabiter ensemble sans problème. Tant que tu ne me laisses pas faire tout le ménage moi-même et que te me files régulièrement un coup de main, ça devrait aller. Et niveau présence, entre mon boulot de serveuse et celui de styliste, je risque d’être peu présente moi aussi.. »
Parfait. Son plan machiavélique se déroulait précisément de la manière dont il l’avait envisagé. Shane tenait en premier lieu à gagner la confiance de la belle Juliet, s’insinuer dans sa vie pour finalement tout anéantir en un claquement de doigts. Cameron ne lui avait donné aucune recommandation particulière, il tenait juste à récupérer sa femme dans les plus brefs délais et surtout, dans un état totalement désespéré. Un jeu d’enfants selon Shane… Le reste de la soirée se déroula de la manière la plus agréable qui soit. Ensemble ils partagèrent un repas improvisé, se racontèrent quelques anecdotes sur leurs vies respectives avant que finalement, Juliet n’aille trouver refuge dans sa chambre tandis que pour sa part, Shane continuait ses recherches sur Internet. Rien à voir avec la rédaction d’un quelconque article bien entendu. Il s’agissait de recherches personnelles dans le cadre de ses « missions »…
Le lendemain, 23h09
L’heure était tardive et pourtant, bon nombre de badauds entraient et sortaient du bar. Certains venaient juste passer un bon moment, d’autres étaient à la recherche de cette tumultueuse ivresse qui leur permettrait d’oublier leur éreintante journée ou leur vie misérable. Discret, Shane se faufila au beau milieu de la foule et guetta la ravissante serveuse qui s’affairait derrière le comptoir. Non, Juliet n’était vraiment pas faite pour ce genre de métier. Non pas qu’elle l’exerce mal, bien au contraire ! Mais elle avait la beauté et la grâce d’un ange… un ange que bon nombre d’hommes ici présents convoitaient avec une lueur malsaine dans le regard. Etrangement, Shane était exaspéré de les voir la reluquer ainsi. Une autre serveuse s’approcha de lui mais il ne la regarda même pas tant il était absorbé par le spectacle qui s’offrait à ses yeux. « Un whisky, je vous prie. » Le bar était suffisamment grand et il y avait assez de monde pour que Juliet ne remarque pas sa présence immédiatement. Shane n’avait pas l’intention de s’éterniser ici. Il tenait juste à observer Juliet car il estimait que c’était la meilleure façon d’obtenir des informations à son égard. Il voulait comprendre comment elle fonctionnait pour mieux retourner ses faiblesses contre elle. C’est alors qu’il vit un grand gaillard à peine plus âgé que lui se rapprocher de la jeune femme qui venait de contourner le bar pour s’occuper de nouveaux clients. L’homme semblait faire preuve d’une insistance dérangeante et bien qu’il ne soit pas capable d’entendre ce qu’il était en train de dire, Shane comprit rapidement qu’il était en train de faire une proposition plus que douteuse à la jolie brune. Il n’aimait pas ça, mais il fallait qu’il se contienne. Juliet ne devait rien savoir de sa présence en ces lieux. Mais l’homme devenait de plus en plus pressant. S’il pouvait aisément concevoir que l’on puisse se délecter de la charmante compagnie de Juliet, Shane tolérait beaucoup moins que l’on puisse lui manquer de respect ou que l’on se montre trop entreprenant à son égard. C’était juste une question de principe et de bienséance. Lui qui, en dépit de ses missions douteuses, ne rechignait pas sur les bonnes manières, ne pouvait accepter le manque évident de courtoisie dont l’homme faisait preuve depuis que son regard s’était posé sur Juliet. Qu’il l’apprécie était un fait. Mais qu’il puisse l’envisager comme une conquête potentielle l’était beaucoup moins. Fallait-il qu’il ait un sacré toupet pour croire le contraire. Sérieusement, Shane commençait à fulminer. Il n’avait qu’une envie : s’interposer et le remettre à sa place sur le champ. Fort heureusement, les aptitudes de Shane à faire preuve de tact et de diplomatie n’étaient plus à démontrer. Son flegme légendaire était un gage de confiance et de sureté pour son entourage. Il était une force tranquille. De ceux qui peuvent se montrer extrêmement dangereux mais qui savent se contenir. Ne dit-on pas qu’il faut toujours se méfier de l’eau qui dort ? Cependant, même s’il avait l’art et la manière de manipuler son entourage, Shane n’était pas infaillible et par conséquent, il ne fallait pas lui demander de rester de marbre lorsque la situation commençait à prendre vilaine tournure. Et c’est précisément ce qui arriva…
Non content de se montrer grossier et insistant, l’homme glissa ses mains au-delà du seuil de tolérance, la tenant bien trop fermement pour qu’elle puisse le gifler. En moins d’une fraction de seconde, Shane se matérialisa près de Juliet et se chargea lui-même d’ôter la main de l’importun. Allez savoir pourquoi mais toucher à elle était une grave, très très grave erreur. L’homme se tourna brusquement vers Shane qui de son côté, ne sembla pas perturbé outre mesure. Perturbé par quoi ? Par l’air menaçant d’un homme plus qu’imbibé et qui empestait la bière à des dizaines de mètres ? « Vous tenez vraiment à faire ça ?» L’homme était au bord du précipice. Un pas de plus, un geste de plus et c’était toute la fureur de Shane qui s’abattrait sur ses épaules. Calme en apparence, le jeune homme n’en demeurait pas moins prêt à agir en conséquence. La terre meuble était sur le point de céder et il suffisait d’un faux pas de la part de cet individu présomptueux pour se voir précipité dans les ténèbres. Involontairement, l’homme recula d’un pas. Sans ciller, il fixa les prunelles de son adversaire avec froideur. S’il pensait impressionner Shane d’une manière quelconque, autant dire qu’il faisait une grossière erreur. A croire que chez les Westlake, on avait ça dans le sang. Rien n’impressionnait. Rien ne faisait peur. Rien n’était insurmontable. Et s’il répugnait songer à ses ancêtres, Shane se devait pourtant d’admettre qu’il était de la même espèce que son géniteur. Un air de défi dans le regard, le jeune homme haussa un sourcil, attendant la moindre réflexion de la part de l’homme. Réflexion qui ne vint pas. L’inconnu était certes bien constitué, mais pas suffisamment pour subir les foudres de Shane, encore moins au sens physique du terme. L’air que revêtaient ses traits laissa penser à Shane qu’il ne lâcherait pas le morceau aussitôt et pourtant, l’homme remit le col de sa veste convenablement en place avant de s’éloigner. Le sourire narquois qu’il afficha en partant était un ultime défi lancé à Shane. Oui ils se reverraient. A un autre endroit, à un autre moment. Cette affaire n’allait surement pas en rester là. Fidèle à ses habitudes, Shane avait agi en toute discrétion, tant et si bien que personne dans le bar n’avait remarqué ce petit dérapage. Le jeune homme lança un coup d’œil par-dessus son épaule afin de s’assurer que l’homme s’était bel et bien éloigné puis se tourna vers Juliet. « Est-ce que tout va bien ? S’il t’approche encore une fois, je risque de ne plus répondre de mes actes. » Le pire c’est que pour une fois, Shane était véritablement inquiet pour elle. Sentiment qu’il n’était pas en mesure de s’expliquer tant son entourage ne lui inspirait que de l’indifférence. Mais avec Juliet … enfin bon, passons !! Maintenant que l’incident était clos, il y avait fort à parier que la jeune femme se demandait ce qu’il faisait ici. Et merde !! Shane n’avait initialement pas prévu de se montrer. Il fallait donc qu’il improvise quelque chose. « Je … j’allais rentrer et comme le bar était sur ma route, je me suis dit que tu voudrais peut-être que je te raccompagne.» Ouais sauf que visiblement, Juliet n’avait pas encore terminé puisqu’elle était en service. Hélas, il n’avait rien trouvé de mieux à dire. Pour un as de l’improvisation, ce n’était pas terrible il fallait bien le reconnaitre.
Même si je n’avais pas oublié Cameron, il faisait désormais pleinement partie de mon passé. Et j’étais persuadée que je faisais aussi partie du sien. Qu’il avait sans doute refait sa vie et m’avait peut-être même oublié. J’étais bien loin d’imaginer qu’il était à ma recherche, et encore moins que c’était avec la complicité de Shane. Oui, j’étais à des milliers de kilomètres de suspecter cette immense machination qui se montait dans mon dos. D’ailleurs, je plongeais même avec facilité, accordant presque facilement ma confiance à l’italien. Ainsi, le reste de la soirée se déroula de la même façon, dans une bonne ambiance tandis que nous apprenions peu à peu à nous connaître. J’ignorais bien évidemment qu’en réalité, il savait déjà quasiment tout de moi… Le lendemain, 23h09
Malgré l’heure tardive et une légère fatigue qui commençait à se faire ressentir, je m’efforçais de garder un large sourire et de rester agréable face à tous les clients du bar. Il était encore assez tôt et ainsi, nous comptions encore bon nombre de personnes au sein de l’établissement. Et en tant que serveuse, je me devais de rester sympathique et plaisante envers les clients du bar. Ne serait-ce que pour leur donner envie de revenir. Heureusement, mon service touchait à sa fin. D’ici moins d’une heure, je pourrais enfin rentrer chez moi. Et ce n’était pas de refus ! J’avais véritablement passé une grosse journée, entre mon boulot de styliste et celui de serveuse, je n’avais pas eu beaucoup de temps pour moi. Mais soit, ma journée de travail arrivait à son terme et j’allais pouvoir rentrer chez moi. Enfin chez nous, puisque je ne vivais plus seule désormais. Bref, tandis que je m’occupais des dernières commandes, un client, ayant visiblement trop bu m’accosta et commença à me draguer d’une manière peu fine et assez insistante. Ce n’était d’ailleurs pas le premier à agir ainsi. Cela faisait trois mois que je bossais ici et clairement, j’en avais vu des vertes et des pas mûres. Et j’avais plus ou moins l’habitude des clients complètement saouls qui me tournaient autour et se permettaient presque tout. Ainsi, je remis gentiment cet homme à sa place et m’apprêtais à reprendre mon service lorsqu’il insista encore et encore. Et j’avais beau le repousser, lui dire clairement que je n’avais rien à faire de lui, il ne semblait rien vouloir entendre. Pire, il se montrait de plus en plus grossier et insistant, à tel point que j’envisageais soudain l’ultime solution ; le gifler. Ce n’était pas vraiment dans mes habitudes mais je n’avais plus vraiment le choix. Le bar était tellement plein que personne n’avait réellement fait attention à ce qu’il se passait entre ce type et moi. Et ameuter toute la foule n’était peut être pas la meilleure idée qui soit. Pourtant, avant même que je n’ai eu le temps d’agir, il m’attrapa assez fermement. Suffisamment pour que je ne puisse me défaire de son emprise. Et lorsqu’il glissa sa main dans mon cou, tenant visiblement à m’embrasser de force, il fut arrêté dans son élan par quelqu’un, l’obligeant par la même occasion à me lâcher.
« Vous tenez vraiment à faire ça ?» Reconnaissant immédiatement cette voix, je me tournais en direction de celui qui venait de me tirer de cette mauvaise passe. Shane. Je poussais un léger soupir de soulagement. Il était arrivé pile au bon moment. Parce que, même si j’étais parvenue à garder mon calme, je commençais à avoir sacrément la trouille. Heureusement, tout cela semblait fini. Je n’osais cependant rien dire, sentant l’immense tension qui régnait encore entre les deux hommes. Et voyant Shane beaucoup plus froid que d’habitude. Visiblement prêt à sauter sur le type s’il se permettait quoi que ce soit. Ainsi, je restais muette jusqu’à ce que le client décide de faire demi-tour et de quitter directement le bar. « Est-ce que tout va bien ? S’il t’approche encore une fois, je risque de ne plus répondre de mes actes. » Je m’efforçais alors d’afficher un vague sourire, comme pour le rassurer. « Oui, ça va aller… Merci d’être venu ‘à mon secours’, je ne sais pas ce que j’aurais fait sans toi… Et ne fais plus attention à lui, je n’ai pas envie que tu aies des problèmes à cause d’un con pareil. » répondis-je alors en balayant la salle du regard, constatant que personne ne semblait avoir remarqué ce dérapage. Il fallait bien avouer que Shane s’était montré très discret et nous avait ainsi évité de nous faire remarquer. Et bien sûr, j’étais sincère lorsque je disais que je ne voulais pas qu’il ait d’ennuis à cause de ce type. S’il venait à lui régler son compte, Shane serait susceptible d’avoir des ennuis, aussi bien envers ce type qu’envers la police. Car il serait assez simple pour cet homme de tourner la situation à son avantage et accuser Shane. Bref, il valait donc mieux laisser cela de côté. Je retournais ensuite derrière le bar pour continuer à servir les clients présents, laissant le jeune homme prendre place de l’autre côté du bar. « Je … j’allais rentrer et comme le bar était sur ma route, je me suis dit que tu voudrais peut-être que je te raccompagne.» Il m’avait devancé puisque j’allais effectivement lui demander ce qui l’amenait dans le coin. Parce qu’au final, c’était une sacrée coïncidence qu’il soit dans le bar pile au moment où je me retrouvais dans une situation aussi délicate. Mais je n’allais surtout pas m’en plaindre ! J’esquissai alors une légère moue désolée. « Oh c’est gentil mais je finis à minuit… Donc je rentrerais dès que j’aurais fini, sauf si tu tiens à m’attendre… Mais ne t’embêtes surtout pas pour moi ! » Répliquais-je alors, songeant qu’il serait peut-être préférable qu’il reste. Ne serait-ce que par sécurité. Si le type de tout à l’heure décidait de revenir et me voyait seule, il s’en donnerait certainement à cœur joie. « Tu veux que je te serve quelque chose ? » demandais-je alors en supposant qu’il venait d’arriver et n’avait donc pas encore eu l’occasion de commander.
Avoir des ennuis était bien la dernière de ses préoccupations. Shane avait beau tourner le problème dans tous les sens, il ne comprenait vraiment pas ce qui l’avait poussé à intervenir de la sorte. C’est précisément ce qui le dérangeait. Son geste n’avait nullement été prémédité et lui venir en aide avait sonné comme une évidence. Alors qu’il était persuadé de n’éprouver rien de plus qu’une véritable indifférence à l’égard de Juliet, voilà qu’il se découvrait soudainement l’envie de la protéger et la peur qu’on lui fasse du mal. Pourquoi ? Ce n’était pourtant pas dans ses habitudes de se préoccuper d’autrui, bien au contraire !! D’autant plus que ce qu’il faisait avec Juliet en la manipulant depuis plus d’un mois n’était guère plus louable. C’était même pire. Chassant toutes ces pensées de son esprit, le jeune homme improvisa rapidement une lamentable excuse afin de se justifier de sa présence. « Oh c’est gentil mais je finis à minuit… Donc je rentrerais dès que j’aurais fini, sauf si tu tiens à m’attendre… Mais ne t’embêtes surtout pas pour moi ! » Une fois de plus, c’est son instinct protecteur qui prit le dessus car la question de partir ou de rester ne se posait même pas. D’une part car l’homme qui s’était montré si peu courtois pourrait revenir d’une minute à l’autre, et d’autre part car la laisser quitter un endroit pareil, seule, à minuit, ne l’enchantait pas outre mesure. « Juliet, je t’assure que cela ne m’ennuie pas le moins du monde. Je reste, je préfère.» Ses prunelles soudainement assombries balayèrent la salle du regard. Il avait toujours trouvé pitoyables ces piliers de bar qui n’avaient rien de mieux à faire que de s’imbiber jusque tard dans la nuit. En plein jour, la plupart passaient pour des hommes louables. La nuit, c’était une autre histoire. Shane soupira et tapota nerveusement ses doigts sur le marbre du comptoir, les traits tendus, la bouche crispée et le regard sombre. « Tu veux que je te serve quelque chose ? » N’entendant pas immédiatement la question, Shane scrutait les moindres mouvements de la jeune femme avec beaucoup d’attention. Juliet était vraiment une proie facile. Pour lui, comme pour beaucoup d’autres. S’il trouvait l’idée de la manipuler totalement existante au moment de la signature du contrat, il se trouvait désormais ignoble. Après tout, elle n’était rien de plus qu’une gamine cherchant à reprendre sa vie en main. Qui était-il pour tout anéantir du jour au lendemain ? Ce n’est que lorsqu’il croisa le regard de Juliet que Shane réalisa qu’elle attendait une réponse de sa part. Merde, son whisky ! Bah tant pis… « Excuse-moi, j’avais la tête ailleurs. Hum oui, volontiers. N’importe quoi du moment que c’est frais.» Dans son dos, il entendit deux types parler fort, sans doute sous l’effet de l’alcool. Shane demeura silencieux un instant et continuant d’observer Juliet, déclara : « Pourquoi travailles-tu ici Juliet ? Je veux dire… ce n’est pas un endroit pour toi.» Son regard sondait celui de la jeune femme avec insistance. Vraiment, il ne comprenait pas comment elle pouvait supporter tout ça. Shane ne connaissait que trop bien tous ces hommes imbus de leur petite personne, persuadés que leurs désirs sont des ordres. Cette ambiance, ce décor, ce job … rien ne correspondait à l’image qu’il se faisait de la parfaite et élégante Juliet.
Jusqu’à présent, le comportement de Shane le faisait passer pour l’homme parfait. Celui que toutes les mères aimeraient que leurs filles épousent. Celui sur lequel toutes les jeunes filles fantasment. Et celui avec lequel les femmes mariées seraient capable de tromper leur mari. Oui, clairement, Shane avait tout pour lui. Et son attitude précédente, à la fois courageuse, assurée et protectrice, ne pouvait qu’accentuer cela. Sans aucun doute, j’étais tombée sur une perle rare. Perle rare avec laquelle je voulais simplement rester amie. C’était fou. Totalement impensable pour certaines. Mais c’était ainsi. . « Juliet, je t’assure que cela ne m’ennuie pas le moins du monde. Je reste, je préfère.» Je lui adressais alors un doux sourire, rempli de reconnaissance. Plus j’apprenais à le découvrir, plus je réalisais qu’il était un homme bien. Vraiment. Et plus je remettais certaines choses en doute. Et si faire une croix sur les hommes n’était qu’une erreur ? Et si…. Non. Je m’étais déjà fais avoir plusieurs fois, il était hors de question que je me fasse à nouveau berner. Quitte à passer à côté d’un homme formidable. D’ailleurs, je n’avais rien à regretter. Il m’avait clairement expliqué qu’il ne parvenait pas à s’attacher. Il serait bien trop bête que je finisse par être assez faible pour tomber sous son charme, m’attacher, tandis qu’il n’aurait, de son côté, rien à faire de moi. Enfin, c’était une hypothèse parmi tant d’autres. Mais quoi qu’il en soit, me laisser charmer n’était vraiment pas une bonne idée. « C’est comme tu veux… Merci Shane. » répondis-je alors en plantant mon regard dans le sien. Trop fière, je ne lui avouais pas que je préférais aussi cette option là. Pourtant, c’était bien le cas. Après cette interpellation avec un des clients, je préférais rester prudente. Et puis, même en général, je n’aimais pas avoir à rentrer seule en pleine nuit. Une jeune femme, seule, sans défense… C’était une proie tellement alléchante. Sauf qu’à aucun moment, je supposais être la proie de Shane… Reprenant ensuite mon rôle de serveuse, je regagnais le bar et continuais à servir les clients qui me le demandaient tout en demandant au jeune homme ce qu’il souhaitait. Le voyant perdu dans ses pensées et ne me répondant pas, je penchais légèrement la tête pour croiser son regard. « Excuse-moi, j’avais la tête ailleurs. Hum oui, volontiers. N’importe quoi du moment que c’est frais.» J’affichais alors rapidement une légère moue songeuse, réfléchissant à ce que je pouvais lui proposer. « Un cocktail, ça te va ? On en a un de vraiment excellent ! » soulignais-je avant d’aller le lui préparer pour finalement lui mener. Et ce n’était pas simplement dans le but de faire du chiffre que je lui conseillais ce cocktail mais bien car il était délicieux. Enfin, à mon goût…
« Pourquoi travailles-tu ici Juliet ? Je veux dire… ce n’est pas un endroit pour toi.» Je me figeai durant une fraction de seconde sur place. Puis, après avoir vérifié qu’aucun client n’attendait d’être servi, je me rapprochais de Shane, appuyant mes avant-bras sur le comptoir, face à lui. Un léger rire, presque nerveux, s’échappa de mes lèvres tandis que je baissais légèrement la tête, cherchant quoi répondre à cela. Un endroit pour moi ? Qu’est-ce que cela signifiait pour lui ? Parce qu’au final, il ne me connaissait pas encore parfaitement et ne pouvait juger de ce qui était bon ou pas pour moi. Et puis, il y avait tout de même pire comme boulot. « Tu sais Shane, mon travail de styliste ne me rapporte pas encore d’argent… Il faut encore que j’arrive à trouver quelques personnes pour confectionner et commercialiser mes créations. Je n’en suis pas encore à ce stade alors il faut bien que je gagne ma vie autrement. Et serveuse ici fut le premier job que j’ai trouvé en arrivant ici. Et franchement, cela ne me déplaît pas. Enfin, disons qu’il y a bien pire comme travail… » expliquais-je sans lâcher son regard. Il avait vraiment des yeux magnifiques… « Si ça peut te rassurer, je n’ai pas tout le temps affaire à des clients totalement bourrés qui me manquent de respect. Le bar fait aussi restaurant, il est donc ouvert en journée, je ne fais donc pas que des services le soir mais aussi le jour, ça dépend… Le travail et la clientèle ne sont pas les mêmes... » Certes, avec ce qu’il venait de voir là – et les clients actuellement présents – je ne pouvais que comprendre les doutes de Shane à propos de mon poste. Pourtant, je n’étais pas si mal que ça. Certes, je préférais travailler en journée et assurer le service du « restaurant » plutôt que de devoir m’occuper de tous ces types qui ne pensent qu’à boire jusqu’à la fermeture du bar. Mais soit. J’avais un travail, et qui ne me déplaisait pas, c’était tout ce qui importait. « Tu parlais d’endroits pour moi… A quoi pensais-tu ? » demandais-je alors un léger sourire en coin, curieuse de savoir dans quel milieu il me voyait plutôt évoluer.
A sa proposition concernant le cocktail, Shane acquiesça bien volontiers d’autant plus qu’il avait réellement soif. Malheureusement, il avait abandonné son verre de whisky derrière lui au moment de venir en aide à Juliet et naturellement, il ne pouvait se permettre d’aller le chercher sans prendre le risque de se trahir. Après tout, il était censé arriver au moment de l’incident. Plus les minutes passaient et plus Shane trouvait qu’il y avait quelque chose d’incongru au sein de ce décor somme toute basique. La présence de Juliet sans doute. Il faut dire que la jeune femme était d’une élégance et d’un raffinement qui ne collaient en rien à l’atmosphère qui émanait de ces lieux. « Tu sais Shane, mon travail de styliste ne me rapporte pas encore d’argent… Il faut encore que j’arrive à trouver quelques personnes pour confectionner et commercialiser mes créations. Je n’en suis pas encore à ce stade alors il faut bien que je gagne ma vie autrement. Et serveuse ici fut le premier job que j’ai trouvé en arrivant ici. Et franchement, cela ne me déplaît pas. Enfin, disons qu’il y a bien pire comme travail… Si ça peut te rassurer, je n’ai pas tout le temps affaire à des clients totalement bourrés qui me manquent de respect. Le bar fait aussi restaurant, il est donc ouvert en journée, je ne fais donc pas que des services le soir mais aussi le jour, ça dépend… Le travail et la clientèle ne sont pas les mêmes... » Elle avait raison : il y avait bien pire comme boulot. Le sien par exemple. Oh Shane adorait son métier, tout comme il avait réellement aimé bosser dans la police et collaborer avec l’armée. En revanche, il aimait beaucoup moins se voir confier des missions comme celle-ci… Certes il n’éprouverait sans doute aucun remord une fois qu’il aurait anéanti Juliet mais tout de même… il y avait des façons bien plus louables de gagner sa vie. A croire que l’argent porte le monde et obscurci les pensées de chacun. Un court instant, le jeune homme baissa le regard en direction de son verre posé sur le comptoir et replongea ses prunelles dans celles de Juliet. « Je suis navré si ma question t’a semblé offensante, ce n’était nullement mon intention. Ce que tu fais en ces lieux est parfaitement louable et je fais partie de ceux qui pensent qu’il n’y a pas de sots métiers. C’est juste que … tu mérites tellement mieux que tous ces hommes qui gravitent autour de toi en déblatérant des immondices après s’être imbibés d’alcool.» Même si la clientèle n’était pas la même en fonction des heures de la journée, Shane avait du mal à accepter l’idée que certains se permettent de la traiter comme l’avait fait cet homme quelques minutes plus tôt. Allez savoir pourquoi, mais ça le dérangeait profondément. Il n’était pas capable de se l’expliquer. « Tu parlais d’endroits pour moi… A quoi pensais-tu ? » Tout en l’observant, le jeune homme demeura silencieux. Il était plongé dans ses pensées tandis que la réponse à cette étrange interrogation lui semblait d’une évidence implacable. Juliet méritait ce qu’il y avait de mieux. « A tous ces endroits qui peuplent tes rêves … ces endroits auxquels tu penses que tu n’auras jamais accès… ce n’est pas la lune qu’il faut viser mais bien d’autres univers. Permets-moi de faire montre d’une audace qui ne me ressemble pourtant pas : je ne te connais que depuis un mois, mais c’est amplement suffisant pour savoir que tu es une jeune femme merveilleuse. Et les merveilles de ce monde n’ont rien à faire dans un endroit comme celui-ci.» A l’instant même où il terminait sa phrase, il entendit un homme dans son dos héler Juliet pour qu’elle lui resserve un verre. Shane qui n’avait pas cillé arqua un sourcil en fixant la jeune femme l’air de dire : « tu comprends mieux ? »
Cela faisait quasiment trois mois que je travaillais ici alors, tout naturellement, j’étais habituée à l’ambiance et aux clients. Plus rien ne pouvait me surprendre. Ou presque. Mais Shane semblait intrigué par ma présence ici. Il sous-entendit même que je n’avais rien à faire ici et que ma place était ailleurs. Aussitôt, je le rassurais quant au fait que j’étais réellement bien dans ce bar et que c’était un boulot assez plaisant que je faisais ici. Et puis, ce n’était que temporaire. Je n’avais pas l’intention de travailler comme serveuse dans ce bar tout le reste de ma vie. C’était juste quelques mois, le temps de me renflouer un peu… « Je suis navré si ma question t’a semblé offensante, ce n’était nullement mon intention. Ce que tu fais en ces lieux est parfaitement louable et je fais partie de ceux qui pensent qu’il n’y a pas de sots métiers. C’est juste que … tu mérites tellement mieux que tous ces hommes qui gravitent autour de toi en déblatérant des immondices après s’être imbibés d’alcool.» Un vague sourire prit place sur mes lèvres tandis que j’haussais les épaules, semblant lui dire que je n’y pouvais rien. Parce qu’il n’avait pas tort. Même s’il y avait des métiers bien plus pénibles que le mien, devoir supporter des types pareils à longueur de temps n’était pas vraiment ce à quoi j’aspirais. Clairement, certains avaient du oublier ce que le mot « respect » signifiait. Alors en effet, niveau conditions de travail, ce n’était pas le top. Mais soit, généralement, tout se passait bien et il n’y avait aucun dérapage. C’était l’essentiel. Même si, malgré tout, j’attendais impatiemment de pouvoir vivre pleinement de mon métier de styliste. Mais c’était pour l’instant encore trop tôt. Il me fallait encore quelques semaines, voire quelques mois avant de pouvoir lancer ma marque. Et en attendant, ce travail me convenait parfaitement. « Non, ce n’est rien… Je comprends. » C’était peut-être idiot mais voir Shane s’inquiéter de la sorte pour moi le rendait vraiment chou. Après tout, nous ne nous connaissions que depuis un mois et le voir aussi prévenant et soucieux de ma petite personne me touchait.
Par la suite, je lui demandais ce qu’il considérait être un « endroit pour moi » puisque ce bar ne semblait pas en faire partie. Simple curiosité. J’avais envie de voir quelle image il avait de moi et ce que je méritais vraiment à ses yeux. « A tous ces endroits qui peuplent tes rêves … ces endroits auxquels tu penses que tu n’auras jamais accès… ce n’est pas la lune qu’il faut viser mais bien d’autres univers. Permets-moi de faire montre d’une audace qui ne me ressemble pourtant pas : je ne te connais que depuis un mois, mais c’est amplement suffisant pour savoir que tu es une jeune femme merveilleuse. Et les merveilles de ce monde n’ont rien à faire dans un endroit comme celui-ci.» Le menton posé sur la paume de ma main, j’écoutais attentivement Shane, oubliant presque les clients du bar qui étaient autour de nous. Subjuguée, je me laissais littéralement charmer par ses paroles, si bien qu’une fois son discours terminé, je restais encore quelques petite secondes à le fixer. Réalisant soudain que… Que quoi au juste ? Que ses paroles m’avaient fait fondre ? Que pendant quelques minutes, je n’avais eu d’yeux que pour lui ? Oui, certainement. Bref, réalisant cela, je me reculais légèrement en secouant vaguement la tête. Reprends-toi Juliet, reprends-toi ! « Merci Shane, je… » Je n’eus pas le temps de lui répondre qu’un client m’appelait pour une commande. Je profitais alors de l’occasion pour m’éloigner un peu afin de servir ce client et en même temps, de me ressaisir. Une fois la commande servie, je revins vers mon colocataire, un vague sourire au bout des lèvres. J’avais d’ailleurs bien remarqué son regard lorsque le client m’avait hélé. « Désolée, fallait que je m’en occupe… Mais ce que tu viens de me dire me touche vraiment beaucoup… Cela faisait longtemps que l’on ne m’avait pas dit de telles choses… Surtout avec autant de sincérité. » soulignais-je alors en baissant le regard. C’était évident, le jeune homme pensait ce qu’il disait. En tous cas, il semblait affreusement sincère. Et c’était tellement plaisant de rencontrer un homme aussi gentil et en place. Et j’adorais l’entendre me dire que j’étais une femme merveilleuse. Ce n’était peut être pas totalement vrai, mais toutes les femmes aiment ce type de compliments. Et en même temps, il valait peut être mieux qu’il évite de me dire trop souvent ce genre de choses. Ne serait-ce que pour éviter tout malentendu, toute ambiguïté entre nous. A l’entendre, on aurait presque pu croire qu’il me draguait. Pourtant… non ! Ce n’était pas le cas. Nous étions juste colocataires.
La sincérité de ses propos était telle, que Shane parvint à se surprendre lui-même. Il n’avait nullement anticipé ce discours édulcoré qu’il venait de lui servir sur un plateau d’argent. Les mots étaient sortis le plus naturellement du monde et il n’en réalisa l’ampleur qu’en la voyant demeurer silencieuse un instant. Aurait-il réussi à la troubler ? Si tel était le cas, il va de soi que cela ne pouvait que servir ses affaires. Néanmoins, sa démarche n’en restait pas moins sincère et Shane espérait de tout coeur qu’elle parviendrait à se relever après tout le mal qu’il s’apprêtait à lui faire. Lorsque Juliet s’éloigna afin de s’occuper de ses clients, le jeune homme sentit une vague de soulagement se propager dans ses veines. Il ne s’en rendait compte que maintenant, mais il était particulièrement tendu jusque-là. Etonnant pour un homme qui était en règle générale doté de nerfs en acier et d’une assurance capable de résister à toute épreuve. En attendant le retour de Juliet, Shane porta son verre à ses lèvres, savourant le merveilleux cocktail que Juliet venait de lui préparer. Elle avait raison, c’était vraiment excellent. Quand il la vit de nouveau faire son apparition, il lui adressa un léger sourire. « Désolée, fallait que je m’en occupe… Mais ce que tu viens de me dire me touche vraiment beaucoup… Cela faisait longtemps que l’on ne m’avait pas dit de telles choses… Surtout avec autant de sincérité. » Elle baissa le regard et il ne put s’empêcher de la trouver touchante et fragile à la fois. Shane pencha légèrement la tête sur le côté avant de reposer son verre et de glisser délicatement un doigt sous le menton de Juliet, comme chaque fois qu’il sentait qu’elle était mal à l’aise. Quand enfin il parvint à capter son regard, il la relâcha délicatement et reprit plus doucement : « Peut-être que cela fait trop longtemps que tu te caches pour ne pas avoir à les entendre. De quoi as-tu tellement peur, Juliet ? » Il le savait parfaitement. Mais il était là pour jouer avec ses sentiments et semer le chaos dans son petit cœur déjà suffisamment meurtri. Une fois encore, il n’était vraiment pas fier de son attitude mais il gardait à l’esprit que cela faisait partie intégrante de la mission qu’il avait accepté de mener à son terme. Un contrat est un contrat, aussi inhumain soit-il. Pour lui, l’amour au sens large du terme ne se limitait pas à une satisfaction physique qui ne s’embarrassait pas de retenue ou de complications émotionnelles inutiles. C’était même inconcevable. Il lui était déjà arrivé de se laisser embarquer dans ce genre d’aventure mais en dehors d’un plaisir éphémère, il n’en avait tiré aucune satisfaction. Pourquoi cela serait-il différent avec elle ? Shane n’était pas encore prêt à l’admettre mais il y avait pourtant quelque chose qui l’attirait irrémédiablement en elle et ce n’était pas qu’une question de physique. Certes, Juliet était dotée d’une incroyable beauté mais il y avait autre chose… quelque chose de totalement inconnu pour lui. Elle représentait une énigme et bizarrement, il aimait se sentir intrigué. C’était compliqué de mettre des mots sur ce qu’il était en train de ressentir à cet instant précis.